ENCOURIR : PARTICULARITÉS D’EMPLOI
Il faut se rappeler que encourir a le sens de « s’exposer à », et seulement ce sens-là (contrairement à son cousin anglais incur, qui, en plus de ce sens, a aussi — et plus souvent — celui de « subir »). On ne peut donc l’employer que pour des situations hypothétiques, comme c’est le cas dans les dispositions qui créent des infractions et fixent la peine encourue du fait de leur éventuelle perpétration.
De même, en matière financière ou commerciale, les pertes encourues ne peuvent être que virtuelles, comme le montre l’exemple qui suit : « En plaçant votre argent dans des actions à risque vous encourez des pertes à court terme mais avez de bonnes perspectives de gain à moyen terme. » En effet, c’est seulement si vous achetez de telles actions et lorsque l’hypothèse énoncée se réalise que les pertes deviennent effectives et tangibles : de virtuelles qu’elles étaient, elles sont devenues réelles et dès lors ne sauraient être qualifiées de « encourues »; on dira plutôt qu’elles sont, selon le contexte, subies, supportées ou éprouvées (ou encore occasionnées, provoquées, causées, etc., par…).
Le même raisonnement s’applique en tous points à des frais ou dépenses. On peut certes encourir des dépenses tant qu’on n’a pas déboursé un seul dollar et qu’on les envisage seulement; mais lorsque la décision est prise de consacrer une somme précise à une fin particulière (notamment en matière de finances publiques), on engage les dépenses, et une fois que la somme en question a été entièrement utilisée, on dit que les dépenses ont été faites ou exposées (ce dernier terme étant plus formel et administratif et signifiant que les frais faits ont été justifiés). Selon le contexte et les nuances que l’on souhaite apporter, on pourra aussi dire que des dépenses ou des frais ont été supportés (par qqn), occasionnés ou entraînés (par qqch.).
- Date modified: