État des lieux sur la situation de l'accès à la justice dans les deux langues officielles

Chapitre 10 : Ontario

Structure du système judiciaire

Organisation Judiciaire

Les cours supérieures

La Loi sur les tribunaux judiciaires[70] de l'Ontario établit un tribunal supérieur d'archives nommé Cour d'appel de l'Ontario qui entend les appels de jugements en provenance de la Cour divisionnaire ainsi que de la Cour supérieure de justice, sauf ceux dont les appels sont interjetés devant la Cour divisionnaire. Les juges de la Cour supérieure de justice sont d'office des juges de la Cour d'appel.

En vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, est aussi établie une Cour supérieure d'archives nommée Cour supérieure de justice, ayant compétence générale en matière civile et criminelle.

En vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, est créée une section de la Cour supérieure de justice connue sous le nom de Cour de la famille. La Cour de la famille est une cour unifiée (supérieure et provinciale) en matière de droit de la famille[71] qui n'a compétence que dans certaines municipalités[72]. Les juges de la Cour supérieure de justice sont aussi des juges de la Cour de la famille.

Est établie, en vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, une section de la Cour supérieure de justice nommée la Cour des petites créances. Chaque juge de la Cour supérieure de justice est juge de la Cour des petites créances et les causes sont entendues par un tel juge. Les appels d'ordonnances concernant les sommes d'argents supérieures à 500  $ sont interjetés devant la Cour divisionnaire.

Est aussi établie, en vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, la Cour divisionnaire, compétente à entendre certains appels de jugements en provenance de la Cour supérieure de justice, notamment, les ordonnances accordant ou rejetant un versement unique d'au plus 25 000 $.

Les cours provinciales

La Loi sur les tribunaux de justice établit une cour d'archives nommée Cour de justice de l'Ontario à qui est dévolue essentiellement la compétence criminelle et quasi-criminelle de la province ainsi que certaines fonctions en droit de la famille, là où la Cour de la famille n'a pas compétence[73]. La Cour de justice de l'Ontario est aussi celle qui est désignée tribunal pour adolescents aux fins de la Loi sur les jeunes contrevenants[74] (Canada).

Obligations constitutionnelles

Il n'y a pas d'obligation constitutionnelle d'offrir des services judiciaires et juridiques en français en Ontario.

Législation provinciale

La Loi sur les tribunaux judiciaires déclare que l'anglais et le français sont les langues officielles des tribunaux de cette province et que les audiences sont instruites soit en anglais, soit en tant qu'instance bilingue. Ceci signifie essentiellement qu'une partie à une instance a le droit à un juge bilingue et le droit de présenter des témoignages et observations en français. De plus, une partie a le droit à un jury bilingue et le droit de déposer des documents rédigés en français dans les régions suivantes[75] :

Adopté en vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, le Règlement de l'Ontario 53/01, en vigueur depuis le 1er juin 2001, assure le droit à une instance bilingue de quatre façons[76] :

Par ailleurs, la Loi sur les services en français[77] assure des services en français et le droit d'utiliser le français à la Législature, au siège ou à l'administration centrale d'un organisme gouvernemental et dans les bureaux régionaux du gouvernement dans certains secteurs désignés. Cependant, ces obligations sont assujetties aux limites raisonnables et nécessaires qu'exigent les circonstances.

Profil de la communauté francophone[78]

Démographie

La population de l'Ontario est largement anglophone. Sur les 10 642 790 habitants de la province, 72% sont de langue maternelle anglaise. Les francophones comptent pour 4,7% et les autres groupes linguistiques pour presque 24% de la population totale, selon le recensement de 1996.

La population de langue maternelle française est passée de 341 502 personnes en 1951 à 499 689 en 1996. Elle a beaucoup augmenté entre 1951 et 1971, période où, attirés en grand nombre vers l'Ontario, les francophones de tout l'est du Canada, et en particulier du Québec, ont convergé vers la province. Ils ont contribué à consolider un large réseau institutionnel franco-ontarien, tant en milieu métropolitain que dans les petites villes. Le nombre de francophones s'est stabilisé depuis 1971 aux environs de 500 000 personnes.

Géographie

Les francophones sont présents partout en Ontario. L'Est reste le plus important foyer de concentration des Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens, avec plus de 200 000 personnes de langue maternelle française concentrées dans trois divisions de recensement : Ottawa-Carleton, Prescott-Russell et Stormont, Dundas et Glengarry. Le Nord accueille le deuxième plus fort contingent de francophones, soit près de 150 000 ou un peu plus du quart des Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens. Le Centre, c'est-à-dire le grand Toronto et les centres urbains avoisinants, a une population franco-ontarienne un peu moins importante : environ 110 000 personnes. Un francophone sur cinq habite maintenant la région, qui fait de plus en plus contrepoids à l'Est et au Nord, où se sont concentrés traditionnellement les francophones de la province. À peine plus de 40 000 Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens sont établis dans le Sud ou dans l'Ouest.

Le poids des francophones diffère sensiblement d'une région à l'autre. Le quart des Ontariennes et Ontariens du Nord-Est de la province sont Franco-Ontariens, ce qui crée un contexte favorable à l'usage du français dans une diversité de situations concrètes. Dans l'Est, la proportion des Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens diminue à un peu moins de 15%, mais les francophones sont ici très concentrés. La région est le siège du gouvernement fédéral et elle a des liens très étroits avec le Québec voisin. La communauté franco-ontarienne de l'Est jouit d'un large éventail d'institutions, ce qui contribue à la vitalité du français non seulement à l'échelle régionale mais aussi dans l'ensemble de l'Ontario français. Malgré leur nombre, les francophones du Centre comptent pour 1,6% de la population totale. Dispersés dans plusieurs localités où ils ne réussissent pas à former de véritables enclaves, leur milieu de vie est essentiellement anglophone.

Économie

Il existe un mouvement important de Caisses populaires et de coopératives en Ontario ainsi qu'une Chambre économique francophone regroupant plusieurs associations de gens d'affaires. Ces derniers représentent des outils de développement économique de taille pour les francophones de l'Ontario. Il existe aussi un nombre relativement important d'entrepreneurs francophones regroupés en associations.

Éducation

Il existe en Ontario douze conseils scolaires homogènes de langue française. Il y a 358 écoles primaires et secondaires de langue française. Plus de 120 000 élèves inscrits dans les écoles de langue française et plus de 122 000 élèves inscrits dans les écoles d'immersion. De plus, on retrouve deux universités bilingues (Laurentienne et Ottawa) et deux collèges universitaires bilingues (Glendon et Hearst) en Ontario. Environ 10 000 étudiantes et étudiants composent la clientèle étudiante du niveau universitaire. Il y a aussi le collège agroalimentaire (Alfred), trois collèges d'arts appliqués et de technologie francophones (La Cité collégiale, le Collège Boréal et le Collège des Grands Lacs). Environ 5 400 étudiantes et étudiants composent la clientèle étudiante du palier collégial.

Milieu associatif

L'Association canadienne-française de l'Ontario (ACFO) est le principal porte-parole représentant 21 composantes régionales et 25 associations affiliées. Depuis l'adoption du projet de loi 8 sur les services en français (1986), la mise en place d'institutions collégiales et universitaires de langue française, la promotion de la francophonie ontarienne, le développement d'infrastructures médiatiques, la vitalité de la communauté franco-ontarienne et la petite enfance figurent parmi les priorités de l'ACFO.

Profil des répondants

Parmi les 500 membres de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario (AJEFO) que nous avons contactés, 83 ont répondu au sondage. Cela représente un taux de réponses de 17%.

Ce questionnaire comportait surtout des questions fermées, se prêtant à une analyse quantitative. Le cadre de notre analyse est structuré en fonction des 83 personnes ayant répondu à ce sondage, dont plus particulièrement les 71 avocats de pratique privée. Ces personnes sont ci-après désignées, d'une part, comme ensemble ou totalité des répondants (avocats, juges, fonctionnaires, procureurs de la Couronne, traducteurs/interprètes et autres) et, d'autre part, comme avocats.

À part cet outil de cueillette de données, nous avons mené, en Ontario, des entrevues téléphoniques comportant davantage de questions semi-ouvertes et ouvertes, auprès d'autres répondants : quatre auxiliaires de justice, un procureur de la Couronne, deux juges, un représentant du ministère provincial et un représentant de l'AJEFO. De plus, nous avons animé un groupe de discussion (focus group) rassemblant des membres d'AJEF de plusieurs provinces, dont deux membres de l'Ontario. Les commentaires de ces intervenants sont intégrés suite à l'analyse quantitative des diverses sections sous le titre « Point de vue des autres intervenants dans le système judiciaire ». Ces commentaires révèlent certaines nuances, apportent certains renforcements ou soulèvent certaines questions. Afin de conserver l'anonymat des répondants et la confidentialité de leurs réponses, nous traitons, comme un tout, l'ensemble des données qualitatives qu'ils nous ont fournies.

Distribution professionnelle des répondants

Parmi les 83 répondants au sondage, 71 se sont identifiés comme avocats, ce qui représente 87% des répondants. Dans leur ensemble, les catégories autres que celle d'avocat représentent 13% des répondants au sondage en ligne. Celles-ci regroupent un juge, un procureur, trois fonctionnaires et six répondants travaillant dans d'autres domaines du droit. Une personne n'a pas identifié sa profession.

La majorité de l'analyse quantitative est basée sur la cohorte d'avocats ayant répondu au sondage. Plus d'un facteur explique cette démarche. D'abord, les avocats constituent la plus grande part des membres des AJEF. Ensuite, ils offrent des services de première ligne aux justiciables face à l'appareil judiciaire. Toutefois, lorsque cela est pertinent, nous présentons également des données concernant l'ensemble des répondants.

Distribution régionale des répondants et avocats

Les répondants ont été appelés à identifier le district judiciaire dans lequel ils exercent habituellement le droit. C'est à partir de cette question qu'ils sont associés à un district judiciaire, puis à une région.

Aux fins de l'analyse, nous avons regroupé les districts judiciaires en grandes régions selon les catégories suivantes : (Nord, Est, Ottawa, Centre et Sud). Nous avons regroupé sous l'appellation Nord, le Nord-Est et le Nord-Ouest à défaut d'un taux de réponses suffisant dans le Nord-Ouest. De plus, tel que le fait l'AJEFO, nous avons distingué la région d'Ottawa de l'Est étant donné le contexte urbain d'une part et le contexte généralement plus rural d'autre part.

Une part de l'analyse tient compte de distinctions selon les régions. Toutefois, nous n'avons pu le faire pour l'ensemble de l'analyse puisque, dans plusieurs cas, les nombres sont trop restreints. Il en est ainsi lorsqu'il s'agit des obstacles à la justice en français dans les divers domaines du droit qui relèvent de compétence fédérale (droit criminel, droit de la faillite, droit du divorce et de la pension alimentaire).

Ceci étant dit, le tableau 10.1 indique la façon dont l'ensemble des répondants, puis des avocats sont répartis en fonction des régions[79]. Pour l'ensemble des répondants nous en retrouvons 15 (19%) dans le Nord, six (8%) dans l'Est, 32 (41%) à Ottawa, 17 (22%) dans le Centre et cinq (6%) dans le Sud. En ce qui concerne les avocats, on en compte 14 (20%) dans le Nord, six (9%) dans l'Est, 29 (41%) à Ottawa, 16 (23%) dans le Centre et quatre (6%) dans le Sud. Comme on peut le constater, les proportions de répondants selon les régions sont très semblables, qu'il s'agisse de la totalité des répondants au sondage ou des avocats seulement.

Langue maternelle et langue de travail des avocats

Comme l'illustre le tableau 10.2, parmi les avocats membres de l'AJEFO, ayant répondu au sondage, 55 sur 71 (77%) sont de langue maternelle française et 15 sur 71 (21%) sont de langue maternelle anglaise.

Parmi les avocats de langue maternelle française, 45 sur 55 (82%) travaillent en français et en anglais, huit sur 55 (15%) travaillent en anglais et deux sur 55 (4%) travaillent en français. Parmi les avocats de langue maternelle anglaise, neuf sur 15 (60%) travaillent en français et en anglais.

La proportion d'avocats de langue maternelle anglaise travaillant dans l'une et l'autre langue officielle paraît élevée. Toutefois, notons que notre échantillon de répondants est tiré de la liste des avocats membres de l'Association des juristes d'expression française. À ce titre, on pourrait poser l'hypothèse selon laquelle ces individus seraient sinon francophones, du moins francophiles et suffisamment bilingues pour pouvoir travailler non seulement en anglais mais aussi en français.

Ainsi, les avocats et avocates de langue maternelle française sont appelés à travailler en français et en anglais dans des proportions de 82%, puis ceux et celles de langue maternelle anglaise sont appelés à travailler en français et en anglais dans des proportions de 60%. Ceci indiquerait la présence d'une demande de services judiciaires et juridiques dans l'une et l'autre langue officielle ainsi qu'une capacité de ces avocats à donner des services dans l'une et l'autre langue. Le caractère bilingue de la pratique du droit chez les avocats membres de l'AJEFO ressort donc de ces données.

Langue maternelle et université où les études de droit ont été poursuivies

Le tableau 10.3 révèle que 45 des 71 avocats (63%) ayant répondu au sondage ont étudié à l'Université d'Ottawa, quatre (6%) ont étudié à l'Université de Moncton et 22 (31%) ont étudié dans une université autre que celles qui offrent des programmes de droit en français dans la francophonie canadienne hors Québec. De ces 22 avocats, 20 ont étudié dans des institutions anglophones, deux ont étudié dans des institutions francophones autres que Moncton et Ottawa.

Les avocats qui ont suivi le programme de common law dans un contexte de formation francophone ou bilingue (Moncton ou Ottawa) sont au nombre de 49, ils représentent 69% du total.

Les avocats de langue maternelle française ont reçu une formation juridique à la faculté de droit de l'Université d'Ottawa dans une proportion de 76% (42 sur 55) alors que 7% (quatre sur 55) ont fréquenté l'école de droit de l'Université de Moncton. Les autres avocats de langue maternelle française ont fait leurs études de droit ailleurs qu'à Ottawa ou Moncton, et ce, dans une proportion de 16%.

Parmi les avocats de langue maternelle anglaise, trois sur 15 (20%) ont fait leurs études de droit à l'Université d'Ottawa et 12 sur 15 (80%) sont allés ailleurs.

Parmi les avocats qui ont étudié à l'Université d'Ottawa, ceux de langue maternelle française représentent 93% et ceux de langue maternelle anglaise 7%.

Une forte proportion d'avocats de langue maternelle française ont donc poursuivi leurs études de droit à l'Université d'Ottawa. Le programme de common law se donne aussi bien en français qu'en anglais à cette université alors qu'il se donne uniquement en français à l'Université de Moncton.

Au sein même du programme de common law français de l'Université d'Ottawa, il est possible pour un étudiant de faire 25% de sa scolarité en anglais durant les deuxième et troisième année alors que la première année doit être complétée en français. Étant donné le contexte bilingue de la pratique juridique en Ontario, le modèle de l'Université d'Ottawa serait bien adapté dans la mesure où les étudiants ont la chance d'acquérir le vocabulaire juridique nécessaire à l'exercice du droit, d'abord en français puis en anglais.

Toutefois, avant d'en arriver à un tel constat, il importe de rendre compte de la langue dans laquelle les études de droit ont été poursuivies à l'Université d'Ottawa puisqu'elle offre la possibilité de suivre le programme de common law en français ou en anglais.

Universités où les études de droit ont été poursuivies et langue des études en droit

Dans le tableau 10.4, nous observons que, parmi les 45 avocats qui ont étudié à l'Université d'Ottawa, 23 (51%) ont étudié en français, 7 (16%) ont étudié en anglais et 15 (33%) ont étudié en français et en anglais. Ainsi, un peu plus de la moitié des répondants qui ont fait leurs études de droit à l'Université d'Ottawa les ont fait en français et un peu plus du tiers les ont fait en français et en anglais. Entre l'une et l'autre cohorte de répondants, 84% ont acquis des connaissances juridiques en français.

Points de vue des autres intervenants dans le système judiciaire

Selon plus d'un intervenant, la création des programmes de common law en français aurait contribué à augmenter à la fois l'offre et la demande de services judiciaires et juridiques en français. Un des intervenants associe la hausse significative des demandes de procéder en français dans la province, depuis 1997, à la présence accrue d'avocats diplômés d'écoles de droit francophones ainsi qu'à l'éducation accrue des francophones quant à leurs droits.

Université et langue de travail

Tel que l'indique le tableau 10.5, la majorité des avocats ayant répondu au sondage travaillent en français et en anglais. Parmi les avocats ayant étudié à l'Université d'Ottawa, 37 des 45 répondants (82%) travaillent en français et en anglais, les quatre diplômés de la Faculté de droit de l'Université de Moncton travaillent tous en français et en anglais, puis, sur l'ensemble des diplômés en droit d'autres universités, 63% travaillent en français et en anglais.

Ainsi, encore une fois, ces données font ressortir le caractère bilingue de l'exercice du droit parmi les avocats membres de l'AJEFO.

Langue de travail et langue d'études en droit

Le tableau 10.6 illustre que, parmi les 55 avocats dont la langue de travail est le français et l'anglais, 23 ou 42% ont étudié le droit en français, 14 ou 26% ont fait leurs études en anglais et 18 ou 33% ont étudié en français et en anglais.

Ainsi, une part importante des avocats qui travaillent dans les deux langues officielles ont poursuivi des études de droit soit entièrement, soit partiellement en français. Au total, il s'agit de 41 avocats sur 55 ou 75%.

Ce constat illustre encore une fois l'importance de programmes de droit en français pour l'exercice du droit dans cette langue.

Demande et offre de services en français

Proportion de la clientèle de langue française et demande de services en français

Comme le démontre le tableau 10.7, parmi l'ensemble des avocats sondés, en moyenne, le tiers (31%) de leur clientèle est de langue française. De ce tiers, près de la moitié des clients, soit 47% en moyenne, demandent des services en français. Ces proportions varient d'une région à l'autre.

Dans le Nord et l'Est, comparativement à l'ensemble de la province, une proportion plus forte de la clientèle est de langue française. Toutefois, une plus faible proportion de cette clientèle demande des services judiciaires et juridiques en français. Dans le Nord, 38% de la clientèle est de langue française et 29% de celle-ci demande des services judiciaires et juridiques en français. Dans l'Est, 35% de la clientèle est de langue française et 34% de celle-ci demande des services judiciaires et juridiques en français.

À Ottawa, la proportion de clientèle de langue française est la plus forte (43%) et elle demande davantage de services en français (65%). Notons que, puisque la région d'Ottawa rassemble une forte proportion des avocats ayant répondu au sondage, soit 41%, ceci peut avoir contribué à hausser les données pour l'ensemble de la province.

Dans le Centre de la province, une faible proportion de la clientèle est de langue française (8%). Par ailleurs, une plus forte proportion de cette clientèle comparativement à l'Est et au Nord, demande des services judiciaires et juridiques en français (36%).

Dans le Sud, nous retrouvons une proportion de clientèle de langue française légèrement plus élevée que dans le Centre, soit 11%. C'est toutefois beaucoup moins élevé que dans les trois autres régions. Également, la proportion de clientèle demandant des services judiciaires et juridiques en français est la moins élevée à 22%.

Points de vue des autres intervenants dans le système judiciaire

L'information fournie par un intervenant important paraît concorder avec ces données. En effet, d'un point de vue régional, on dit remarquer que l'Est Ontarien (les cinq comtés et Ottawa) entend plus de causes en français que l'ensemble de la province et que la région de Toronto en entend autant, en chiffres absolus, que celle du Nord. En outre, il y aurait eu une augmentation très importante des causes entendues en français dans la région de Toronto depuis les dernières années. Toutefois, dans la région du Sud-Ouest, il y aurait peu de demandes à procéder en français.

Sur le plan provincial on dit remarquer une augmentation significative des demandes à procéder en français et du nombre de causes entendues en français depuis les dernières années. Dans l'ensemble de la province, on peut constater, dit-on, que le nombre de demandes de services en français a augmenté et continue de croître. Par ailleurs, le nombre de plaintes relatives à la prestation de services judiciaires et juridiques en français a diminué, d'où le constat selon lequel la capacité d'offrir des services judiciaires et juridiques en français se serait améliorée tant en termes de quantité et de qualité.

L'accroissement des demandes de procéder en français et des causes entendues dans cette langue serait lié, selon cet intervenant, à la présence accrue d'avocats diplômés d'écoles de droit francophones et à une plus grande sensibilisation des francophones à l'égard de leurs droits linguistiques.

Perception des incidences à procéder en français

Comme l'illustre le tableau 10.8, selon l'ensemble des avocats, le facteur qui aurait le plus d'incidence sur le choix de procéder ou non en français serait les délais dans la prestation de services. En effet, en leur demandant si certains facteurs auraient une incidence sur les choix de procéder ou non en français, 37 sur 63 répondants (59%) identifient ce facteur.

Perception des incidences à procéder ou non en français selon les régions

Du point de vue des régions, certaines nuances peuvent être apportées.

Délais dans la prestation des services

Les avocats perçoivent que cela peut avoir une incidence négative sur le choix de procéder en français dans les proportions suivantes : 62% des répondants du Nord, 100% des répondants de l'Est, 54% des répondants d'Ottawa, 39% des répondants du Centre et 100% des répondants du Sud de la province. Alors que cette opinion est unanime dans l'Est et dans le Sud de la province, elle est plus partagée à Ottawa et dans le Centre. En effet, à Ottawa, 54% considèrent les délais comme facteur ayant une incidence sur le choix de procéder en français, 39% ne considèrent pas ce facteur comme ayant une incidence et 7% ne le savent pas. Dans le Centre de la province, 39% considèrent les délais comme facteur ayant une incidence sur le choix de procéder en français, 46% ne considèrent pas ce facteur comme ayant une incidence et 15% ne savent pas.

Coûts additionnels

Dans quatre des cinq régions, soit le Nord, l'Est, Ottawa et le Sud, on ne considère généralement pas ce facteur comme ayant une incidence sur le choix de procéder ou non en français. Les proportions sont les suivantes : 54% dans le Nord, 75% dans l'Est, 71% à Ottawa et 75% dans le Sud. Toutefois, les réponses sont plus partagées dans le Centre de la province où, de part et d'autre, la même proportion de répondants, soit 39%, considèrent ce facteur comme ayant ou non une incidence sur le choix de procéder en français. Dans cette région, plusieurs, soit 23%, indiquent ne pas savoir alors que cette proportion est de 0% dans trois des autres régions et de 15% au Nord de la province.

Possibilité d'un jugement défavorable

Les répondants de la région d'Ottawa expriment l'opinion selon laquelle ce facteur n'a pas d'incidence, dans une forte proportion, soit de 93%. Les répondants du Sud de la province expriment la même opinion à 75%, l'autre 25% ne se prononcent pas. Dans les trois autres régions, les réponses sont plus partagées. Dans le Nord, 54% considèrent que ce facteur n'a aucune incidence, 31% estiment qu'il a une incidence et 15% ne savent pas. Dans l'Est, exactement la moitié des répondants considèrent que ce facteur a une incidence et l'autre moitié pense qu'il n'a pas d'incidence. Dans le Centre de la province, 54% ne considèrent pas ce facteur comme ayant une incidence, 8% estiment qu'il a une incidence et 39% ne le savent pas. Notons les proportions importantes d'avocats qui ne se sont pas prononcés sur la question, soit 25% dans le Sud et 39% dans le Centre. Ceci est préoccupant dans la mesure où cet élément met en question la perception d'une justice rendue.

Possibilité d'interjeter appel

Ce facteur n'est pas considéré comme ayant une incidence sur le choix de procéder ou non en français dans les proportions suivantes : 75% dans l'Est, 93% à Ottawa, 67% au Centre et 75% dans le Sud. Cette proportion est moins forte dans le Nord de la province où elle est à 54%, 28% croyant que ce facteur a une incidence et la même proportion ne le sachant pas.

Perception, chez les clients, d'une crainte d'incidences négatives sur leur dossier pour justifier leur choix de ne pas procéder en français

Les avocats de la région de l'Est ontarien perçoivent davantage cette crainte chez leurs clients, et ce, dans une proportion de quatre sur cinq répondants ou 80% alors que 20% ne le savent pas. Cette crainte est aussi perçue dans le Nord de la province dans une proportion de 46% bien que 39% ne perçoivent pas cette crainte et que 16% ne le savent pas. Par ailleurs, du côté d'Ottawa et du Centre de la province, on perçoit encore moins cette crainte chez les clients puisque 79% des répondants à Ottawa et 64% au Centre disent ne pas percevoir cette crainte chez leurs clients. C'est au sud que les opinions sont les plus partagées, 50% ne percevant pas cette crainte, 25% la percevant et 25% ne le sachant pas.

En somme, selon ces données, l'opinion au niveau des régions correspond en partie à l'opinion de l'ensemble des avocats ayant répondu au sondage. Toutefois, on peut remarquer que, à l'égard de quatre facteurs, dans les régions les plus éloignées : de l'Est, du Nord et du Sud, les répondants perçoivent davantage d'incidences à procéder en français. Cette tendance paraît se dessiner en ce qui concerne la perception des répondants de l'Est et du Sud de la province par rapport aux délais dans la prestation des services, des répondants de l'Est de la province en ce qui concerne la question d'un jugement défavorable et des répondants de l'Est et du Nord pour ce qui est de la perception d'une crainte chez les clients d'incidences négatives à procéder en français.

Points de vue des autres intervenants dans le système judiciaire

Un intervenant du Nord dit percevoir, en plus des craintes déjà identifiées chez les justiciables francophones (délais, coûts et peur d'un jugement défavorable), une inquiétude chez certains clients francophones de ne pas bien comprendre soi-même le procès.

Connaissance et application de l'article 530 du Code criminel

Tel que l'indique le tableau 10.9, de l'avis des avocats, généralement, l'article 530 du Code criminel paraît être connu et appliqué en ce qui a trait à la connaissance des étapes où il y a possibilité de faire un choix linguistique.

En ce qui concerne l'avis aux accusés de la part des juges au sujet de la possibilité de faire un choix linguistique, les réponses sont plus partagées puisque 50% des avocats ont indiqué ne pas être au courant. Néanmoins, 37% estiment que les juges avisent les accusés de leur droit à faire un choix linguistique.

Bien que dans 43% des cas les avocats soutiennent que les formulaires sont disponibles en français, 22% affirment le contraire et 35% ne le savent pas.

Ainsi, de leur point de vue, les avocats connaissent et sont en mesure de respecter les exigences de l'article 530 du Code criminel. Toutefois, en leur demandant si les juges avisent les accusés de leur droit à faire un choix linguistique et si les formulaires sont disponibles, les réponses sont moins catégoriques. Cette indécision est particulièrement préoccupante en ce qui concerne l'avis donné aux accusés par les juges sur leur possibilité de choix linguistiques. Bien que ce soit en l'absence d'un avocat qu'un juge soit tenu d'offrir au justiciable de procéder en français, il est tout de même curieux qu'en tant que catégorie de répondants, ils soient si nombreux à être incapables de se prononcer sur la question.

Offre active de services

Le tableau 10.10 indique que plusieurs répondants, 43%, ne sont pas au courant de l'existence d'une politique d'offre active de services dans les deux langues officielles dans la province alors que 39% affirment qu'il y en a une.

Points de vue des autres intervenants dans le système judiciaire

Un intervenant averti fait toutefois remarquer que l'Ontario est doté d'une politique d'offre active de services judiciaires et juridiques dans les deux langues officielles dans la mesure où cette province dispose de la Loi sur les services en français ainsi que de la Loi sur les tribunaux judiciaires. De plus, un nouveau règlement de procédure bilingue a été adopté en juin 2001. Ce règlement s'inspire de la Loi sur les tribunaux judiciaires. Il concerne les instances de droit civil, de droit de la famille et celles qui sont intentées en vertu de la Loi sur les infractions provinciales. En vertu de ce nouveau règlement, le droit à une instance bilingue est assuré soit par le dépôt d'une réquisition, par une déclaration devant le tribunal, par le dépôt d'une déclaration écrite auprès du tribunal ou parle dépôt du premier document rédigé en français. Une instance bilingue est une action ou une demande devant un tribunal au cours de laquelle le français et l'anglais peuvent être utilisés.

Malgré ces dispositions, des intervenants ne sont pas au courant de l'existence d'une politique d'offre active de services judiciaires et juridiques en français. Certains soutiennent que des mécanismes d'offre active de services judiciaires et juridiques en français seraient nécessaires afin de créer une demande là où elle apparaît insuffisante. En effet, il s'agirait, dit-on, d'encourager les francophones à connaître et à exercer leurs droits linguistiques.

Parmi les intervenants qui reconnaissent l'existence d'une législation en matière d'offre active de services judiciaires et juridiques en français, plus d'une personne soutient que la dévolution des pouvoirs aux municipalités qui échappent à la Loi sur les services en français fait en sorte que les garanties législatives sont toutefois affaiblies sinon anéanties.

Obstacles à la justice en français

Aperçu global de la satisfaction à l'égard des services judiciaires et juridiques en français

Tel que l'indique le tableau 10.11, c'est dans le domaine du droit criminel que les avocats sont globalement les plus satisfaits face aux services en français, 65% d'entre eux se disant satisfaits et 35% se disant insatisfaits. Suit, en second lieu, la satisfaction des avocats face aux services judiciaires et juridiques en français dans le domaine du droit de la faillite où ils sont satisfaits à 55% et insatisfaits à 46%. Enfin, la moins grande satisfaction à l'égard des services en français se retrouve dans le domaine du droit de la famille où 53% des avocats se disent satisfaits et 47% se déclarent insatisfaits.

Les proportions concernant la satisfaction à l'égard des services judiciaires et juridiques en français dans le domaine du droit criminel et du droit du divorce sont à peu près semblables chez l'ensemble des répondants auxquels cette question s'appliquait et chez les avocats qui exercent dans ces domaines. Toutefois, en ce qui concerne le droit de la faillite, sur l'ensemble des répondants, plus d'avocats sont insatisfaits que satisfaits dans des proportions de 54% et 46%.

Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine du droit criminel

Suivant le tableau 10.12, en retenant les éléments où il y a davantage de réponses positives que négatives ou non concluantes (« je ne sais pas »), nous observons, dans les proportions suivantes, la perception d'une facilité d'accès à des juges aptes à donner des services en français (43%), à des interprètes (65%) et à la législation en français (73%) chez les répondants

En retenant les éléments où il y a davantage de réponses négatives que positives ou non concluantes (« je ne sais pas ») quant à l'accès aux services et aux documents en français, nous constatons qu'en matière de droit criminel les avocats considèrent que les services et documents suivants ne sont pas facilement accessibles : services de la part des auxiliaires de justice de la cour supérieure (44%), services de la part du personnel administratif du palais de justice (39%), actes de procédure en français (39%), jurisprudence en français (52%) et doctrine en français (39%). Parmi cette liste de services et documents moins aisément accessibles en français, il semble que les services en français de la part des auxiliaires de justice de la Cour supérieure et l'accès à la jurisprudence en français posent le plus de difficultés.

Notons une certaine ambiguïté entourant l'accès à un jury pouvant comprendre la cause en français puisque, face à ce facteur, la plus forte proportion des réponses ne sont pas concluantes, 52% des répondants ayant indiqué ne pas savoir s'il était facile d'y avoir accès.

En somme, ces données soulèvent des questions quant à l'accès à des services en français de la part des auxiliaires de justice de la Cour supérieure, à l'accès à la jurisprudence en français et à un jury bilingue dans le domaine du droit criminel en Ontario. À défaut d'un nombre suffisant de répondants, nous ne pouvons nous prononcer sur la distribution régionale de ces lacunes apparentes. Toutefois, il serait intéressant de vérifier si ces lacunes sont effectivement localisées.

Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine du droit de la faillite

Suivant le tableau 10.13, en retenant les éléments où il y a davantage de réponses positives que négatives ou non concluantes, nous observons selon 50% des répondants une facilité d'accès à des juges aptes à donner des services en français bien que 42% des répondants ne se prononcent pas. Il y aurait, selon 58% des répondants, une facilité d'accès aux actes de procédure en français.

Par ailleurs, pour ce qui est de l'accès à la jurisprudence et à la doctrine en français, cela paraît problématique puisque 58% des répondants estiment qu'il n'est pas facile d'avoir accès à la jurisprudence en français et que 67% des répondants soutiennent qu'il en est de même pour la doctrine en français.

Notons qu'à l'égard des services en français de la part des juges et des interprètes les réponses sont toutefois partagées. En ce qui concerne les services en français de la part des juges, 50% considèrent y avoir facilement accès et 42% ne se prononcent pas sur la question. En ce qui a trait aux interprètes, 36% considèrent y avoir facilement accès alors que 45% des répondants ne se prononcent pas sur la question.

En somme, ces quelques données soulèvent essentiellement des questions sur l'accès à la jurisprudence et à la doctrine en français dans le domaine du droit de la faillite en Ontario. Encore une fois, il aurait été intéressant de vérifier si l'apparence de lacunes dans ces domaines est effectivement localisée. Toutefois, à défaut d'un nombre suffisant de répondants, nous ne pouvons nous prononcer sur la distribution régionale des réponses.

Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine du droit du divorce et de la pension alimentaire

Dans le tableau 10.14, en retenant les éléments où il y a davantage de réponses positives que négatives ou non concluantes, les services et documents seraient accessibles en français selon les répondants dans les proportions suivantes : services de la part des juges (58%), services de la part des auxiliaires de justice de la cour provinciale (53%), services de la part du personnel administratif du palais de justice (44%), services de la part d'interprètes (47%) et accès aux actes de procédure en français (74%).

Par ailleurs, selon 63% des répondants, la doctrine ne serait pas facilement accessible en français de même que la jurisprudence selon 42% des répondants.

Encore une fois, il aurait été intéressant de vérifier si l'apparence de lacunes, dans ces domaines, est effectivement localisée. Toutefois, à défaut d'un nombre suffisant de répondants, nous ne pouvons nous prononcer sur la distribution régionale des réponses.

Obstacles à l'accès à la justice en français selon les autres intervenants dans le système judiciaire

Certaines des lacunes identifiées dans le cadre du sondage ont été soulevées et davantage élaborées lors de nos consultations auprès des autres intervenants dans le système judiciaire. De plus, ces derniers ont identifié d'autres obstacles.

Selon plus d'un intervenant, les obstacles à l'accès à la justice en français en Ontario ne relèvent pas des principes du droit mais de la mise en œuvre du droit. On estime que la législation prévoyant le droit des justiciables francophones aux services judiciaires et juridiques dans leur langue devrait assurer l'accès à la justice en français dans la province. Toutefois, dans les faits, il s'avérerait que ce droit n'est pas assuré, et ce, pour diverses raisons. Voici les plus grands obstacles identifiés par ces intervenants.

Insuffisance de juges francophones ou bilingues

Plusieurs constatent et déplorent une insuffisance ou même une absence de juges francophones ou bilingues dans certaines régions. Le manque de recours à des juges francophones ou bilingues dans certaines régions, entraîne, dit-on, des retards dans la prestation des services judiciaires et juridiques aux justiciables francophones, puisqu'il faut prévoir le déplacement d'un juge venant d'une autre circonscription judiciaire.

Lacunes dans le processus de nomination des juges

Plusieurs attribuent le manque de juges francophones ou bilingues au processus de nomination où ne sont pas prises suffisamment en considération les capacités linguistiques des candidats. Non seulement, dit-on, les capacités linguistiques des juges doivent-elles être considérées, mais de plus, elles doivent être évaluées. En effet, il s'agirait de s'assurer que les juges considérés bilingues puissent effectivement entendre une cause aussi bien en français qu'ils ne le font en anglais.

Déficiences dans les cours de formation de français juridique des juges anglophones

Plus d'un intervenant considère que les cours de formation de français juridique offerts aux juges de langue anglaise sont inadéquats. Ces cours sont suivis sur une base volontaire, ne sont offerts qu'une fois par année pendant quelques jours et manquent de mise en application au sein des tribunaux.

Bien que des améliorations puissent être apportées aux cours de formation de français juridique des juges anglophones, certains soutiennent que les efforts doivent être davantage consacrés à la nomination de juges francophones et bilingues puisque la compréhension d'une langue relève non seulement de la maîtrise du langage technique, en l'occurrence le langage juridique, mais aussi d'une compréhension de la culture.

En somme, il s'agirait, dans les processus de nomination et de formation des juges, d'assurer de façon soutenue, la présence de juges aptes à présider des procès ou des causes impliquant des justiciables francophones.

Insuffisance d'avocats francophones ou bilingues dans certaines régions

Bien que le nombre d'avocats aptes à plaider en français semble s'être généralement accru et que plusieurs travaillent en français et en anglais, certains font toutefois remarquer que, dans certaines régions, ces avocats se font très rares sinon inexistants. Tel serait le cas de Sault-Ste Marie par exemple.

Insuffisance de personnel compétent et bilingue

Plus d'un intervenant constate un manque de personnel rattaché aux services judiciaires et de personnel des palais de justice qui soit à la fois compétent et bilingue. En outre, on fait remarquer que des salaires trop bas empêchent de recruter et de retenir un tel personnel. Aussi s'agirait-il de mettre en œuvre les mesures nécessaires afin de recruter, former et retenir du personnel compétent et bilingue. À cet effet, on peut penser notamment aux auxiliaires de justice de la cour et au personnel administratif.

Insuffisance d'interprètes

Selon plus d'un intervenant, les services d'interprétation ne seraient pas toujours offerts.

Défaillances dans les services de police

Dans plus d'un cas, on remarque que les services de police sont surtout anglophones et donc peu disposés à offrir des services en français. D'ailleurs, on fait remarquer que, de plus en plus, la police provinciale a recours à la sous-traitance de ses services vers les services policiers municipaux. Or, au niveau municipal, il n'y a pas d'obligation quant à Loi sur les services en français. Ainsi, croit-on que de telles ententes entre services policiers devraient prévoir certaines dispositions quant aux services en français.

Par ailleurs, même si, en principe, les services policiers de la province sont tenus de respecter la Loi sur les services en français, c'est-à-dire d'être en mesure de répondre à un citoyen dans langue officielle de son choix, il s'avère qu'une politique d'offre active serait nécessaire. En effet, face au policier, le citoyen moyen se trouve en présence d'un représentant de l'autorité qu'il peut craindre d'indisposer en exigeant qu'il s'adresse à lui en français plutôt qu'en anglais. Ainsi, certains suggèrent que les policiers soient obligés d'aborder les citoyens dans l'une et l'autre langue officielle. Ceci pourrait se faire oralement ou par écrit.

Carences dans le financement de l'aide juridique

Aussi, plus d'un intervenant identifie l'insuffisance de financement à l'aide juridique comme un obstacle majeur à l'offre et à la demande de services judiciaires et juridiques en français. Des cliniques d'aide juridique n'auraient simplement pas les moyens d'assurer des services en français. Selon un intervenant, la difficulté ou l'incapacité des services d'aide juridique à offrir des services en français serait plus sérieuse dans les circonscriptions judiciaires à moins forte concentration de francophones, soit les circonscriptions à l'extérieur des grands centres que sont Toronto, Ottawa, Windsor, Welland, Timmins et Sudbury.

La difficulté sinon l'incapacité des services d'aide juridique à offrir des services aussi bien en français qu'en anglais serait d'autant plus préoccupante que, d'une part, ce sont les citoyens les plus vulnérables de notre société qui ont généralement recours à l'aide juridique et que, d'autre part, les services d'aide juridique occupent une place de plus en plus prépondérante dans l'exercice du droit, notamment dans le domaine du droit du travail ou dans celui du droit du logement.

Carences dans le financement des AJEF

Selon divers répondants, les associations cherchant à améliorer l'accès de groupes minoritaires au système judiciaire, dont les AJEF, souffrent d'un important sous-financement. Ceci limite, disent plusieurs, leur capacité à faire avancer, de pair avec les ministères, l'accès à la justice.

Initiatives

Initiatives en cours

Des intervenants nous ont informés de certaines initiatives en cours en Ontario qui contribueraient à l'accès à la justice en français et qui pourraient être intéressantes pour d'autres juridictions.

En effet, l'Ontario met présentement en place ce qui est désigné comme le « Projet de justice intégrée ». Ce projet regroupe l'ensemble des services judiciaires (procureur général, solliciteur général et services correctionnels) offerts aussi bien en français qu'en anglais et qui sont mis à la disposition des citoyens dans les deux langues sous format électronique (interfaces, dépôt électronique de documents, accès aux formulaires, etc.) Certains problèmes comme l'isolement géographique ou la disponibilité de commis bilingues seraient ainsi surmontés. De cette façon, dit-on, les processus devraient être accélérés et l'accès à des services de qualité en français assuré.

Une initiative novatrice aurait été adoptée par le Barreau de l'Ontario, inscrivant au code de déontologie de la profession juridique l'obligation des avocats à informer les clients qu'ils peuvent obtenir des services judiciaires et juridiques dans l'une ou l'autre langue officielle.

Initiatives implantées

Malgré les préoccupations et les réserves énoncées un peu plus haut dans le rapport, des intervenants reconnaissent toutefois des efforts du gouvernement fédéral pour faciliter l'accès à la justice en français. En outre, on considère que la partie VII de la Loi sur les tribunaux judiciaires, qui prévoit que les langues officielles des tribunaux soient le français et l'anglais, aurait eu une incidence positive sur la prestation des services judiciaires et juridiques dans les deux langues officielles.

On souligne aussi certaines initiatives qui auraient eu des incidences positives sur l'accès à la justice en français : la nomination de quelques juges francophones et de quelques juges anglophones bilingues et le fait d'avoir embauché quelques procureurs de la Couronne francophones, de greffiers francophones, la mise en place également d'un service de traduction lors de procédures, la traduction des lois provinciales, la traduction en français des Règles de procédure et la mise en place du Programme de formation en common law en français à l'Université d'Ottawa.

Pistes de solutions

Fédéral

Comme pistes de solutions au palier fédéral, il pourrait s'agir de :

Provincial

Autres

Tableaux

Tableau 10.1 : Distribution des répondants et avocats par régions
Régions Ensemble des répondants Avocats
Nombre Proportion Nombre Proportion
Nord 15 19% 14 20%
Est 6 8% 6 9%
Ottawa 32 41% 29 41%
Centre 17 22% 16 23%
Sud 5 6% 4 6%
Sud-Ouest 3 4% 1 1%
Total 78 100% 70 100%
Tableau 10.2 : Langue maternelle et langue de travail des avocats
Langue de travail Langue maternelle
Français Anglais Autre Total
Français 2   0   0   2 (3%)
Anglais 8   6   0   14 (20%)
Français et anglais 45   9   1   55 (77%)
Total 55 (78%) 15 (21%) 1 (1%) 1 (100%)
Tableau 10.3 : Langue maternelle et université où les études de droit ont été poursuivies
Langue maternelle Université
Autre Moncton Ottawa Total
Français 9   4   42   55 78%)
Anglais 12   0   3   15 (21%)
Autre 1   0   0   1 (1%)
Total 22 (31%) 4 (6%) 45 (63%) 71 (100%)
Tableau 10.4 : Université où les études de droit ont été poursuivies et langue de formation
Langue de formation Université
Autre Moncton Ottawa Total
Français 0   4   23   27 (38%)
Anglais 16   0   7   23 (32%)
Français et anglais 6   0   15   21 (30%)
Total 22 (31%) 4 (6%) 45 (63%) 71 (100%)

Tableau 10.5 : Université et langue de travail
Langue de travail Université
Autre Moncton Ottawa Total
Français 0   0   2   2 (3%)
Anglais 8   0   6   14 (20%)
Français et anglais 14   4   37   55 (77%)
Total 22 (31%) 4 (6%) 45 (63%) 71 (100%)
Tableau 10.6 : Langue de travail et langue d'études en droit
Langue d'études en droit Langue de travail
Français Anglais Français et anglais Total
Français 2   2   23   27 (38%)
Anglais 0   9   14 23   (32%)
Français et anglais 0   3   18   21 (30%)
Total 2 (3%) 14 (20%) 55 (77%) 71 (100%)
Tableau 10.7 : Proportion de la clientèle de langue française et demande de services en français selon les avocats
  Ensemble Nord Est Ottawa Centre Sud
Proportion de la clientèle qui est de langue française 31% 38% 35% 43% 8% 11%
Proportion de la clientèle de langue française qui demande des services judiciaires et juridiques en français 47% 29% 34% 65% 36% 22%
Tableau 10.8 : Perception des incidences à procéder en français
  Oui Non Je ne sais pas
Délais dans la prestation de services 37 (59%) 20 (32%) 6 (10%)
Coûts additionnels 19 (31%) 38 (61%) 5 (8%)
Jugement défavorable 9 (15%) 45 (73%) 8 (13%)
Possibilité d'interjeter appel 6 (10%) 47 (77%) 8 (13%)
Perception d'une crainte d'incidence négative chez les clients 17 (26%) 39 (60%) 9 (14%)

Tableau 10.9 : Connaissance et application de l'article 530 du Code criminel
  Oui Non Je ne sais pas
Connaissance de l'article 530 20 (83%) 2 (8%) 2 (8%)
Connaissance des étapes où il y a possibilité de faire un choix linguistique 19 (79%) 4 (17%) 1 (4%)
Avis des clients, de la part des avocats, de la possibilité de faire un choix linguistique 17 (81%) 1 (5%) 3 (14%)
Avis des accusés, de la part des juges, de la possibilité de faire un choix linguistique 8 (37%) 3 (14%) 11 (50%)
Disponibilité des formulaires en français 10 (43%) 5 (22%) 8 (35%)
Tableau 10.10 : Offre active de services
  Oui Non Je ne sais pas
Existence d'une politique d'offre active dans les deux langues officielles dans la province 9 (39%) 4 (17%) 10 (43%)
Tableau 10.11 : Aperçu global de la satisfaction à l'égard des services judiciaires et juridiques en français
  Avocats Ensemble
Satisfait Insatisfait Satisfait Insatisfait
Globalement, face aux services judiciaires et juridiques en français en matière de droit criminel, êtes-vous : 13 (65%) 7 (35%) 14 (64%) 8 (36%)
Globalement, face aux services judiciaires et juridiques en français en matière de droit de la faillite, êtes sous : 6 (55%) 5 (46%) 6 (46%) 7 (54%)
Globalement, face aux services judiciaires et juridiques en français en matière de droit du divorce, êtes-vous : 10 (53%) 9 (47%) 10 (50%) 10 (50%)
Tableau 10.12 : Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine du droit criminel
  Oui Non Je ne sais pas
De la part des juges 10 (43%) 8 (35%) 5 (22%)
De la part des auxiliaires de justice de la cour provinciale 8 (35%) 7 (30%) 8 (35%)
De la part des auxiliaires de justice de la Cour supérieure 5 (22%) 10 (44%) 8 (35%)
De la part du personnel administratif du palais de justice 8 (35%) 9 (39%) 6 (26%)
De la part des procureurs fédéraux 10 (43%) 6 (26%) 7 (30%)
De la part des procureurs provinciaux 9 (41%) 7 (32%) 6 (27%)
De la part des interprètes 15 (65%) 2 (9%) 6 (26%)
Quant aux actes de procédure en français 8 (35%) 9 (39%) 6 (26%)
Quant à la constitution d'un jury apte à comprendre la cause en français 6 (26%) 5 (22%) 12 (52%)
Quant à la législation en français 16 (73%) 3 (14%) 3 (14%)
Quant à la jurisprudence en français 7 (30%) 12 (52%) 4 (17%)
Quant à la doctrine en français 6 (26%) 9 (39%) 8 (35%)
Tableau 10.13 : Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine du droit de la faillite
  Oui Non Je ne sais pas
Des la part des juges 6 (50%) 1 (8%) 5 (42%)
De la part des auxiliaires de justice de la Cour supérieure 4 (37%) 4 (37%) 3 (27%)
De la part du personnel administratif du palais de justice 3 (30%) 4 (40%) 3 (30%)
De la part des interprètes 4 (36%) 2 (18%) 5 (45%)
Quant aux actes de procédure en français 7 (58%) 3 (25%) 2 (17%)
Quant à la jurisprudence en français 4 (33%) 7 (58%) 1 (8%)
Quant à la doctrine en français 2 (17%) 8 (67%) 2 (17%)
Tableau 10.14 : Facilité d'accès aux services et aux documents en français selon les avocats exerçant dans le domaine de la famille
  Oui Non Je ne sais pas
De la part des juges 11 (58%) 6 (32%) 2 (11%)
De la part des auxiliaires de justice de la cour provinciale 10 (53%) 7 (37%) 2 (11%)
De la part des auxiliaires de justice de la Cour supérieure 9 (47%) 7 (37%) 3 (16%)
De la part du personnel administratif du palais de justice 8 (44%) 7 (39%) 3 (17%)
De la part des interprètes 9 (47%) 5 (26%) 5 (26%)
Quant aux actes de procédure en français 14 (74%) 5 (26%) 0 (0%)
Quant à la législation en français 13 (68%) 6 (32%) 0 (0%)
Quant à la doctrine en français 4 (21%) 12 (63%) 3 (16%)
Quant à la jurisprudence en français 7 (37%) 8 (42%) 4 (21%)