S’ASSURER QUE : PARTICULARITÉS D’EMPLOI
Le verbe « assurer », à la forme pronominale, est d’un maniement délicat et prête à nombre d’erreurs. Les plus courantes peuvent être regroupées en deux grandes catégories :
- anglicisme lexical (avec le subjonctif);
- emploi abusif ou incorrect de la forme pronominale.
En premier lieu, c’est commettre un anglicisme lexical que de donner à « s’assurer (que) » le sens de « faire en sorte (que) » ou de « veiller (à ce que) », notamment pour rendre l’anglais to ensure that. En effet, contrairement à cette expression anglaise, le verbe « s’assurer » signifie seulement « faire le nécessaire pour connaître avec certitude quelque chose, vérifier » (TLF).
Exemple :
- (2) Le ministre devra <s’assurer que> les services mentionnés aux sous-alinéas (1)a)(i) à (iv) sont dispensés de la manière la plus économique et la plus judicieuse possible.
Dans l’exemple qui précède, où le sens est prospectif, les expressions « veiller (à ce que) » et « faire en sorte que » auraient été nettement plus justes en français que « (s’)assurer (que) » qui aboutit à un contresens. En effet, par contraste avec le verbe anglais to ensure that, « s’assurer que » est essentiellement rétrospectif, c’est-à-dire que le fait ou le renseignement à vérifier ou à contrôler doit être préexistant ou, à tout le moins, concomitant; il n’admet de ce fait que les temps présent et passés dans la proposition subordonnée. Sur cet aspect, voir l’article « s’assurer que », L’Actualité terminologique, 1998, vol. 31, no 4.
Pour les mêmes raisons, et bien que la faute soit courante notamment dans les médias, le verbe « s’assurer » s’accorde mal avec l’emploi, dans la subordonnée complétive qu’il introduit, du subjonctif, mode par excellence du doute et de l’incertitude. Il convient donc d’employer l’indicatif.
Exemple : « Il incombe au ministre de s’assurer que les conditions de délivrance du permis sont remplies » (et non « <soient> remplies »).
À noter que la même règle s’applique à la forme non pronominale « assurer que », qui n’a qu’un sens en français, celui d’affirmer, de donner pour vrai. Cette forme admet par contre le futur : « je vous assure que vos ordres seront exécutés ».
En second lieu, la forme pronominale peut donner lieu à des anacoluthes, comme dans l’exemple suivant :
- (2) Une centrale ne peut devenir membre de l’Association à moins que les dépôts auprès de ses membres ne soient garantis en vertu d’une loi fédérale ou provinciale qui […] prévoit que le membre sera soumis à un examen pour <s’assurer qu’>il suit des pratiques éprouvées […]
Suivant la grammaire, le pronom personnel réfléchi « s’ » a pour antécédent le substantif « membre ». Or, en toute logique, ce n’est pas le membre, mais bien l’autorité qui procède à l’examen qui voudra vérifier l’orthodoxie des méthodes pratiquées par le membre. Certes, l’emploi de la voix passive contribue au porte-à-faux de la disposition. Quoi qu’il en soit, il importe de veiller, au moment d’employer la forme pronominale, à la grammaticalité du pronom réfléchi, l’antécédent étant forcément le sujet du verbe. La faute est en effet plus grave encore lorsque l’antécédent est une chose inanimée ou tout simplement inexistant :
- 5 Les dispositions du paragraphe 4 ne portent pas atteinte à l’application d’une disposition quelconque de la législation fiscale d’un État contractant :
- […]
- b) adoptée après cette date par un État contractant et qui vise à <s’assurer qu’>une personne qui n’est pas un résident de cet État ne bénéficie pas d’un traitement plus favorable que […]Footnote *
En somme, il faut, d’une part, s’assurer que le sujet du verbe et antécédent du pronom est bien la personne à qui il incombe de vérifier ou de contrôler, rétrospectivement, l’existence d’un fait ou la véracité d’un renseignement et, d’autre part, ne pas oublier que « s’assurer que » est impropre lorsque l’idée de vérification ou de contrôle est absente.
Report a problem on this page
- Date modified: