Précis des faits

Surreprésentation des Autochtones dans le système de justice pénale

Novembre 2024

Les Autochtones continuent d’être surreprésentés dans le système de justice pénale canadien, que ce soit en tant que victimes ou accusées d’un crime. La présente fiche de renseignements présente un aperçu statistique des principaux domaines dans lesquels les Autochtones sont surreprésentés à différentes étapes du système de justice pénale.

Quoique la collecte de données nationales sur l’identité autochtone des personnes ayant des démêlés avec le système de justice pénale s’est améliorée au fil du temps, les données demeurent limitées en ce qui concerne la ventilation fondée sur les distinctions (c.-à-d. les Premières Nations, les Inuits et les Métis).

La présente fiche d’information résume les données disponibles provenant de diverses sources, y compris Statistique Canada (c.-à-d. l’Enquête sociale générale (l’ESG) sur la sécurité des Canadiens (victimisation)Note de bas de page 1, l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés (l’ESEPP), l’Enquête sur les homicides ainsi que les enquêtes sur les services correctionnels), le Sondage national sur la justice (le SNJ) du ministère de la Justice du Canada, Sécurité publique Canada ainsi que le Bureau de l’enquêteur correctionnel (le BEC).

Remarque : Malgré que le présent Précis des faits donne un aperçu statistique de la surreprésentation des Autochtones dans le système de justice pénale canadien, il est essentiel d’examiner des renseignements contextuels sur l’histoire des peuples autochtones, leurs différences culturelles ainsi que leur expérience de la discrimination systémique et de la marginalisation socioéconomique afin de mieux comprendre les données présentées. Le Tableau de bord sur l’état du système de justice pénale du ministère de la Justice du Canada, qui présente des données ainsi que des renseignements contextuels par l’intermédiaire d’une thématique axée sur la population autochtone, est accessible en ligne à l’adresse suivante : https://www.justice.gc.ca/socjs-esjp/fr/ind-aut/lm-sp.

La confiance à l’égard de la police est plus faible chez les Autochtones que chez les non-Autochtones.

Selon l’ESG de 2019, la perception des Autochtones à l’égard du rendement de la police est généralement similaire à celle des non-Autochtones, à l’exception de leur capacité à faire respecter les lois, au sujet de laquelle la perception des Premières Nations est moins favorable que celle des non-Autochtones (36 % et 47 %, respectivement). En outre, les Autochtones (30 %) étaient moins susceptibles de dire qu’ils avaient une grande confiance en la police que les non-Autochtones (42 %)Note de bas de page 2. Le plus faible niveau de confiance à l’égard de la police a été observé chez les Premières Nations, dont seulement 27 % des répondants ont déclaré avoir une grande confiance en la police, suivie par les Métis (32 %)Note de bas de page 3. Des résultats semblables sont consignés dans le Sondage national sur la justice de 2023, selon lequel les Autochtones sont plus susceptibles de déclarer ne pas être confiants que le système de justice pénale est équitable (11 %) et accessible (16 %) pour toutes les personnes que les Blancs (17 % et 23 %, respectivement)Note de bas de page 4.

Les Autochtones sont surreprésentés parmi les victimes d’incidents violents.

Selon l’ESG de 2019, le taux de victimisation avec violence chez les Autochtones âgés de 15 ans et plus était plus du double de celui observé chez les non-Autochtones (177 incidents violents pour 1 000 personnes contre 80 incidents violents pour 1 000 personnes, respectivementNote de bas de page 5). Cette différence s’expliquait principalement par les taux nettement plus élevés chez les Inuits (265E pour 1 000)Note de bas de page 6 et les Métis (225 incidents violents pour 1 000 personnes).

Selon l’ESEPP de 2018, ce sont les femmes autochtones qui sont le plus à risque d’être victimes de violences au cours de leur vie (c’est-à-dire depuis l’âge de 15 ansNote de bas de page 7)Note de bas de page 8. En particulier, 63 % des femmes autochtones ont été victimes de violence physique ou sexuelle au cours de leur vie. En outre, les femmes des Premières Nations (64 %) et des Métisses (65 %) étaient plus susceptibles de déclarer avoir été victimes de violences physiques ou sexuelles que les femmes inuites (45 %) et les femmes non autochtones (45 %).

Bien qu’il n’y ait pas de différence importante sur le plan statistique dans le taux de victimisation violente chez les jeunes autochtones et non autochtones selon l’ESG de 2019, la recherche montre que les personnes plus jeunes sont davantage susceptibles de faire l’objet de victimisation avec violenceNote de bas de page 9.

Remarque : Bien que les mauvais traitements subis pendant l’enfance, la consommation de drogues et l’itinérance sont associés à un risque accru de victimisation avec violence indépendamment de l’identité autochtone, les Autochtones sont davantage susceptibles de signaler ces facteurs et présentent des taux accrus de victimisation avec violenceNote de bas de page 10. Cette prévalence accrue de facteurs de risque est enracinée dans la violence et les traumatismes historiques et continus résultant de la colonisation, des pensionnats et d’autres facteurs touchant les AutochtonesNote de bas de page 11.

Les Autochtones sont surreprésentés comme victimes et personnes accusées d’homicide.

Même si les Autochtones ne constituent que 5 % de la population canadienneNote de bas de page 12, ils représentaient 25 % de toutes les victimes d’homicides en 2023Note de bas de page 13. Sur les 193 victimes autochtones d’homicide signalées par la police cette année-là, 141 étaient des hommes (73 %) et 50 des femmes (26 %). En 2023, le taux d’homicides était près de six fois plus élevé chez les Autochtones que chez les non-Autochtones (9,31 victimes pour 100 000 personnes par rapport à 1,46 pour 100 000 pour les non-Autochtones)Note de bas de page 14. Le taux d’homicide enregistré chez les femmes autochtones (4,60 victimes pour 100 000 femmes autochtones en 2021, 5,26 victimes en 2022 et 4,74 victimes en 2023) ainsi que chez les hommes autochtones (15,13 victimes pour 100 000 hommes autochtones en 2021, 17,27 victimes en 2022 et 13,85 victimes en 2023) ont fluctué d’une année à l’autre, les hommes affichant systématiquement un taux plus élevé.

Comme les années précédentes, un tiers (33 %) des personnes accusées d’homicide en 2023 ont été identifiées par la police comme étant des AutochtonesNote de bas de page 15. Le taux d’accusations chez les Autochtones (9,60 pour 100 000 Autochtones) était neuf fois plus élevé que celui observé chez les non-Autochtones (0,98 pour 100 000 non-Autochtones)Note de bas de page 16. En 2023, le taux d’accusations d’homicide chez les hommes autochtones (15,22 pour 100 000 hommes autochtones) était près de neuf fois plus élevé que celui observé chez les hommes non autochtones (1,80 pour 100 000 hommes non-autochtones)Note de bas de page 17. En outre, le taux d’accusations d’homicide chez les femmes autochtones (4,17 pour 100 000 femmes autochtones) était un peu plus de 26 fois supérieur à celui observé chez les femmes non autochtones (0,16 pour 100 000 femmes non autochtones).

Les Autochtones sont surreprésentés en tant qu’accusés devant les tribunaux de juridiction criminelle et subissent des conséquences négatives disproportionnées.

À l’heure actuelle, les tribunaux canadiens de juridiction criminelle ne recueillent pas de renseignements sur l’identité autochtone des accusés. Dans le but de combler cette lacune, le ministère de la Justice du Canada a collaboré avec Statistique Canada afin de recueillir l’identité autochtone des accusés dans le cadre d’un projet de couplage de donnéesNote de bas de page 18. Dans cette étude, on a estimé qu’en 2015-2016, les Autochtones représentaient 25 % de tous les accusés (adultes et jeunes), alors qu’ils comptaient pour seulement 5 % de la population canadienne, ce qui signifie qu’ils étaient surreprésentés par un facteur de cinq.

Entre 2005-2006 et 2015-2016, les accusés autochtones, par rapport aux accusés blancsNote de bas de page 19, étaient en moyenne plus susceptibles d’être déclarés coupables (+14 %), moins susceptibles d’être acquittés (-33 %), plus susceptibles de faire l’objet d’un arrêt des procédures (+47 %), et moins susceptibles de faire l’objet d’un retrait, d’un rejet ou d’une libération (-55 %)Note de bas de page 20. Après avoir été reconnus coupables et condamnés, les accusés autochtones étaient en moyenne davantage susceptibles de se voir infliger des peines plus sévères comme des peines d’emprisonnement (+30 %) ou des peines d’emprisonnement avec sursis (+11 %), et moins susceptibles d’obtenir une probation (-13 %) ou de recevoir une amende (-14 %).

Les adultes et les jeunes autochtones, notamment les femmes, sont surreprésentés dans les services correctionnels provinciaux et territoriaux.

En 2022-2023, les adultes autochtones représentaient 30 % des admissions dans les services correctionnels provinciaux et territoriauxNote de bas de page 21 alors qu’ils comptaient pour seulement 4 % de la population adulte au Canada en 2021Note de bas de page 22. Cette surreprésentation était légèrement plus prononcée en ce qui concerne les admissions en détention (30 %)Note de bas de page 23 que les admissions en surveillance au sein de la collectivité (27 %)Note de bas de page 24. Quoique tous les groupes d’autochtones sont surreprésentés dans les services correctionnels provinciaux et territoriaux, ce phénomène est plus prononcé chez les femmes autochtones. En 2020-2021, les Autochtones adultes de sexe féminin représentaient 42 % des admissions des femmes en détention, tandis que les Autochtones adultes de sexe masculin représentaient 30 % des admissions des hommes en détentionNote de bas de page 25.

En 2022-2023, les jeunes autochtones représentaient 40 % des jeunes admis au sein des services correctionnels provinciaux et territoriaux même s’ils comptaient pour seulement 8 %Note de bas de page 26 de la population de jeunes canadiensNote de bas de page 27. De même que pour les adultes, la surreprésentation des jeunes autochtones était plus marquée dans les admissions en détention (46 %) que dans les admissions en surveillance au sein de la collectivité (37 %) dans les provinces et territoires déclarantsNote de bas de page 28. De plus, la surreprésentation était davantage prononcée chez les jeunes autochtones de sexe féminin, qui représentaient 55 % des admissions de jeunes de sexe féminin en détention en 2022-2023 (51 % pour la détention avant procès, 70 % pour les placements sous garde en milieu fermé, 76 % pour les placements sous garde en milieu ouvert et 95 % pour les détentions provisoires sous l’autorité du directeur provincial), tandis que les jeunes autochtones de sexe masculin représentaient 44 % des admissions de jeunes de sexe masculin en détention (43 % pour la détention avant procès, 45 % pour les placements sous garde en milieu fermé, 53 % pour les placements sous garde en milieu ouvert et 73 % pour les détentions provisoires sous l’autorité du directeur provincial)Note de bas de page 29.

Les adultes autochtones, notamment les femmes, sont surreprésentés dans les établissements correctionnels fédéraux.

En 2022-2023, les adultes autochtones représentaient 33 % des admissions dans les établissements de détention fédérauxNote de bas de page 30. En particulier, les femmes autochtones représentaient 49 % des femmes admises, tandis que les hommes autochtones représentaient 32 % des hommes admis.

Entre 2018-2019 et 2022-2023, le nombre d’adultes autochtones dans la population de délinquants sous responsabilité fédérale a augmenté de 4,5 %Note de bas de page 31. En outre, en 2022-2023, 29 % des délinquants sous responsabilité fédérale se sont identifiés comme Autochtones. De ce nombre, 69 % étaient membres des Premières Nations, 28 % des Métis et 3 % des Inuits.

Le pourcentage de femmes autochtones détenues par les autorités fédérales a augmenté au fil des ans. Pour la première fois, en avril 2022, exactement la moitié des 596 femmes incarcérées dans des établissements fédéraux étaient autochtones (298)Note de bas de page 32.

En plus d’être surreprésentés, les délinquants autochtones sous responsabilité fédérale sont confrontés à des conditions de détention plus difficiles.

En 2021-2022, le pourcentage des délinquants autochtones ayant reçu la cote de sécurité minimale est plus faible (15 %), alors qu’il est plus élevé pour la cote de sécurité moyenne (69 %) et de sécurité maximale (16 %) comparativement aux délinquants non autochtones sous responsabilité fédérale (22 %, 65 % et 13 %, respectivement)Note de bas de page 33.

Entre le 1er avril 2019 et le 30 novembre 2019, les délinquants autochtones sous responsabilité fédérale représentaient 40 % de toutes les admissions en isolement préventifNote de bas de page 34, alors qu’ils ne représentaient que 30 % des délinquants en détention à l’époqueNote de bas de page 35. En novembre 2019, après l’élimination de l’isolement préventif, des Unités d’intervention structurée (UIS)Note de bas de page 36 ont été mises en place. En mars 2022, 49 % des personnes placées dans une UIS se sont identifiées autochtonesNote de bas de page 37.

Entre avril 2015 et octobre 2020, les délinquants autochtones sous responsabilité fédérale représentaient 39 % de toutes les personnes impliquées dans des incidents de recours à la forceNote de bas de page 38 malgré le fait qu’ils comptaient pour seulement 28 % de la population carcérale pendant cette même périodeNote de bas de page 39. Bien que les femmes représentaient 5 % de toutes les personnes impliquées dans des incidents de recours à la force, les femmes noires, autochtones et de couleur comptaient pour 67 % de toutes les femmes impliquées dans de tels incidents, ce qui s’explique en grande partie par le nombre élevé de femmes autochtones incarcéréesNote de bas de page 40. En moyenne, les femmes autochtones représentaient 60 % de toutes les femmes impliquées dans des incidents de recours à la force, alors qu’elles ne représentaient qu’environ 40 % des femmes incarcérées dans des établissements fédéraux au cours des cinq dernières annéesNote de bas de page 41.

Les délinquants autochtones subissent des conséquences négatives disproportionnées lors des audiences de libération conditionnelle.

En 2021-2022, les taux de semi-libertéNote de bas de page 42 et de libération conditionnelle totaleNote de bas de page 43 accordés aux délinquants autochtones (72 % et 21 %, respectivement) étaient inférieurs à ceux des délinquants non autochtones (77 % et 33 %, respectivement); une tendance qui s’est maintenue au cours des dix dernières annéesNote de bas de page 44. Ainsi, un plus grand pourcentage des libérations de délinquants autochtones sous responsabilité fédérale étaient des libérations d’office (76 %)Note de bas de page 45 comparativement aux libérations de délinquants non autochtones sous responsabilité fédérale (57 %)Note de bas de page 46.

En 2021-2022, les délinquants autochtones ont également purgé une plus grande proportion de leur peine avant d’obtenir leur première mise en semi-liberté et leur première libération conditionnelle totale (42 % et 48 % de leur peine, respectivement) que les délinquants non autochtones (37 % et 45 %, respectivement).