2. Questions et réponses
Le Droit de la mise en liberté provisoire au Canada
- Q1 Qu’est-ce que le principe de l’échelle?
- Q2 Que sont les conditions de mise en liberté provisoire et qui peut les imposer?
- Q3 Comment fonctionne le renversement du fardeau de la preuve lors de la mise en liberté provisoire?
- Q4 Peut-on changer la loi pour garantir que les délinquants violents n’obtiendront pas de mise en liberté provisoire?
- Q5 Le régime actuel de mise en liberté provisoire prévu par le Code criminel favorise-t-il la libération des personnes autochtones et/ou noires et/ou marginalisées accusées d’un délit violent?
- Q6 Qu’est-ce que le principe de la retenue et comment est-il censé s’appliquer?
- Q7 Pourquoi le principe de la retenue a-t-il été légiféré?
- Q8 Le principe de la retenue exige-t-il que les personnes accusées d’une infraction avec violence soient libérées?
- Q9 Quelles sont les différences entre les règles de mise en liberté provisoire du Code criminel et celles de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents?
Q1 Qu’est-ce que le principe de l’échelle?
- Le paragraphe 515(1) du Code criminel établit, pour la plupart des audiences sur le mise en liberté provisoire, une présomption selon laquelle un accusé devrait être libéré sans conditions, à moins que la Couronne ne puisse justifier pourquoi la détention ou une forme plus restrictive de mise en liberté est nécessaire.
- Le "principe de l’échelle" se trouve au paragraphe 515(2) du Code criminel. Elle fait référence aux formes de mise en liberté de plus en plus restrictives qu’un juge ou un juge de paix peut ordonner pour un accusé lorsqu’il accorde une mise en liberté sous caution. Par exemple, l’alinéa 515(2)e) est la forme de libération la plus restrictive, qui implique un dépôt obligatoire en espèces et une caution facultative dans certaines circonstances.
Q2 Que sont les conditions de mise en liberté provisoire et qui peut les imposer?
- Les conditions de mise en liberté provisoire peuvent être imposées par la police ou les tribunaux et doivent être respectées par un accusé lorsqu’il est libéré de sa détention en attendant son procès. Par exemple, un accusé peut être tenu de respecter un couvre-feu, de ne pas posséder d’armes et de ne pas communiquer avec une victime ou un témoin.
- Les conditions de mise en liberté provisoire doivent être appropriées et raisonnables. Si un accusé enfreint ses conditions de mise en liberté sous caution, il peut être accusé et reconnu coupable d’une nouvelle infraction criminelle en vertu de l’article 145 du Code criminel et pourrait être condamné à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans.
Q3 Comment fonctionne le renversement du fardeau de la preuve lors de la mise en liberté provisoire?
- Le renversement du fardeau de la preuve lors de la mise en liberté provisoire suppose que l’accusé devrait être détenu en attendant son procès et exige qu’il démontre pourquoi il devrait être libéré, compte tenu des motifs de détention prévus au paragraphe 515(10) du Code criminel (c.-à-d. le risque de fuite, la sécurité publique et la confiance dans l’administration de la justice).
- Un renversement du fardeau de la preuve ne signifie pas que l’accusé ne pourra pas obtenir de mise en liberté provisoire, ni qu’il devra réfuter la commission de l’infraction. Cela signifie que le fardeau de la preuve a été déplacé vers l’accusé, reflétant l’intention du Parlement selon laquelle il devrait être plus difficile d’obtenir une mise en liberté provisoire dans ces circonstances.
- Un renversement du fardeau de la preuve lors de la mise en liberté provisoire existe pour certaines situations, par exemple, lorsque l’accusé est inculpé de violation d’une condition de mise en liberté provisoire ou d’un acte criminel impliquant une arme à feu alors que l’accusé était sous le coup d’une ordonnance d’interdiction.
Q4 Peut-on changer la loi pour garantir que les délinquants violents n’obtiendront pas de mise en liberté provisoire?
- Toute loi qui doit être appliquée de manière discrétionnaire entraînera des situations imprévisibles. Nous ne pouvons pas légiférer pour éliminer tout risque, à moins de détenir tous les accusés tout le temps, ce qui ne serait pas conforme à la Charte des droits et libertés qui garantit aux accusés le droit de ne pas se voir refuser une mise en liberté provisoire raisonnable sans motif valable.
- Bien que la loi fournisse un cadre important, nous dépendons également de sa mise en œuvre efficace par les responsables de l’administration de la justice pour garantir qu’elle fonctionne comme le Parlement l’entend.
Q5 Le régime actuel de mise en liberté provisoire prévu par le Code criminel favorise-t-il la libération des personnes autochtones et/ou noires et/ou marginalisées accusées d’un délit violent?
- Non. En vertu de l’article 493.1, la police et les tribunaux sont tenus d’accorder la priorité à la libération de tous les accusés, lorsque cela est approprié et compatible avec les motifs de détention (en vertu des paragraphes 498(1.1) ou 515(10)).
- En vertu de l’article 493.2, la police et les tribunaux sont tenus de tenir compte de la situation particulière des accusés autochtones et des membres des populations vulnérables lorsqu’ils prennent une décision concernant la mise en liberté provisoire.
- Ces principes ne modifient pas la règle selon laquelle un accusé doit être détenu si la détention est jugée nécessaire pour la sécurité publique, pour assurer sa présence au tribunal ou pour maintenir la confiance dans l’administration de la justice.
- Ces principes rappellent aux responsables de l’application de notre régime de mise en liberté provisoire qu’ils doivent tenir compte d’un certain nombre de facteurs lorsqu’ils prennent une décision sur la mise en liberté provisoire.
Q6 Qu’est-ce que le principe de la retenue et comment est-il censé s’appliquer?
- Le "principe de retenue" en vertu de l’article 493.1 a pour but d’assurer que la libération à la première occasion est privilégiée par rapport à la détention, le cas échéant, et que seules les conditions de mise en liberté provisoire raisonnablement nécessaires sont imposées à un accusé. Le principe de retenue est un principe directeur et ne dicte pas un résultat précis.
- Ce principe ne modifie pas le fondement sur lequel une personne peut être détenue lors d’une audience de mise en liberté provisoire. Les motifs de détention mentionnés au paragraphe 498(1.1) pour la police et au paragraphe 515(10) pour les tribunaux continuent de s’appliquer, ce qui signifie qu’un accusé doit toujours être détenu si cela est nécessaire pour empêcher la fuite, pour la protection du public ou pour maintenir la confiance dans l’administration de la justice.
- Le principe de la retenue est intégré à la structure des dispositions actuelles sur la mise en liberté provisoire, qui remontent à la Loi sur la réforme du cautionnement de 1972. La Cour suprême du Canada a mandaté son application à de nombreuses reprises, notamment dans les arrêts St-Cloud (2015), Antic (2017), Myers (2019) et, plus récemment, Zora (2020).
Q7 Pourquoi le principe de la retenue a-t-il été légiféré?
- Lorsque l’ancien projet de loi C-75 a été déposé, des informations laissaient entendre que la police et les tribunaux imposaient régulièrement des conditions de mise en liberté provisoire qui n’étaient ni liées à l’infraction ni conformes aux principes de la mise en liberté provisoire. Les manquements mineurs aux conditions de la mise en liberté provisoire détournaient des ressources destinées à des infractions plus graves, avec des effets disproportionnés sur les personnes autochtones et les populations vulnérables. Ces enjeux ont été examinés en détail par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles dans son rapport exhaustif intitulé Justice différée, justice refusée de 2017.
- Le principe de la retenue répond directement à la recommandation 31 de ce rapport, qui demandait au ministre de la Justice de "donner la priorité à la réduction du nombre de personnes en détention préventive dans tout le Canada".
- Les réformes ont également codifié les principes de common law énoncés dans une série d’arrêts de la Cour suprême du Canada sur la liberté provisoire, notamment St-Cloud (2015), Antic (2017), Myers (2019) et plus récemment, Zora (2020).
Q8 Le principe de la retenue exige-t-il que les personnes accusées d’une infraction avec violence soient libérées?
- Non. Le principe de la retenue vise à guider la police et les tribunaux dans l’application des dispositions de la partie XVI (comparution obligatoire d’un prévenu et la mise en liberté provisoire) du Code criminel qui traitent de la mise en liberté provisoire, mais il n’exige pas la libération de toute personne, y compris les accusés appartenant à des populations autochtones ou vulnérables.
- Le principe ne modifie pas les motifs de détention qui existent actuellement en vertu du paragraphe 498(1.1) pour la police et du paragraphe 515(10) pour les tribunaux. Le principe de la retenue fait spécifiquement référence à ces motifs, et réaffirme que la détention continuera d’être nécessaire pour la sécurité publique, pour s’assurer que l’accusé se présente au tribunal, ou pour maintenir la confiance dans l’administration de la justice.
- Ce principe, ainsi que le principe exigeant que la police et les tribunaux tiennent compte de la situation d’un accusé autochtone ou d’un accusé issu d’une population vulnérable, vise à garantir qu’un éventail complet de considérations influe sur la décision de libérer ou non une personne sous caution.
Q9 Quelles sont les différences entre les règles de mise en liberté provisoire du Code criminel et celles de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents?
- La partie XVI (comparution obligatoire d’un prévenu et la mise en liberté provisoire) du Code criminel s’applique à la détention et à la mise en liberté des adolescents, sauf lorsque ces dispositions sont incompatibles avec la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) ou exclues par celle-ci.
- La LSJPA contient ses propres motifs de détention d’un adolescent aux articles 28 à 31. Les motifs de détention sous garde diffèrent de ceux que l’on trouve dans le Code criminel, et les conditions de l’ordonnance de mise en liberté qui peuvent être imposées à un adolescent en vertu des paragraphes 515(4) à (4.2) du Code criminel sont également définies par la LSJPA. L’article 30.1 de la LSJPA contient une période applicable plus courte pour un examen de la détention par rapport à l’article 525 du Code criminel.
- En outre, dans certains cas, lorsque certaines exigences sont satisfaites, un adolescent peut être placé sous la garde d’une personne responsable au lieu d’être détenu sous garde. La détention sous garde n’est pas autorisée en remplacement de mesures appropriées de protection de l’enfance, de santé mentale ou d’autres mesures sociales.
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