Énoncé concernant la Charte - Projet de loi C-69 : Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024 (Loi n° 1 d’exécution du budget de 2024)

Déposé à la Chambre des communes le 27 mai 2024
Note explicative
L’article 4.2 de la Loi sur le ministère de la Justice exige que le ministre de la Justice prépare un « Énoncé concernant la Charte » pour chaque projet de loi du gouvernement afin d’éclairer le débat public et parlementaire au sujet des projets de loi du gouvernement. L’une des plus importantes responsabilités du ministre de la Justice est d’examiner le projet de loi afin d’évaluer s’il est incompatible avec la Charte canadienne des droits et libertés [la « Charte »]. Lorsqu’il dépose un Énoncé concernant la Charte, le ministre énonce certaines des considérations principales ayant guidé l’examen visant à vérifier la compatibilité du projet de loi avec la Charte. L’Énoncé recense les droits et libertés garantis par la Charte auxquels un projet de loi pourrait porter atteinte et il explique brièvement la nature de ces atteintes eu égard aux mesures proposées.
L’Énoncé concernant la Charte présente également les raisons pouvant justifier les restrictions qu’un projet de loi pourrait imposer aux droits et libertés garantis par la Charte. L’article premier de la Charte prévoit que ces droits et libertés peuvent être assujettis à des limites raisonnables, pourvu qu’elles soient prescrites par une règle de droit et que leurs justifications puissent se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. Il s’ensuit que le Parlement peut adopter des lois qui limitent les droits et libertés garantis par la Charte. Il y aura violation de la Charte uniquement si la justification de ces limites ne peut être démontrée dans le cadre d’une société libre et démocratique.
Un Énoncé concernant la Charte vise à fournir des informations juridiques au public et au Parlement se rapportant aux effets possibles d’un projet de loi sur les droits et libertés dans la mesure où ces effets ne sont ni négligeables ni trop théoriques. Il ne s’agit pas d’un exposé détaillé de toutes les considérations possibles relatives à la Charte. D’autres considérations constitutionnelles pourraient également être soulevées pendant l’examen parlementaire et l’amendement d’un projet de loi. Un Énoncé concernant la Charte ne constitue pas un avis juridique sur la constitutionnalité d’un projet de loi.
Considérations relatives à la Charte
Le ministre de la Justice a examiné le projet de loi C‑69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024, afin d’évaluer s’il est incompatible avec la Charte, suivant l’obligation que lui impose l’article 4.1 de la Loi sur le ministère de la Justice. Dans son examen, il a notamment pris en considération les objectifs et les caractéristiques du projet de loi.
Voici une analyse non exhaustive des façons par lesquelles le projet de loi C-69 pourrait porter atteinte aux droits et aux libertés garantis par la Charte. Elle est présentée en vue d’aider à éclairer le débat public et parlementaire sur le projet de loi. Elle ne constitue pas une description exhaustive de l’ensemble du projet de loi; elle est plutôt axée sur les éléments qu’il convient de prendre en compte dans le contexte d’un Énoncé concernant la Charte.
Voici les principaux droits et libertés garantis par la Charte auxquels pourraient porter atteinte les mesures proposées :
- Liberté d’expression (alinéa 2b)
L’alinéa 2b) de la Charte prévoit que chacun a la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication. Cela inclut le « principe de publicité des débats judiciaires », selon lequel les membres du public ont le droit d’obtenir des renseignements sur les procédures judiciaires. - Droit à la liberté (article 7)
L’article 7 de la Charte protège contre l’atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité d’une personne sauf si l’atteinte se fait en conformité avec les principes de justice fondamentale, notamment les principes contre le caractère arbitraire, la portée excessive et la disproportion totale. Une loi est arbitraire lorsqu’elle porte atteinte aux droits garantis par l’article 7 d’une manière qui n’est pas rationnellement liée à l’objet de la loi. Une loi d’une portée excessive porte atteinte aux droits garantis par l’article 7 en ce sens que, bien que généralement rationnelle, elle va trop loin en interdisant certains actes qui n’ont aucun lien avec la réalisation de l’objet de la loi. Une loi est totalement disproportionnée lorsque ses effets sur les droits garantis par l’article 7 sont si sévères qu’ils sont « sans rapport aucun » avec l’objet de la loi. Les infractions qui sont passibles d’un emprisonnement pourraient porter atteinte au droit à la liberté, et cette atteinte doit donc être conforme aux principes de justice fondamentale. - Droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives (article 8)
L’article 8 de la Charte protège les individus contre les fouilles, les perquisitions et les saisies « abusives ». L’objectif de l’article 8 est de protéger les personnes contre une intrusion abusive lorsqu’il y a une attente raisonnable au respect de la vie privée. Une fouille, perquisition ou saisie qui porte atteinte à une attente raisonnable en matière de respect de la vie privée sera raisonnable si elle est autorisée par une loi, si la loi elle‑même est raisonnable (en ce sens qu’elle établit un équilibre entre le droit à la vie privée et les intérêts que poursuit l’État), et si elle est menée de manière raisonnable. L’appréciation du caractère raisonnable de la loi est souple et tient compte de la nature et de l’objet du régime législatif et de la nature du droit à la vie privée concerné. - Droits qui s’appliquent à toute personne accusée d’une infraction (article 11)
L’article 11 de la Charte garantit certains droits aux personnes qui ont été accusées d’une infraction. Une personne est « inculpée » au sens de l’article 11 si elle est visée par une procédure de nature criminelle ou qui entraîne de « véritables conséquences pénales ». Les véritables conséquences pénales comprennent l’emprisonnement et les amendes ayant un objectif ou un effet punitif, comme cela peut être le cas lorsque l’amende ou la sanction est disproportionnée par rapport au montant requis pour atteindre les objectifs réglementaires. - Traitements ou peines cruels et inusités (article 12)
L’article 12 de la Charte garantit à chacun le droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités. Dans le contexte de la détermination de la peine, l’article 12 interdit d’infliger des peines exagérément disproportionnées.
Partie 1
Utilisation et communication de renseignements
La partie 1 apporterait un certain nombre de modifications à l’article 241 de la Loi de l’impôt sur le revenu, qui régit l’utilisation et la communication de renseignements confidentiels. Une modification proposée permettrait au ministre du Revenu national et au ministre des Finances de communiquer au public certains renseignements concernant les subventions, sous forme de crédits d’impôt remboursables, qui sont demandées ou reçues par les sociétés canadiennes et certains types de fiducies qui investissent dans les technologies propres. Plus précisément, les ministres seraient autorisés à communiquer au public le nom de chaque société ou fiducie qui a demandé ou reçu un crédit d’impôt pour l’économie propre, de même que le nom d’une société de personnes si la société ou la fiducie a demandé ou reçu le crédit parce qu’elle est un associé de la société de personnes. Le ministre serait également autorisé à communiquer le type de crédit d’impôt demandé ou reçu, par exemple, qu’il s’agisse d’un crédit d’impôt pour investissement dans la technologie propre, d’un crédit d’impôt pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone, d’un crédit d’impôt pour l’hydrogène propre ou d’un crédit d’impôt pour investissement dans des biens de fabrication de technologies propres, et la période à laquelle le crédit d’impôt se rapporte. La modification proposée autoriserait également la communication de renseignements confidentiels par l’Agence du revenu du Canada à toute personne, mais uniquement en vue de l’application de la nouvelle disposition relative à la communication publique.
La partie 1 apporterait également des modifications en édictant de nouveau un certain nombre de dispositions existantes qui régissent la façon dont peuvent être utilisés les renseignements confidentiels et en supprimant les renvois désuets à la Loi sur l’assurance-chômage. Ces dispositions prévoient l'utilisation des renseignements confidentiels à diverses fins relatives à l’application et à l’exécution de la Loi de l’impôt sur le revenu, de la Loi sur l’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada, ainsi qu’à la surveillance et à l’évaluation des personnes engagées ou employées par Sa Majesté pour aider à l’application et à l’exécution des dispositions de ces lois et à la prise de mesures disciplinaires à leur endroit.
Étant donné que les modifications autoriseraient la communication de renseignements confidentiels, elles pourraient porter atteinte aux intérêts en matière de vie privée et mettre en jeu les droits garantis par l’article 8 de la Charte. Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces modifications avec l’article 8 de la Charte.
Les modifications proposées sont de nature administrative et s’appliqueraient dans un contexte où les attentes en matière de vie privée sont habituellement moins élevées. L’objectif des dispositions existantes qui seraient édictées de nouveau est de s’assurer que les renseignements confidentiels peuvent être utilisés à des fins étroitement liées aux fins pour lesquelles les renseignements ont été fournis, c’est-à-dire pour l’application et l’exécution de la Loi de l’impôt sur le revenu, ainsi que du Régime de pensions du Canada et de la Loi sur l’assurance-emploi. Ces deux lois exigent la fourniture de renseignements confidentiels, notamment, afin de déterminer de l’admissibilité aux avantages sociaux. L’objectif des modifications proposées relatives aux crédits d’impôt pour une économie propre est d’assurer la transparence concernant la manière dont les impôts sont utilisés pour verser les subventions, sous forme de crédits d’impôt remboursables, à l’appui des investissements dans la technologie propre. Les renseignements qui peuvent être communiqués publiquement se limitent au nom de l’entité et de la société de personnes visée dont l’entité est un associé qui a demandé ou reçu le crédit d’impôt, au type de crédit d’impôt reçu et à la période à laquelle le crédit d’impôt se rapporte. Le pouvoir des ministres de communiquer ces renseignements est discrétionnaire et serait exercé conformément à la Charte.
Sanctions administratives pécuniaires
La partie 1 créerait une sanction administrative pécuniaire applicable au défaut de produire un rapport de conformité pour un projet d’hydrogène propre pour lequel un crédit d’impôt pour l’hydrogène propre a été demandé. Étant donné la possibilité de sanctions pécuniaires importantes, cette modification pourrait être perçue comme ayant une incidence sur les droits garantis par l’article 11 de la Charte.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité des modifications avec la Charte. La procédure conduisant à l’imposition d’une sanction serait de nature administrative. L’imposition d’une sanction aurait pour but de promouvoir un comportement conforme aux dispositions de la Loi, c’est-à-dire la production en temps opportun des rapports de conformité utilisés pour évaluer l’admissibilité continue au crédit d’impôt. Chaque sanction administrative pécuniaire serait calculée selon une formule basée sur les montants des crédits d’impôt demandés et le nombre de jours du défaut et serait plafonnée à un montant ne dépassant pas le total de tous les crédits d’impôt pour l’hydrogène propre demandés par le contribuable relativement au projet. La disposition proposée relative aux sanctions suivrait de près l’exemple de dispositions relatives aux sanctions administratives pécuniaires figurant dans d’autres lois fiscales. Dans ce contexte, l’imposition d’une sanction ne donnerait pas lieu à de « véritables conséquences pénales » au sens de l’article 11 de la Charte.
Partie 2
La partie 2 édicterait la Loi sur l’impôt minimum mondial afin de mettre en œuvre un régime d’impôt minimal mondial qui ferait en sorte que les grandes sociétés multinationales seraient assujetties à un taux d’imposition effectif minimal de 15 % sur leurs bénéfices partout où elles exercent leurs activités. L’impôt s’appliquerait aux groupes de sociétés multinationales dont les revenus annuels consolidés seraient d’au moins 750 millions d’euros, calculés en euros pour refléter les pratiques internationales. La Loi établit des règles pour déterminer l’assujettissement à l’impôt ainsi que les exigences en matière de déclaration et de production. La Loi comprendrait des dispositions d’application et d’exécution en vue de favoriser l’observation de la Loi comme le font d’autres lois fiscales. Cette partie apporte également des modifications corrélatives à d’autres lois.
Pouvoirs de recueillir, de communiquer et d’utiliser des renseignements
La Loi sur l’impôt minimum mondial établirait des pouvoirs de recueillir, de communiquer et (ou) d’utiliser des renseignements. Le ministre du Revenu national serait autorisé à obliger une personne à produire des renseignements ou des registres pour l’application et l’exécution de la Loi. La Loi autoriserait également le ministre à exiger qu’une personne résidant au Canada ou une personne non résidente qui exerce une activité commerciale au Canada fournisse des renseignements ou des registres étrangers. L’expression « renseignement ou registre étranger » s’entendrait d’un renseignement accessible ou d’un registre situé en dehors du Canada, qui peut être pris en compte pour l’application ou l’exécution de la Loi. De plus, les renseignements recueillis aux termes de la Loi seraient confidentiels et la communication et l’utilisation de renseignements confidentiels seraient autorisées uniquement dans des circonstances précises. Les mesures permettant de recueillir, de communiquer et (ou) d’utiliser des renseignements pourraient mettre en jeu les droits garantis à l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des mesures avec l’article 8. Les intérêts en matière de vie privée sont généralement limités dans les contextes réglementaires et administratifs, et la norme pour autoriser une atteinte à la vie privée à des fins administratives et réglementaires est généralement inférieure aux normes de la Charte applicables aux fins d’enquête sur les infractions. La Loi n’interdirait pas la communication et l’utilisation de renseignements confidentiels dans le cadre d’une procédure criminelle après le dépôt d’accusations, par exemple pour faciliter la communication des registres d’un tiers, ou pour l’application ou l’exécution de la Loi ou d’autres lois fiscales.
Les pouvoirs de recueillir des renseignements visent à soutenir l’application appropriée du régime en permettant à l’Agence du revenu du Canada d’obtenir les renseignements nécessaires pour évaluer avec précision l’assujettissement à l’impôt minimum mondial. Ces pouvoirs comprennent des mesures visant à protéger le droit à la vie privée, comme l’obligation d’obtenir une autorisation judiciaire pour contraindre la production de renseignements concernant des personnes non désignées, ou pour recueillir des renseignements de façon plus intrusive.
Les pouvoirs de communiquer des renseignements permettraient d’assurer la cohérence de ces pouvoirs entre les différentes lois fiscales fédérales et les lois connexes appliquées et exécutées par l’Agence du revenu du Canada afin qu’ils cadrent avec les obligations de confidentialité contenues dans chacune des lois. Les pouvoirs de communication doivent être compatibles avec ceux prévus par les autres lois afin d’éviter que les obligations de confidentialité prévues par la Loi fassent obstacle à l’application des autres lois. Les pouvoirs protègent les intérêts en matière de vie privée en limitant la communication permise à des fins précises, dans des circonstances précises. Les renseignements qui pourraient être communiqués auraient déjà été communiqués au gouvernement et les attentes en matière de vie privée seraient donc réduites par rapport aux autres fins gouvernementales. La Loi protège également la confidentialité des renseignements pertinents en interdisant leur communication non autorisée, et une violation de cette interdiction est passible d’une amende maximale de 5 000 $ ou d’un emprisonnement maximal de 12 mois, ou de ces deux peines.
Sanctions administratives pécuniaires
La Loi sur l’impôt minimum mondial établirait des sanctions administratives pécuniaires en cas de manquement à certaines exigences de la Loi. Ces sanctions pourraient être imposées par le ministre du Revenu national dans les circonstances suivantes en vertu de la Loi : défaut de produire une déclaration dans le délai prévu; faux énoncés ou omissions; défaut de produire des renseignements ou registres dans le délai prévu; poursuite d’un appel non fondé interjeté pour reporter le paiement d’une somme payable; évitement fiscal planifié. Étant donné la possibilité de sanctions pécuniaires importantes, les nouvelles modifications pourraient être perçues comme ayant une incidence sur les droits garantis par l’article 11 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des dispositions avec la Charte. La procédure conduisant à l’imposition d’une sanction serait de nature administrative. L’objectif de l’imposition d’une sanction serait de promouvoir un comportement conforme aux objectifs des parties pertinentes de la Loi. Chaque sanction administrative pécuniaire serait calculée selon une formule basée sur la nature de la violation et d’autres facteurs, comme la durée de l’inobservation. Les dispositions proposées relatives aux sanctions suivraient de près l’exemple de dispositions relatives aux sanctions administratives pécuniaires figurant dans d’autres lois fiscales. Dans ce contexte, l’imposition d’une sanction ne donnerait pas lieu à de « véritables conséquences pénales » au sens de l’article 11 de la Charte.
Infractions et peines
La Loi sur l’impôt minimum mondial établirait des infractions qui réprimeraient, entre autres, l’omission de produire une déclaration ou de se conformer à une obligation ou à une ordonnance, le fait de faire des déclarations fausses ou trompeuses ou de participer à leur énonciation, et l’omission intentionnelle de payer des impôts comme l’exigent les dispositions. Une disposition d’infraction générale serait également créée afin de promouvoir la conformité au nouveau régime fiscal dans son ensemble. Les infractions prévues par les nouvelles dispositions pourraient être passibles d’une amende ou d’un emprisonnement, ou de ces deux peines. Bien qu’il y ait des amendes minimales obligatoires, il n’y a pas de peine d’emprisonnement minimal obligatoire. Par exemple, l’omission de produire une déclaration ou de se conformer à une obligation ou à une ordonnance est passible d’une amende minimale de 2 000 $ et maximale de 40 000 $ ou d’un emprisonnement maximal de 12 mois, ou des deux peines; une infraction pour déclarations fausses ou trompeuses est passible d’ une amende minimale représentant 50 % de la somme payable, sans dépasser une amende maximale représentant 200 % de la somme payable, d’un emprisonnement maximal de cinq ans, ou de ces deux peines.
Puisque les dispositions établissant des infractions pourraient entraîner l’imposition d’une peine d’emprisonnement, elles pourraient porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte et doivent donc respecter les principes de justice fondamentale.
Dans le cadre de son examen des dispositions établissant des infractions, le ministre n’a pas recensé d’incompatibilité possible avec les principes de justice fondamentale énoncés à l’article 7 de la Charte. Le champ d’application des infractions cadre avec les objectifs législatifs, notamment, s’assurer que les déclarations sont produites dans les délais prévus, promouvoir l’exactitude des déclarations, des états et des registres, et promouvoir l’objectif général d’observation de la Loi. Enfin, sur déclaration de culpabilité, un juge aura le pouvoir discrétionnaire d’imposer une peine appropriée.
Puisque les amendes ont des montants minimaux obligatoires et qu’elles seraient imposées comme des peines qui sanctionnent une infraction, elles pourraient porter atteinte aux droits garantis par l’article 12 de la Charte.Les considérations suivantes appuient la compatibilité des amendes minimales obligatoires avec l’article 12 de la Charte. Les contrevenants potentiels sont des personnes morales dont les revenus annuels sont d’au moins 750 millions d’euros, ou leurs dirigeants et administrateurs. Une personne morale ne bénéficie pas de la protection de l’article 12. En ce qui concerne les particuliers, y compris les dirigeants et les administrateurs, les montants minimaux obligatoires des amendes ne seraient pas excessifs compte tenu de l’ampleur des activités commerciales auxquelles les nouvelles dispositions s’appliqueraient.
Pouvoirs d’inspection, de contrainte et de perquisition
La Loi sur l’impôt minimum mondial conférerait des pouvoirs réglementaires similaires à ceux conférés par d’autres lois fiscales. Une personne autorisée par le ministre du Revenu national aurait le droit d’inspecter les registres, les procédés, les biens ou les locaux d’une personne permettant de déterminer ses obligations fiscales, et de vérifier la conformité avec les nouvelles dispositions. Les personnes autorisées auraient la possibilité d’exiger qu’une personne fournisse une assistance raisonnable dans le cadre de l’inspection, y compris en répondant à toutes les questions pertinentes à l’application des nouvelles dispositions. Les dispositions permettraient également aux personnes autorisées de perquisitionner tout bâtiment ou endroit en vertu d’un mandat pour y chercher des registres ou choses qui peuvent constituer des éléments de preuve de la perpétration d’une infraction aux nouvelles dispositions, et de saisir ces registres ou choses. Les mesures proposées décrites ci-dessus pourraient porter atteinte à la protection contre les fouilles, perquisitions et saisies abusives prévue à l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces mesures avec l’article 8 de la Charte. Les pouvoirs d’inspection et de contrainte ne pourraient être utilisés dans le cadre d’une enquête pénale. Ils seraient plutôt utilisés à des fins réglementaires, par exemple pour déterminer les obligations fiscales et pour vérifier le respect des nouvelles dispositions. Dans ces situations, les attentes en matière de vie privée sont moins élevées. Pour ce qui est des lieux tenant lieu de résidences où les attentes sont plus élevées, les inspecteurs ne seraient autorisés qu’à entrer avec la permission de l’occupant ou sur présentation d’un mandat décerné par un juge. Un mandat serait également nécessaire pour perquisitionner et saisir des documents ou des choses qui pourraient constituer des éléments de preuve de la perpétration d’une infraction aux nouvelles dispositions. Les mandats décernés en vertu des nouvelles dispositions seraient obtenus par autorisation judiciaire, ce qui signifie qu’un juge serait convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que le document ou la chose en question sera vraisemblablement trouvé dans les locaux et fournira la preuve de l’infraction, satisfaisant ainsi aux exigences de l’article 8 pour qu’une fouille, une perquisition ou une saisie soit raisonnable.
Pouvoirs du président d’enquête
La Loi sur l’impôt minimum mondial permettrait à un président d’enquête autorisé par le ministre du Revenu national de faire toute enquête qu’il estime nécessaire sur toute question se rapportant à l’application ou à l’exécution de la Loi. Le président d’enquête aurait le pouvoir de convoquer tout témoin à l’enquête et de l’obliger à témoigner oralement ou par écrit sous serment, et à produire tout document ou chose pertinent. Quiconque témoigne à l’enquête ou dont les affaires donnent lieu à l’enquête aurait le droit d’être représenté par un avocat.
Le pouvoir de contraindre une personne à se présenter à un endroit précis pour un interrogatoire oral avec prestation de serment peut porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte, qui comprend des protections résiduelles contre l’auto-incrimination.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces pouvoirs avec l’article 7 de la Charte. Le pouvoir de contraindre à témoigner sert un objectif important, à savoir l’application d’une loi qui impose une taxe sur les revenus des services commerciaux; il ne peut pas être utilisé pour l’objectif principal de favoriser les poursuites à l’encontre du témoin. En outre, tout élément de preuve incriminant exigé lors d’une enquête pourrait ne pas être utilisé dans une autre procédure si cela risque d’aller à l’encontre du principe interdisant l’auto-incrimination. En outre, les personnes faisant l’objet d’une enquête et les témoins auraient le droit d’être représentées par un avocat.
Le pouvoir d’enjoindre la production de documents ou de choses dans le cadre d’une enquête peut porter atteinte au droit à la vie privée protégé par l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ce pouvoir avec l’article 8 de la Charte. Le type de documents ou de choses pouvant être exigé doit se rapporter à l’application et à l’exécution d’une loi fiscale dans un contexte où les attentes en matière de vie privée sont élevées. En outre, l’ordonnance de produire un document ou une chose n’est pas particulièrement intrusive, puisqu’elle n’implique pas de pénétrer dans la propriété privée d’un contribuable pour y effectuer une fouille, une perquisition ou une saisie. Des pouvoirs d’enquête similaires existent dans d’autres lois fiscales et ont été confirmés par les tribunaux.
Partie 3
Section 3
Loi sur la taxe sur les logements sous-utilisés
La section 3 propose d’apporter des modifications afin de clarifier l’incorporation existante dans la Loi de 2001 sur l’accise de dispositions de la Loi sur la taxe sur les logements sous-utilisés (la Loi) afin d’autoriser, dans des circonstances précises, la divulgation de renseignements recueillis dans le cadre de l’application et de l’exécution de la Loi (p. ex., le nom et l’adresse d’une personne assujettie à la Loi, son statut de citoyenneté et son pourcentage de propriété dans des immeubles résidentiels situés au Canada). La divulgation de renseignements pertinents pourrait mettre en jeu droits garantis par l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des mesures avec l’article 8. L’objectif des modifications proposées est d’assurer la cohérence des pouvoirs de divulgation dans les lois fiscales fédérales et les lois connexes appliquées et exécutées par l’Agence du revenu du Canada afin qu’ils soient compatibles avec les obligations de confidentialité contenues dans chacune des lois. Les pouvoirs de divulgation prévus par la Loi doivent être compatibles avec les pouvoirs de divulgation prévus par les autres lois afin d’éviter que les obligations de confidentialité prévues par la Loi fassent obstacle à l’application des autres lois. Le degré de respect de la vie privée qui peut être raisonnablement attendu dans les contextes réglementaires et administratifs est généralement plus faible. Les renseignements qui pourraient être communiqués auraient déjà été communiqués au gouvernement et les attentes en matière de vie privée seraient donc réduites par rapport aux autres fins gouvernementales. Uniquement la divulgation de renseignements qui seraient pertinents pour la fin précisée serait autorisée. La norme qui doit être respectée pour autoriser les atteintes à la vie privée à des fins administratives et réglementaires est généralement inférieure aux normes de la Charte qui s’appliquent habituellement afin d’autoriser les atteintes à la vie privée aux fins d’enquête sur les infractions. La Loi protège autrement le droit à la vie privée en ce qui a trait aux renseignements pertinents en interdisant leur divulgation et leur utilisation non autorisées, et la violation de cette interdiction est passible d’un emprisonnement maximal de 12 mois et (ou) d’une amende maximale de 5 000 $.
Section 4
Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre
Divulgation de renseignements – Gouvernements provinciaux
Les modifications proposées à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre (la Loi) permettraient la divulgation de renseignements sur les activités des gouvernements provinciaux et de leurs mandataires qui sont réglementées au titre de la partie 1 de la Loi, ainsi que sur l’observation ou l’inobservation de la partie 1 de la Loi par les gouvernements provinciaux et de leurs mandataires. La partie 1 de la Loi impose une redevance sur les combustibles qui s’applique aux personnes qui produisent, distribuent et importent divers types de combustibles à base de carbone et de déchets combustibles. En vertu de la partie 1 de la Loi, un renseignement confidentiel s’entend, de façon générale, d’un renseignement de toute nature qui est obtenu par le ministre du Revenu national ou en son nom pour l’application de la Loi. Ces renseignements relatifs à un gouvernement provincial ou à son mandataire pourraient être divulgués au gouvernement fédéral lorsqu’un gouvernement provincial ou son mandataire n’observe pas les exigences de la partie 1 de la Loi ou qu’il a déclaré qu’il ne les observera pas, mais uniquement en vue de l’évaluation ou de la formulation d’une réponse. De plus, certains types de renseignements énumérés (comme le statut d’inscription en vertu de la partie 1 de la Loi, les données sur les types et les quantités de carburant utilisés, les sommes impayées en redevance sur les combustibles, et les mesures d’exécution qui sont envisagées par le ministre du Revenu national) pourraient être divulgués publiquement lorsqu’un gouvernement provincial ou son mandataire n’observe pas les exigences de la partie 1 de la Loi ou qu’il a déclaré publiquement qu’il ne les observera pas. La divulgation de renseignements pertinents, qui pourraient comprendre des renseignements commerciaux de nature délicate, pourrait porter atteinte à une attente raisonnable au respect de la vie privée et pourrait donc mettre en jeu les droits garantis par l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des mesures avec l’article 8. Les gouvernements provinciaux ou leurs mandataires ne sont pas titulaires de droits au regard de la Charte donc ils n’ont pas d’attentes en matière de vie privée en ce qui a trait aux renseignements pertinents. En général, les gouvernements doivent respecter les droits et libertés; ils ne sont pas protégés par les droits et libertés. Dans la mesure où une autre personne peut avoir une attente raisonnable au respect de la vie privée en ce qui a trait aux renseignements pertinents, le degré de respect de la vie privée qui peut être raisonnablement attendu dans les contextes réglementaires et administratifs est généralement plus faible. Les pouvoirs de communication proposés devraient assurer la transparence essentielle à la compréhension du public et à la reddition de comptes en ce qui concerne l’inobservation par un autre ordre du gouvernement des exigences de la partie 1 de la Loi. La Loi protège autrement le droit à la vie privée en ce qui a trait aux renseignements pertinents en interdisant leur communication et leur utilisation non autorisées, et la violation de cette interdiction est passible d’un emprisonnement maximal de 12 mois et (ou) d’une amende maximale de 5 000 $.
Divulgation de renseignements – Généralités
La section 4 propose également d’apporter des modifications qui permettraient de clarifier l’incorporation existante dans la Loi de dispositions de la Loi de 2001 sur l’accise. L’incorporation de ces dispositions à la Loi a pour effet d’autoriser dans des circonstances précises la divulgation de renseignements recueillis dans le cadre de l’application et de l’exécution de la partie 1 de la Loi. La divulgation de renseignements pertinents, qui pourraient comprendre des renseignements commerciaux de nature délicate, pourrait mettre en jeu l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des mesures avec l’article 8. L’objectif des modifications proposées est d’assurer la cohérence des pouvoirs de divulgation dans les lois fiscales fédérales et les lois connexes appliquées et exécutées par l’Agence du revenu du Canada afin qu’ils soient compatibles avec les obligations de confidentialité contenues dans chacune des lois. Les pouvoirs de divulgation prévus par la partie 1 de la Loi doivent être compatibles avec les pouvoirs de divulgation prévus par les autres lois afin d’éviter que les obligations de confidentialité prévues par la Loi fassent obstacle à l’application des autres lois. Le degré de respect de la vie privée qui peut être raisonnablement attendu dans les contextes réglementaires et administratifs est généralement plus faible. Les renseignements qui pourraient être communiqués auraient déjà été communiqués au gouvernement et les attentes en matière de vie privée seraient donc réduites par rapport aux autres fins gouvernementales. Uniquement la divulgation de renseignements qui seraient pertinents pour la fin précisée serait autorisée. La norme qui doit être respectée pour autoriser les atteintes à la vie privée à des fins administratives et réglementaires est généralement inférieure aux normes de la Charte qui s’appliquent habituellement afin d’autoriser les atteintes à la vie privée aux fins d’enquête sur les infractions. La Loi protège autrement le droit à la vie privée en ce qui a trait aux renseignements pertinents en interdisant leur communication et leur utilisation non autorisées, et la violation de cette interdiction est passible d’un emprisonnement maximal de 12 mois et (ou) d’une amende maximale de 5 000 $.
Infraction
La section 4 modifierait l’infraction d’utiliser sciemment des renseignements confidentiels à une autre fin que celle pour laquelle ils ont été communiqués. L’infraction serait passible d’un emprisonnement maximal de 12 mois et (ou) d’une amende maximale de 5 000 $. L’article 7 de la Charte protège contre les atteintes au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, sauf si de telles atteintes sont portées conformément aux principes de justice fondamentale. Les infractions qui peuvent être sanctionnées par une peine d’emprisonnement portent atteinte au droit à la liberté et doivent donc être conformes aux principes de justice fondamentale. Le champ d’application de l’infraction est établi de manière à cibler les actes qui seraient liés à l’objectif de protéger les renseignements confidentiels au sens de la Loi d’une utilisation ou d’un accès non autorisé. Dans le cadre de son examen des dispositions pertinentes, le ministre n’a pas recensé d’incompatibilité possible avec les principes de justice fondamentale, notamment les principes qui interdisent le caractère arbitraire, la portée excessive et le caractère totalement disproportionné.
Partie 4
Section 16 Cadre sur les services bancaires axés sur les consommateurs
La section 16 édicterait une nouvelle loi, la Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs, afin de permettre aux consommateurs de partager leurs données financières de façon sécuritaire avec les entités participantes de leur choix. Cette section modifierait également la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada afin de permettre à l’Agence de la consommation en matière financière du Canada de superviser et d’administrer les attributions relatives à ce cadre.
Pouvoirs relatifs aux renseignements personnels
Cette section modifierait la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada afin de permettre au commissaire adjoint principal de recueillir tous les renseignements personnels nécessaires à la mission de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, ce qui comprend déterminer le respect de la Loi et des conditions pertinentes, surveiller et évaluer les tendances et les questions qui se dessinent dans le secteur des services bancaires axés sur les consommateurs et favoriser la collaboration dans les services bancaires axés sur les consommateurs et la compréhension de ces services auprès des consommateurs. Les renseignements recueillis dans le cadre de l’exercice de ce pouvoir seront traités comme des renseignements confidentiels. Le commissaire adjoint principal serait en mesure de communiquer ces renseignements à des organismes qui réglementent et (ou) supervisent des institutions financières ou des entités participantes dans un registre public tenu par l’Agence de la consommation en matière financière ou le gouverneur de la Banque du Canada à des fins liées à la réglementation ou à la supervision d’entités participantes. Le commissaire adjoint principal serait également en mesure de communiquer ces renseignements au sous-ministre des Finances ou à tout fonctionnaire autorisé du ministère des Finances pour l’analyse de la politique en matière de réglementation des institutions financières ou des entités participantes. Le commissaire adjoint principal ne pourrait communiquer ces renseignements que s’il est convaincu que l’organisme destinataire les traitera comme confidentiels. Étant donné que ces dispositions régissent la collecte et la communication de renseignements qui pourraient donner lieu à une attente raisonnable au respect de la vie privée, elles pourraient avoir des effets au regard de l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces dispositions avec l’article 8 de la Charte. Les renseignements recueillis seraient limités aux renseignements qui seraient pertinents à l’exercice des attributions du sous-commissaire principal visées par la Loi concernant la mission de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, y compris déterminer le respect de la Loi et de ses conditions pertinentes. Les dispositions prévoient également l’obligation de garder confidentiels les renseignements recueillis. La communication de ces renseignements est autorisée uniquement à des fins étroitement liées à la réglementation ou à la supervision d’institutions financières ou d’entités participantes. En outre, le droit à la vie privée est plus restreint dans les contextes réglementaires et administratifs lorsque l’atteinte potentielle est faite à des fins réglementaires ou administratives, comme le respect d’une loi, qu’il le ne serait à des fins d’enquêtes sur les infractions. Dans le cadre de son examen des dispositions pertinentes, le ministre n’a pas recensé d’effets qui pourraient constituer une atteinte déraisonnable au droit à la vie privée garanti par l’article 8 de la Charte.Sanctions administratives pécuniaires
Cette section propose également de mettre à jour les dispositions relatives au régime actuel de sanctions administratives pécuniaires dans la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, y compris les renvois au commissaire adjoint principal et à la Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs proposée et à ses règlements. Dans le cadre de ce régime de sanctions administratives pécuniaires, le commissaire ou le commissaire adjoint principal seraient habilités à dresser des procès-verbaux et à proposer des pénalités, s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une violation a été commise. Les personnes visées par un procès-verbal et une pénalité auraient le droit de payer la pénalité ou de présenter des observations à l’égard de la violation et de la pénalité proposée. Si des observations sont présentées, le commissaire ou le commissaire adjoint principal détermineraient, selon la prépondérance des probabilités, la responsabilité de l’intéressé, et si elle doit imposer la pénalité proposée ou une pénalité réduite ou encore n’imposer aucune pénalité. Le gouverneur en conseil pourrait, par règlement, établir des pénalités maximales de 1 000 000 $ pour une violation commise par une personne physique et de 5 000 000 $ pour une violation commise par une entité participante.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des dispositions mentionnées ci-dessus avec la Charte. Les modifications apportées au régime actuel de sanctions pécuniaires administratives prévu par la Loi n’entraîneraient pas d’accusations, de poursuites, de peines criminelles, ni de peines d’emprisonnement. L’objectif de la sanction serait de favoriser le respect de la Loi ou d’autres conventions pertinentes ou de conditions prévues par la Loi, et non de « punir », selon la définition de ce concept aux fins de l’article 11 de la Charte. Il n’y a pas de sanction minimale prescrite. Dans ce contexte législatif, ces dispositions ne permettraient pas l’infliction d’une sanction qui entraînerait de « véritables conséquences pénales » au regard de l’article 11.
Infractions – Conflits d’intérêts
Cette section modifierait les infractions existantes relatives aux conflits d’intérêts prévues au paragraphe 16(2) de la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada afin d’ajouter les entités participantes ou l’organisme de normalisation technique aux personnes et entités qui ne peuvent pas faire de dons en espèces ou en nature au commissaire, au commissaire adjoint principal ou aux sous-commissaires, ou à leurs employés. Cette disposition prévoit que toute personne qui commet cette infraction est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 2 000 $ et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’une amende maximale de 10 000 $ ou d’un emprisonnement maximal de cinq ans.
Puisque les dispositions établissent des infractions qui sont passibles d’une peine d’emprisonnement, elles pourraient porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte. Dans le cadre de son examen des mesures pertinentes, le ministre de la Justice n’a pas recensé d’incompatibilité possible entre les dispositions établissant des infractions et les principes de justice fondamentale énoncés à l’article 7 de la Charte. Le champ d’application des infractions est établi de manière à viser uniquement les actes qui cibleraient l’objectif de préserver l’intégrité de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada dans le cadre de ses fonctions de supervision, plus précisément, en évitant les conflits d’intérêts et en interdisant les tentatives visant à influencer les activités de l’Agence par l’intermédiaire de pots-de-vin ou d’autres moyens similaires. Sur déclaration de culpabilité, un juge aura le pouvoir discrétionnaire d’imposer une peine appropriée.
Infractions – Représentations et renseignements faux et trompeurs
La Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs proposée comprendrait un certain nombre d’interdictions qui viseraient à interdire aux personnes qui ne sont pas des entités participantes de se présenter comme étant des entités participantes et à interdire également aux personnes de fournir des renseignements faux ou trompeurs relativement à leur participation sous le régime de la Loi. Puisque ces interdictions prévoiraient l’infliction d’une peine d’emprisonnement, elles pourraient porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces dispositions avec l’article 7 de la Charte. Les interdictions qui se rapportent à la prétention d’être une entité participante cadrent avec les objectifs de la Loi en empêchant les entités de tromper les clients quant à la question de savoir si elles sont assujetties aux diverses exigences que le cadre éventuel pourrait inclure. Ces exigences pourraient comprendre des exigences techniques et des exigences relatives à la protection de la vie privée et des consommateurs qui seraient essentielles à la décision qu’un consommateur prendrait de faire affaire avec une entité participante. L’interdiction de fournir des renseignements faux ou trompeurs cadre également avec les objectifs de la Loi en s’assurant que les personnes, les entités participantes et les personnes participant à l’application de la Loi sont en mesure de prendre des décisions fondées sur des renseignements exacts concernant une entité participante potentielle. Elle permet également de s’assurer que les entités dont le statut a été suspendu ou révoqué ne fournissent pas de renseignements faux ou trompeurs sur leur statut aux termes de la Loi et de garantir le bon fonctionnement du système.
Section 20
Loi canadienne sur les sociétés par actions
La section 20 apporterait un certain nombre de modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
Infractions et peines
La section 20 édicterait de nouveau et modifierait l’article 21.4(5) de la Loi, qui établit la peine pour les infractions prévues aux articles 21.4(1) à (4) dont sont passibles les administrateurs, les dirigeants et les actionnaires d’une société qui contreviennent sciemment aux obligations prévues par la Loi relativement à la tenue de livres et à la divulgation relative à la propriété effective. La modification proposée édicterait de nouveau la peine en tant qu’infraction hybride. Sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, la peine maximale demeurerait une amende maximale de 1 000 000 $ ou un emprisonnement maximal de 5 ans, ou ces deux peines. Sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine maximale serait une amende maximale de 200 000 $ ou un emprisonnement maximal de 2 ans, ou ces deux peines. Parce que l’article 21.4(5) de la Loi comprend la possibilité d’emprisonnement, il pourrait porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de la modification proposée avec l’article 7. Le ministre n’a pas recensé de possible incompatibilité avec les principes de justice fondamentale. La disposition modifiée cadre avec les objectifs législatifs, notamment assurer le respect de l’obligation de maintenir des renseignements exacts sur la propriété effective, fournir ces renseignements au directeur et aux organismes d’enquête et poursuivre l’objectif global de rendre publics certains renseignements sur des particuliers ayant un contrôle important d’une société. Enfin, la modification proposée préserverait le pouvoir discrétionnaire des juges d’imposer une peine appropriée dans chaque cas.
Section 21
Code canadien du travail (amélioration de l’accès aux mesures de protection destinées aux employés)
Les modifications proposées au Code canadien du travail dans cette section créeraient une nouvelle interdiction relativement à la classification erronée des employés et seraient assujetties aux diverses dispositions établissant des infractions qui sont actuellement en vigueur dans le Code. Certaines infractions pourraient être passibles d’une peine d’emprisonnement et pourraient donc porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité des modifications proposées avec l’article 7. Le ministre n’a pas recensé de possible incompatibilité avec les principes de justice fondamentale. Les infractions sont établies de manière à viser uniquement les actes qui ont trait à l’interdiction proposée relativement à la classification erronée des employés au titre du Code canadien du travail. Les infractions ne sont pas assujetties à une peine minimale, et la durée maximale d’emprisonnement de deux ans ne s’applique qu’à une infraction en lien avec la partie II du Code canadien du travail, qui concerne la santé et la sécurité au travail.
Section 31
Loi sur les aliments et drogues
La section 31 modifierait la Loi sur les aliments et drogues (LAD) afin de permettre au ministre de la Santé de prendre des arrêtés en lui conférant trois nouveaux pouvoirs et d’élargir le pouvoir du gouverneur en conseil de prendre des règlements.
Le premier pouvoir permettrait au ministre de la Santé de prendre un arrêté, applicable à une personne ou à une catégorie de personnes, lorsqu’il croit que l’usage d’un produit thérapeutique qui n’est pas celui auquel le produit est destiné peut présenter un risque de préjudice à la santé ou que l’usage d’une drogue destinée à un animal qui n’est pas celui auquel la drogue est destinée peut présenter le risque d’effets nocifs sur l’être humain, sur les animaux ou sur l’environnement. Le pouvoir permettrait au ministre de la Santé d’établir des règles, notamment en ce qui concerne la vente, les conditions de vente, la publicité, l’emballage, l’étiquetage et l’examen du produit thérapeutique ou la drogue afin de prévenir, de gérer ou de contrôler le risque de préjudice à la santé ou d’effets nocifs de l’usage du produit qui n’est pas celui auquel il est destiné. Le pouvoir permet également d’établir des règles visant à empêcher la promotion d’un produit thérapeutique pour un usage autre que celui auquel il est destiné ou à empêcher que cet usage soit attrayant.
Le deuxième pouvoir permettrait au ministre de la Santé de soustraire, par arrêté, tout aliment, tout produit thérapeutique ou toute activité, sauf en ce qui a trait aux cosmétiques, à l’application de dispositions précises de la LAD et de ses règlements, pour des raisons d’intérêt public, notamment des raisons de santé ou de sécurité.
Le troisième pouvoir permettrait au ministre de la Santé de déclarer, par arrêté, que certaines exigences de la LAD ou de ses règlements relativement à un produit thérapeutique ou à un aliment sont réputées être respectées sur le fondement d’une décision d’une autorité réglementaire étrangère ou de renseignements ou documents émanant de celle-ci.
Les modifications apportées à la LAD permettront également au gouverneur en conseil de prendre des règlements visant à prévenir ou à atténuer une pénurie d’aliments au Canada à des fins diététiques spéciales afin de protéger la santé humaine.
Un arrêté qui vise à empêcher la promotion d’un produit thérapeutique pour un usage autre que celui auquel il est destiné ou à empêcher que cet usage soit attrayant, comme la publicité, l’emballage ou l’étiquetage du produit, pourrait porter atteinte au droit à la liberté d’expression garanti par l’alinéa 2b) de la Charte.
L’alinéa 2b) protège la liberté d’expression et s’étend généralement à la publicité et à d’autres expressions qui sont faites à des fins commerciales, y compris l’expression commerciale par les sociétés et les particuliers. Les considérations suivantes appuient la compatibilité de la disposition avec l’alinéa 2b) de la Charte. L’arrêté viserait à empêcher la promotion d’un produit thérapeutique pour un usage autre que celui auquel il est destiné ou à empêcher que cet usage soit attrayant et il serait pris dans le but de prévenir, de gérer ou de contrôler le risque de préjudice à la santé d’une personne. Ce type d’expression commerciale n’est pas autant protégé que les autres formes de liberté d’expression parce qu’il est généralement plus éloigné des valeurs fondamentales du droit, à savoir la recherche de la vérité dans les affaires politiques et dans les entreprises scientifiques et artistiques, la protection de l’autonomie et de l’épanouissement personnels et la promotion de la participation du public au processus démocratique. Le fait que l’expression soit de nature commerciale est un facteur pertinent pour déterminer si limiter cette expression est justifiable au regard de la Charte.
Une contravention à un arrêté ou aux règlements constituerait une infraction à la LAD. Les nouveaux pouvoirs de prendre un arrêté peuvent également servir à influencer le champ d’application des actes qui constitueraient une infraction à la LAD. Puisque la perpétration d’une infraction est notamment passible d’une peine d’emprisonnement, cette modification pourrait porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte. Le ministre de la Justice n’a pas recensé de possible incompatibilité avec les principes de justice fondamentale énoncés à l’article 7. L’arrêté et la réglementation cadrent avec les objectifs d’assurer la santé et la sécurité des Canadiens, et en particulier, la santé et la sécurité des Canadiens qui pourraient être à risque, comme les populations vulnérables.
Une personne visée par un arrêté ou un règlement serait assujettie aux dispositions relatives à l’inspection de la LAD. Le pouvoir d’exiger la production de documents ou de renseignements pourrait porter atteinte aux droits garantis par l’article 8 de la Charte qui protège contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives. Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ce pouvoir avec l’article 8 de la Charte. Le droit à la vie privée est restreint dans les contextes réglementaires et administratifs. Les pouvoirs conférés par la loi d’exiger la production de renseignements pertinents à des fins réglementaires ou administratives plutôt qu’aux fins de mener une enquête sur des infractions criminelles ont été jugés raisonnables au titre de l’article 8. Le ministre de la Justice n’a pas recensé d’effets qui pourraient constituer une atteinte déraisonnable au droit à la vie privée garanti par l’article 8 de la Charte.
Section 32
Loi sur le tabac et les produits de vapotage
La section 32 modifie la Loi sur le tabac et les produits de vapotage (LTPV). Elle ajouterait une nouvelle disposition à la LTPV qui exigerait que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile fournisse des renseignements douaniers au sens de la Loi sur les douanes au ministre responsable de l’exécution et du contrôle d’application de la LTPV lorsqu’il le demande. Cette section modifierait également la LTPV afin d’accorder au ministre le pouvoir discrétionnaire de communiquer des renseignements obtenus sous le régime de la LTPV à d’autres ministres fédéraux à certaines fins connexes. Elle autoriserait la communication de ces renseignements à tout ministre fédéral dans le but de vérifier le respect des autres lois fédérales qui s’appliquent également aux produits du tabac, aux produits de vapotage ou à toute activité liée aux produits du tabac ou aux produits de vapotage. Puisque la section traite de la communication de renseignements, elle pourrait porter atteinte à une attente raisonnable au respect de la vie privée, et donc au droit garanti par l’article 8 de la Charte, qui protège contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces mesures avec la Charte. Les nouveaux pouvoirs de recueillir des renseignements douaniers et de communiquer des renseignements recueillis aux termes de la LTPV pourraient être utilisés à des fins réglementaires, et non pénales, dans le but de vérifier le respect des exigences prévues par la loi qui s’appliquent au tabac et aux produits de vapotage. Par conséquent, les mesures sont, de façon générale, équivalentes aux pouvoirs déjà confirmés dans d’autres contextes réglementaires où le droit à la vie privée est restreint. Il est important de noter que le pouvoir de communiquer des renseignements à d’autres ministres fédéraux serait discrétionnaire et que ce pouvoir discrétionnaire devrait être exercé conformément à la Charte. De plus, les règles actuelles de la Loi sur les douanes qui protègent les renseignements douaniers continueraient de s’appliquer.
Section 33
Code criminel (taux d’intérêt criminel)
La section 33 modifierait l’infraction relative au taux d’intérêt criminel à l’article 347 du Code criminel, qui interdit la perception d’intérêts ou la conclusion d’une convention ou d’une entente pour percevoir des intérêts à un taux criminel, c’est-à-dire à un taux d’intérêt supérieur à un certain pourcentage. Selon les modifications introduites par le projet de loi C-47 en 2023 qui ne sont pas encore entrées en vigueur, le taux criminel serait fixé à un taux annuel supérieur à 35 %. Les modifications proposées dans ce projet de loi élargiraient la portée de l’infraction prévue à l’article 347 du Code criminel afin d’interdire d’offrir un prêt à un taux d’intérêt criminel ou de faire la publicité d’une telle offre.
Les sanctions potentielles pour l’offre d’un prêt à un taux d’intérêt criminel ou la publication d’une telle offre comprennent l’emprisonnement. Par conséquent, les modifications porteraient atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité du taux d’intérêt criminel modifié avec l’article 7 de la Charte. L’infraction élargie aurait pour objectif de contrer les pratiques de prêt à des conditions abusives qui profitent des personnes vulnérables sur le plan économique au Canada. Elle permettrait d’imposer des sanctions pénales pour l’offre de prêts à la consommation prévoyant la perception d’intérêts à un taux bien supérieur aux taux standards acceptables. De plus, les modifications introduites par le projet de loi C-47, qui ne sont pas encore entrées en vigueur, permettraient de mieux adapter le champ d’application de l’infraction par la prise de règlement, par exemple, pour soustraire certains types d’ententes ou de conventions de crédit à l’application du Code criminel.
Les modifications proposées pourraient porter atteinte à l’alinéa 2b) de la Charte puisqu’elles imposent des restrictions sur la publicité – une forme d’activité expressive.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité des modifications proposées avec l’alinéa 2(b). Les modifications interdisent la publicité d’un service déjà illégal. Les modifications proposées fourniraient plus de clarté et veilleraient à ce qu’un acte qui a pour but de rendre un régime de crédit illicite attrayant pour des emprunteurs constitue une infraction au Code criminel. L’imposition de restrictions à la publicité commerciale d’une activité illégale est plus loin de porter atteinte aux valeurs fondamentales qui sous-tendent la protection de la liberté d’expression, comme la participation au processus démocratique. De telles restrictions peuvent être considérées comme une réponse proportionnelle à l’objectif important de protéger les consommateurs contre les pratiques de prêt à des conditions abusives.
Section 34
Recyclage des produits de la criminalité, financement des activités terroristes, contournement de sanctions et autres mesures
Sous-section A – Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes
La sous-section A modifierait la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT).
Transporteurs d’espèces et d’autres effets et entreprises d’encaissement de chèques
La sous-section A édicterait de nouveau, avec des changements mineurs pour assurer la cohérence interne de la Loi, les modifications introduites par le projet de loi C-30 en 2021 qui ne sont pas encore en vigueur. Les modifications assujettiraient les transporteurs d’espèces et d’autres effets à diverses exigences prévues par la LRPCFAT qui s’appliquent aux entreprises de services monétaires. Ces exigences s’appliqueraient également aux entreprises d’encaissement de chèques. Étant donné que ces exigences s’appliqueraient à la collecte de renseignements personnels et à leur communication au Centre d’analyse des rapports financiers et des transactions du Canada (CANAFE) dans certaines circonstances, elles pourraient porter atteinte à une attente raisonnable au respect de la vie privée et, par conséquent, mettre en jeu les droits garantis par l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces modifications avec l’article 8 de la Charte. Les transporteurs d’espèces et d’autres effets, ainsi que les entreprises d’encaissement de chèques, présentent un risque de blanchiment d’argent semblable à celui d’autres entreprises de services monétaires, car ils jouent un rôle dans la réalisation des opérations financières au nom de tiers. Les nombreuses protections en matière de vie privée prévues par la LRPCFAT qui s’appliquent actuellement aux activités des entreprises de services monétaires et à leurs clients s’appliqueraient également aux transporteurs d’espèces et d’autres effets, ainsi qu’aux entreprises d’encaissement de chèques.
Communication de renseignements au ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration
Les modifications obligeraient le CANAFE à communiquer les renseignements désignés au ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration lorsque le CANAFE a des motifs raisonnables de soupçonner que les renseignements seraient utiles dans le cadre d’une enquête ou d’une poursuite relative à une infraction de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes ou que les renseignements seraient pertinents dans le cadre de procédures de confiscation civile. Le CANAFE serait également tenu de déterminer si les renseignements désignés sont utiles pour établir si une personne est visée par les paragraphes 10(1), 19(2) ou l’article 22 de la Loi sur la citoyenneté, c’est-à-dire une personne qui a commis une fraude dans le cadre d’une demande de citoyenneté, une personne qui constitue une menace envers la sécurité du Canada ou qui a participé à une activité criminelle organisée ou une personne qui ne peut autrement recevoir la citoyenneté. Étant donné que ces modifications exigent la divulgation de renseignements aux agences gouvernementales, elles pourraient mettre en jeu le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives garanti par l’article 8 de la Charte.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité de ces modifications avec l’article 8 de la Charte. La communication est uniquement autorisée lorsque le CANAFE a déjà des motifs raisonnables de soupçonner que les renseignements seraient utiles dans le cadre d’une enquête relative à une infraction de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes, ou encore, à des menaces envers la sécurité nationale, et que le CANAFE serait déjà dans l’obligation de les communiquer aux organismes d’application de la loi et à d’autres organismes concernés. La communication au ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration serait accessoire et refléterait la réalité selon laquelle les renseignements liés au blanchiment d’argent, au financement d’activités terroristes et aux menaces envers la sécurité nationale peuvent révéler des renseignements pertinents à l’admissibilité à la citoyenneté et à une fraude en matière de citoyenneté, y compris, par exemple, lorsqu’une personne se livre à des activités qui constituent des menaces envers la sécurité du Canada ou à des activités criminelles organisées. Le pouvoir de communication n’étendrait pas la compétence du CANAFE au-delà du blanchiment d’argent et du financement d’activités terroristes, mais permettrait simplement la communication accessoire de renseignements qui ont déjà été divulgués à la police.
Communication de renseignements aux organismes provinciaux et territoriaux chargés de la confiscation de biens au civil
Les modifications obligeraient le CANAFE à communiquer les renseignements désignés aux organismes provinciaux et territoriaux chargés de la confiscation de biens au civil, lorsque le CANAFE a des motifs raisonnables de soupçonner que les renseignements seraient utiles dans le cadre de l’enquête ou de la poursuite d’une infraction de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes, et que les renseignements seraient pertinents dans le cadre de procédures de confiscation civile. Étant donné que ces modifications exigent la divulgation de renseignements aux agences gouvernementales, elles pourraient mettre en jeu le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives garanti par l’article 8 de la Charte.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité de ces modifications avec l’article 8 de la Charte. La communication est uniquement autorisée lorsque le CANAFE a déjà des motifs raisonnables de soupçonner que les renseignements seraient utiles dans le cadre d’une enquête relative à une infraction de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes et que le CANAFE serait déjà dans l’obligation de les communiquer à la police. La communication aux organismes provinciaux et territoriaux chargés de la confiscation de biens au civil serait accessoire et contribuerait à l’objectif de la LRPCFAT de priver les criminels du produit de leurs activités illicites.
Infraction – Vérification et examen
Des modifications créeraient une infraction en cas de contravention aux articles 9.92 et 9.93 de la LRPCFAT , qui ont été introduits par le projet de loi C-47 en 2023, mais qui ne sont pas encore entrés en vigueur. Les articles 9.92 et 9.93 obligent les entreprises de services monétaires à faire preuve de diligence convenable avant d’engager un mandataire afin de s’assurer qu’elles n’engagent pas un mandataire qui n’est pas admissible à l’inscription en tant qu’entreprise de services monétaires. Puisque les modifications proposées établissent une infraction criminelle passible d’une peine d’emprisonnement, elles pourraient porter atteinte au droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte.
Les considérations qui suivent appuient la compatibilité des modifications avec l’article 7 de la Charte. Le ministre n’a pas recensé de possible incompatibilité avec les principes de justice fondamentale. Les nouvelles infractions aideraient à assurer le respect des nouvelles obligations de diligence convenable prévues par la LRPCFAT et viseraient uniquement les actes qui sont incompatibles avec ces obligations. Ces obligations ont un lien rationnel avec l’objet de la loi puisqu’elles permettent de s’assurer que les entités qui ne sont pas admissibles à s’inscrire en tant qu’entreprise de services monétaires ne peuvent pas éviter les conséquences de cette inadmissibilité en agissant au nom d’une entreprise de services monétaires inscrite. Cette mesure vise à lutter contre le blanchiment d’argent et le financement d’activités terroristes, car elle empêche les personnes et les entités de participer à des activités qui présentent un risque de blanchiment d’argent s’ils ont été déclarés coupables de certaines infractions de blanchiment d’argent et de financement d’activités terroristes, de même que d’infractions connues pour être associées au blanchiment d’argent et au financement d’activités terroristes, comme certaines infractions liées à la drogue et au terrorisme.
Sous-section C – Code criminel
La sous-section C modifierait le Code criminel pour créer deux nouveaux pouvoirs. En plus d’une ordonnance visant à ce qu’un compte soit maintenu ouvert ou actif, elle créerait un nouveau pouvoir permettant de rendre une « ordonnance de communication répétitive ». Sur demande ex parte présentée par un agent de la paix ou un fonctionnaire public, un juge de paix ou un juge pourrait ordonner à toute personne de communiquer un document ou des données qui sont en sa possession ou à sa disposition aux dates précisées dans l’ordonnance. Avant de rendre une telle ordonnance, le juge de paix ou le juge devrait être convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à la Loi ou à toute autre loi fédérale a été ou sera commise et que le document ou les données, s’ils sont en la possession de la personne ou à sa disposition à l’une des dates qui seront précisées dans l’ordonnance, fourniront une preuve concernant la perpétration de l’infraction. De plus, l’ordonnance pourrait obliger la personne à produire des copies de déclarations faites en application de la LRPCFAT au cours de la période où l’ordonnance est en vigueur. Étant donné qu’une ordonnance peut viser des documents ou des données qui donnent lieu à une attente raisonnable au respect de la vie privée, elle pourrait mettre en jeu les droits garantis par l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces modifications avec l’article 8 de la Charte. L’ordonnance serait autorisée par voie judiciaire selon la norme « qu’il existe des motifs raisonnables de croire », qui est la norme par défaut pour les perquisitions criminelles. Cette norme a été définie dans la jurisprudence comme le moment où « les soupçons font place à la probabilité fondée sur la crédibilité ». Cette norme requiert que la police relève des éléments de preuve précis pour établir un fondement objectif reposant sur des renseignements concluants et dignes de foi. L’ordonnance contiendrait les restrictions suivantes : la communication ne peut être ordonnée plus d’une fois au cours d’une période de 72 heures et elle serait limitée aux documents qui sont des copies de documents ou des documents comportant des données qui sont en possession de la personne ou à sa disposition au cours de la période où l’ordonnance est en vigueur. De plus, l’ordonnance est valide pour une période maximale de 60 jours et doit préciser au plus six dates auxquelles les documents ou les données devraient être communiqués au cours de la période où l’ordonnance est en vigueur. Toute demande de communication de rapports aux termes de la LRPCFAT doit respecter la même norme « qu’il existe des motifs raisonnables de croire » que les autres documents ou données demandés. Les ordonnances ne seront renouvelables que si le juge de paix ou le juge est convaincu que les conditions préalables à l’ordonnance sont toujours remplies. L’octroi d’une telle ordonnance n’obligerait pas le destinataire à préserver les données de façon continue, mais seulement à produire des données qui sont en sa possession ou à sa disposition aux dates précisées dans l’ordonnance. De plus, les personnes faisant l’objet d’une enquête relative à l’infraction ne peuvent être assujetties à ces ordonnances. Le juge de paix ou le juge qui rend l’ordonnance serait en mesure d’imposer toute condition qu’il juge appropriée, y compris toute mesure visant à protéger les renseignements visés par le secret professionnel de l’avocat ou du notaire. Le destinataire de l’ordonnance serait également en mesure de demander la révision de l’ordonnance par un juge.
Section 35
Code criminel (vol de véhicules à moteur)
La section 35 modifierait le Code criminel en édictant de nouvelles infractions de vol de véhicule à moteur aux termes de l’article 333.1 et de nouvelles infractions relatives aux dispositifs pouvant servir à commettre des vols de véhicules à moteur aux termes de l’article 333.2 proposé. Elle ajouterait également une infraction relative au recyclage des produits de la criminalité aux termes de l’article 462.31 et apporterait des modifications corrélatives au Code criminel et à d’autres lois.
Le paragraphe 333.1(1) interdit actuellement le vol de véhicules à moteur et prévoit une infraction hybride qui serait passible, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de dix ans, la peine minimale étant de six mois dans le cas d’une troisième infraction ou de toute autre récidive subséquente, et sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’un emprisonnement maximal de deux ans moins un jour. Les modifications ajouteraient deux actes criminels à l’article 333.1. La première modification créerait une infraction de vol de véhicule à moteur avec usage, tentative, ou menace de violence; la deuxième modification créerait une infraction de vol de véhicule à moteur au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle. Les deux infractions seraient passibles d’un emprisonnement maximal de 14 ans, soit la même peine prévue avant la modification.
Les modifications créeraient deux nouvelles infractions aux termes de l’article 333.2 en ce qui a trait à la possession et à la distribution de dispositifs utilisés dans le but de commettre un vol de véhicule à moteur. La première infraction interdirait la possession d’un dispositif électronique qui peut servir à commettre un vol de véhicule à moteur dans le but de commettre une infraction. La seconde interdirait, par exemple, la fabrication, la vente, la réparation, la distribution, l’importation et l’exportation d’un tel dispositif, sachant que le dispositif a été utilisé pour commettre une infraction de vol de véhicule à moteur ou est destiné à l’être, sans excuse légitime. Ces deux infractions seraient des infractions hybrides qui seraient passibles, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de 10 ans et, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 5 000 $ ou d’un emprisonnement maximal de deux ans, moins une journée, ou de ces deux peines. De plus, sur déclaration de culpabilité, le dispositif électronique peut être confisqué au profit de la Couronne.
Ces modifications ajouteraient également un acte criminel à l’article 462.31 du Code criminel pour le blanchiment des produits de la criminalité au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle. L’infraction serait passible d’un emprisonnement maximal de 14 ans. En outre, ces nouvelles infractions seraient toutes ajoutées à la liste des infractions désignées énumérées à l’article 183 du Code criminel, qui permet aux enquêteurs de demander une autorisation judiciaire visant à intercepter des communications privées, et de l’article 487.04, qui prévoit, par exemple, le prélèvement d’une substance corporelle aux fins d’analyse dans le cadre du régime d’analyse génétique.
Puisque les modifications incluent la possibilité d’emprisonnement, elles pourraient porter atteinte au droit à la liberté, et cette atteinte doit donc être conforme aux principes de justice fondamentale.
Dans le cadre de son examen des dispositions pertinentes, le ministre n’a pas recensé d’incompatibilité possible avec les principes de justice fondamentale énoncés à l’article 7 de la Charte. Le champ d’application des infractions cadre avec les objectifs législatifs, tels que réduire le vol de véhicules à moteur en dissuadant l’utilisation de la violence dans sa commission, interdire les outils utilisés dans sa commission, et lutter contre la participation de criminels organisés et leur capacité à recycler les produits de leurs activités criminelles. L’article 333.2 proposé inclut un fort élément d’intention coupable (mens rea), qui ne s’applique que si l’accusé a l’intention de commettre un vol de véhicule à moteur alors qu’il est en possession d’un appareil électronique pouvant servir à la commission du vol, ou lorsque l’accusé, par exemple, fabrique, vend ou distribue un tel dispositif, sachant que le dispositif a été utilisé pour commettre une infraction de vol de véhicule à moteur ou est destiné à l’être, sans excuse légitime. Enfin, les dispositions proposées préservent le pouvoir discrétionnaire des juges de première instance d’imposer une peine appropriée dans chaque cas.
La désignation proposée de nouvelles infractions dans le cadre du régime relatif à l’interception de communications privées et du régime d’analyse génétique pourrait mettre en jeu le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives aux termes de l’article 8 de la Charte.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de ces inclusions avec l’article 8 de la Charte. Les protections existantes contenues dans ces régimes continueront de s’appliquer, notamment l’obligation d’obtenir une autorisation judiciaire avant d’intercepter des communications privées ou de prélever des substances corporelles aux fins d’analyse génétique, ce qui permet ainsi de satisfaire aux exigences de l’article 8 de la Charte en ce qui a trait à une fouille, à une perquisition ou à une saisie raisonnable.
Section 38
Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés
La section 38 modifierait la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en édictant de nouveau l’alinéa 55(3.1)b) qui exige qu’un agent arrête et détienne sans mandat l’étranger qui, après son entrée au Canada, devient un étranger désigné en conséquence d’une arrivée irrégulière ou que l’agent lance un mandat pour son arrestation et sa détention. Cette modification limiterait l’application de cette disposition aux personnes qui n’ont pas déjà été arrêtées et détenues en vertu de cette disposition. Étant donné que la disposition existante prévoit l’arrestation de personnes, elle pourrait porter atteinte au droit à la liberté protégé par l’article 7 de la Charte, et l’atteinte doit être compatible avec les principes de justice fondamentale afin de se conformer à l’article 7.
Les considérations suivantes appuient la compatibilité de cette disposition avec l’article 7 de la Charte. Le ministre n’a pas recensé de possible incompatibilité avec les principes de justice fondamentale. L’effet de la disposition sur la liberté cadre avec les objectifs législatifs, qui comprennent le contrôle des personnes qui arrivent au Canada dans le cadre d’une arrivée irrégulière. Cette modification limiterait le champ d’application de cette disposition, car elle ne pourrait être utilisée qu’une seule fois à l’égard d’une personne donnée.
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