Expériences des parents séparés et divorcés des pensions alimentaires pour enfants et des questions connexes

Conclusion

La séparation est un moment difficile autant sur le plan émotif que financier. Elle peut avoir une incidence négative sur la capacité des gens à progresser dans leurs relations parentales après la séparation. L’absence de résolution quant à la pension alimentaire pour enfants peut entraver davantage l’adaptation émotionnelle et financière qu’exige la séparation.

La plupart des parents interviewés qui ont fini par recevoir une pension alimentaire pour enfants de l’autre parent ont dû attendre plusieurs mois, voire plusieurs années, de la date de la séparation, pour que le processus de paiement de la pension commence. D’habitude, il fallait attendre la présentation d’une demande officielle de pension alimentaire pour enfants auprès d’un tribunal.

La proportion de personnes qui ont dit ne pas recevoir une pension alimentaire pour enfants tout en y ayant droit est préoccupante. D’après le sondage et les entrevues qualitatives, environ 30 % des personnes déploraient le non-paiement d’une pension alimentaire pour enfants. Cette proportion concorde avec la recherche américaine selon laquelle, malgré les efforts déployés pour renforcer l’application des pensions alimentaires pour enfants au cours des dernières décennies, il y a une grande proportion de pensions alimentaires pour enfants qui ne sont pas payéesNote de bas de page27.

Les participants de la présente étude ont donné diverses explications pour cette proportion élevée de pension alimentaire pour enfants non versées : l’augmentation du temps parental partagé, l’augmentation du nombre d’autres parents qui ont un faible revenu (ou des revenus inférieurs à ceux du parent qui a la majorité du temps parental), et la décision de ne pas avoir recours aux tribunaux pour régler leurs différends.

L’une des conclusions de la présente étude est que les parents prennent parfois leurs propres arrangements sur le temps parental partagé sans avoir recours aux tribunaux et sans prévoir un calendrier de pension alimentaire pour enfants, car ils supposent que cette pension n’est pas requise ou qu’elle ne s’applique pas aux arrangements sur le temps parental partagé.

Une meilleure compréhension des facteurs associés au non-paiement de la pension alimentaire pour enfants et des problèmes liés à l’observation des paiements peut aider à renforcer les interventions et les services afin d’aider le mieux possible les familles à résoudre de tels différends.

Le lien entre la violence familiale et la pension alimentaire pour enfants fait souvent l’objet de discussions anecdotiques, mais il y a peu de recherches à ce sujet. La recherche actuelle a permis d’établir un lien à partir du petit échantillon de cas où il y avait eu de la violence familiale et les pensions alimentaires pour enfants n’avaient pas été versées. D’autres recherches sont nécessaires pour explorer les répercussions de la violence sur les questions relatives aux pensions alimentaires pour enfants. Enfin, nous rappelons la nécessité de conduire d’autres recherches pour déterminer comment offrir aux parents des moyens sûrs d’obtenir une pension alimentaire pour enfants en présence de violence familiale et dans les cas de victimes qui l’ont subie. Il reste à étudier comment fournir aux survivants des services de soutien à l’enfance en toute sécurité.

Limites

Comme dans d’autres études, les données recueillies sont limitées. La présente étude fait état de 224 sondages auprès de parents et de 34 entrevues de suivi auprès de personnes qui ont été recrutées volontairement au moyen de stratégies d’échantillonnage non aléatoires. Il n’y a pas de représentation nationale. L’échantillonnage est non aléatoire; et la taille de l’échantillon est petite. Par conséquent, il se peut que l’échantillon ne soit pas tout à fait représentatif de la diversité des parents après la séparation. En effet, l’échantillon provient de l’éducation des parents et des services de médiation, lorsque les parents avaient déjà franchi les premières étapes des services de justice familiale. Il serait important de suivre les participants au cours de leur différend pour mieux comprendre ce qui est utile et ce qui ne l’est pas. D’ailleurs, des parents qui se séparent et qui sont en mesure de négocier une pension alimentaire pour enfants après la séparation, soit avec l’aide d’un avocat, soit tous seuls, sans aller devant les tribunaux, peuvent avoir eu des expériences différentes.

De plus, les données concernant le revenu des participants n’ont pas été incluses. Il s’ensuit que la présente étude n’a pas examiné toutes les considérations financières (comme celles relatives aux participants qui peuvent ou ne peuvent pas se payer un avocat). Certains participants ont dit qu’ils n’avaient pas les moyens de se payer un avocat, tandis que d’autres ont dit avoir dépensé des centaines de milliers de dollars en frais juridiques.

La grande majorité des participants vivaient en Alberta. Il n’y a eu aucun sondage rempli en français. La présente recherche s’est servie d’un petit échantillon de parents, principalement de l’Alberta. L’étude a permis de soulever de nombreuses questions à explorer dans le cadre d’une étude plus approfondie, malgré les limites à sa généralisation aux parents de l’Alberta et d’autres provinces et territoires. À l’avenir, les recherches devraient cibler l’ensemble des provinces et des territoires pour explorer les questions relatives aux pensions alimentaires pour enfants à l’échelle du Canada. En effet, l’échantillon semble constituer davantage un instantané provincial qu’une analyse nationale des questions de pension alimentaire pour enfants.

Malgré ces limites, les résultats montrent que les participants connaissaient généralement les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants et leur application. Il est vrai que la plupart des participants ont utilisé ces lignes directrices pour déterminer le montant de la pension alimentaire pour enfants et les dépenses visées à l’article 7, mais il y a eu aussi de nombreuses variations dans l’application des lignes directrices en fonction des circonstances propres à chaque cas. Plusieurs participants ont exprimé leur frustration à l’égard du soutien à l’exécution et à la conformité.

Recherche future

La pension alimentaire pour enfants est généralement considérée comme une question d’ordre juridique. Compte tenu de l’effusion émotionnelle des participants au sujet de leur expérience des difficultés liées à la pension alimentaire pour enfants, il est important que les recherches futures considèrent les conflits liés à la pension alimentaire pour enfants comme un facteur important lorsqu’elles tiennent compte de l’exploitation financière, du stress financier et de l’adaptation en général après la séparation. Les problèmes relatifs aux pensions alimentaires pour enfants sont une porte d’entrée qui permet d’aller au cœur du conflit. Ils permettent une évaluation et une intervention dans les cas qui portent sur la violence familiale, un conflit intense, des relations parent-enfant et des arrangements sur le plan parental. Une telle recherche devrait consister à permettre aux parents de parler directement de leurs expériences avec les pensions alimentaires pour enfants. En effet, il s’agit d’une façon de comprendre la complexité de la famille et d’appuyer la conception de politiques à l’avenir.

Compte tenu des taux élevés de pensions alimentaires pour enfants non payées relevés dans la présente étude, les recherches futures devraient explorer des interventions qui peuvent le mieux sensibiliser les gens aux obligations alimentaires à l’égard de l’enfant, améliorer les attitudes à l’égard du paiement des pensions alimentaires pour enfants et réduire les problèmes de conformité.

D’autres recherches sont nécessaires pour mieux comprendre la répartition des dépenses spéciales dans les arrangements parentaux et le pouvoir décisionnel. La présente étude a relevé que, bien que de nombreux parents aient été en mesure de créer des programmes de paiement pour les dépenses spéciales qui sont proportionnels à leur revenu et à leur temps parental, il existe des exemples de différends au sujet d’éléments qui pourraient et devraient être couverts comme dépenses spéciales. Certains éléments semblaient alimenter plus de conflits que d’autres, notamment les décisions concernant la garde d’enfants et les activités extrascolaires. Les autres sources de dépenses n’étaient pas souvent mentionnées, mais elles ont créé d’autres conflits si elles faisaient l’objet de disputes. Il s’agit notamment des soins orthodontiques, des services thérapeutiques pour enfants et des camps d’été. Il serait utile que la recherche fournisse plus d’instructions qui aident à résoudre les problèmes susmentionnés.

De nouvelles recherches sont nécessaires pour comprendre les arrangements sur le temps parental partagé et la façon dont la pension alimentaire pour enfants entre en ligne de compte dans les décisions. Dans une situation où le temps parental partagé devient plus courant pour les familles qui se séparent et recherchent des arrangements parentaux idéaux, il subsiste des controverses et des débats sur le type d’arrangements parentaux qui convient le mieux à chaque enfant. Selon les recherches actuelles, la pension alimentaire pour enfants est l’un des facteurs qui peuvent jouer un rôle important dans la prise de décisions à cet égard, considérations qui ne se concentrent pas nécessairement sur l’intérêt supérieur de l’enfant.