Séparation et divorce très conflictuels : options à examiner

2004-FCY-1F

4.  LE DIVORCE TRÈS CONFLICTUEL : THÉORIE ET MARQUES EXTÉRIEURES

4.1  THÉORIE

Kressel et coll. (1980), qui ont analysé neuf cas de recours à la médiation, ont discerné quatre modèles distincts selon lesquels les couples décident de divorcer, à savoir : le modèle enchevêtré, le modèle autiste, le modèle du conflit direct et le modèle du conflit marqué par un certain désengagement. La classification était basée sur trois dimensions intimement liées : le degré d’ambivalence à l’égard de la relation, la fréquence et la transparence des communications sur un éventuel divorce et le degré de visibilité du conflit à l’origine de la décision. Les niveaux extrêmement élevés de conflit, la communication et l’ambivalence à propos de la décision de divorcer caractérisaient le modèle enchevêtré. Les parties avaient débattu, souvent amèrement, le pour et le contre du divorce, convenu de divorcer, puis changé d’idée. Elles étaient incapables de « laisser aller ». Souvent, elles ont eu recours aux services de médiation avec de sérieuses réserves et amorcé le processus à contrecœur.

Le modèle autiste était caractérisé par l’absence de communications et un conflit patent à propos d’un éventuel divorce. Le modèle du conflit direct était caractérisé par des niveaux relativement élevés de conflit patent (mais pas aussi intense que pour les couples du modèle enchevêtré) et par des communications fréquentes et ouvertes à propos d’un éventuel divorce. Un faible niveau d’ambivalence à l’idée de mettre fin au mariage caractérisait le modèle du conflit marqué par un certain désengagement. Les auteurs ont affirmé que la médiation pourrait donner de bons résultats pour les couples du modèle du conflit direct et de celui marqué par un certain désengagement. Pour ces deux types de couples, les buts concordaient en général : parvenir à un règlement équitable. C’était moins heureux pour les types correspondant au modèle enchevêtré et au modèle autiste parce qu’il semblait y avoir divergence fondamentale entre les participants.

L’une des plus éminentes spécialistes de la question des divorces très conflictuels est Janet R. Johnston. Dans un ouvrage publié conjointement avec Linda Campbell et intitulé Impasses of Divorce, elle examine les conflits pour un groupe de 80 familles californiennes en instance de divorce qui n’avaient pu parvenir à une entente ou qui se disputaient encore même après avoir conclu un accord de médiation ou obtenu une ordonnance du tribunal (Johnston et Campbell, 1988). Les deux tiers des familles étaient engagées dans un litige à propos de la garde et du droit de visite, tandis que les autres ne s’entendaient pas sur les visites. Pour la plupart, ces parents éprouvaient une profonde méfiance ou étaient sans cesse mal à l’aise devant la capacité de l’autre parent à prendre soin de l’enfant. Ils se plaignaient aussi du fait que l’autre parent refusait d’écouter, de parler, de faire des plans ou de coordonner les projets concernant les enfants. Bon nombre accusaient leur ex-conjoint de négligence. Six cas comportaient de graves allégations d’atteinte à la pudeur ou de sévices physiques.

Les auteures ont analysé la tournure des querelles entre les parties. Toutes les familles étaient engagées dans un litige parce qu’elles avaient suivi la recommandation du médiateur ou du juge. En dehors du tribunal, le conflit prenait diverses formes, depuis la résistance au règlement des questions de divorce, la crainte et l’évitement de l’autre — avec refus de communiquer, méfiance personnelle et amère acrimonie — jusqu’à la confrontation avec colère, y compris les menaces et la violence explosive. Au cours des douze mois précédents, les trois quarts des parents avaient commis une agression physique, d’après l’échelle Strauss des tactiques de règlement des différends. Plus des quatre cinquièmes avaient été violents dans le passé. En moyenne, les parents s’étaient agressés physiquement l’un l’autre une fois par mois et leurs enfants avaient assisté aux deux tiers de ces épisodes. Cependant, la forme de conflit actif la plus courante était la violence verbale : insultes, rabaissement de l’autre, échanges avilissants, en moyenne une fois par semaine, souvent au téléphone ou au moment du transfert de l’enfant d’un domicile à l’autre. Moins du tiers des familles s’étaient séparées dans les douze mois précédents et près de la moitié, depuis plus de deux ans. Précisons que 29 p. 100 seulement avaient pu obtenir un jugement de divorce. S’étantdemandé pourquoi ces parents ne pouvaient régler leurs différends et faire des plans pour assurer une certaine stabilité à leurs enfants après le divorce, les auteures ont élaboré le concept de l’impasse divorce-transition. L’incapacité de résoudre les différends est considérée comme symptomatique de la résistance de la famille au changement. Dans les cas de désaccord chronique, la trajectoire normale du changement et du rétablissement est contrecarrée. « Les parents sont incapables de profiter du divorce pour résoudre des questions dans leur for intérieur ou entre eux et s’éternisent dans la transition. En fait, la forme du différend à propos de la garde devient leur nouveau modèle de relation » (Johnston et Campbell, 1998 : 7-12). [Traduction]

Ces impasses se créent à trois niveaux : le niveau externe, le niveau interactionnel et le niveau intrapsychique ou interne. Au niveau externe, le conflit peut être alimenté par d’autres personnes influentes (membres de la famille élargie, nouveaux partenaires ou professionnels aidants) qui ont formé une coalition ou une alliance avec les parties en voie de divorcer et légitimé leurs revendications. Au niveau interactionnel, le conflit peut être la continuation d’une relation conflictuelle ou le produit d’une séparation traumatisante ou ambivalente des parents. Au niveau intrapsychique, les conflits peuvent servir à gérer les sentiments intolérables suscités par le divorce (humiliation, tristesse, état de détresse et culpabilité) chez les parents psychologiquement vulnérables (Johnston et Campbell, 1988 : 12; Johnston et Roseby, 1997 : 5‑22).

Les auteures ont élaboré une autre forme d’approche misant sur la médiation afin d’aider ces familles aux prises avec de graves conflits, en combinant la thérapie et le counselling pour contrer le désir de lutte des parents et les conseiller sur les besoins de leurs enfants :

Bien qu’un certain nombre de médiateurs aient reconnu la nécessité d’offrir des cours, du counselling et une thérapie aux familles qui vivent de graves conflits, avant de passer à la médiation, tous ont souligné que ces mesures devraient être prises dans un cadre distinct, hors des véritables négociations. Nous ne sommes pas d’accord et considérons le counselling et la négociation d’un règlement, pour les familles aux prises avec de tels conflits, comme les phases d’un même processus. La compréhension de l’impasse, de la personnalité des parents et des besoins des enfants, acquise à l’étape du counselling, est très précieuse pour choisir les stratégies de négociation et préparer l’entente comme telle. Par ailleurs, si le conseiller-médiateur est le même dans les deux étapes, il est plus facile de coordonner et d’accélérer le processus (Johnston et Campbell, 1988 : 198-199). [Traduction]

Johnston (1994) a expliqué que, dans un divorce, le conflit a trois dimensions : le domaine, les tactiques et l’attitude. La dimension du domaine correspond aux désaccords sur les questions à résoudre, notamment le soutien financier, le partage des biens, la garde des enfants et le droit de visite. La dimension des tactiques est la manière dont les couples qui divorcent essaient de résoudre officieusement leurs désaccords en s’évitant mutuellement et en éludant les questions ou en recourant au raisonnement verbal, à l’agression verbale, à la contrainte physique et à l’agression physique. Elle peut aussi concerner la manière dont les différends se règlent habituellement par la négociation entre avocats, la médiation, les poursuites ou l’arbitrage par un juge. La dimension de l’attitude a trait au degré des sentiments émotionnels négatifs ou d’hostilité que s’expriment mutuellement les parties, de manière dissimulée ou ouverte. Le problème de la mesure de l’incidence du conflit est davantage compliqué par le fait que l’une des parties peut percevoir un domaine particulier de conflit, mais pas l’autre. La durée et le développement de chaque forme de conflit dépendent des caractéristiques de celui-ci (s’il est normal ou pathologique). Par exemple, les niveaux élevés de conflit observés dans la plupart des divorces sont relativement courants au moment de la séparation et de la présentation de la requête en divorce et jusqu’à ce que le jugement définitif soit rendu. Par ailleurs, les différends ultérieurs au jugement de divorce sont parfois considérés comme insolubles et signes d’un dysfonctionnement personnel et familial préexistant.

L’une des études examinées par Johnston (1994) est celle de Maccoby et Mnookin (1992) mené auprès de 1124 familles et de 1875 enfants recrutés à partir des requêtes en divorce de deux comtés de la Californie. Ces chercheurs ont entre autres analysé le nombre de litiges en justice à propos de la garde et du droit de visite. Ils ont estimé que 10 p. 100 des familles étaient engagées dans un conflit judiciaire important et 15 p. 100, dans un conflit judiciaire plus intense. Ils ont répertorié trois modèles d’exercice conjoint des responsabilités parentales appliqués trois ou quatre années après la séparation, générés par la discussion ou la non-discussion entre les ex-conjoints (disputes fréquentes, dénigrement et sabotage mutuel de leur rôle de parent) et par la présence ou l’absence de tentatives fréquentes de communiquer et de coordonner leurs efforts de parents. Ces trois modèles étaient : le modèle à degré élevé de communication et à faible niveau de discorde (appelé modèle d’exercice coopératif des responsabilités parentales); le modèle à faible degré de communication et à faible niveau de discorde (appelé modèle d’exercice désengagé des responsabilités parentales) et le modèle à faible degré de communication et à haut niveau de discorde (appelé modèle d’exercice des responsabilités parentales en contexte conflictuel). Ce dernier a été observé dans 24 p. 100 des cas. Au cours de la période de trois ans, il était peu probable que les parents engagés dans des différends deviennent coopératifs. En somme, d’après leurs données obtenues selon différentes mesures (conflit judiciaire, hostilité et exercice des responsabilités parentales en contexte conflictuel), le quart des divorces étaient très conflictuels trois ans et demi après la séparation. En général, les couples susceptibles de vivre de graves conflits se caractérisaient par leur profonde méfiance quant à la capacité de l’autre parent à bien s’occuper de l’enfant et par leurs perceptions différentes des méthodes d’éducation des enfants.

Johnston (1994) a résumé d’autres études, y compris la sienne, dont ressortait un degré élevé de violence dans les familles aux prises avec de graves conflits. Elle a affirmé que, selon les observations cliniques précoces, les personnes engagées dans un divorce très conflictuel peuvent être plus susceptibles de troubles psychiques, de troubles de la personnalité et de problèmes de toxicomanie. Cependant, la question cruciale soulevée par ces études était de savoir si les manifestations psychopathologiques reflétaient des troubles de la personnalité ou des troubles émotifs permanents ou si elles étaient des réactions probables au stress intense, notamment à celui imputable au divorce et aux litiges juridiques. Johnston, qui a analysé la documentation sur les conséquences des conflits parentaux sur les enfants, a conclu que l’hostilité entre les parents et l’agression physique étaient modérément associées, chez ces enfants, à un plus grand nombre de problèmes de comportement et de difficultés émotives et à des aptitudes sociales inférieures à celles des enfants de familles non conflictuelles. En général, les enfants qui assistent à des agressions physiques entre leurs parents présentent plus de symptômes que ceux qui sont témoins de la discorde non violente de leurs parents. Cette tendance était encore plus prononcée chez les enfants victimes de sévices.

Tout en reconnaissant les limites de ces études, Johnston (1994) a conclu provisoirement que les conflits entre parents après le divorce (par exemple, l’agression verbale et physique, l’hostilité et la méfiance déclarées) et les troubles émotifs du parent ayant la garde était des facteurs prédictifs d’une relation parent-enfant plus problématique et d’une plus grande inadaptation de l’enfant. Les régimes de garde partagée et de visites fréquentes ordonnés par le tribunal sont en général associés à de moins bons résultats chez l’enfant, surtout parents les filles. Johnston a toutefois indiqué que cette apparente association entre la garde partagée/visites fréquentes et les mauvais résultats chez l’enfant semblait circonscrite chez une faible proportion de familles (environ une sur dix) pour l’ensemble des divorces considérés comme très conflictuels.

Dans son évaluation des procédures et programmes de règlement de conflits, Johnston a fait remarquer que la médiation était un remède problématique dans les cas de divorce très conflictuel. C’est le processus appliqué par un tiers neutre dans un contexte confidentiel pour aider les parties opposées à cerner les problèmes et à négocier les différences et les solutions de rechange. On suppose que le médiateur peut contenir et détourner les conflits émotionnels des parties qui divorcent et les aider à devenir raisonnables, à préciser leurs attentes et à se concentrer sur le but. Johnston a toutefois signalé que les échecs de la médiation avaient toutes les caractéristiques du divorce très conflictuel (Johnston, 1994 : 176). Elle s’est expliquée en ces termes :

... pour les familles, il est difficile de parvenir à un consensus si les parties ont des opinions très divergentes sur les besoins de leurs enfants et une profonde méfiance quant à la capacité de l’autre à fournir un milieu sûr. En somme, les familles engagées dans un divorce très conflictuel se sont souvent distinguées par leur incapacité à recourir efficacement à des méthodes de médiation qui reposent sur un processus décisionnel rationnel (Johnston, 1994 : 176). [Traduction]

Johnston a affirmé que, pour intervenir d’une manière plus appropriée dans les cas de divorce très conflictuel, il faut comprendre pourquoi les parents sont enlisés dans des conflits chroniques. Les thérapeutes peuvent alors concevoir des interventions ciblées pour briser l’impasse, ce qui aide les parents à prendre des décisions plus rationnelles. Par ailleurs, ils peuvent les aider à se concentrer sur les besoins des enfants sans mêler ces questions à leurs problèmes psychologiques. Cette méthode de règlement des différends, appelée « médiation thérapeutique », a été élaborée surtout en tant que méthode dite « médiation axée sur l’impasse ». Elle réunit les parents et leurs enfants dans le cadre d’une intervention confidentielle relativement brève (15-25 heures). Elle comporte deux volets. D’un côté, on aide les parents à comprendre leur impasse psychologique. De l’autre, on les informe des effets de leur conflit sur leurs enfants et on les conseille sur la façon de les mettre à l’abri de leurs disputes conjugales.

Johnston a exposé les principes fondamentaux pour renseigner les responsables de la politique sociale sur la façon d’atténuer les conflits graves, notamment :

... les ententes en matière de garde devraient permettre aux parents de se dégager de leur conflit et d’établir avec leurs enfants des relations séparées, régies par un contrat explicite qui détermine le programme des visites. Un programme de visites régulières bien arrêté est crucial et la nécessité d’une prise de décisions conjointes et de communications directes devrait être réduite au minimum. Le quatrième principe suppose donc qu’en général, les régimes de garde juridique partagée et de garde physique partagée, qui requièrent une coordination minutieuse des activités sociales, scolaires et parascolaires de l’enfant, ne sont pas appropriés pour ce sous-segment spécial des familles qui divorcent (Johnston, 1994 : 179). [Traduction]

Johnston et Roseby (1997 : 5) ont étudié les travaux réalisés dans ce domaine :

En somme, les parents engagés dans de graves conflits sont caractérisés par de multiples critères qui se chevauchent : taux élevé de poursuites et de reprise des poursuites, degré élevé de colère et de méfiance, agressions verbales, agressions physiques intermittentes et difficulté continuelle à communiquer et à collaborer au sujet des soins à assurer à leurs enfants, et ce, au moins deux ou trois ans après la séparation. La principale caractéristique de ces parents dont « le divorce a échoué » est sans doute le fait qu’ils ont du mal à distinguer leurs propres besoins de ceux de leurs enfants et ne peuvent les protéger de leurs propres troubles émotifs et colère ou de leurs disputes continuelles.

... La menace la plus grave ... est ... le risque accru que ces enfants répètent le cycle des relations conflictuelles et empreintes de violence lorsqu’ils grandiront et essaieront de fonder leur propre famille. [Traduction]

4.2  MARQUES EXTÉRIEURES DES CAS TRÈS CONFLICTUELS

Johnston ne s’est pas intéressée exclusivement aux caractéristiques personnelles des couples qui divorcent pour essayer de comprendre pourquoi ils s’engagent dans des conflits. Elle a aussi affirmé que les actes d’autres personnes — les représentants du système de justice — peuvent alimenter les conflits, notamment les avocats qui les favorisent entre les parties à un divorce :

Depuis longtemps, l’intervention des avocats, en particulier, contribue à alimenter les conflits au lieu de les résoudre, à cause de leur rôle de défenseur dans le cadre d’un système judiciaire accusatoire. Exemples : ils conseillent à leur client de ne pas parler au conjoint, formulent des exigences extrêmes pour hausser les enjeux et présentent des requêtes qui font mal paraître l’autre parent. Certains avocats qui doivent fournir des preuves de négligence, de mauvais traitements, de sévices ou d’incapacité émotionnelle ou mentale pour gagner la cause de leur client composent des documents qui constituent un dossier public d’accusations et de contre-accusations en citant, souvent hors contexte, des incidents malheureux et le comportement désespéré de parties vulnérables sur le plan émotif et engendré par la séparation. La honte publique, la culpabilité et le mécontentement de l’autre partie, quand elle constate qu’elle a été si mal représentée, l’incitent à vouloir rétablir la vérité des faits en intentant des poursuites onéreuses (Johnston et Roseby, 1997 : 9). [Traduction]

Un autre élément est le rôle des professionnels de la santé mentale :

Certains thérapeutes, qui voient seulement l’une des parties au conflit du divorce, encouragent les attitudes intransigeantes, concrétisent les opinions déformées à propos de l’autre parent, formulent des recommandations et vont même jusqu’à témoigner au nom de leur client adulte sans en comprendre les besoins, ou presque, ni l’opinion de l’autre parent ni la dynamique du couple ou de la famille. Malheureusement, certains tribunaux prêtent foi à ce genre de « témoignage d’expert ». Dans certains cas notoires, les thérapeutes des parents luttent l’un contre l’autre, transportant ainsi le conflit des parents sur une scène communautaire ou devant les tribunaux (Johnston et Roseby, 1997 : 9-10). [Traduction]

À cet égard, Turkat (1993) a fait remarquer que, dans le contexte des recommandations des experts en santé mentale en matière de garde, pour chaque évaluateur professionnel compétent, il peut y en avoir un grand nombre d’incompétents. À son avis, pour faire une évaluation sur la garde, le professionnel en santé mentale devrait idéalement avoir reçu une formation poussée dans le domaine du développement de l’enfant et en psychopathologie, posséder des années d’expérience comme clinicien praticien et préciser au tribunal que ses interprétations ou recommandations peuvent être erronées. Par ailleurs, vu que même le plus objectif des examinateurs impartiaux peut avoir un parti pris, l’accusateur au service de l’une des parties à un conflit ne devrait pas être autorisé à donner une recommandation au sujet de la garde.

Un autre intervenant qui alimente le conflit est le tribunal :

Le rôle du tribunal comme tel risque de piéger une famille dans une distorsion de la situation, pas tant à cause de décisions non judicieuses, mais bien de la façon dont les décisions sont rendues... L’autorité du tribunal et le jugement qu’il rend ... peuvent avoir une puissante signification symbolique pour les clients aux prises avec des troubles émotifs et dépendant d’autres personnes sur le plan de l’estime de soi. Le tribunal est non seulement considéré par beaucoup de gens comme une scène où la lutte entre conjoints est exposée à un examen public humiliant, mais il peut aussi se voir conférer par ses clients une autorité morale quasi divine.

Dans l’optique du client, les jugements deviennent une représentation théâtrale de qui a raison ou tort... Si le conseiller juridique ou le juge soupçonne que les parties se présentent au tribunal avec l’intention intime d’obtenir un jugement moral, il est particulièrement important que les ordonnances du tribunal énoncent d’une manière claire et précise les motifs de la décision. Si elles ne sont pas suffisamment claires, elles peuvent constituer pour certaines personnes un registre public permanent d’une honte et d’une condamnation démesurées (Johnston et Roseby, 1997 : 11). [Traduction]

Ce point de vue a été repris dans un rapport récent assorti d’un plan d’action arrêté à une conférence internationale sur les divorces très conflictuels. Les cas de garde très conflictuels peuvent être créés par toutes les parties à un conflit en matière de garde, soit non seulement les parents, mais aussi les avocats dont les démarches au nom de leur client ajoutent un élément de conflit supplémentaire et non nécessaire à la procédure, les professionnels de la santé mentale dont l’interaction avec les parents, les enfants, les avocats ou l’appareil judiciaire exacerbe le conflit. Les cas très conflictuels peuvent aussi être créés par le système judiciaire dont les procédures, les retards ou les erreurs causent des injustices ou des frustrations ou entraînent la poursuite du conflit (American Bar Association, 2000). Les auteurs du rapport reconnaissaient que les professionnels de la santé, les avocats et les juges sont ceux qui peuvent influer davantage sur le déroulement des cas de garde très conflictuels. Par conséquent, ils devraient assumer en majeure partie la responsabilité de prévenir ou d’atténuer les différends dans de tels cas.

Un autre indicateur extérieur des cas très conflictuels entre conjoints est la violence familiale. Dans leur livre intitulé In the Name of the Child (1997 : 25-45), Johnston et Roseby consacrent un chapitre à l’analyse de cinq types de violence familiale dans les couples en instance de divorce et non d’accord sur la garde des enfants. Ces types sont : les brutalités constantes ou épisodiques du mari; les sévices physiques amorcés par la femme; la violence réactive de l’homme en vue de contrôler; le traumatisme du divorce engendré par la séparation; les réactions psychotiques et paranoïaques. Les cas de violence masculine, continuelle ou épisodique, semblent provenir du chauvinisme de l’homme. Celui-ci est presque toujours celui qui amorce la violence, laquelle est souvent précipitée par l’abus de drogues et d’alcool. La violence amorcée par la femme semble due à un stress interne qui la pousse à s’emporter face à la passivité du conjoint. La violence interactive de l’homme en vue de contrôler s’intensifie, passant des insultes réciproques à la lutte physique. L’homme réagit en maîtrisant physiquement la femme. Le traumatisme engendré par la séparation et manifesté après le divorce est marqué par des actes de violence non caractéristiques liés à la séparation ou à des événements stressants, comme les conflits à propos de la garde. Les réactions psychotiques et paranoïaques sont des actes violents générés par la pensée désordonnée et les distorsions de la réalité qui contribuent à des lubies de conspiration paranoïaques.

Les auteures affirment qu’aucune politique ni traitement ne peuvent suffire à régler tous les cas de violence familiale. Par exemple, il ne faut jamais envisager un régime de résidence dite traditionnelle ou partagée si le père bat la mère, de façon régulière ou non. En pareil cas, les visites chez le père devraient être surveillées ou suspendues. On ne devrait envisager les visites non surveillées que si le père a cessé de commettre des actes violents et suivi avec succès un traitement approprié. Pour d’autres types de violence familiale, les visites non surveillées pourraient donner de bons résultats, à la condition d’être bien structurées. En général, cependant, le partage des responsabilités parentales a de meilleures chances de réussite s’il n’y a pas d’antécédents de sévices physiques dans le mariage.

Comme l’a toutefois fait remarquer Stewart (2001 : 23) dans son examen de la documentation, les cinq types de violence familiale décrits ci-dessus peuvent faire problème :

Cette liste est censée permettre aux cliniciens de distinguer les divers types de violences liées au divorce. Il s’agit d’un outil de mesure de la gravité de la violence dans le cadre de l’examen des problèmes relatifs au droit de visite. Cet effort de différenciation n’a pas fait l’unanimité chez les professionnels, certains estimant qu’elle nuisait aux efforts en vue de faire admettre la gravité égale de toute violence conjugale.

Une autre chose qui risque d’attiser le conflit est la réduction, au fil des ans, du financement de l’aide juridique. Ainsi, en 1999, le juge en chef du tribunal australien de la famille a fait remarquer que la possibilité limitée de recours à l’aide juridique avait eu des effets particulièrement néfastes dans le domaine du droit de la famille. Voici ce qu’il a déclaré :

Au moment où la vie des gens est bouleversée, le refus de leur accorder l’aide juridique entraîne des contraintes supplémentaires pas seulement pour la personne non représentée, mais aussi pour les autres parties au conflit, leurs représentants juridiques et le tribunal. Ce refus accroît inévitablement les risques de retard et réduit les possibilités de règlement. Certaines personnes dirigent le sentiment d’injustice qu’elles ressentent contre leur ex-partenaire ou contre leurs enfants, ou ceux-ci deviennent des pions dans le processus. La violence est la manifestation la plus extrême, mais nous constatons aussi des cas d’obstructionnisme accru et de refus d’observer les ordonnances ou autres ententes à appliquer après la séparation... Avant l’audience d’une affaire, lorsque des occasions de régler le différend se présentent souvent, on peut comprendre que les personnes ayant une vive animosité l’une envers l’autre soient incapables de négocier et de chercher une solution. Ces personnes ne trouvent pas de conseils objectifs (Nicholson, 1999b : 1-2). [Traduction]

Si les affirmations du juge en chef peuvent être hypothétiques, des preuves récentes permettent de vérifier l’opinion selon laquelle le manque de financement pour l’aide juridique peut nuire à l’efficacité des services judiciaires. Une étude menée récemment auprès de parties à un litige qui se représentaient elles-mêmes devant le tribunal australien de la famille a révélé que la plupart d’entre elles ne sont pas représentées par un avocat parce qu’elles n’en ont pas les moyens. Par ailleurs, un peu plus de la moitié des personnes constituant l’échantillon de l’étude s’étaient vu refuser l’aide juridique à cause de changements apportés en 1997 aux lignes directrices sur l’aide juridique. En outre, une forte minorité d’entres elles n’avaient pas pris la peine de faire une demande d’aide juridique parce qu’on leur avait dit qu’elles n’y avaient pas droit. Les parties à un litige qui se représentaient elles-mêmes étaient plus susceptibles que l’ensemble de la population d’avoir une scolarité et des revenus limités et peu de biens et de ne pas avoir d’emploi rémunéré. On a noté une concentration disproportionnée de ces personnes dans les litiges portant sur les enfants par rapport à ceux concernant les biens.

Dewar et coll. (2000) ont fait remarquer que ces personnes avaient de nombreux besoins : renseignements, services de soutien, procédures des tribunaux, conseils et aide. Les fonctionnaires judiciaires et le personnel du greffe ont subi des niveaux élevés de stress et de frustration dans leurs rapports avec les personnes qui se représentaient elles-mêmes au tribunal du fait que celles-ci connaissent peu la loi et les procédures et qu’il est difficile de maintenir un juste équilibre entre les parties représentées et celles qui ne le sont pas. Même si les affaires des secondes parties se règlent plus rapidement que celles des premières, les fournisseurs de services ont été presque unanimes à affirmer que tant qu’elles demeurent dans le système, les parties non représentées nécessitent davantage de temps de la part des autres parties et de leurs conseillers juridiques (Dewar et coll., 2000[1]).

En outre, un examen récent de la loi australienne de1995 dite Family Law Reform Act a permis de conclure que bon nombre de requêtes présentées par le parent n’ayant pas la garde contre l’autre parent parce qu’il aurait violé une ordonnance parentale rendue par le tribunal étaient sans fondement et visaient à harceler le parent ayant la garde. Dans la plupart de ces cas non fondés, le père n’était pas représenté. Cela a fait ressortir l’importance du rôle de gardien que jouent les avocats pour écarter du système les plaintes frivoles (Rhoades et coll., 2000 : 9).

Conséquence de ces constatations, dans le contexte du divorce très conflictuel : la personne non représentée est susceptible de causer des retards dans le système judiciaire, ce qui multiplie les risques de conflit. Par ailleurs, le manque de moyens financiers de la partie non représentée contraste nettement avec les moyens du conjoint plus à l’aise, ce qui crée un déséquilibre de pouvoir qui risque d’alimenter davantage le conflit.

On peut cependant affirmer que la typologie des conflits maritaux la plus utilisée est l’échelle d’évaluation des conflits conçue par Garrity et Baris (1994) et présentée dans leur ouvrage intitulé Caught in the Middle: Protecting the Children of High-Conflict Divorce. Voici les cinq degrés de conflits, allant de minimes à graves, que comporte cette échelle :

  1. Conflits minimes

    • Les responsabilités parentales sont exercées en collaboration.
    • Les parents parviennent à distinguer leurs propres besoins de ceux des enfants.
    • Ils peuvent admettre l’importance de l’autre parent.
    • Ils peuvent affirmer que l’autre parent est compétent.
    • Les conflits entre adultes se règlent avec seulement quelques rares manifestations de colère.
    • Les émotions négatives sont rapidement maîtrisées.
  2. Conflits légers

    • Les parents admonestent parfois l’autre parent en présence de l’enfant.
    • Disputes occasionnelles en présence de l’enfant.
    • Les parents interrogent l’enfant au sujet de divers aspects de la vie personnelle de l’autre parent.
    • Ils tentent parfois d’amener l’enfant à prendre parti contre l’autre parent.
  3. Conflits modérés

    • Invectives, mais aucune menace ni antécédents de sévices physiques.
    • Vociférations.
    • Dénigrement de l’autre parent.
    • Menaces de limiter le droit de visite de l’autre parent.
    • Menaces de poursuite.
    • Efforts constants pour amener l’enfant à prendre parti contre l’autre parent sur des questions isolées.
  4. Conflits assez graves

    • L’enfant n’est pas lui-même en danger, mais ses parents se mettent, eux, réciproquement en danger.
    • Menaces de violence.
    • Claquements de portes, jet d’objets.
    • Menaces de sévices physiques ou d’enlèvement.
    • Différends continuels.
    • Efforts en vue d’amener l’enfant à prendre définitivement parti contre l’autre parent (syndrome d’aliénation).
    • L’enfant court un risque émotif.
  5. Conflits graves

    • Mise en danger par des sévices physiques ou sexuels.
    • Affaiblissement des facultés par l’alcool ou les drogues.
    • Pathologie psychologique grave.

Garrity et Baris (1994 : 42-43) ont conçu cette échelle de conflit d’après leur vaste expérience clinique acquise auprès de couples qui divorçaient et d’enfants qui subissaient les conflits des parents et en se basant sur les documents de chercheurs à propos des querelles et de la violence dans les familles divorcées et les familles intactes. Ils ont précisé que l’échelle n’était ni valide ni fiable statistiquement mais qu’elle pouvait servir de ligne directrice pour élaborer des plans de visite à d’autres fins.

Lors de son examen de la documentation, Stewart (2001 : 20) s’est entretenu avec un certain nombre de professionnels sur la façon de définir un divorce très conflictuel. Le psychiatre Eric Hood, qui fait depuis plus de vingt ans les évaluations familiales ordonnées par le tribunal au Clarke Institute, était sceptique face aux tentatives pour arrêter les critères permettant de définir ce qu’est le divorce très conflictuel. D’après lui, les professionnels de la santé mentale visaient par là à donner un caractère scientifique à leurs évaluations lorsqu’ils devaient comparaître devant le tribunal pour justifier leurs rapports. Il a cependant affirmé que trois marques extérieures indiquent que les parties ne parviennent pas à régler un différend : plusieurs changements d’avocat, ce qui peut dénoter que le client ne peut accepter les conseils; le nombre de fois qu’un dossier est porté devant le tribunal et le temps nécessaire pour parvenir à un règlement. Nicholas Bala, professeur de droit à l’Université Queen’s, s’est aussi dit méfiant face à l’établissement de critères des divorces très conflictuels, affirmant que ces critères peuvent entraîner un étiquetage susceptible de limiter les possibilités d’intervention. Au contraire, selon le professeur Bala, les personnes divorcées doivent toutes pouvoir bénéficier d’un éventail d’interventions, à savoir : le counselling et les consultations thérapeutiques, aussi bien pour les enfants que pour les parents; les programmes visant à renseigner parents et proches sur les dangers du divorce et des conflits pour les enfants; un système de gestion de cas selon lequel un seul juge est chargé d’un dossier du début à la fin; et des programmes de visites et d’échanges surveillés pour les cas où il y a des antécédents de violence.

Aux États-Unis, dans le protocole de l’État de l’Idaho destiné aux juges qui s’occupent des cas de divorce très conflictuel, on peut lire qu’un divorce très conflictuel se situe :

... dans un continuum où le conflit parental peut se manifester de diverses façons, allant de 1) la violence verbale sans menaces ni antécédents de sévices, à la menace de limiter l’accès de l’autre parent, aux menaces de poursuites, aux tentatives continuelles d’amener l’enfant à prendre parti contre l’autre parent à propos de questions isolées, jusqu’à 2) la mise en danger causée par les sévices physiques ou sexuels, l’usage abusif de drogues ou d’alcool ou de graves problèmes psychiques (Brandt, 1998 : 33). [Traduction]

Dans ce protocole, les marques du divorce très conflictuel incluent : les requêtes de garde temporaire; les demandes de protection, notamment les ordonnances pour la protection de l’enfant et celles concernant la violence familiale; le dysfonctionnement familial comme l’abus de drogues; les changements d’avocat; le refus de l’enfant de visiter un parent et l’incapacité du parent à distinguer ses propres besoins de ceux de l’enfant. Une autre marque est celle des divorces mettant en cause des enfants (de la naissance à trois ans) qui requièrent une surveillance spéciale à cause du risque extrême de subir des dommages psychologiques (Brandt, 1998 : 33).

Selon une excellente étude menée dans l’Oregon sur les approches concernant les divorces très conflictuels aux États-Unis, la division de la famille du comté de Fulton, en Georgie, utilise une méthode officieuse qui tient compte des facteurs suivants pour déceler les divorces très conflictuels : la présence de plusieurs enfants; des enfants très jeunes, ce qui suppose une intervention éventuelle plus poussée du tribunal; les rapports intimes de la famille élargie; les sévices aux enfants; les traumatismes et l’opposition possible de l’une des parties au divorce. L’échelle d’évaluation des conflits de Garrity et Baris était l’outil privilégié au Vermont et dans l’Idaho (Sydlik et Phalan, 1999 : 2).

Bon nombre des définitions qui précèdent sur le divorce très conflictuel font problème. Comme l’indique Stewart (2001 : 48) dans son examen de la documentation, plusieurs études cliniques et empiriques tirent des conclusions claires quant aux conséquences néfastes que subissent les enfants exposés à de graves conflits parentaux :

... ces études restent dans le vague lorsqu’il s’agit de définir ce qu’on entend par conflit grave. Un des problèmes qui caractérisent l’ensemble de ces études est que nous n’avons pas de critères de référence quant au niveau « normal de conflit » auquel on peut s’attendre dans la plupart des familles qui divorcent. Sans cela, il est impossible de dire avec précision quel niveau de conflit sera considéré comme « aigu ».

Stewart (2001 : 49) a donc recommandé ce qui suit :

Afin de parvenir à mesurer avec précision ce qu’on entend par conflit grave, il faudra mener de nouvelles recherches empiriques. Dans ces recherches, portant sur de grands échantillons, on devrait d’abord établir des mesures de référence quant au degré de conflit normalement constaté dans les familles qui divorcent par rapport à celui que vivent les familles intactes. Une fois ces mesures de référence établies, on pourra en établir d’autres pour jauger le niveau de conflit dans les familles qui présentent certains des traits caractéristiques énumérés plus loin.

Selon Stewart (2001), une typologie des familles à conflits aigus/conflits faibles est plus utile pour les praticiens que les modèles proposant une différenciation plus poussée des types de conflits. Il a donc fourni pour les conflits aigus et les conflits faibles un modèle énumérant, pour chaque typologie, les marques extérieures, les caractéristiques individuelles et relationnelles, le recours à des ressources et les éléments clés du plan de responsabilités parentales. Pour les divorces caractérisés par des conflits aigus, la typologie et les caractéristiques individuelles et relationnelles s’établissent comme suit :

  1. Marques extérieures

    • Les antécédents de condamnations au criminel.
    • L’intervention d’organismes de protection de l’enfance dans les querelles.
    • Les multiples changements d’avocat.
    • Le nombre de fois où l’affaire est soumise au tribunal.
    • Le délai pour parvenir à un règlement.
    • La multiplicité des affidavits.
    • Les refus répétés de reconnaître le droit de visite.
  2. Caractéristiques individuelles et relationnelles

    • Les antécédents en santé mentale, notamment la dépression, la colère, le repli sur soi et le refus de communiquer.
    • Les antécédents de violence et de comportement abusif.
    • La tendance à dénigrer l’autre parent.
    • L’incapacité de distinguer les besoins de l’enfant de ses propres besoins.
    • Une conception rigide et inflexible des relations interpersonnelles et du développement de l’enfant.
    • Une grande méfiance.
    • La tendance à l’enchevêtrement plutôt qu’à l’autonomie.
    • Un piètre sens des limites.
    • Beaucoup de rivalité, aussi bien dans le mariage que lors de la séparation.
    • Le nombre d’agressions verbales et physiques entre les parents.
    • La tendance à impliquer les enfants dans les querelles parentales.
    • La manie de chercher à détourner l’enfant de l’autre parent.

Pour les divorces faiblement conflictuels, la typologie et les caractéristiques individuelles et relationnelles s’établissent comme suit :

  1. Marques extérieures

    • Disputes continuelles sur divers détails du quotidien.
    • Recours à l’appui d’amis ou de membres de la famille afin d’atténuer les conflits.
    • Recours aux avocats, en dernier ressort.
    • Peu de comparutions au tribunal.
    • Aucun antécédent pénal quant au différend sur la garde.
    • Aucun antécédent de violence.
  2. Caractéristiques individuelles et relationnelles

    • La capacité de distinguer les besoins de l’enfant de ses propres besoins.
    • La capacité d’admettre l’importance de l’autre parent.
    • Les conflits sont réglés et les manifestations de colère sont rares.
    • Les émotions négatives sont rapidement maîtrisées.
    • La capacité de ne pas dire certaines choses sous l’emprise de la colère.
    • L’habitude de mettre l’enfant à l’abri des déchaînements de colère.
    • Le fonctionnement de l’enfant s’améliore après une période d’adaptation initiale.
    • Les deux parents sont capables d’accepter les différences.
    • La capacité de collaborer sur les questions concernant l’enfant.
    • Le règlement des problèmes personnels.

Stewart (2001 : 53) a ajouté qu’au-delà d’une application pratique lors de l’élaboration des plans de répartition des tâches parentales, il se peut qu’il ne soit pas tellement utile de définir plus précisément les critères qui caractérisent les situations de divorce fortement conflictuelles. La difficulté principale en cela est peut-être l’adverbe « fortement », puisqu’il laisse entendre qu’il existe une distinction précise entre divers niveaux de conflit, alors qu’en réalité il vaut peut-être mieux considérer les conflits dans le divorce comme un continuum incluant : certains événements et comportements qui, dans une famille, mènent à la décision de se séparer et à la séparation même; les ressources disponibles dans la famille et le milieu pour aider les parents et les enfants à s’adapter aux changements; et les réactions internes des enfants face à ces défis.

Aux fins de notre étude, nous acceptons ici en général la plupart des marques extérieures de Stewart qui servent à distinguer les cas de divorce très conflictuel des cas de divorce à faible degré de conflit : les condamnations antérieures au criminel; l’intervention d’organismes de protection de l’enfance dans les querelles; les multiples changements d’avocat; le nombre de fois où l’affaire est soumise au tribunal; le délai pour parvenir à un règlement ; la multiplicité des affidavits; les refus répétés de reconnaître le droit de visite. Cependant, nous proposons d’apporter un changement à la liste de Stewart : violence familiale et infractions sexuelles à la place de condamnation au criminel. La condamnation au criminel est un critère trop vaste pour dénoter un cas de divorce très conflictuel. Exemple : une personne qui a été condamnée pour possession simple de marijuana n’entache pas, par ce seul motif, sa requête en divorce en introduisant un risque de conflit grave. Une marque plus précise s’impose, une marque qui permet de supposer qu’à cause d’une action fautive criminelle ou d’une éventuelle allégation de faute criminelle, les relations entre les membres de la famille pourraient être compromises par un conflit. Pour cette raison, nous avons retenu à titre de marque l’action fautive criminelle sous forme d’infraction sexuelle ou d’acte de violence familiale.