Lignes directrices facultatives en matière de pensions alimentaires pour époux - Juillet 2008

INTRODUCTION

Le ministère de la Justice du Canada a déterminé, en 2001, qu'il fallait explorer la possibilité de formuler des lignes directrices facultatives en matière de fixation des pensions alimentaires pour époux. Le projet visait à donner plus de certitude et de prévisibilité au calcul des pensions alimentaires pour époux en vertu de la Loi sur le divorce[1]. Il répondait à des préoccupations croissantes exprimées par des avocats, des juges, des médiateurs et des particuliers quant au manque de certitude et de prévisibilité du droit des pensions alimentaires pour époux. Cette incertitude donne lieu au quotidien à des impasses lorsqu'il s'agit de conseiller des clients, de négocier et de plaider ou, dans le cas des juges, de se prononcer sur des questions de pensions alimentaires pour époux. Nous avons été chargés de mener ce projet à bien.

L'Ébauche de proposition a été publiée en 2005. Elle établissait un ensemble exhaustif de Lignes directrices facultatives en matière de pension alimentaire pour époux. Au cours des trois dernières années, des époux, des avocats, des médiateurs et des juges de partout au Canada ont utilisé ces Lignes directrices facultatives. Nous avons reçu des commentaires détaillés et de la rétroaction au sujet de l'Ébauche de proposition. Vous avez entre les mains la version définitive des Lignes directrices facultatives en matière de pensions alimentaires pour époux.

Le terme « lignes directrices » rappelle les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, adoptées en 1997[2]. Nous tenons dès maintenant à souligner qu'un tel rapprochement est à déconseiller. Aucune réforme législative officielle n'est prévue. Contrairement aux lignes directrices fédérales, provinciales et territoriales sur les pensions alimentaires pour enfants, ces lignes directrices facultatives ne font pas l'objet d'une intervention législative ou réglementaire. Elles ne sont que facultatives, sans caractère officiel, dans le cadre législatif actuel . Elles n'auront pas force de loi et ne sont appliquées que dans la mesure où les avocats et les juges les trouvent utiles. Elles sont véritablement destinées à « donner une orientation », conformément au nom de Lignes directrices facultatives que nous leur avons donné pour les distinguer des Lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.

La nature et l'état des Lignes directrices facultatives

Les Lignes directrices facultatives sont censées être des outils pour aider à déterminer les pensions alimentaires pour époux dans le cadre des lois actuelles et servir surtout de point de départ des négociations et des règlements. Le projet ne vise pas à établir un nouveau cadre juridique théorique pour les pensions alimentaires pour époux, ni à créer un nouveau modèle de pensions alimentaires. Les formules que nous avons élaborées visent à appuyer les objectifs énoncés dans la Loi sur le divorce pour ces pensions alimentaires et que la Cour suprême du Canada a approfondis. Nous nous sommes efforcés de formuler des lignes directrices permettant d'obtenir des résultats satisfaisants pour une grande diversité de cas.

Puisqu'elles n'ont pas de caractère officiel, ces lignes directrices facultatives tiennent compte du fait qu'elles doivent correspondre globalement aux résultats obtenus actuellement en matière de pensions alimentaires tout en structurant ce secteur du droit et en lui donnant une cohérence dont il a grand besoin — ce qui n'est pas une mince tâche. De plus, elles ne traitent pas du droit aux aliments, mais uniquement du montant et de la durée de celle-ci, une fois que ce droit a été établi. Elles ne confèrent pas non plus le pouvoir de réexaminer des ententes existantes portant sur des pensions alimentaires pour époux hormis ce que prévoit le droit actuel.

La teneur des Lignes directrices facultatives

Les Lignes directrices facultatives sont fondées sur ce que l'on appelle le « partage des revenus ». Contrairement à ce que l'on croit souvent, ce partage ne se fait pas forcément de façon égale. L'expression signifie simplement que l'on fixe la pension alimentaire pour époux d'après un pourcentage de leurs revenus. Les pourcentages peuvent varier en fonction de plusieurs facteurs. Les Lignes directrices facultatives proposent deux formules de base selon lesquelles la pension alimentaire pour époux est fondée sur leurs revenus et sur d'autres facteurs pertinents, notamment la présence ou l'absence d'enfants à charge et la durée du mariage. Les formules détaillent le montant et la durée de la pension alimentaire après que le droit aux aliments a été établi. Plutôt que des nombres précis sur les montants et les durées, elles génèrent des fourchettes qu'il est possible de « restructurer » en modulant le montant et la durée.

Il s'agit uniquement de lignes directrices facultatives, ce qui permet de s'éloigner des résultats obtenus par l'application des formules s'ils sont jugés inappropriés. Nous nous sommes efforcés, afin d'aider les parties et les tribunaux, de déterminer des exceptions pour évaluer les écarts possibles par rapport aux formules établies, mais la liste est loin d'être exhaustive. Les Lignes directrices facultatives vont laisser beaucoup de latitude qui pourra toutefois s'exercer dans une structure bien mieux définie qu'auparavant et comprenant des points de départ plus clairs. Les budgets, avec lesquels se calcule pour l'instant la pension alimentaire pour époux, auront un rôle de plus en plus réduit, moins essentiel.

Les documents qui accompagneront cette version définitive

Deux documents seront publiés en même temps :

  1. La présente version définitive du document de référence, intitulé Lignes directrices facultatives en matière de pensions alimentaires pour époux;
  2. Un bref compte-rendu des modifications faisant état des modifications qui ont été apportées à l'Ébauche de proposition dans la version définitive.

Un Guide d'utilisation, qui se veut un guide étape par étape sur les Lignes directrices facultatives, qui renvoie à la version définitive, sera publié dans un avenir prochain.

La structure de la version définitive

Une grande partie du contenu de la présente version définitive est identique à l'Ébauche de proposition, mais nous avons modifié sa structure et sa présentation. Certaines questions qui semblaient importantes lorsque nous avons rédigé l'Ébauche de proposition ne sont plus pertinentes; par conséquent, nous avons supprimé ou raccourci certaines parties de l'Ébauche de proposition. Maintenant que les Lignes directrices facultatives sont mieux connues et utilisées par un plus grand nombre de personnes, nous avons mis l'accent sur certaines questions qui sont souvent oubliées : le droit aux aliments, l'utilisation des fourchettes, la restructuration et l'indépendance économique. Nous nous sommes également inspirés de l'expérience des gens qui ont appliqué les Lignes directrices facultatives au cours des trois années qui ont suivi la publication de l'Ébauche de proposition pour en expliquer le fonctionnement.

Il convient d'aborder de nombreuses questions préliminaires avant de traiter la teneur des Lignes directrices facultatives en matière de pensions alimentaires pour époux, afin qu'elles soient bien comprises. Le chapitre 1 présente le contexte nécessaire au projet. Nous y examinons le cadre juridique actuel des pensions alimentaires pour époux dans lequel ces Lignes directrices sont appliquées et nous traitons des problèmes du droit actuel à l'origine des Lignes directrices.

Le chapitre 2 décrit la nature du projet, les difficultés qu'il a posées, le mode d'élaboration des Lignes directrices.

Le chapitre 3 expose le fondement de la proposition; on y présente un aperçu de la structure de base des Lignes directrices.

Les chapitres 4 et 5 portent sur deux questions essentielles qu'il faut examiner avant de pouvoir utiliser les Lignes directrices facultatives : existe-t-il un droit aux aliments? Et les Lignes directrices facultatives s'appliquent-elles en l'espèce? Les questions du droit aux aliments et du fondement de ce droit se posent non seulement à ce point critique, mais également tout au long de l'application des Lignes directrices.

Le chapitre 6 porte sur la détermination des revenus des époux, qui constitue une autre étape cruciale de l'analyse des Lignes directrices.

Le chapitre 7 traite de la première des deux formules de base qui structurent les Lignes directrices facultatives — la formule sans pension alimentaire pour enfant, à appliquer dans les cas où il n'y a pas d'enfant à charge, ni donc d'obligation alimentaire relative à des enfants.

Le chapitre 8 expose l'autre formule de base — avec pension alimentaire pour enfant — à appliquer dans les cas où il y a des enfants à charge.

Le chapitre 9 décrit principalement la façon dont les fourchettes établies au moyen de ces deux formules peuvent être utilisées et les facteurs qui peuvent avoir une incidence sur l'emplacement exact du montant et de la durée dans les fourchettes. Le chapitre 10 porte sur l'étape suivante, c'est-à-dire la façon dont on peut restructurer les fourchettes établies en modulant le montant et la durée, en vue d'obtenir des montants plus élevés, des durées plus longues ou des montants forfaitaires.

Au chapitre 11, nous expliquons comment appliquer les plafonds et les planchers, soit les limites maximale et minimale qui fixent l'éventail des revenus auxquels les Lignes directrices facultatives peuvent s'appliquer. En outre, ce chapitre renferme des directives sur la détermination de la pension alimentaire pour époux dans des cas où les revenus sont supérieurs au plafond ou inférieurs ou à peu près équivalents au plancher.

Le chapitre 12 décrit les exceptions à l'application des fourchettes établies au moyen des formules. Trop souvent, ces exceptions n'ont pas été prises en compte dans la pratique; par conséquent, nous leur avons accordé plus d'importance dans la version définitive. Nous avons clarifié certaines des exceptions les plus anciennes et nous en avons ajouté quelques-unes.

Nous avons réuni, dans le chapitre 13, tous les aspects des Lignes directrices facultatives qui favorisent l'indépendance économique, une question importante et difficile du droit en matière de pensions alimentaires pour époux qui, à notre avis, méritait d'être traitée dans un chapitre distinct dans la version définitive.

Le chapitre 14 traite de l'application des Lignes directrices facultatives en cas de modification et de révision. Leur application est parfois plus limitée lors de ces étapes, puisque des questions liées au maintien du droit aux aliments se posent souvent.

Le chapitre 15 renferme un exposé sur l'application des Lignes directrices facultatives dans les cas de divorce au Québec et de quelques-uns des rajustements qui ont été apportés pour ces cas.

On trouvera à la fin du document, après la conclusion, un glossaire définissant de nombreux termes employés dans le présent document. Certains de ces termes sont d'usage courant pour les avocats spécialisés en droit de la famille et pour les juges, mais moins pour d'autres lecteurs; d'autres sont propres aux Lignes directrices facultatives en matière de pensions alimentaires pour époux.