FRAIS DE JUSTICE :
DÉPENS ET AUTRES FRAIS

On appelle « frais de justice » les frais (voir la note « COÛT, PRIX ET FRAIS : AFFAIRE DE PERSPECTIVE ») engagés dans le cadre d’une instance judiciaire. Le terme « dépens » s’entend quant à lui des frais dits « répétibles », c’est-à-dire ceux que le gagnant peut, à moins que le tribunal n’en décide autrement, se faire payer par le perdant. Il va sans dire qu’il appartient au législateur de déterminer, dans les limites de son ressort, le contenu juridique précis de la notion. Ainsi, tel type de frais pourraient bien constituer des dépens dans une province, mais non dans une autre, de sorte que, au moindre doute, on aurait tout intérêt à consulter les spécialistes du droit comparé. Cela posé, le terme dépens vise normalement les droits de timbre et d’enregistrement, les indemnités versées aux témoins, les vacations des experts et fonctionnaires judiciaires, ainsi que les débours, c’est-à-dire les frais exposés à titre d’avance dans l’intérêt du justiciable (copie, publicité, déplacement, etc.). Les dépens s’opposent ainsi aux frais dits « irrépétibles », c’est-à-dire ceux qui ne sont pas normalement supportés par la partie qui succombe; c’est souvent le cas des honoraires de l’avocat.

Dans ces conditions, et bien qu’il soit d’usage courant, le doublet <frais et dépens> est sujet à caution sous deux rapports : d’une part, il serait plus juste de dire « dépens et autres frais », puisque les dépens sont, par définition, des « frais ». D’autre part, encore faut-il s’assurer qu’il s’agit bien, en l’occurrence, des deux types de frais de justice – répétibles et irrépétibles; voici un exemple :

Dépens et autres frais

37 Le juge, s’il l’estime indiqué dans les circonstances, peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Par ailleurs, les adjectifs « judiciaire » et « extrajudiciaire » s’emploient au Canada pour qualifier des frais. D’après le Dictionnaire de droit québécois et canadien (Hubert Reid, Wilson & Lafleur, 1994), le terme « frais judiciaires » serait à toutes fins utiles synonyme de dépens, alors que « frais extrajudiciaires » s’entendrait plutôt des frais irrépétibles. Très peu fréquent dans la législation fédérale, cet usage paraît suspect et à déconseiller dans la mesure où il n’est attesté par aucun dictionnaire de langue et se trouve à attribuer à l’adjectif « judiciaire » une portée artificiellement restreinte par rapport à son champ sémantique normal. En effet, lorsqu’il est mis en opposition avec « extrajudiciaire », l’adjectif « judiciaire » qualifie ce qui existe ou se fait dans le cadre d’une instance. Par conséquent, le terme « frais judiciaires » désigne proprement tous les frais liés à l’instance, qu’ils soient répétibles ou non. Sur le plan du contenu, il se rapproche donc beaucoup plus de « frais de justice » que de « dépens ». Et de fait, c’est dans ce sens qu’il s’emploie dans les textes français. Même au Québec, on en trouve une occurrence à l’article 1644 du Code civil.

Formules utiles

Sources

BISAILLON, Claude. « La terminologie canadienne relative aux dépens », in Le Mot, no 4, 6 avril 1982, Centre de traduction et de terminologie juridiques de l’École de droit du Centre universitaire de Moncton.