Justice, c'est nous
Michael Audet et Luc Vachon
Luc Vachon et Michael Audet sont des avocats qui aiment travailler avec les mots.
« Je voulais un travail qui me permettrait de rédiger et un client qui me donnerait l'occasion d'améliorer la qualité de ma rédaction, un client pour qui ce serait important d'avoir un texte clair et bien structuré »
, dit Luc, avocat conseil par intérim.
Il a commencé en pratique privée, mais il a constaté que les clients n'étaient pas disposés à payer le temps nécessaire pour bien rédiger les contrats.
Luc a donc quitté la pratique privée il y a onze ans et il a accepté un emploi qui lui permet de faire de la rédaction juridique. Il est devenu rédacteur législatif au ministère de la Justice du Canada.
Le conseiller législatif Michael Audet a aussi rapidement découvert que la pratique privée n'était pas pour lui.
Avant la Faculté de droit, Michael a obtenu un diplôme de premier cycle en littérature anglaise. Le rôle de rédacteur législatif lui correspondait bien en raison du mariage entre les mots et le droit.
La méthode de rédaction simultanée d'un projet de loi dans les deux langues officielles est intitulée corédaction et elle est propre au Canada.
Michael et Luc sont deux des 28 conseillers législatifs à la Section de la législation du Ministère engagés dans la rédaction des projets de loi du gouvernement fédéral.
« Un projet de loi est l'expression législative d'une politique. La première chose que nous devons faire, c'est de bien comprendre la politique, dans la mesure où le temps et les circonstances le permettent, pour pouvoir l'exprimer correctement »
, dit Michael.
« Nous essayons de comprendre ce que nous devons formuler, ajoute Luc. Nous discutons d'abord de l'objectif visé en collaboration avec des conseillers juridiques spécialistes du domaine en cause et les experts qui ont élaboré la politique. Nous déterminons ensuite ce que devraient être les nouvelles règles de droit »
, précise-t-il.
Cette méthode de rédaction de mesures législatives fait appel à des rédacteurs et à des chargés de projet provenant du ministère qui parraine le projet de loi. Ils peut s'agir d'experts juridiques qui travaillent dans une Section de services juridiques ministériels et qui représentent les intérêts stratégiques de leur ministère client. Mais ce sont souvent des experts d'un domaine donné, des économistes jusqu'aux scientifiques.
La rédaction des mesures législatives se fait à deux : un rédacteur français et un rédacteur anglais. Ils travaillent dans des salles de rédaction spécialement conçues, meublées d'une longue table au centre et d'ordinateurs installés de chaque côté. Les deux rédacteurs prennent place d'un côté de la table, chacun à un ordinateur. L'un rédige les mesures législatives en français et l'autre les rédige simultanément en anglais.
Les chargés de projet prennent place de l'autre côté de la table devant deux ordinateurs, ils lisent le projet de loi dans les deux langues à mesure qu'il est rédigé et ils vérifient si la formulation correspond bien à l'objet de la politique. Les chargés de projet font des commentaires sur le texte et les rédacteurs peuvent apporter immédiatement aux mesures législatives les modifications correspondantes.
Cette méthode de rédaction simultanée d'un projet de loi dans les deux langues officielles est intitulée corédaction et elle est propre au Canada.
Les rédacteurs visent à rédiger un texte naturel dans chaque langue au lieu que l'un soit une traduction littérale de l'autre version.
« Ce n'est pas une traduction, remarque Michael. Le français dit la même chose que l'anglais sans être une traduction gauche, mot à mot et sans élégance. »
Ce modèle a été lancé à la fin des années 70. Auparavant, la version française était simplement une traduction du texte anglais.
« C'était souvent fait à la dernière minute par un traducteur qui n'avait pas beaucoup d'information contextuelle, dit Luc. Il n'avait pas accès à l'expert en la matière, il manquait d'information et il devait donc coller à la formulation anglaise.
Malheureusement, en suivant le texte anglais mot à mot, le texte français était difficile à comprendre et à interpréter. »
En conséquence, le modèle de corédaction a vu le jour et a évolué au cours des ans. Des délégations de l'étranger sont venues au ministère de la Justice pour étudier le processus de rédaction simultanée, mais Michael et Luc ne savent pas si un système semblable est utilisé ailleurs.
Cependant, ils sont convaincus qu'il fonctionne au Canada.
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