3. Questions et réponses
Maintenir les droits garantis par l’article 35 au moyen d’une disposition de non-dérogation dans la Loi d’interprétation
Objet, contenu et effet d’une disposition de non-dérogation (DND) de la Loi d’interprétation
- Q 1 Quel est l’objectif d’une DND dans ce contexte? Et qu’entend-on par « droits ancestraux et issus de traités »?
- Q 2 Le projet de loi S-13 est un projet de loi technique. Comment peut-on l’expliquer à la population canadienne?
- Q 3 Quels sont les effets d’une DND? Existe-t-il des exemples concrets?
- Q 4 La Loi d’interprétation fédérale s’applique-t-elle à l’ensemble des lois et des règlements fédéraux?
- Q 5 Comment les lois sont-elles interprétées?
- Q 6 Une DND crée-t-elle une protection envers des droits ancestraux et des droits issus de traités différente de celle qui est conférée par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982? Autrement dit, les DND changent-elles la loi, ou sont-elles seulement symboliques?
- Q 7 Les DND empêchent-elles les atteintes aux droits ancestraux et issus de traités?
- Q 8 En quoi le projet de loi S-13 est-il lié aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et aux appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées?
DND dans d’autres textes législatifs fédéraux
- Q 9 Combien y a-t-il de DND dans les lois fédérales à l’heure actuelle? Qu’adviendrait-il de ces DND si le projet de loi S-13 était adopté?
- Q 10 Pourquoi certaines DND seraient-elles conservées si l’objectif du projet de loi S-13 est de garantir une interprétation uniforme de toutes les lois fédérales?
- Q 11 Pourquoi est-ce que seuls certains textes de loi contiennent actuellement des DND et pourquoi leurs libellés sont-ils différents?
- Q 12 Que se passera-t-il si une DND présente dans une loi fédérale est conservée même après l’ajout d’une DND à la Loi d’interprétation?
- Q 13 Pourquoi avoir choisi d’abroger les DND existantes, plutôt que de les harmoniser?
- Q 14 Est-ce que les DND contenues dans des projets de loi actuellement à l’étude au Parlement devront être abrogées?
- Q 15 Pourquoi n’y a-t-il pas de dispositions de coordination pour le projet de loi C-219 (art. 3), le projet de loi C-271 (art. 3) et le projet de loi S-241 (art. 17)?
- Q 16 Quelles interactions y a-t-il entre le projet de loi S-13 et la Loi sur les langues officielles?
- Q 17 Pourquoi n’abrogez-vous pas la DND contenue dans la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes?
Processus de consultation et de collaboration
- Q 18 Quel était le processus de consultation et de collaboration relatif à l’initiative des DND?
- Q 19 Comment les partenaires autochtones ont-ils été sélectionnés et comment le ministère de la Justice est-il entré en contact avec eux?
- Q 20 Qu’avons-nous appris lors du processus de consultation et de collaboration?
- Q 21 Quelle a été l’incidence de l’entrée en vigueur, le 21 juin 2021, de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones?
- Q 22 Y avait-il du financement disponible pour participer au processus de consultation et de collaboration relatif à la DND?
- Q 23 Pourquoi le ministère de la Justice n’a-t-il pas consulté tout le monde (ou chaque Première Nation individuellement) dans le cadre du processus de consultation et de collaboration?
- Q 24 Avez-vous obtenu le consentement préalable donné librement et en connaissance de cause des peuples autochtones relativement au présent projet de loi?
- Q 25 Ce processus établit-il un précédent dans la façon dont le Canada abordera la consultation et la collaboration à l’avenir?
Interpretation Act de la Colombie-Britannique et possibilité d’ajouter une disposition interprétative à la Loi d’interprétation fédérale
- Q 26 Y a-t-il des similitudes entre la DND proposée dans le projet de loi S-13 et la DND qui a été ajoutée à l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique?
- Q 27 Pourquoi le projet de loi S-13 ne propose-t-il pas une disposition qui exigerait que les lois fédérales soient interprétées d’une manière compatible avec la Déclaration des Nations Unies, comme cela a été fait en Colombie-Britannique?
Autres dispositions de non-dérogation provinciales
- Q 28 Les lois d’interprétation des autres provinces et territoires contiennent-elles des DND?
- Q 29 Y a-t-il eu des discussions avec les provinces et territoires?
Y a-t-il une différence entre les libellés français et anglais de la DND?
Objet, contenu et effet d’une disposition de non-dérogation (DND) de la Loi d’interprétation
Q 1 Quel est l’objectif d’une DND dans ce contexte? Et qu’entend-on par « droits ancestraux et issus de traités »?
- La Loi d’interprétation fédérale est une loi technique qui établit une seule et même norme uniforme pour l’interprétation de toutes les lois fédérales. L’ajout d’une DND dans la Loi d’interprétation permettrait de garantir que toutes les lois fédérales soient interprétées comme incluant elles-mêmes une DND. Il ne serait donc plus nécessaire, à l’avenir, d’inclure une DND dans chacune des lois fédérales.
- La DND proposée est libellée comme suit :
« Tout texte maintient les droits – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982; il n’y porte pas atteinte. »
« Every enactment is to be construed as upholding the Aboriginal and treaty rights of Indigenous peoples recognized and affirmed by section 35 of the Constitution Act, 1982, and not as abrogating or derogating from them. » - L’expression « peuples autochtones » n’étant pas définie dans la Loi d’interprétation, son inclusion doit s’accompagner d’une explication quant à ce qu’elle signifie. Le nouveau projet de loi précise que « peuples autochtones » a la même signification sur le plan juridique que celle qui est attribuée au terme « peuples autochtones du Canada » au paragraphe 35(2) de la Loi constitutionnelle de 1982.
- L’intention de la présente DND est de souligner l’importance de respecter les droits reconnus à l’article 35 et d’interpréter les lois fédérales de façon à ne pas porter atteinte à ces droits.
- L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 a pour objet de conférer un statut et une protection constitutionnels aux « droits ancestraux et issus de traités » dont disposent les peuples autochtones du Canada. Ces droits n’ont pas été créés par l’article 35; celui-ci ne fait que reconnaître et confirmer les droits ancestraux et issus de traités qui existent déjà.
- Les droits ancestraux et issus de traités sont d’une importance fondamentale pour les peuples autochtones. Pour constituer un droit ancestral, une activité doit avoir un élément d’une coutume, pratique ou tradition faisant partie intégrante de la culture distincte du groupe autochtone. Les droits ancestraux comprennent des droits liés aux terres et aux ressources – notamment des droits de récolte, de chasse et de pêche – à la culture, aux langues et aux cérémonies, ainsi que d’autres droits collectifs qui sont à la base même de l’autodétermination et de l’autonomie gouvernementale des Autochtones.
- Les droits issus de traités sont des droits découlant d’un « échange de promesses solennelles » entre la Couronne et des groupes autochtones spécifiques, qu’on désigne sous le terme de « traité ».
- L’article 35 vise essentiellement à reconnaître l’occupation antérieure du Canada par les peuples autochtones, en reconnaissant leurs droits ancestraux ainsi que les droits découlant des traités qui ont été conclus entre le Canada et les peuples autochtones à partir des années 1800.
Q 2 Le projet de loi S-13 est un projet de loi technique. Comment peut-on l’expliquer à la population canadienne?
- Le projet de loi S-13 a pour objet de souligner et de rappeler à toutes les personnes appelées à interpréter les lois fédérales que toutes les lois du Canada doivent respecter les droits ancestraux et issus de traités qui sont énoncés dans la Constitution canadienne.
- À cette fin, le projet de loi S-13 modifierait la Loi d’interprétation. La Loi d’interprétation est une loi du Canada qui s’applique à l’ensemble des lois fédérales et qui indique comment les lois fédérales doivent être interprétées. En un mot, la Loi d’interprétation établit les règles par défaut qui s’appliquent à l’interprétation des lois fédérales.
- Dans le cadre du projet de loi S-13, une « disposition de non-dérogation », ou « DND », serait ajoutée à la Loi d’interprétation. Cette DND spécifique indiquerait que toutes les lois fédérales doivent être interprétées pour maintenir les droits constitutionnels des peuples autochtones, excepté lorsque le législateur a spécifié dans la loi qu’il doit en être autrement.
- Cela signifie que, s’il existe deux façons d’interpréter une loi et que l’une de ces façons porte atteinte aux droits ancestraux et issus de traités, il faut privilégier l’interprétation qui est la plus respectueuse des droits.
Q 3 Quels sont les effets d’une DND? Existe-t-il des exemples concrets?
- Une DND liée à l’article 35 a essentiellement pour objet d’informer toute personne interprétant une loi fédérale que la loi en question doit être interprétée d’une façon qui maintient les droits ancestraux et issus de traités reconnus et confirmés par l’article 35. S’il existe plusieurs façons d’interpréter la loi, l’interprétation qui est compatible avec l’article 35 doit être privilégiée.
- À titre d’exemple, dans l’affaire récente Gitxaala c. British Columbia, la Cour s’est penchée sur la décision du commissaire en chef de l’or de la Colombie-Britannique (le « CCO ») d’accorder des concessions minières sans consulter les peuples autochtones. L’affaire a été entendue en Colombie-Britannique, dont l’Interpretation Act renferme une DND.
- La concession minière en question a été accordée en vertu des pouvoirs discrétionnaires dont dispose le commissaire au titre de la Mine Tenure Act (la « MTA »). La Cour a conclu que la MTA et son règlement – même si leur libellé n’en fait pas expressément mention – conféraient le pouvoir discrétionnaire de mener des consultations auprès des peuples autochtones, mais que le commissaire avait indûment omis, dans l’application de la loi, de consulter les peuples autochtones touchés.
- L’une des raisons pour lesquelles la Cour est parvenue à cette conclusion est que l’article 8.1 de l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique contient une DND semblable à celle proposée dans le projet de loi S-13. La Cour a souligné que la DND contenue dans l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique porte que tous les textes de loi doivent maintenir les droits prévus à l’article 35 et que, par conséquent, le commissaire aurait dû exercer son pouvoir discrétionnaire de consulter les peuples autochtones lorsqu’il a appliqué la MTA, afin de s’assurer que les droits prévus à l’article 35 étaient maintenus. La Cour a conclu que le commissaire a manqué à ses obligations constitutionnelles au titre de l’article 35.
- Peu de cours se sont penchées sur les DND contenues dans des lois fédérales existantes. La Cour d’appel du Yukon a toutefois été appelée à le faire en 2019, dans Ross River Dena Council c. Canada. Dans sa décision, la Cour a souligné que la DND contenue dans la Loi sur le Yukon indique clairement que la Loi sur le Yukon ne porte pas atteinte à la protection des droits des peuples autochtones découlant de l’article 35.
- Nous pourrions également fournir un exemple hypothétique de la façon dont la DND pourrait s’appliquer.
- En vertu du paragraphe 91(1) de la Loi sur les Indiens, le ministre a le pouvoir discrétionnaire de consentir à ce qu’une personne acquière la propriété de biens, tels un poteau totémique ou une roche ornée d’images gravées ou peintes, se trouvant sur une réserve. À titre d’exemple, un musée pourrait demander au ministre de consentir à ce que le musée prélève un poteau totémique situé sur une réserve en vue de l’ajouter à sa collection. En elle-même, la Loi sur les Indiens ne reconnaît pas les droits ancestraux ou issus de traités et n’en fait pas mention. Or, si le projet de loi S-13 était adopté, la Loi sur les Indiens devrait être interprétée de façon à maintenir les droits ancestraux et issus de traités. Le ministre, dans l’exemple donné, devrait alors interpréter son pouvoir d’autoriser ou non le musée à acquérir le poteau totémique d’une façon qui soit compatible avec le maintien des droits ancestraux et issus de traités protégés par l’article 35 qui se rapportent aux objets culturels comme les poteaux totémiques.
Q 4 La Loi d’interprétation fédérale s’applique-t-elle à l’ensemble des lois et des règlements fédéraux?
- Oui. La Loi d’interprétation fédérale s’applique à tous les textes de loi fédéraux, incluant autant les lois que les règlements, sauf s’il existe une intention contraire, comme l’indique le paragraphe 3(1) :
« 3 (1) Sauf indication contraire, la présente loi s’applique à tous les textes, indépendamment de leur date d’édiction. » - En vertu de ce paragraphe, pour indiquer l’existence d’une intention contraire, le Parlement peut utiliser des dispositions excluant expressément les règles et les définitions énoncées dans la Loi d’interprétation. Une intention contraire pourrait également être inférée par l’interprétation d’un texte de loi dans son contexte, même en l’absence de mots exprimant explicitement cette intention.
- Une fois le projet de loi S-13 adopté, la DND incluse dans la Loi d’interprétation fédérale s’appliquera également aux lois édictées avant les modifications.
Q 5 Comment les lois sont-elles interprétées?
- La common law et la Loi d’interprétation forment le cadre qui dicte comment les lois doivent être interprétées au Canada.
- La Cour suprême du Canada a statué que les termes employés dans une loi doivent être interprétés dans leur contexte global en suivant leur sens ordinaire et grammatical. Chaque disposition doit être considérée dans le contexte global de la loi, qui inclut les objectifs généraux de la loi et l’intention du législateur.
- Toute personne interprétant une loi doit considérer les dispositions de cette loi comme faisant partie d’un tout harmonieux. Lorsque des termes sont ambigus, leur sens exact peut être déterminé à la lumière du contexte global de la disposition ou de la loi dans son entier. Les versions anglaise et française d’un texte de loi ont une valeur égale et doivent être interprétées d’une façon qui est compatible avec la langue en question.
- La Loi d’interprétation prévoit également des règles d’interprétation. Le projet de loi S-13 vise à ajouter à la Loi d’interprétation une DND liée à l’article 35 qui aurait pour effet d’établir une règle d’interprétation précise, soit que toutes les lois fédérales doivent être interprétées comme maintenant les droits des peuples autochtones protégés par l’article 35.
Q 6 Une DND crée-t-elle une protection envers des droits ancestraux et des droits issus de traités différente de celle qui est conférée par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982? Autrement dit, les DND changent-elles la loi, ou sont-elles seulement symboliques?
- Une DND confirme que la loi est assujettie à l’application normale de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
- L’article 35 réitère que les droits ancestraux et issus de traités sont des droits garantis. Il s’agit d’une garantie constitutionnelle qui ne peut être modifiée par la législation.
- L’inclusion d’une DND dans la Loi d’interprétation permettra à tous ceux et celles qui interprètent les lois fédérales de se rappeler que ces dernières doivent être interprétées d’une manière qui est compatible avec les droits ancestraux et les droits issus de traités garantis par l’article 35.
- De plus, l’ajout d’une DND dans la Loi d’interprétation aidera à garantir que différentes lois seront interprétées de la même façon, c.-à-d. que les droits garantis par l’article 35 s’appliquent également à toutes les lois fédérales.Note de bas de page 1
Q 7 Les DND empêchent-elles les atteintes aux droits ancestraux et issus de traités?
- L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme les droits ancestraux et issus de traités au Canada, et les DND réitèrent que les lois doivent être interprétées conformément à l’application normale de l’article 35. Ainsi, s’il y a plus d’une façon d’interpréter une disposition donnée et que l’une de ces interprétations est compatible avec l’article 35, c’est cette dernière qui s’appliquera.
- Comme l’indique la Loi d’interprétation au paragraphe 3(1), ses dispositions s’appliquent à l’interprétation de toutes les lois, « sauf indication contraire ». La modification proposée enjoindrait donc aux fonctionnaires fédéraux, aux tribunaux et aux autres intervenants qui peuvent être appelés à interpréter et à appliquer les lois fédérales de le faire d’une façon qui maintient les droits ancestraux et les droits issus de traités protégés par la Constitution, sauf si le Parlement a clairement exprimé son intention que la loi soit interprétée autrement.
- Ainsi, si une loi donnée renfermait des dispositions qui, lorsqu’elles sont interprétées dans leur contexte et conformément aux objectifs de la loi, semblent porter atteinte aux droits des Autochtones, la DND que l’on propose d’ajouter à la Loi d’interprétation risquerait fortement d’être écartée.
- Toute atteinte devrait obligatoirement satisfaire au critère rigoureux établi par la Cour Suprême du Canada dans l’arrêt Sparrow. Le gouvernement pourrait encore, pour de justes raisons, porter atteinte à des droits protégés par l’article 35 s’il peut démontrer que ce critère juridique est satisfait et si une intention de porter atteinte à ces droits a été exprimée par le Parlement.
- Dans le renvoi de 2022 relatif à la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, la Cour d’appel du Québec a caractérisé la DND contenue dans cette Loi de la façon suivante :
[215] L’art. 2 de la Loi déclare que celle-ci maintient, sans y attenter, les droits reconnus et confirmés par l’art. 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Le Parlement n’entend donc pas que sa Loi limite les droits protégés par cette disposition ou les définisse de manière exhaustive (limitation qui serait de toute façon soumise au test établi dans l’arrêt Sparrow […]).
Q 8 En quoi le projet de loi S-13 est-il lié aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et aux appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées?
- Tant les appels à l’action que les appels à la justice préconisent la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (appels à l’action nos 43 et 44; appel à la justice 1.2v) de l’Enquête nationale sur les FFADA). Le projet de loi S-13 appuie les appels à l’action et les appels à la justice, car il représente une mesure précoce visant à assurer la compatibilité des lois fédérales avec la Déclaration des Nations Unies. Le projet de loi S-13 permet également de remplir un engagement pris dans le Plan d’action de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies en assurant la mise en œuvre de la mesure 2a) du chapitre « Priorités partagées » demandée par les partenaires autochtones.
- Le projet de loi S-13 s’applique aux droits de tous les Autochtones titulaires de droits en vertu de l’article 35, y compris au maintien des droits en vertu de l’article 35 des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA autochtones.
DND dans d’autres textes législatifs fédéraux
Q 9 Combien y a-t-il de DND dans les lois fédérales à l’heure actuelle? Qu’adviendrait-il de ces DND si le projet de loi S-13 était adopté?
- Une trentaine de lois fédérales contiennent des DND liées à l’article 35, et celles-ci sont formulées de plusieurs façons différentes.
- Si le projet de loi S-13 était adopté, la plupart des DND seraient abrogées, et la DND incluse dans la Loi d’interprétation s’appliquerait à toutes les lois, y compris celles dont les DND auraient été abrogées. Cela favoriserait une plus grande uniformité dans l’interprétation des lois fédérales.
- Dans le cadre du processus de consultation et de collaboration, les partenaires autochtones ont identifié les DND existantes qu’ils recommandent de conserver et celles qu’ils recommandent d’abroger.
- Si le projet de loi S-13 reçoit la sanction royale, 26 lois fédérales verront leur DND être abrogée.
- Les DND présentes dans les trois lois fédérales suivantes seraient conservées :
- Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie (la formulation de la DND contenue dans cette loi a été modifiée afin de l’harmoniser à celle de la DND contenue dans le projet de loi),
- Loi sur l’autonomie gouvernementale de la Nation shishalhe,
- Loi sur le gouvernement du territoire provisoire de Kanesatake.
Q 10 Pourquoi certaines DND seraient-elles conservées si l’objectif du projet de loi S-13 est de garantir une interprétation uniforme de toutes les lois fédérales?
- Même si le Sénat recommandait, dans son rapport de 2007, l’abrogation de toutes les DND existantes, depuis lors, des progrès ont été accomplis dans le renouvellement de la relation entre le gouvernement du Canada et les peuples autochtones, et les partenaires autochtones ont mentionné de façon générale qu’ils préféraient une approche plus ciblée.
- Il est apparu, lors du plus récent processus de consultation et de collaboration, qu’une majorité de partenaires autochtones appuie l’inclusion d’une DND dans la Loi d’interprétation. Cela dit, les partenaires autochtones s’entendent aussi généralement sur le fait que certaines des DND présentes dans les lois fédérales ont une incidence spécifique sur certains peuples autochtones et qu’il y a lieu de conserver ces DND si tel est le souhait de ces peuples autochtones. Il s’agit de l’opinion exprimée par la majorité des partenaires autochtones. Nous sommes en accord avec le principe exprimé et nous avons pris des mesures en conséquence.
- Certains des partenaires qui souhaitent conserver les DND présentes dans les lois qui les touchent directement se sont dits ouverts à l’idée d’en modifier le libellé afin de l’harmoniser à celui de la nouvelle DND ajoutée à la Loi d’interprétation. Le ministère de la Justice Canada a grandement apprécié cette approche fondée sur la collaboration.
Q 11 Pourquoi est-ce que seuls certains textes de loi contiennent actuellement des DND et pourquoi leurs libellés sont-ils différents?
- Par le passé, la question de l’inclusion d’une DND était généralement traitée selon une approche ad hoc. Les demandes d’inclusion d’une DND ou les débats sur sa formulation avaient souvent lieu à un stade tardif du processus législatif. En outre, après l’arrêt Sparrow, les DND ont commencé à être formulées d’une façon qui n’obtenait pas l’appui d’un certain nombre de gouvernements et d’organisations des Premières Nations.
- Même si la façon dont les DND ont été libellées à la suite de l’arrêt Sparrow visait à refléter l’application de l’article 35 conformément aux directives de la CSC, certains ont mis en doute l’intention du Canada à cet égard, y voyant une tentative potentielle de réduire les protections conférées par l’article 35.
- C’est la raison pour laquelle le ministère de la Justice Canada est heureux d’avoir eu l’occasion, ces dernières années, de travailler en collaboration avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis afin d’élaborer une unique DND qui guidera l’interprétation de toutes les lois fédérales dans l’avenir.
Q 12 Que se passera-t-il si une DND présente dans une loi fédérale est conservée même après l’ajout d’une DND à la Loi d’interprétation?
- Ces 40 dernières années, des DND ont été ajoutées à près de 30 lois fédérales. Si le projet de loi S-13 est adopté dans sa forme actuelle, la plupart de ces DND seront abrogées et la DND contenue dans la Loi d’interprétation fédérale s’appliquera à ces lois fédérales.
- Toutefois, quelques-unes des DND présentes dans les lois seront conservées, ce qui implique que ce sont ces DND qui s’appliqueront, et non la DND incluse dans la Loi d’interprétation.
- Cependant, les quelques DND qui seront conservées et la DND de la Loi d’interprétation serviront toutes le même objectif législatif – soit de confirmer les droits reconnus par l’article 35 – car leur libellé sera très similaire et l’intention du législateur sera la même dans tous les cas.
Q 13 Pourquoi avoir choisi d’abroger les DND existantes, plutôt que de les harmoniser?
- Il y a plusieurs avantages d’avoir qu’une seule DND dans la Loi d’interprétation, par opposition à plusieurs DND dans différentes lois.
- Premièrement, cela permettrait d’assurer une approche uniforme et éviterait aux peuples autochtones de devoir militer pour l’inclusion d’une DND dans chaque nouvelle loi (ou dans les lois existantes).
- Ensuite, le fait de ne pas abroger les DND actuellement présentes dans les lois – même si leur libellé était harmonisé – risquerait d’accroître la probabilité que les demandes ponctuelles d’ajout d’une DND dans des lois fédérales se multiplient à l’avenir, ce qui pourrait donner lieu à des débats soutenus sur leur libellé et, éventuellement, engendrer de la confusion si le libellé des DND en venait à nouveau à différer.
- Enfin, les partenaires autochtones ont indiqué qu’ils préféraient qu’une DND normalisée soit ajoutée dans la Loi d’interprétation et que toutes les autres DND soient abrogées, excepté dans les cas où des peuples autochtones plus directement touchés ont dit vouloir conserver la DND présente dans une loi donnée. C’est donc cette approche qui a été adoptée, et seules quelques DND seront conservées dans des circonstances exceptionnelles bien précises.
Q 14 Est-ce que les DND contenues dans des projets de loi actuellement à l’étude au Parlement devront être abrogées?
- Actuellement (en date du 12 septembre 2023), deux projets de loi d’initiative gouvernementale à l’étude au Parlement renferment des DND qui pourraient être abrogées, soit le projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada, et le projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu).
- Le projet de loi S-13 règle ce problème grâce à ses dispositions de coordination, qui permettent de résoudre les conflits entre deux ou plusieurs projets de loi. Dans le cas présent, les projets de loi C-35 et C-21 édicteraient de nouvelles DND alors que le projet de loi S-13 vise à abroger les dispositions de non-dérogation. Les dispositions de coordination du projet de loi S-13 prévoient que les DND contenues dans les projets de loi C-35 et C-21 seront abrogées si ces derniers reçoivent la sanction royale avant l’adoption du projet de loi S-13.
- Le projet de loi d’initiative gouvernementale C-49, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada – Terre-Neuve-et-Labrador et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada – Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois est également à l’étude au Parlement. Les modifications proposées visent, entre autres, à modifier le titre de la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada – Terre-Neuve-et-Labrador et de la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada – Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers.
- Le projet de loi S-13 renferme des dispositions de coordination tenant compte des modifications proposées dans le projet de loi C-49.
Q 15 Pourquoi n’y a-t-il pas de dispositions de coordination pour le projet de loi C-219 (art. 3), le projet de loi C-271 (art. 3) et le projet de loi S-241 (art. 17)?
- Les projets de loi C-219 et C-271 sont des projets de loi d’initiative parlementaire et le projet de loi S-241 est un projet de loi d’intérêt public émanant du Sénat. Ces types de projets de loi sont présentés par un député de la Chambre des communes ou par un sénateur, respectivement. Ils ne sont pas officiellement parrainés par le gouvernement, de sorte qu’ils ne font l’objet d’aucune disposition de coordination visant à en tenir compte. Pour cette raison, le projet de loi S-13 ne renferme actuellement aucune disposition de coordination se rapportant aux projets de loi C-219, C-271 et S-241. L’incidence de ces projets de loi pourra être prise en compte s’ils franchissent les prochaines étapes du processus parlementaire.
Q 16 Quelles interactions y a-t-il entre le projet de loi S-13 et la Loi sur les langues officielles?
- La DND qui serait ajoutée à la Loi d’interprétation s’appliquera à la Loi sur les langues officielles. Cela signifie que la Loi sur les langues officielles devrait être interprétée et appliquée de façon à maintenir les droits reconnus par l’article 35. La DND présente dans la Loi d’interprétation ne pourrait toutefois pas être invoquée pour créer de nouveaux droits ou pour autrement remplacer le libellé clair de la loi.
- La DND de la Loi d’interprétation et le paragraphe 83(1) de la Loi sur les langues officielles s’appliqueraient en parallèle. Il pourrait y avoir un certain chevauchement entre les deux en ce qui concerne la protection des droits relatifs aux langues autochtones, puisque la DND de la Loi d’interprétation vise à maintenir les droits reconnus par l’article 35 – lesquels peuvent être liés aux langues autochtones – et que le paragraphe 83(1) de la Loi sur les langues officielles empêche toute atteinte aux droits découlant de la loi ou de la coutume relatifs aux langues autochtones. Ces dispositions ne sont en rien contradictoires; elles se complètent.
Si une explication plus détaillée est demandée :
- La Loi sur les langues officielles contient la disposition suivante :
83 (1) La présente loi n’a pas pour effet de porter atteinte aux droits – antérieurs ou postérieurs à son entrée en vigueur et découlant de la loi ou de la coutume – des langues autres que le français et l’anglais, notamment des langues autochtones. - Il s’agit d’un exemple de disposition de non-dérogation visant des droits sensiblement différents de ceux confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Bien qu’elle puisse recouper dans une certaine mesure les droits relatifs aux langues reconnus par l’article 35, cette disposition protège un plus grand ensemble de droits linguistiques, y compris tout droit découlant de la loi relatifs aux langues autres que le français et l’anglais, ainsi que tout droit découlant de la coutume relatifs aux langues autres que le français et l’anglais. L’abrogation de cette disposition aurait des implications importantes qui iraient au-delà de la portée du projet de loi S-13.
Q 17 Pourquoi n’abrogez-vous pas la DND contenue dans la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes?
- La disposition en cause dans la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes est libellé comme suit :
6(2) La présente loi n’a pas pour effet d’abroger les droits du peuple indien ou de l’empêcher de négocier l’obtention d’avantages pour le pétrole et le gaz dans les régions où les revendications de terres n’ont pas été réglées. - L’objet de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes et les droits mentionnés dans cette disposition sont liés au régime établi par la Loi sur les Indiens.
- La version originale de cette disposition est antérieure à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, de sorte qu’elle ne renvoyait pas initialement aux droits reconnus par l’article 35. En 2009, la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes a été mise à jour et sa portée a été élargie à la suite de vastes consultations avec des représentants des Premières Nations dont les terres de réserve contiennent des quantités commerciales de pétrole et de gaz.
- La disposition énoncée au paragraphe 6(2) de la nouvelle Loi est identique à celle qui figurait dans l’ancienne Loi. Cette disposition porte sur les droits des Premières Nations et préserve leur capacité de négocier des ententes pétrolières et gazières. Cette capacité était importante à l’époque où le pouvoir des Premières Nations de négocier de telles ententes et l’autonomie nécessaire pour le faire n’étaient pas encore acquis.
- La nouvelle Loi maintient également l’obligation de consulter qui était prévue au paragraphe 6(1) de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes de 1974 : « Pour l’application de la présente loi, le ministre consulte en permanence les représentants des bandes indiennes les plus directement touchées ».
- La nouvelle DND proposée dans le projet de loi S-13 et celle qui figure au paragraphe 6(2) de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes sont complémentaires. La nouvelle DND pourrait également éclairer l’interprétation de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes.
- Il convient également de souligner que les partenaires autochtones ont identifié la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes comme l’une des lois qui pourraient bénéficier d’une éventuelle réforme. La disposition contenue dans la Loi pourrait être modifiée dans le cadre de cette réforme future.
Processus de consultation et de collaboration
Q 18 Quel était le processus de consultation et de collaboration relatif à l’initiative des DND?
- Le ministère de la Justice Canada a commencé par tenir des discussions préliminaires avec des partenaires autochtones clés qui avaient participé aux audiences du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ayant mené au rapport de 2007 sur la question des DND, intitulé Prendre au sérieux les droits confirmés à l’article 35 : Dispositions de non-dérogation visant les droits ancestraux et issus de traités.
- En décembre 2020, le ministère de la Justice Canada a lancé une plus vaste phase de consultation et de collaboration fondée sur les commentaires reçus lors des discussions préliminaires. Une lettre a été envoyée à près de 60 titulaires de droits autochtones et organisations représentant les Autochtones afin de les inviter à présenter des observations écrites sur l’initiative des DND et de leur donner la possibilité de participer aux discussions avec les fonctionnaires du Ministère. Ces rencontres se sont déroulées au début de 2021, et de nombreux partenaires autochtones ont transmis des observations écrites.
- En décembre 2021, après l’entrée en vigueur de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies, le ministère de la Justice Canada a lancé la phase suivante du processus de consultation et de collaboration relatif aux DND. Une lettre a été envoyée aux mêmes partenaires autochtones qui avaient été sollicités plus tôt dans l’année afin de les inviter à faire connaître leurs dernières réflexions sur l’initiative des DND ou à transmettre des commentaires complémentaires. Des rencontres avec les partenaires autochtones se sont déroulées tout au long de l’année 2022. Le ministère de la Justice Canada a également abordé la question des DND avec des partenaires autochtones lors de réunions relatives à la mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies.
- La dernière phase du processus de consultation et de collaboration a été lancée en 2023. Un avant-projet de loi a été publié sur le site Web du ministère de la Justice Canada du 1er mars au 14 avril 2023, et le Ministère a sollicité les commentaires des peuples autochtones. Cette approche nous a permis d’élargir le processus de consultation et de collaboration et d’optimiser la communication et la transparence avec les partenaires autochtones.
- À la fin de cette phase, l’avant-projet de loi a été retiré du site Web afin que le projet de loi officiel puisse être préparé, puis déposé. L’avant-projet de loi a été utilisé pour orienter la préparation et la formulation du projet de loi S-13. Le libellé de la DND proposée dans le projet de S-13 est identique à celui de la DND contenue dans l’avant-projet de loi. Le projet de loi est accessible au public sur le site LegisInfo à l’adresse https://www.parl.ca/LegisInfo/fr/projet-de-loi/44-1/s-13.
Q 19 Comment les partenaires autochtones ont-ils été sélectionnés et comment le ministère de la Justice est-il entré en contact avec eux?
- En 2020, des fonctionnaires du ministère de la Justice ont tenu des discussions préliminaires avec certains gouvernements et organisations signataires de traités modernes de même qu’avec des représentants de la Coalition pour les ententes sur les revendications territoriales (Land Claims Agreements Coalition – LCAC) et des partenaires inuits. Ces partenaires ont été sélectionnés en raison de leur participation déterminante aux audiences du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui ont précédé la publication, en 2007, du rapport sur les DND intitulé « Prendre au sérieux les droits confirmés à l’article 35 : Dispositions de non-dérogation visant les droits ancestraux et issus de traités ».
- Le 16 décembre 2020, le ministère de la Justice Canada a envoyé une lettre à près de 60 titulaires de droits autochtones et organisations représentatives pour les informer qu’il envisageait d’ajouter une DND à la Loi d’interprétation et d’abroger les DND présentes dans les lois fédérales existantes, et leur offrir la possibilité de présenter des observations, notamment sur le libellé éventuel de la DND.
- En 2022, des fonctionnaires du ministère de la Justice ont commencé à aborder l’initiative des DND de façon proactive avec les partenaires autochtones dans le cadre du processus de consultation et de collaboration relatif au Plan d’action de la LDNU, ce qui a permis de recueillir les points de vue d’un large éventail de partenaires autochtones sur la question des DND.
- Un avant-projet de loi a été publié sur le site Web du ministère de la Justice Canada du 1er mars au 14 avril 2023, dans le cadre de la dernière phase du processus de consultation et de collaboration. La diffusion à grande échelle du projet de loi visait à assurer une transparence accrue et à rejoindre un maximum de partenaires autochtones. Le site Web était public et invitait tous les Autochtones du Canada à transmettre leurs commentaires.
- La liste des partenaires autochtones qui ont participé au processus de consultation et de collaboration est incluse dans le Rapport sur ce que nous avons appris, qui peut être consulté sur le site Web du ministère de la Justice.
Q 20 Qu’avons-nous appris lors du processus de consultation et de collaboration?
- Le processus de consultation et de collaboration a révélé que la proposition d’ajouter à la Loi d’interprétation fédérale une DND visant à assurer le maintien des droits reconnus par l’article 35 bénéficiait d’un appui considérable.
- Les partenaires autochtones ont exprimé différents points de vue sur la question de savoir si la DND qui serait ajoutée dans la Loi d’interprétation fédérale devait faire référence aux « droits ancestraux et issus de traités » ou aux « droits des peuples autochtones ». Toutefois, bon nombre de partenaires autochtones préféraient l’expression « droits ancestraux et issus de traités », notamment parce que cette expression établit un lien clair avec les droits garantis par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Cela dit, de nombreux partenaires autochtones étaient favorables à l’utilisation de l’une ou l’autre des expressions, soulignant que la priorité était de faire adopter les modifications à la Loi d’interprétation fédérale, quelle que soit l’expression retenue.
- Certains partenaires autochtones ont proposé que la DND, à l’instar de la DND ajoutée à la Interpretation Act de la Colombie-Britannique, fasse référence à la fois aux « droits ancestraux et issus de traités » et aux « droits des peuples autochtones », et qu’une explication du terme « peuples autochtones » soit ajoutée au début de la loi. Ils voyaient l’utilisation des deux expressions comme une façon de reconnaître aussi bien les droits ancestraux et issus de traités protégés par la Constitution que les droits des peuples autochtones énoncés dans la Déclaration des Nations Unies. Il s’agit de l’approche qui a finalement été adoptée dans le projet de loi qui vous est présenté (voir la division 1).
- Nous avons appris que l’abrogation de l’ensemble des DND présentes dans les lois fédérales n’était pas l’approche souhaitée. Les partenaires autochtones étaient généralement d’avis que les DND contenues dans les lois fédérales qui ne concernent que certains partenaires autochtones devaient être conservées si tel était le souhait de ces partenaires. Il y avait effectivement des partenaires qui souhaitaient que ces DND soient conservées. Parmi eux, certains ont dit être ouverts à l’idée de modifier leur libellé pour l’harmoniser à celui de la nouvelle DND de la Loi d’interprétation.
- Afin de favoriser une interprétation judiciaire uniforme d’une loi à l’autre, les partenaires autochtones étaient généralement favorables à l’abrogation de toutes les autres DND que les partenaires autochtones ne souhaitaient pas particulièrement conserver. En outre, plusieurs partenaires autochtones étaient favorables à l’abrogation des DND dont le libellé n’était pas conforme à celui recommandé dans le rapport du Comité sénatorial.
- Les partenaires autochtones ont soulevé à plusieurs reprises la nécessité d’abroger les dispositions de non-dérogation faisant référence à la « protection » des droits ancestraux au titre de la Loi constitutionnelle de 1982. Les partenaires ont souligné que les DND qui expriment l’idée de ne pas porter atteinte à « la protection » des droits, plutôt qu’aux « droits » eux-mêmes, sont problématiques. Le paragraphe suivant est un exemple de formulation jugée problématique :
« Il est entendu que la présente loi ne porte pas atteinte à la protection des droits des peuples autochtones du Canada découlant de leur reconnaissance et de leur confirmation au titre de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. » - Le Canada reconnaît que l’objet d’une DND est de refléter la présomption selon laquelle les lois fédérales doivent être interprétées comme maintenant les droits reconnus et confirmés par l’article 35. Par conséquent, c’est la formulation préconisée par les peuples autochtones qui est utilisée dans le projet de loi S-13.
Q 21 Quelle a été l’incidence de l’entrée en vigueur, le 21 juin 2021, de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones?
- La Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (LDNU) impose une obligation de consultation et de collaboration relativement aux mesures à prendre pour assurer la compatibilité des lois avec la Déclaration (article 5 de la LDNU). La consultation et la collaboration nécessitent, entre autres, d’établir des relations de bonne foi, de travailler ensemble à l’atteinte d’un objectif commun dans le cadre d’un processus mené conjointement ou en collaboration et de respecter les relations avec les peuples autochtones. Cette exigence de la LDNU a été prise en compte dans le cadre du processus de consultation et de collaboration relatif à la DND.
Q 22 Y avait-il du financement disponible pour participer au processus de consultation et de collaboration relatif à la DND?
- Oui. Un financement a été offert afin de soutenir la participation des peuples autochtones au processus de consultation et de collaboration relatif à la mise en œuvre de la LDNU, dans le cadre duquel l’initiative de la DND a également été abordée. Grâce à ce processus, le ministère de la Justice Canada a pu recueillir les points de vue des partenaires autochtones sur l’ajout d’une DND à la Loi d’interprétation fédérale.
Q 23 Pourquoi le ministère de la Justice n’a-t-il pas consulté tout le monde (ou chaque Première Nation individuellement) dans le cadre du processus de consultation et de collaboration?
- Les fonctionnaires du ministère de la Justice ont mené, sur plusieurs années, un vaste processus de consultation et de collaboration en plusieurs phases qui prenait appui, entre autres, sur les travaux réalisés par le Comité sénatorial permanent.
- Outre les activités de consultation et de collaboration ciblées qui ont été menées auprès de plus de 60 partenaires autochtones, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont pris des mesures pour que le processus soit aussi large et inclusif que possible.
- Il s’agissait notamment de profiter des rencontres avec les partenaires autochtones concernant le Plan d’action de la LDNU pour rejoindre davantage de peuples autochtones au sujet de l’initiative relative à la DND.
- Au début de 2022, des renseignements généraux sur l’initiative législative relative à la DND ont également été publiés sur le site Web du ministère de la Justice Canada, accompagnés d’une adresse courriel accessible au public. Les fonctionnaires du ministère de la Justice ont assuré le suivi des messages envoyés à cette adresse courriel pendant toute la durée de l’initiative relative à la DND.
- Un avant-projet de loi a été publié sur le site Web du ministère de la Justice du 1er mars 2023 au 14 avril 2023 dans le cadre de la dernière étape du processus de consultation et de collaboration. La diffusion à grande échelle de l’avant-projet de loi visait à assurer une transparence accrue et à rejoindre un maximum de partenaires autochtones.
- Tous les peuples autochtones qui souhaitent contribuer à l’initiative relative à la DND peuvent encore faire part de leurs commentaires tout au long du processus parlementaire.
[Si l’on vous questionne sur la participation des Premières Nations]
- Les partenaires inuits et signataires de traités modernes ont été des partenaires clés dans le cadre de l’initiative de la DND. Leur participation remonte, en effet, au Rapport sénatorial de 2007. Ces partenaires comprennent plusieurs Premières Nations.
Q 24 Avez-vous obtenu le consentement préalable donné librement et en connaissance de cause des peuples autochtones relativement au présent projet de loi?
- À bien des égards, le projet de loi S-13 est le reflet d’un processus mené par les Autochtones, puisqu’il est l’aboutissement des revendications de longue date et du leadership des peuples autochtones, qui réclament cette modification depuis des décennies.
- Reconnaissant que ce projet de loi touche l’ensemble des peuples autochtones, et conscients des exigences de la LDNU en matière de consultation et de collaboration, ces trois dernières années, nous avons offert aux peuples autochtones plusieurs occasions de nous faire part de leurs commentaires et de leurs points de vue sur le projet.
- Nous croyons avoir réussi à répondre à presque toutes les préoccupations qui ont été soulevées jusqu’à maintenant et sommes d’avis que ce projet bénéficie d’un large appui parmi les peuples autochtones.
- Nous sommes cependant conscients que les avis ne sont pas unanimes et nous demeurerons à l’écoute de ceux et celles qui auraient d’autres points de vue à faire valoir dans le cadre du processus parlementaire.
Q 25 Ce processus établit-il un précédent dans la façon dont le Canada abordera la consultation et la collaboration à l’avenir?
- Conformément à l’article 5 de la LDNU, le gouvernement du Canada doit, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la Déclaration.
- L’article 5 ne prescrit pas la façon exacte dont le processus de consultation et de collaboration doit se dérouler.
- À la lumière d’avis internationaux concernant la Déclaration des Nations Unies et, plus particulièrement, le droit des peuples autochtones de participer aux processus décisionnels ayant une incidence sur leurs droits, le Canada interprète l’article 5 de la LDNU comme autorisant une certaine variation dans l’intensité des consultations et de la collaboration avec les peuples autochtones.
- En somme, plus les répercussions potentielles sur les droits et les intérêts des peuples autochtones sont importantes, plus les efforts de consultation et de collaboration devraient être vastes et soutenus.
- L’approche en matière de consultation et de collaboration adoptée aux fins de la présente initiative pourra servir d’inspiration pour d’autres initiatives législatives dans l’avenir. Il ne s’agit pas cependant du seul exemple dont nous disposons. En effet, de telles approches ont également été adoptées aux fins de l’élaboration de la Loi sur les langues autochtones et de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et sont utilisées dans le cadre des travaux relatifs à la santé des Autochtones et aux services de police autochtones qui sont en cours actuellement, entre autres. Les nouvelles initiatives devront être envisagées dans un contexte plus large, à la lumière des leçons apprises et des nouvelles pratiques exemplaires, afin de déterminer s’il y a lieu ou non d’avoir recours à une approche similaire.
Interpretation Act de la Colombie-Britannique et possibilité d’ajouter une disposition interprétative à la Loi d’interprétation fédérale
Q 26 Y a-t-il des similitudes entre la DND proposée dans le projet de loi S-13 et la DND qui a été ajoutée à l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique?
- Oui, il y a des similitudes entre la DND proposée dans le projet de loi S-13 et la DND qui a été ajoutée à l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique en 2021.
- La DND de la Colombie-Britannique confirme les obligations constitutionnelles du gouvernement provincial envers les peuples autochtones et s’applique à l’ensemble des lois et des règlements de la Colombie-Britannique. La DND qui a été ajoutée à l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique souligne l’importance de maintenir les droits reconnus par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Elle est libellée comme suit :
« For certainty, every enactment must be construed as upholding and not abrogating or derogating from the aboriginal and treaty rights of Indigenous peoples as recognized and affirmed by section 35 of the Constitution Act, 1982. »
[Traduction]
Il est entendu que tout texte de loi maintient les droits – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982; et qu’il n’y porte pas atteinte. - Cette modification répond à la demande des peuples autochtones de la Colombie-Britannique qui réclamaient depuis longtemps l’ajout d’une DND formulée de façon positive, et donne suite à un engagement pris dans l’ébauche du Plan d’action relatif à la Declaration on the Rights of Indigenous Peoples Act de la Colombie-Britannique.
Q 27 Pourquoi le projet de loi S-13 ne propose-t-il pas une disposition qui exigerait que les lois fédérales soient interprétées d’une manière compatible avec la Déclaration des Nations Unies, comme cela a été fait en Colombie-Britannique?
- Certains partenaires autochtones ont demandé qu’une disposition interprétative prévoyant le recours à la Déclaration des Nations Unies dans l’interprétation des textes de loi fédéraux soit élaborée, puis ajoutée à la Loi d’interprétation fédérale, comme cela a été fait dans l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique.
- Une disposition interprétative est différente d’une disposition de non-dérogation et servirait un objectif différent. La DND proposée dans le projet de loi S-13 renvoie aux droits reconnus par l’article 35, tandis qu’une disposition interprétative renverrait à la Déclaration des Nations Unies.
- Les modifications proposées dans le projet de loi S-13 répondent aux demandes des peuples autochtones qui réclament depuis longtemps qu’une DND soit ajoutée à la Loi d’interprétation afin d’assurer le maintien des droits reconnus par l’article 35.
- Afin de ne pas retarder l’initiative visant à ajouter une DND à la Loi d’interprétation et d’assurer la tenue d’un processus de consultation et de collaboration adéquat sur l’ajout éventuel d’une disposition interprétative en lien avec la Déclaration des Nations Unies, nous avons veillé à ce que le processus menant au dépôt du projet de loi S-13 demeure axé sur la DND liée à l’article 35.
- Le Plan d’action de la LDNU comprend un engagement à étudier la possibilité de modifier la Loi d’interprétation ou d’autres lois de façon à indiquer que la Déclaration des Nations Unies constitue une source d’interprétation des textes de loi fédéraux.
- Le ministère de la Justice Canada se réjouit à l’idée de collaborer avec les partenaires autochtones pour élaborer la disposition interprétative.
- Entretemps, nous soulignons que l’article 4 de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies confirme que la Déclaration des Nations Unies constitue un instrument international universel en matière de droits de la personne qui trouve application en droit canadien. Nous sommes d’avis que, lorsque l’article 4 est lu conjointement avec le préambule de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies, selon lequel « il y a lieu de confirmer que la Déclaration est une source d’interprétation du droit canadien », l’effet obtenu est similaire à celui de la disposition interprétative contenue dans l’Interpretation Act de la Colombie-Britannique. (À noter que le préambule de la Declaration on the Rights of Indigenous Peoples Act de la Colombie-Britannique ne contenait pas de disposition semblable à celle figurant dans la Loi sur la Déclaration fédérale.)
Autres dispositions de non-dérogation provinciales
Q 28 Les lois d’interprétation des autres provinces et territoires contiennent-elles des DND?
- Des DND sont présentes dans les lois d’interprétation de certaines provinces et de certains territoires, notamment la Colombie-Britannique et le Manitoba, et une DND est présente dans la Loi sur la législation du Nunavut.
Q 29 Y a-t-il eu des discussions avec les provinces et territoires?
- La sous-ministre de la Justice a fait le point sur l’initiative auprès des provinces et des territoires, y compris lors d’une séance d’information à l’occasion de la réunion des sous-ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la Justice et de la Sécurité publique, qui s’est tenue en février 2023.
- De plus, des fonctionnaires du ministère de la Justice ont organisé des discussions avec des représentants des gouvernements de la Colombie-Britannique, des Territoires du Nord-Ouest, du Yukon et de la Nouvelle-Écosse, ou ont reçu des commentaires de leur part.
- Bien que le gouvernement fédéral n’ait pas l’obligation légale de consulter les provinces ou les territoires – à l’exception du gouvernement du Yukon compte tenu des dispositions de la Loi sur le Yukon – des invitations à participer à des séances de discussion ont été envoyées à certaines provinces et à certains territoires signataires d’accords avec les peuples autochtones qui ont été par la suite mis en œuvre au moyen d’une loi et qui contiennent une DND.
- Des discussions ont également eu lieu avec la province de la Colombie-Britannique afin d’en savoir plus sur la DND qui a été ajoutée à l’Interpretation Act de cette province en 2021.
- Aucune des provinces et aucun des territoires n’ont soulevé de préoccupations importantes relativement à l’initiative de la DND proposée par le gouvernement fédéral.
Y a-t-il une différence entre les libellés français et anglais de la DND?
Q30 Y a-t-il une différence entre les libellés français et anglais de la DND? En particulier, est-ce que l’emploi du mot « maintient » véhicule le même sens que le mot « uphold » en anglais?
- Il est important de reconnaître que le ministère de la Justice Canada adopte l’approche selon laquelle les versions anglaise et française des lois ne se veulent pas des traductions littérales l’une de l’autre. Les versions anglaise et française des lois sont élaborées en parallèle; les lois ne sont pas rédigées dans une langue pour être ensuite traduites dans une autre de façon littérale. L’objectif n’est pas de simplement avoir un libellé équivalent, mais de produire le même résultat sur le plan juridique.
- La version française de la Loi d’interprétation est souvent bien plus directe que la version anglaise. La proposition de disposition de non-dérogation qui serait ajoutée à la Loi d’interprétation est en adéquation avec les formulations utilisées ailleurs dans la Loi. Bon nombre des dispositions de la version anglaise de la Loi d’interprétation contiennent le mot « construed » et sont passablement plus longues que dans la version française (p. ex. les articles 6, 11, 15(2)). L’ensemble de la Loi d’interprétation est rédigé dans ce style. Là encore, il en est ainsi parce que l’objectif est de produire le même résultat juridique dans les deux langues officielles, et non pas d’obtenir deux versions qui soient l’équivalent « mot pour mot » l’une de l’autre.
- L’emploi de l’expression « doit maintenir » en français, par exemple, ne cadrerait pas avec les temps de verbe utilisés ailleurs dans la Loi d’interprétation. De la même manière, le mot « doit » ne serait pas en phase avec le reste de la Loi d’interprétation et le résultat juridique serait moins prévisible.
- Le ministère de la Justice Canada est d’avis que les versions anglaise et française du projet de loi S-13 produisent le même résultat sur le plan juridique.
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