COÛT, PRIX ET FRAIS :
AFFAIRE DE PERSPECTIVE
Les notions de coût, de prix et de frais sont intimement liées, et il n’est pas toujours facile de les distinguer; voyons un peu.
Le coût d’une chose - produit, service, activité, processus, etc. -, c’est la somme que coûte son obtention ou sa réalisation. Le prix désigne quant à lui la valeur de la transaction (vente, échange, etc.) dont cette chose fait l’objet. Il dépend non seulement du coût réel, mais aussi d’autres facteurs comme la marge bénéficiaire, les conditions du marché, etc.;
Exemple :
Le coût de ce genre de réception est toujours élevé, mais le traiteur m’a fait un bon prix.
Pour qui se procure la chose, le coût correspond au prix payé au fournisseur, auquel s’ajoute, le cas échéant, toute autre somme versée dans le cadre de l’opération. En cas de revente ultérieure, le propriétaire fixera vraisemblablement le prix de vente en fonction du coût initial et du bénéfice qu’il souhaite réaliser, et ainsi de suite. Lorsque le prix est égal au coût, on parle de prix coûtant;
Exemple :
Avant de fermer boutique, ce marchand a liquidé ses stocks à prix coûtant.
Bien que le terme « coût » soit un collectif, il reste que, à chacune des étapes (traitement, emballage, transport, etc.) du processus de fabrication d’un produit, par exemple, correspond un coût, de sorte qu’il est possible de parler des coûts que supporte le fabricant.
Cela dit, il convient toujours de se demander si le pluriel est justifié, et ce même lorsque le mot « cost » figure au pluriel dans la version anglaise. En effet, il pourrait s’agir du coût du produit ou du service, ou encore des frais associés à son obtention;
Exemple :
Le coût de l’emballage d’un produit. (packaging costs)
Les frais de publicité engagés en vue du lancement d’un nouveau produit. (advertising costs)
Selon le Petit Robert, les frais se définissent comme des « dépenses occasionnées par une opération quelconque » (caractères gras ajoutés). Par exemple, le coût d’un bâtiment comprend non seulement le prix d’achat, mais aussi les frais, juridiques et autres, liés à la transaction.
Le terme « frais » donne lieu à certains abus (voir la note « DROITS ET REDEVANCES »), qui résultent avant tout de la méconnaissance de la nature même des frais, exprimée dans le passage en caractère gras de la définition reproduite ci-dessus.
D’abord, les frais sont des dépenses, de sorte que le terme ne peut s’employer qu’avec des verbes qui conviennent à des « dépenses ». Ainsi, bien qu’on puisse assumer ou exposer des frais, on ne peut pas en <recevoir>. Signalons toutefois que l’usage a consacré l’expression « avoir droit aux frais de… », résultant de l’ellipse de la notion de remboursement.
Ensuite, le terme « occasionnées », utilisé dans la même définition, souligne le caractère plus ou moins indirect ou accessoire des frais. Par exemple, on peut parler correctement des « frais d’utilisation d’une voiture » par rapport à une activité professionnelle itinérante. Dans ce cas, l’activité principale exige que l’intéressé puisse se déplacer en voiture, ce qui le force à faire certaines dépenses (achat ou location, entretien, etc.), c’est-à-dire des frais. Mais, encore une fois, c’est avant tout par rapport à l’activité principale qui les rend nécessaires que ces dépenses constituent des frais.
À noter que le mot « frais » ne s’emploie qu’au pluriel, même avec un indéfini à valeur négative comme « aucun », qui prend alors lui aussi la marque du pluriel;
Exemple :
La direction ne rembourse aucuns frais engagés sans son autorisation.
Le déterminant éventuel du mot « frais » est un adjectif (frais fixes, frais généraux, frais administratifs, etc.) ou un nom d’action introduit par « de », mais sans article (frais de gestion, frais d’envoi, frais de déplacement, etc.).
Pour ce qui est du verbe cooccurrent, il convient de signaler une erreur fréquente : l’emploi du verbe <encourir>, en parlant de frais ou de dépenses, constitue un anglicisme dénoncé depuis belle lurette par les ouvrages canadiens (voir DAGENAIS, G., Dictionnaire des difficultés de la langue française au Canada, 1967, ainsi que COLPRON, GÉMAR, MULTI). On emploiera plutôt les verbes « engager », « subir » ou simplement « faire ». En parlant d’une chose, on dira qu’elle entraîne ou qu’elle occasionne des frais.
En comptabilité, on trouve aussi « charges », terme générique de portée plus large qui englobe non seulement les frais, mais toutes les dépenses d’exploitation, c’est-à-dire tout ce qui diminue les ressources de l’entreprise dans le cadre de ses activités productives courantes.
Pour résumer, reprenons l’exemple de l’entreprise qui fabrique un produit, et supposons qu’elle se charge de le livrer de l’usine aux installations du détaillant. On peut alors dire qu’elle assume le coût du transport. Par rapport à l’activité principale de production, les dépenses faites à ce chapitre peuvent aussi être considérées comme des frais, les frais de transport. Mais quelle que soit la perspective adoptée, les sommes ainsi versées font partie des coûts associés à la fabrication et à la distribution du produit, lesquels composent le coût global de production, appelé coût de revient en comptabilité. Celui-ci sert ensuite de base au calcul du prix du produit.
(Pour une liste des cooccurrents corrects, voir Jacques BEAUCHESNE, Dictionnaire des cooccurrences, Guérin, Montréal, 2001. Voir également les notes « FRAIS DE JUSTICE : DÉPENS ET AUTRES FRAIS » et « MONTANT OU SOMME? ».)
Sources
« Des faux jumeaux : frais et charges; coût et prix » in Terminologie comptable, Comité de terminologie française, Ordre des comptables agréés du Québec, décembre 2001.
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