S’ASSURER QUE : PARTICULARITÉS D’EMPLOI

The Guide fédéral de jurilinguistique législative française is a collection of articles dealing exclusively with issues in the drafting of French legislative texts. The very nature of the work causes it to be available in French only.

Le verbe « assurer », à la forme pronominale, est d’un maniement délicat et prête à nombre d’erreurs. Les plus courantes peuvent être regroupées en deux grandes catégories :

En premier lieu, c’est commettre un anglicisme lexical que de donner à « s’assurer (que) » le sens de « faire en sorte (que) » ou de « veiller (à ce que) », notamment pour rendre l’anglais to ensure that. En effet, contrairement à cette expression anglaise, le verbe « s’assurer » signifie seulement « faire le nécessaire pour connaître avec certitude quelque chose, vérifier » (TLF).

Exemple :

Dans l’exemple qui précède, où le sens est prospectif, les expressions « veiller (à ce que) » et « faire en sorte que » auraient été nettement plus justes en français que « (s’)assurer (que) » qui aboutit à un contresens. En effet, par contraste avec le verbe anglais to ensure that, « s’assurer que » est essentiellement rétrospectif, c’est-à-dire que le fait ou le renseignement à vérifier ou à contrôler doit être préexistant ou, à tout le moins, concomitant; il n’admet de ce fait que les temps présent et passés dans la proposition subordonnée. Sur cet aspect, voir l’article « s’assurer que », L’Actualité terminologique, 1998, vol. 31, no 4.

Pour les mêmes raisons, et bien que la faute soit courante notamment dans les médias, le verbe « s’assurer » s’accorde mal avec l’emploi, dans la subordonnée complétive qu’il introduit, du subjonctif, mode par excellence du doute et de l’incertitude. Il convient donc d’employer l’indicatif.

Exemple : « Il incombe au ministre de s’assurer que les conditions de délivrance du permis sont remplies » (et non « <soient> remplies »).

À noter que la même règle s’applique à la forme non pronominale « assurer que », qui n’a qu’un sens en français, celui d’affirmer, de donner pour vrai. Cette forme admet par contre le futur : « je vous assure que vos ordres seront exécutés ».

En second lieu, la forme pronominale peut donner lieu à des anacoluthes, comme dans l’exemple suivant :

Suivant la grammaire, le pronom personnel réfléchi « s’ » a pour antécédent le substantif « membre ». Or, en toute logique, ce n’est pas le membre, mais bien l’autorité qui procède à l’examen qui voudra vérifier l’orthodoxie des méthodes pratiquées par le membre. Certes, l’emploi de la voix passive contribue au porte-à-faux de la disposition. Quoi qu’il en soit, il importe de veiller, au moment d’employer la forme pronominale, à la grammaticalité du pronom réfléchi, l’antécédent étant forcément le sujet du verbe. La faute est en effet plus grave encore lorsque l’antécédent est une chose inanimée ou tout simplement inexistant :

En somme, il faut, d’une part, s’assurer que le sujet du verbe et antécédent du pronom est bien la personne à qui il incombe de vérifier ou de contrôler, rétrospectivement, l’existence d’un fait ou la véracité d’un renseignement et, d’autre part, ne pas oublier que « s’assurer que » est impropre lorsque l’idée de vérification ou de contrôle est absente.