Constatations
Perception et sensibilisation du public à l’égard du système de justice pénale pendant la pandémie
Le maintien d’un système de justice accessible, efficace et équitable contribue directement au bien-être du pays. Aider les Canadiens à se sentir en sécurité dans leurs collectivités et à avoir confiance en leur système de justice permet d’améliorer leur qualité de vie ainsi que leur contribution à la prospérité du Canada (Ministère de la Justice Canada 2017).
Des événements importants, comme la pandémie de COVID-19 et les réponses collectives à cette pandémie, mettent en lumière les lacunes existantes dans la confiance envers nos divers systèmes sociaux, y compris le système de justice pénale. Selon le Sondage national sur la justice (SNJ)Note de bas de page10, le nombre de personnes qui considèrent que le SJP est équitable et accessible pour tout le monde a diminué pendant la pandémie de COVID-19. Étant donné que le SNJ n’a pas été mené en 2019 ni en 2020, le sondage de 2021 demandait aux répondants de tenir compte de leur confiance à l’égard du SJP avant la pandémie et environ un an après le début de celle-ci (Ministère de la Justice Canada 2021a). Ces réponses ont été comparées à celles du SNJ de 2018 (Ministère de la Justice Canada 2019).
Baisse de la proportion de Canadiens qui déclaraient être convaincus que le SJP est accessible et équitable pour tous
La proportion de Canadiens qui étaient confiants ou très convaincus (une note de 4 ou 5 sur une échelle de 5 points) que le SJP est accessible à tous est passée d’un tiers (33 %) en 2018 à moins d’un quart (22 %) en 2021 (voir la figure 1). À l’autre extrémité de l’échelle, la proportion de Canadiens qui n’étaient pas convaincus que le SJP est accessible à tous (une note de 1 ou 2 sur une échelle de 5 points) est passée de 35 % en 2018 à 45 % un an après la pandémie. En 2022, deux ans après la déclaration de l’état de pandémie, le nombre de personnes qui croient que le SJP est accessible à tous a commencé à revenir aux niveaux d’avant la pandémie.
Figure 1 : Perception du public quant à l'accessibilité du système de justice pénale à tous

Version textuelle
Le diagramme à barres horizontales comporte quatre catégories dont chacune représente une année. Il y a quatre barres pour chaque catégorie (année). Le mauve correspond à la réponse « Je ne sais pas/Pas disponible », le bleu clair à la réponse « Pas convaincu », le gris à la réponse « Moyennement convaincu » et le bleu foncé à la réponse « Convaincu ».
La première catégorie concerne l’année 2018. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 3 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 35 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 29 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 33 %.
La deuxième catégorie concerne l’année avant la pandémie. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 3 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 35 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 35 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 27 %.
La troisième catégorie concerne l’année 2021. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 3 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 45 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 30 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 22 %.
La quatrième catégorie concerne l’année 2022. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 3 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 39 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 25 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 33 %.
*Note : Les données prépandémiques ont été recueillies en 2021 à l’aide de la question suivante :
En ce qui concerne la période précédant la déclaration de la pandémie à la mi-mars 2020, à quel point étiez-vous convaincu(e) que le système de justice pénale du Canada était accessible pour tous les gens?
Source : Sondage national sur la justice, Ministère de la Justice Canada, 2019; 2021a; 2022b.
Près de la moitié des Canadiens (47 %) n’étaient pas convaincus (une note de 1 ou 2 sur une échelle de 5 points) que le SJP était équitable pour tous en 2021, soit une augmentation de cinq points de pourcentage par rapport à 2018. À l’autre extrémité de l’échelle, la proportion de Canadiens convaincus (une note de 4 ou 5 sur une échelle de 5 points) que le SJP est équitable pour tous a baissé, passant de 27 % en 2018 à 20 % en 2021 (voir la figure 2). Toutefois, deux ans après que l’état de pandémie a été déclaré (2022), la proportion de Canadiens qui étaient convaincus (une note de 4 ou 5 sur une échelle de 5 points) que le SJP est juste pour tous les gens a augmenté à 25 %.
Figure 2 : Perception du public quant au caractère équitable pour tous les gens du système de justice pénale

Version textuelle
Le diagramme à barres horizontales comporte quatre catégories dont chacune représente une année. Il y a quatre barres pour chaque catégorie (année) – Le mauve correspond à la réponse « Je ne sais pas/Pas disponible », le bleu clair à la réponse « Pas convaincu », le gris à la réponse « Moyennement convaincu » et le bleu foncé à la réponse « Convaincu ».
La première catégorie concerne l’année 2018. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 1 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 42 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 30 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 27 %.
La deuxième catégorie concerne l’année avant la pandémie. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 2 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 43 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 32 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 23 %.
La troisième catégorie concerne l’année 2021. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 2 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 47 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 31 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 20 %.
La quatrième catégorie concerne l’année 2022. La première barre est mauve (Je ne sais pas/Pas disponible) et indique 1 %, la deuxième barre est bleu clair (Pas convaincu) et indique 49 %, la troisième barre est grise (Moyennement convaincu) et indique 25 % et la quatrième barre est bleu foncé (Convaincu) et indique 25 %.
*Remarque : Les données prépandémiques ont été recueillies en 2021 à l’aide de la question suivante :
En ce qui concerne la période précédant la déclaration de la pandémie à la mi-mars 2020, à quel point étiez-vous convaincu(e) que le système de justice pénale du Canada était équitable pour tous les gens?
Source : Sondage national sur la justice, Ministère de la Justice Canada, 2019; 2021a; 2022b.
La confiance à l’égard du SJP variait selon des facteurs identitairesNote de bas de page11
En 2021 et 2022, les hommes étaient plus susceptibles que les femmes d’indiquer que le SJP était accessible et équitable pour tous les gens. En 2021, les personnes qui indiquaient être originaires d’Asie de l’Est ou du Sud-Est ou de l’Asie du Sud ou de l’Ouest étaient plus susceptibles que ceux qui indiquaient être blancs de dire qu’ils étaient convaincus que le système était équitable pour tous les gens. En 2022, les Noirs interrogés étaient moins susceptibles que les Blancs d’indiquer qu’ils étaient convaincus que le SJP est équitable pour tous, tandis que d’autres groupes racisés (Asie du Sud-Est, Asie de l’Est, Asie du Sud, Moyen-Orient et Afrique du Nord) étaient plus convaincus que les Blancs interrogés.
En 2021, les répondants des Premières Nations étaient plus susceptibles que les répondants non autochtones de dire qu’ils n’étaient pas convaincus que le SJP était équitable pour tous les gens pendant la pandémie. Toutefois, les répondants Métis étaient plus susceptibles que les répondants non autochtones de dire que le SJP était accessible à tous pendant la pandémie.
La baisse de la perception à l’égard de l’accessibilité et de l’équité du SJP pendant la pandémie de COVID–19 pourrait s’expliquer en partie par les défis variés avec lesquels les Canadiens ont dû composer pendant cette période, en plus des mouvements sociaux qui se produisaient simultanément. Il a certes fallu que le SJP s’adapte et recoure à diverses méthodes pour faire avancer les cas pendant la pandémie de COVID–19, mais certaines des approches adoptées n’étaient pas universellement accessibles. Par exemple, les fonctionnaires des tribunaux étaient tenus de trouver un équilibre entre la santé et la sécurité des acteurs juridiques avec la nécessité de maintenir les opérations des tribunaux. Les vidéoconférences et les auditions virtuelles sont des solutions de rechange appropriées pour de nombreuses personnes, mais celles qui n’ont pas accès à Internet haute vitesse sont souvent incapables de participer de cette façon. Les données du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) montrent qu’en 2017, 98,5 % des ménages du quintile de revenu le plus élevéNote de bas de page12 avaient un abonnement Internet à domicile, comparativement à 69 % des ménages du quintile de revenu le plus faible (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes 2019). En outre, en 2019, seulement 45 % des ménages ruraux avaient accès à Internet haute vitesse (Silver 2021). Cette fracture numérique fait ressortir les inégalités existantes, et qui se recoupent, auxquelles sont confrontées les personnes qui n’ont pas accès à Internet lorsqu’elles tentent d’accéder à des programmes d’éducation, à des possibilités d’emploi ou à la justice (Harper-Merrett 2021).
La sensibilisation au rôle des différentes composantes du SJP était plus faible pendant la pandémie
Selon le SNJ (Ministère de la Justice Canada 2019, 2021), la sensibilisation au rôle des différentes composantes du SJP était plus faible pendant la pandémie que pendant la période de référence précédente. En 2018, 55 % des Canadiens ont déclaré être au courant du rôle de la police, comparativement à 46 % en 2021. En ce qui a trait au rôle des tribunaux, 45 % des Canadiens ont dit qu’ils en étaient au courant en 2018, comparativement à 36 % en 2021. Les Canadiens ont signalé le plus faible niveau de sensibilisation aux services correctionnels : 32 % en 2018 et 26 % en 2021. Dans l’ensemble, en 2021, la sensibilisation autodéclarée augmentait avec le niveau de scolarité et le revenu. Les hommes étaient plus susceptibles que les femmes d’indiquer connaître les trois aspects du SJP. En 2021, les répondants noirs et d’Asie de l’Est et du Sud ont tous signalé une sensibilisation moindre au rôle de la police et des tribunaux par rapport aux répondants blancs.Note de bas de page13
En 2022, la sensibilisation aux trois composantes du SJP a commencé à revenir à son niveau d’avant la pandémie (56 % pour la police, 44 % pour les tribunaux et 34 % pour les services correctionnels). Les hommes étaient plus susceptibles que les femmes d’indiquer connaître les trois composantes du SJP.
Sentiments de sécurité personnelle et de victimisation pendant la pandémie
La perception d’une personne à l’égard de la sécurité et du risque de victimisation a une incidence sur son bien-être personnel, en plus d’être un indicateur clé du bien-être d’un pays (Statistique Canada 2020a). Les données recueillies au cours des deux dernières décennies donnent à penser que les Canadiens se sentent plus en sécurité aujourd’hui que par le passé; on ne connaît toutefois pas encore l’ampleur de l’incidence de la COVID-19 sur ces perceptions.
La moitié des participants à l’initiative d’approche participative estimaient que le niveau de criminalité dans leur quartier n’a pas changé depuis la pandémie
Selon l’Enquête sociale générale (ESG) sur la sécurité des Canadiens (victimisation), en 2019, la majorité des Canadiens (74 %) estimaient que le niveau de criminalité dans leur quartier était demeuré à peu près le même au cours des cinq dernières années. Moins d’un sur cinq (19 %) croyait que la criminalité avait augmenté dans leur quartier, tandis qu’une plus petite proportion (6 %) estimait qu’elle avait diminué (Cotter 2021). Étant donné que l’ESG est menée tous les cinq ans, des données comparables après la pandémie ne sont pas encore disponibles.Note de bas de page14 Bien qu’elle ne soit pas directement comparable, Statistique Canada a mené en mai 2020 une enquête par approche participative en ligne auprès de 43 000 Canadiens sur leur perception de la criminalité et de la sécurité personnelle dans la foulée de la pandémie de COVID–19. La moitié des répondants à l’enquête par approche participative ont indiqué que le niveau de criminalité était resté le même dans leur quartier depuis le début de la pandémie (Statistique Canada 2020a). Les autres répondants ont indiqué, dans une proportion de 11 %, que la criminalité avait augmentée, et de 15 %, qu’elle avait diminué, tandis que 24 % étaient incertains (Ibid.). Les répondants qui ont indiqué être Autochtones ou membres d’un groupe désigné de minorités visiblesNote de bas de page15 (ci-après « racisés ») étaient plus susceptibles d’indiquer que la criminalité avait augmenté depuis le début de la pandémie comparativement aux répondants non autochtones ou non racisés (Ibid.).
Un participant sur dix (10 %) qui a répondu à l’enquête de Statistique Canada par approche participative sur les perceptions de la criminalité et de la sécurité personnelle depuis la pandémie de COVID-19 a déclaré avoir communiqué avec un service d’aide aux victimes pour une raison liée à la criminalité depuis le début de la pandémie (Ibid.). Les participants qui avaient communiqué avec la police ou avec un service d’aide aux victimes étaient plus susceptibles de se sentir moins en sécurité lorsqu’ils marchent seuls une fois la nuit tombée que ceux qui ne croyaient pas que la criminalité avait augmenté dans leur quartier (Ibid.).
Les personnes racisées ont signalé des niveaux de sécurité inférieurs avant et après le début de la pandémie
Conformément aux recherches antérieures sur la sécurité personnelle et la victimisation (p. ex., l’ESG sur la sécurité des Canadiens [victimisation]), les participants racisés à l’enquête de Statistique Canada par approche participative sur les perceptions de la criminalité et de la sécurité personnelle depuis la pandémie de COVID-19 ont déclaré se sentir moins en sécurité que le reste de la population. Un peu plus d’un quart (27 %) des participants racisés ont déclaré ne pas se sentir du tout ou pas très en sécurité quand ils marchent seuls dans leur voisinage une fois la nuit tombée, comparativement à 15 % du reste de la population (Statistique Canada 2020a). Parmi ceux qui ne se sentaient pas très en sécurité lorsqu’ils marchaient seuls une fois la nuit tombée, la proportion était la plus élevée chez les participants coréens (43 %), philippins (38 %) et chinois (31 %) (Heidinger et Cotter 2020). Ce sont les mêmes groupes de personnes racisées qui ont le plus souvent perçu une hausse des incidents de harcèlement ou des attaques à caractère discriminatoire dans leur voisinage depuis le début de la pandémie (Ibid.). En outre, chez les personnes racisées, plus d’un tiers (36 %) des femmes participantes ont déclaré ne pas se sentir en sécurité lorsqu’elles marchent seules une fois la nuit tombée, comparativement à un homme sur cinq (22 %) (Ibid.).
Services de police pendant la pandémie
Afin d’appuyer les nouvelles mesures de santé publique mises en œuvre au début de la pandémie, les organismes de police ont collaboré étroitement avec les autorités de santé publique afin d’élargir le rôle des policiers dans les domaines de l’éducation du public et de l’application des nouvelles politiques. Les organismes de police de tout le pays devaient assumer ces tâches supplémentaires tout en faisant face à des pénuries de personnel et en gérant les risques pour la santé et la sécurité de leurs membres. Cela s’est produit à un moment où l’examen de la police par le public s’est intensifié à la suite de divers événements qui ont amené certains Canadiens à demander de cesser de financer les services de police et de réaffecter le financement aux services communautaires (Lopez-Martinez 2020).
Actes criminels déclarés par la police
Le taux de classement des infractions est resté relativement stable, baissant légèrement en 2021
Il est essentiel d’examiner les niveaux de criminalité et les changements dans certains types d’incidents afin de comprendre le bien-être des Canadiens pendant la pandémie. En 2020 et 2021, les restrictions et les mesures de santé publique mises en place pour limiter la propagation de la COVID-19 ont eu des répercussions variées sur divers aspects de la vie des gens, répercussions qui devront faire l’objet de recherches plus poussées pour être pleinement comprises. Toutefois, l’incidence de la pandémie et des mesures de santé publique sur la criminalité et la police est, dans une certaine mesure, mesurable. L’une des mesures les plus courantes du rendement de la police est le taux de classement des infractions.Note de bas de page16 En 2020, le taux de classement des infractions était conforme à celui de l’année précédente (37,02 et 37,36, respectivement), mais a légèrement diminué de 4 %, pour atteindre 35,78 en 2021 (Statistique Canada s.d.-a.). Même si les taux de classement observés pendant la pandémie sont demeurés quelque peu semblables à ceux de l’année précédant la pandémie, les types d’appels de serviceNote de bas de page17 que la police a reçus pendant la pandémie ainsi que les types de crimes signalés pendant cette période ont considérablement changé.
Augmentation des appels de services de police liés à la santé mentale et aux vérifications du bien-être
Depuis le début de la pandémie, les services de police ont signalé une augmentation de certains types d’appels de services. Selon les données recueillies auprès d’un sous-ensemble de services de police fournissant des services à 32 % de la population canadienne, les appels de services liés aux vérifications du bien-être général (+16 %), à la santé mentale (+13 %) et aux querelles de ménage (+7 %) ont augmenté dans les huit mois suivant la pandémie, comparativement à la même période de huit mois en 2019 (Moreau 2021).
Réponse conjointe aux appels liés à la santé mentale
L’émergence de la pandémie de COVID-19 a donné lieu à la prise de mesures extraordinaires de confinement, d’isolement et de distanciation sociale. Ces mesures ont contribué à accroître les problèmes de santé mentale (Association médicale canadienne 2021). Un sondage effectué au cours de la première vague de la pandémie a révélé que la moitié (50 %) des Canadiens croyait que leur santé mentale s’était détériorée à cause du virus, et que 41 % étaient plus anxieux (Centre de toxicomanie et de santé mentale 2020a).
L’augmentation des troubles de santé mentale pendant la pandémie a exercé une pression supplémentaire sur le système de santé mentale du Canada, qui luttait déjà pour répondre aux besoins des Canadiens en matière de soutien, de services et de ressources avant l’éclosion de la COVID-19 (Ibid.). Dans ce contexte, il n’est pas surprenant d’observer une augmentation des demandes d’intervention de la police pour des vérifications de santé mentale et de bien-être pendant la pandémie.
Certaines études ont révélé que les policiers signalent souvent qu’ils ne se sentent pas suffisamment préparés à reconnaître, à évaluer et à gérer une personne souffrant d’une crise de santé mentale (Lamanna, et al. 2018, Semple, et al. 2020). Plusieurs au Canada plaident en faveur d’une meilleure formation en santé mentale pour les policiers afin de désamorcer les situations de crise et d’un investissement supplémentaire dans des programmes visant à détourner du système de justice pénale les personnes qui éprouvent des problèmes de santé mentale (Institute for Advancements in Mental Health 2022).
En outre, les défenseurs veulent élargir et normaliser l’utilisation des équipes mobiles d’intervention d’urgence (EMIU), qui intègrent une réponse conjointe de la police et des services de santé mentale en cas d’urgence. Les études canadiennes suggèrent que les EMIU ont permis de réduire les arrestations injustifiées et inutiles, de réduire le recours à la force par la police et de fournir des services de santé directs et appropriés aux personnes en détresse mentale (Blais, et al. 2020, Ghelani 2021, Lamanna, et al. 2018, Semple, et al. 2020). Dans le contexte actuel de la pandémie, les interventions conjointes en santé mentale continuent d’occuper une place cruciale dans les procédures d’intervention d’urgence.
Baisse du taux global de criminalité déclaré par la police et de l’Indice de gravité de la criminalité
En 2020, le taux global de criminalité déclaré par la police (à l’exclusion des infractions liées à la circulation), qui mesure le volume d’actes criminels, a baissé de 10 % par rapport à l’année précédente (Moreau 2022). En avril 2020, le premier mois complet après la déclaration de la pandémie, on a enregistré une baisse de 18 % du nombre d’incidents criminels par rapport au même mois de l’année précédente (Moreau 2021). En outre, en 2020, l’Indice de gravité de la criminalité (IGC), qui mesure le volume et la gravité des actes criminels déclarés par la police, a diminué de 7 %. Il s’agit de la première diminution après cinq années d’augmentation (Moreau 2022).
Au cours de l’année qui a suivi le début de la pandémie, 2021, le taux global de criminalité a légèrement augmenté de 1 % par rapport à 2020 (Ibid.). Le taux de crimes violents a augmenté de 5 % en 2021 et, après avoir connu une forte baisse, en 2020, le taux de crimes contre les biens a baissé de 1 %, ce qui en fait le taux le plus bas depuis 1965 (Ibid.). En 2021, l’IGC est resté stable à 73,7 contre 73,9 en 2020 (Ibid.).
Baisse notable des crimes contre les biens
En 2020, la première année de la pandémie de COVID-19, le nombre de crimes contre la propriété a considérablement baissé (-9 %) par rapport à l’année précédente, ce qui coïncide avec la baisse de 7 % de l’IGC (Moreau 2022). Des baisses importantes ont également été signalées pour le vol à l’étalage de moins de 5 000 $ (-36 %), le vol de moins de 5 000 $ (-21 %), le vol qualifié (-18 %) et l’introduction par effraction (-16 %) (Statistique Canada s.d.-b.). Ces changements sont principalement attribuables au fait que les gens passaient plus de temps à la maison en raison des restrictions mises en place pour freiner la propagation de la COVID-19.
Les données recueillies mensuellementNote de bas de page18 auprès d’un sous-ensemble de services de police canadiens qui fournissent des services à 71 % de la population canadienne ont fait état de tendances similaires dans les crimes contre les biens, notamment l’introduction par effraction, les vols qualifiés et les vols à l’étalage (voir la figure 3). Ces types d’incidents ont considérablement diminué au cours de la période de trois mois suivant la déclaration de la pandémie, comparativement aux trois mois précédents. Un an après la déclaration de la pandémie, le taux d’incidents pour ces crimes est demeuré en deçà des niveaux d’avant la pandémie.
Figure 3 : Nombre d'infractions liées aux biens sélectionnées déclarées par la police au premier trimestre (du 1er avril au 30 juin), 2019 à 2021

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte trois catégories, dont chacune représente une infraction liée aux biens au cours du premier trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (violation) – Le bleu représente le premier trimestre de 2019, le mauve représente le premier trimestre de 2020, le noir représente le premier trimestre de 2021.
La première catégorie concerne le vol qualifié. La première barre est bleue (premier trimestre de 2019) et indique 4 055, la deuxième barre est mauve (premier trimestre de 2020) et indique 2 701, la troisième barre est noire (premier trimestre de 2021) et indique 2 937.
La deuxième catégorie concerne l’introduction par effraction. La première barre est bleue (premier trimestre de 2019) et indique 31 353, la deuxième barre est mauve (premier trimestre de 2020) et indique 24 930, la troisième barre est noire (premier trimestre de 2021) et indique 21 944.
La troisième catégorie concerne le vol à l’étalage. La première barre est bleue (premier trimestre de 2019) et indique 27 073, la deuxième barre est mauve (premier trimestre de 2020) et indique 10 219, la troisième barre est noire (premier trimestre de 2021) et indique 16 535.
Remarques :
- Les données mensuelles sont recueillies auprès d’un sous-ensemble de services de police canadiens qui fournissent des services à 71 % de la population canadienne.
- Le trimestre 1 se rapporte à la période de trois mois allant du 1er avril au 30 juin.
Source : Tableau 35-10-0169-01, Certains crimes déclarés par la police et demandes d’intervention pendant la pandémie de COVID-19, Statistique Canada, s.d.-c.
Augmentation considérable de certaines violations
Les services de police de partout au Canada ont également signalé des hausses importantes de certaines infractions, dont quelques-unes pourraient s’expliquer par le fait que les Canadiens passaient plus de temps à la maison et, dans certains cas, plus de temps en ligne. En 2020, la police a signalé une augmentation du nombre des crimes suivants depuis 2019 : vol d’identité (+56 %), infractions liées aux opiacés (+39 %), crimes haineux (+36 %), pornographie juvénile (+26 %), fraude d’identité (+15 %) et homicide (+10 %). Ces catégories sont décrites ci-dessous (Statistique Canada s.d.-b., Moreau 2022).
Le vol d’identité, la fraude liée à l’identité et la fraude informatique ont augmenté
Après avoir connu une tendance à la hausse pendant neuf années consécutives, le taux total de fraude est resté stable en 2020, par rapport à 2019 (Moreau 2021) et a diminué de moins de 1 % en 2021 par rapport à 2020 (Moreau 2022). Des changements se sont toutefois produits dans différents types de fraudes : la fraude générale, le type de fraude le plus volumineux, a reculé de 4 % en 2020, tandis que les taux de vol d’identité (+54 %) et de fraude liée à l’identité (+14 %) ont augmenté (Statistique Canada s.d.-b.).
L’incertitude engendrée par la pandémie de COVID-19 a donné l’occasion aux individus et aux groupes de faire des réclamations frauduleuses et d’exploiter les Canadiens. La fraude informatique consiste en l’exploitation des incertitudes des gens en vue de les piéger pour qu’ils donnent de l’argent ou des renseignements personnels. Le gouvernement du Canada a mis en garde les citoyens contre un certain nombre d’arnaques liées à la COVID-19, notamment :
- Les escroqueries par hameçonnage (par courriel, par message texte ou par téléphone) lorsqu’une personne envoie un faux message prétendant provenir d’un hôpital ou d’une organisation gouvernementale, indiquant par exemple que le bénéficiaire est admissible à un financement gouvernemental. La personne cherche à obtenir de l’argent ou des renseignements personnels, ou à faire télécharger un virus par le bénéficiaire à partir d’une pièce jointe;
- Les fausses applications mobiles, comme des applications de recherche de contacts apparemment légitimes, qui prennent le contrôle du téléphone d’un utilisateur et qui ne lui donnent accès que s’il accepte de payer une rançon (c.-à-d. un rançongiciel);
- De faux sites gouvernementaux qui servent à tromper des individus afin qu’ils fournissent des renseignements personnels qu’ils ne fourniraient pas autrement (Governement du Canada 2020a).
De 2019 à 2020, le nombre d’incidents de fraude informatique signalés par la police a augmenté de 41 %; de 2020 à 2021, le nombre d’incidents a augmenté de 13 % (Moreau 2022).
Augmentation des infractions liées aux opiacés
En 2020, le taux d’infractions liées aux opioïdes déclarées par la police a augmenté de 37 % par rapport à 2019 (Moreau 2022). Toutes les infractions liées aux opioïdes ont augmenté, y compris les infractions de possession, de trafic, de production, d’importation ou d’exportation. Les infractions liées aux opioïdes étaient le seul type d’infraction relative à une drogue en particulier à avoir augmenté par rapport à 2019 (Moreau 2021). De 2020 à 2021, le nombre d’infractions liées aux opioïdes a continué d’augmenter, mais à un rythme plus lent de 13 % (Moreau 2022).
L’augmentation du taux d’infractions liées aux opioïdes s’est produite dans le contexte d’une crise de surdose d’opioïdes qui s’aggrave au Canada. Au cours de la première année de la pandémie, on a enregistré 7 362 décès liés aux opioïdes d’avril 2020 à mars 2021, ce qui représente une augmentation de 96 % par rapport à 2019 (Ibid.). En 2021, le nombre de décès liés aux opioïdes est demeuré élevé; parmi les décès accidentels apparemment liés à la toxicité des opioïdes, des analogues du fentanyl ou du fentanyl avaient été consommés dans 86 % d’entre eux (Ibid.). L’approvisionnement en drogues de plus en plus toxiques et imprévisibles, les sentiments d’isolement, de stress, d’anxiété et de dépression, ainsi que la disponibilité ou l’accessibilité limitée de services de santé et de services sociaux pour les personnes qui consomment des drogues sont des facteurs qui peuvent contribuer à l’augmentation des décès liés aux opioïdes (Agence de la santé publique Canada 2021b).
Augmentation marquée des crimes haineux
La pandémie de COVID-19 a exacerbé davantage les préoccupations continues liées à la sécurité et à la discrimination au Canada. Les données recueillies selon l’initiative d’approche participativeNote de bas de page19 auprès de 43 000 Canadiens par Statistique Canada en mai 2020 indiquent que les répondants racisés étaient trois fois plus susceptibles que les autres répondants de percevoir une augmentation de la fréquence du harcèlement ou des attaques en fonction de la race, de l’origine ethnique ou de la couleur de peau depuis le début de la pandémie (Heidinger et Cotter 2020).
Au cours de la première année de la pandémie, les crimes haineux signalés par la police ont augmenté de 36 % par rapport à 2019 (Moreau 2022). Un an plus tard, en 2021, le nombre de crimes haineux déclarés par la police a augmenté de 27 % pour atteindre 3 360 incidents, ce qui signifie qu’au total, les crimes haineux déclarés par la police au Canada ont augmenté de 72 % au cours des deux dernières années depuis le début de la pandémie (Ibid.). En 2020, les crimes haineux ciblant la race ou l’origine ethnique ont augmenté de façon importante, presque deux fois plus qu’en 2019 (+80 %), les populations les plus touchées étant la population de l’Asie de l’Est ou du Sud-Est (+301 %), les peuples autochtones (+152 %), les Noirs (+92 %) et la population de l’Asie du Sud (+47 %) (Moreau 2021). En 2021, les crimes haineux ciblant la race et l’origine ethnique ont enregistré une croissance plus faible (+6 %) que l’année précédente; des crimes haineux signalés par la police, ce sont ceux ciblant la religion (+67 %) et l’orientation sexuelle (+64 %) qui ont connu la plus forte augmentation (Moreau 2022).
La pornographie juvénile continue d’augmenter
Le Centre canadien de protection de l’enfance (CCPE), qui exploite la ligne de dénonciation du Canada pour signaler les cas d’abus et d’exploitation sexuels d’enfants en ligne, Cyberaide.ca, fait remarquer que les personnes les plus vulnérables de la société ont été touchées de façon disproportionnée par le changement brusque de l’environnement social causé par la pandémie (Centre canadien de protection de l'enfance 2021). L’augmentation du temps passé à la maison, les salles de classe virtuelles et l’accès sans restriction à l’Internet ont augmenté involontairement le risque d’abus et d’exploitation en ligne des enfants. Le CCPE a fait état d’une augmentation de 40 % des signalements à Cyberaide.ca au cours des deux premières semaines de la pandémie; à la fin de 2020, le nombre de signalements avait augmenté de 106 % (Ibid.).
De 2019 à 2021, le taux d’incidents impliquant la fabrication, la distribution ou la possession de la pornographie juvénile, ou l’accès à celle-ci, ont augmenté de 31 % (Moreau 2022). D’autres facteurs, comme les déclarations obligatoires et l’élargissement de la Stratégie nationale pour la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle sur Internet (2019), auraient pu contribuer à l’augmentation des infractions de pornographie impliquant des enfants signalées par la police au cours de la dernière décennie (Moreau 2022). Des discussions sur le Web invisible entre délinquants sexuels d’enfants ont révélé que la pandémie « offrait une occasion exceptionnelle de se mobiliser et d’échanger les “bonnes pratiques” pour parvenir à leurs fins » (Centre canadien de protection de l'enfance 2021).
Augmentation du nombre d’homicides, en particulier parmi les victimes autochtones, un an après le début de la pandémie
De 2019 à 2020, le nombre de victimes d’homicide au Canada a augmenté de 10 %, passant de 689 à 759 victimes respectivement (Statistique Canada s.d.-d.). En 2021, le nombre de victimes d’homicides a augmenté légèrement, à un taux plus lent de 4 %, pour atteindre 788 victimes d’homicides (Ibid.). L’augmentation du nombre d’homicides en 2020 est en partie attribuable à la fusillade de masse la plus meurtrière du Canada, qui a coûté la vie à 22 personnes en Nouvelle-Écosse (Armstrong et Jaffray 2021).
Entre 2019 et 2020, le nombre de victimes d’homicides autochtones Note de bas de page20 a augmenté de 16 %, passant de 179 à 208 victimes, tandis que le nombre de victimes d’homicides non autochtones a augmenté de 9 % (Statistique Canada s.d.-d.). L’augmentation globale du nombre de victimes d’homicides chez les Autochtones est attribuable à une augmentation de 27 % des homicides chez les hommes autochtones, tandis que les homicides chez les femmes autochtones ont diminué de 11 % (Ibid.). Sur les 727 victimes d’homicide au Canada en 2020 où l’identité autochtone était connue, 29 % (208) étaient des Autochtones; il s’agissait de 29 victimes de plus que l’année précédente (Ibid.).
De 2020 à 2021, le nombre de victimes d’homicides autochtones a diminué de 9 % et le nombre de victimes d’homicides chez les personnes non autochtones a augmenté de 8 % (Ibid.). La baisse du nombre de victimes d’homicides autochtones est attribuable à une baisse de 13 % chez les hommes autochtones, de 166 à 145 entre 2020 et 2021, tandis qu’une augmentation de 7 % a été enregistrée chez les femmes autochtones, de 42 à 45 victimes (Ibid.).
Baisse de la proportion de personnes autochtones accusées d’homicide un an après le début de la pandémie (2021)
En 2020, la proportion de personnes accusées d’homicide qui sont autochtones (de toutes les personnes accusées) est demeurée inchangée à 37 %, comme l’année précédente (Statistique Canada s.d.-d.). Un an après le début de la pandémie, en 2021, cette proportion était passée à 28 % de toutes les personnes accusées d’homicide (Ibid.).
La proportion de femmes autochtones accusées d’homicide a augmenté de 26 % entre 2019 et 2020, mais a diminué de 11 % l’année suivante, de 2020 à 2021 (Ibid.). En 2020, la proportion d’hommes autochtones accusés d’homicide avait augmenté de 20 % par rapport à 2019, mais a diminué de 32 % entre 2020 et 2021 (Ibid.).
Crainte accrue de violence familiale
Depuis le début de la pandémie de COVID-19, les experts craignent que l’isolement social, la perte d’emploi et la réduction du revenu augmentent le risque de violence familiale à l’égard des femmes et des enfants au Canada (Chambre des communes 2021). La Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes des Nations Unies, Dubravka Simonovic, a averti que « les restrictions de mouvement, les contraintes financières et l’incertitude généralisée encouragent les auteurs de ces violences à passer à l’action et leur fournissent davantage de pouvoir et de contrôle » (Simonovic 2020).
On estime que la violence familiale a augmenté de 30 % au Canada depuis le début de la pandémie (Chambre des communes 2021, Sagesse Domestic Violence Prevention Society 2021). Par exemple, en 2020-2021, la Assaulted Women’s Helpline en Ontario a enregistré une augmentation de 84 % (93 444) du nombre d’appels liés à la violence, par rapport à 2019-2020 (50 648) (The Assaulted Women’s Helpline 2021). Selon l’Enquête sur les établissements d’hébergement pour les victimes de violence de Statistique Canada, qui a recueilli des renseignements le 14 avril 2021 dans l’ensemble du Canada afin de fournir un instantané, la majorité (84 %) des femmes qui résidaient dans ces établissements pour des raisons de violence échappaient à la violence conjugale; leur agresseur était le plus souvent un conjoint de fait (38 %) ou un conjoint (25 %) (Ibrahim, 2022).
L’augmentation de la violence familiale au Canada représente ce que les chercheurs considèrent comme une « pandémie de l’ombre » beaucoup moins visible de la violence à l’égard des femmes (Koshan, Mosher et Wiegers 2021). Cette augmentation de la violence familiale est corrélée à une augmentation des homicides de femmes au Canada. Selon l’Observatoire canadien du féminicide, les homicides féminins au Canada ont augmenté de 26 % depuis le début de la pandémie de COVID-19 de 2019 à 2021 (Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation 2021). Sur les 173 femmes tuées par homicide en 2021, 47 % ont été tuées chez elles; au total, 35 % des homicides de femmes ont été commis par un partenaire intime, ancien ou actuel (Ibid.).
La pandémie de COVID-19 a mis en évidence des lacunes et des défis importants dans l’accès aux services et aux soutiens nécessaires pour assurer la sécurité des personnes (Koshan, Mosher et Wiegers 2021). La plupart des refuges au Canada (71 %) ont réduit de 50 % ou plus leur capacité de lits pour assurer le respect des mesures de santé publique (Hébergement femmes Canada 2020). La diminution de la capacité globale a eu une incidence directe sur l’accès des femmes et des enfants aux services de soutien aux victimes de violence familiale pendant la pandémie.
La violence familiale signalée par la police a légèrement augmenté
Le taux global de violence familiale signalée par la police est resté inchangé en 2020 par rapport à l’année précédente; toutefois, de 2020 à 2021, le taux de violence familiale a augmenté de 4 %, passant de 324 à 337 victimes pour 100 000 habitants (Moreau 2022). En outre, les données donnent à penser que la violence familiale est largement sous-déclarée. Par exemple, en 2014, moins d’une victime sur cinq de violence conjugale l’a signalé à la police (Gouvernement du Canada 2018). Cette sous-déclaration est en partie attribuable à la stigmatisation, à la dépendance financière, aux contacts limités à l’extérieur du foyer, à la peur pour sa sécurité personnelle (surtout lorsqu’il y a des enfants à la maison) et à la peur de ne pas être cru (Ibid.). Les mesures de santé publique mises en place pour freiner la propagation de la COVID-19, comme les décrets de séjour à domicile, combinées à la réduction ou à la fermeture des services de soutien, ont eu pour conséquence involontaire de confiner les individus à la maison avec les auteurs et de rendre de plus en plus difficile l’accès des gens à l’aide dont ils ont besoin. Cette situation a peut-être aggravé la sous-déclaration de la violence familiale et mis en évidence les lacunes actuelles dans les services. Les données recueillies selon l’initiative d’approche participative en avril 2020 par l’enquête de Statistique Canada sur les répercussions de la COVID-19 sur les Canadiens donnent à penser que 9 % des femmes et 7 % des hommes étaient très ou extrêmement inquiets de la possibilité de violence au foyer pendant la pandémie (Statistique Canada 2020b).
Les activités des tribunaux pénaux pendant la pandémieNote de bas de page21 Note de bas de page22
Au début de la pandémie, les systèmes papier et les procédures en personne sur lesquels les tribunaux canadiens s’appuyaient depuis toujours ont présenté des défis importants. Notamment, les mesures sanitaires mises en place pour freiner la propagation de la COVID-19 ont mis un terme immédiat à la plupart des instances judiciaires en personne partout au pays. Même si la situation variait considérablement d’un pays à l’autre, dans de nombreux cas, les salles d’audience ont été temporairement fermées ou leur accès a été restreint, les procédures régulières et non urgentes ont été reportées ou ajournées, et les tribunaux ont dû composer avec une dépendance croissante à l’égard des procédures virtuelles et du dépôt électronique des documents. Ces défis ont soulevé des préoccupations au sujet de l’aggravation de l’arriéré actuel des affaires pénales.
Les tribunaux du Canada ont adopté une approche multidimensionnelle à l’égard des mesures de contrôle, comme l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) et les autorités locales de santé publique l’ont recommandé, pour adapter les divers environnements (Comité d'action sur l'administration des tribunaux en réponse à la COVID-19 2021a).Note de bas de page23 Les mesures de contrôle mises en place pour enrayer la propagation de la COVID-19 ont permis aux tribunaux canadiens de continuer à faire progresser les affaires pendant la pandémie. Après la fermeture de toutes les entreprises non essentielles en vertu de la première ordonnance de confinement, les cours et les tribunaux, en tant que fournisseurs essentiels de services de justice, ont agi rapidement afin de modifier les règles, émettre des directives de pratique temporaire et utiliser les nouvelles technologies pour éliminer les obstacles à l’accès à la justice, et ce, malgré les restrictions importantes de capacité pour les activités en personne (Ibid.). Même si les approches variaient d’un bout à l’autre du pays, la plupart des administrations ont commencé à accepter les dépôts électroniques, ont réorienté le plus grand nombre possible d’affaires vers des audiences virtuelles et ont continué à tenir des audiences en personne avec des mesures de sécurité accrues pour les cas urgents (Comité d'action sur l'administration des tribunaux en réponse à la COVID–19 2021b).
Ces mesures étaient bien intentionnées et, dans de nombreux cas, nécessaires, mais certaines d’entre elles ont eu pour conséquence malheureuse de limiter l’accès à la justice pour de nombreuses personnes, en particulier pour les personnes marginalisées (Comité d’action sur l’administration des tribunaux en réponse à la COVID–19 2020). La fermeture totale ou partielle des installations judiciaires a eu pour effet de limiter ou d’empêcher l’accès à certains services liés aux tribunaux et à des renseignements juridiques. Parfois, des personnes souffrant de problèmes de toxicomanie ou de santé mentale n’ont pas eu accès à des tribunaux spécialisés ou à leurs réseaux de soutien requis, créant un obstacle supplémentaire à leur rétablissement (Comité d’action sur l’administration des tribunaux en réponse à la COVID–19 2021c). L’accès limité aux services judiciaires a aggravé davantage les effets dévastateurs que la COVID-19 a eus sur les personnes qui doivent déjà composer avec des problèmes d’emploi ou de logement.
Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux
Les données trimestrielles des tribunaux présentées dans ce rapport sont tirées de l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), qui est gérée par Statistique Canada. Ces données sont préliminaires et sont fondées sur des exercices financiers, et pas sur des années civiles. Les données trimestrielles représentent l’information que les administrations ont soumise dans les huit semaines suivant la fin de chaque trimestre financier, et cette information n’a pas été mise à jour rétroactivement. Les trimestres financiers sont les suivants : le premier trimestre va du 1er avril au 30 juin, le deuxième, du 1er juillet au 30 septembre, le troisième, du 1er octobre au 31 décembre, et le quatrième, du 1er janvier au 31 mars.
Les données trimestrielles préliminaires tirées de l’EITJC fournissent des renseignements essentiels sur l’état des tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et des tribunaux de la jeunesse au Canada et permettent de cerner les tendances émergentes plus tôt qu’avec les données annuelles finalisées de l’EITJC. Statistique Canada recommande de jouer de prudence au moment d’établir des comparaisons entre les différents trimestres financiers. Les données trimestrielles de l’EITJC sont comparées d’une année à l’autre, étant donné que le processus judiciaire est associé à une certaine saisonnalité; par conséquent, certains changements d’un trimestre à l’autre peuvent être attribuables au cycle régulier des tribunaux. Les données peuvent être incomplètes parce qu’elles sont préliminaires et que le nombre d’administrations qui présentent des données d’un trimestre à l’autre peut varier.
Les administrations qui n’ont pas présenté des données de façon uniforme pour les quatre trimestres de 2019-2020 à 2021-2022 ont été exclues des données présentées dans ce rapport (figures 4 à 9). Les administrations qui ne sont pas incluses dans les données des tribunaux de juridiction criminelle sont Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba. On s’assure ainsi que les comparaisons entre les années comprennent le même groupe d’administrations, de sorte que les différences observées d’une année à l’autre ne sont pas attribuables aux variations du nombre d’administrations qui présentent des données d’une année à l’autre.
Tendances dans les causes portées devant les tribunaux de juridiction criminelle
Après le début de la pandémie, le nombre de causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle a connu une baisse initiale importante
Au premier trimestre suivant la déclaration de la pandémie (du 1er avril au 30 juin 2020), le nombre de causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes a diminué de moitié (51 %) par rapport au nombre de causes réglées terminées au cours de la même période en 2019 (voir la figure 4).Note de bas de page24 Au troisième trimestre de 2020-2021 (du 1er octobre au 31 décembre 2020), après l’adoption de mesures de sécurité et de contrôleNote de bas de page25 visant à permettre la présence en personne et virtuelle, le nombre de causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes s’est rapproché des chiffres d’avant la pandémie (Ibid.). Le nombre de causes portées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes était légèrement plus élevé que les nombres d’avant la pandémie au quatrième trimestre de 2020-2021 (Ibid.).
Environ un an après la déclaration de la pandémie, le nombre de causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes au premier trimestre de 2021-2022 (du 1er avril au 30 juin 2021) a augmenté, de sorte qu’il se rapprochait du nombre d’avant la pandémie, mais demeurait environ 14 % inférieur au nombre de causes réglées au premier trimestre de 2019-2020 (voir la figure 4). De même, le nombre de causes réglées aux deuxième et troisième trimestres de 2021-2022 était respectivement de 17 % et de 13 % ce qui est inférieur à celui des deuxième et troisième trimestres de 2019-2020 (Ibid.).
Figure 4 : Nombre de causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes dans les administrations déclarantes

Version textuelle
Ce diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le nombre de causes réglées par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (causes réglées par trimestre) – Le bleu correspond à l’année 2019–2020, le mauve correspond à l’année 2020–2021, le noir correspond à l’année 2021–2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 57 632, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 28 231, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 49 538.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 56 781, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 41 076, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 46 861.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 56 619, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 50 933, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 49 415.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 1er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 54 524, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 55 360, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 50 259.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
Une tendance similaire s’est manifestée dans les tribunaux de la jeunesse; le nombre de cas terminés a diminué de 59 % au premier trimestre suivant la déclaration de la pandémie (du 1er avril au 30 juin 2020) par rapport au nombre de cas déclarés pour la même période de l’année précédente (voir la figure 5). Toutefois, le nombre de causes réglées par les tribunaux de la jeunesse est demeuré bien en deçà des niveaux d’avant la pandémie dans toutes les comparaisons d’une année à l’autre des trimestres suivants en 2020-2021 et 2021-2022. Le nombre de causes devant les tribunaux réglés au quatrième trimestre de 2021–2022 (du 1er janvier au 31 mars 2022) était de 30 % inférieur à celui du même trimestre de 2019-2020 (Ibid.).
Figure 5 : Nombre de causes réglées par les tribunaux de la jeunesse dans les administrations déclarantes

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le nombre de causes réglées par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (causes réglées par trimestre) – Le bleu est pour l’année 2019–2020, le mauve est pour l’année 2020–2021, le noir est pour l’année 2021–2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 4 060, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 1 665, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 2 682.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 4 107, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 2 390, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 2 327.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3 827, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 2 955, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 2 490.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 1er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3 529, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 3 103, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 2 457.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
Utilisation de la technologie dans les tribunaux canadiens
Des travaux de modernisation des salles d’audience étaient déjà lancés dans tout le pays, mais la pandémie de COVID-19 a accéléré les délais et, dans certains cas, modifié les priorités et les façons de penser. Par exemple, au Nouveau-Brunswick, la nécessité de gérer les contraintes qui pesaient sur les procès avec jury à la suite de la pandémie de COVID-19 a donné lieu à l’accélération du processus de simplification des procédures avec jury, processus amorcé avant la pandémie. Les technologies existantes ont été mises à profit afin d’automatiser les assignations à comparaître et de fournir davantage de renseignements et des formulaires simplifiés en ligne pour faciliter l’accès (Comité d’action sur l’administration des tribunaux en réponse à la COVID-19 2021d). En Nouvelle-Écosse, la Cour suprême a commencé à recourir aux tribunaux virtuels, a publié un guide des pratiques exemplaires pour les audiences à distance et a tenu une séance portes ouvertes virtuelle afin de fournir aux professionnels de la justice des renseignements sur le fonctionnement des processus virtuels (Comité d’action sur l’administration des tribunaux en réponse à la COVID-19 2021e). En avril 2021, forte de l’expérience acquise avec les audiences virtuelles dans le contexte de la pandémie, la Cour provinciale de la Colombie-Britannique a lancé un programme pilote visant à centraliser les audiences sur la remise en liberté et à les tenir virtuellement pour les personnes des communautés nordiques (Ibid.).
Un nombre croissant de juristes, de conseillers juridiques et d’universitaires ont fait valoir qu’il était temps de [traduction] « réinventer les tribunaux » afin de remédier aux inefficacités et aux difficultés en cours avec les arriérés et les retards (Haigh et Preston 2021). Le juge en chef de l’Ontario, George R. Strathy a décrit la crise de la COVID-19 comme un [traduction] « moment Jordan » Note de bas de page26 pour l’ensemble du système judiciaire Note de bas de page27, le juge David M. Brown ajoutant qu’il y a actuellement une [traduction] « occasion d’une génération », dont nous devrions tirer parti. Note de bas de page28 Essentiellement, un système qui a si longtemps résisté à la technologie et à l’innovation est aujourd’hui contraint de se moderniser. Même si l’utilisation de la technologie qui a permis la vidéoconférence et le dépôt électronique de documents a propulsé le système judiciaire au XXIe siècle, le juge en chef David Jenkins de la Cour d’appel de l’Île-du-Prince-Édouard espère que l’expérience acquise pendant la pandémie [traduction] « produira des avantages à long terme et permettra de recourir à la technologie dans les tribunaux ». Note de bas de page29
La technologie a réussi à réduire les retards; elle ne peut toutefois les éliminer, et ne peut pas être appliquée universellement. Les audiences dans lesquelles un accusé a le droit d’être présent devant un tribunal constituent un exemple d’exemption à la tenue d’audiences virtuelles. La très honorable Beverley McLachlin mentionne que la justice sera toujours une entreprise humaine et que, même si nous adoptons la technologie pour améliorer l’efficacité et l’accès pour certains, [traduction] « nous devons faire preuve d’une grande prudence pour ne pas créer de nouveaux obstacles à la justice ». Note de bas de page30 Il faut entre autres prendre en compte la pauvreté, la langue, l’infrastructure, le soutien technologique et l’accès à l’information dans les plans de continuité des activités futurs et dans la planification de l’utilisation future de la technologie dans les salles d’audience canadiennes.
Efficacité des tribunaux
Le temps nécessaire pour régler une cause a augmenté
Les retards des tribunaux sont coûteux sur le plan économique, nuisent à la sécurité publique et à la confiance du public à l’égard du SJP et causent aussi des difficultés supplémentaires aux victimes, aux témoins et aux accusés. La quantité de temps requise pour traiter une cause devant les tribunaux est une mesure importante de l’efficience de ces derniers. Elle peut démontrer de façon quantitative l’accès limité aux tribunaux pendant la pandémie, bien que certaines affaires soient plus longues à traiter en général en raison du type d’infraction et du niveau de complexité. Le règlement est mesuré par le nombre médian de jours entre la première comparution et la décision finale, c’est-à-dire que la médiane correspond à la valeur médiane qui sépare la moitié de toutes les causes dont la durée est inférieure (ou égale) et la moitié de toutes les causes dont la durée est supérieure (ou égale).
Parmi les causes devant les tribunaux qui ont duré plus de sept jours, le nombre médian de jours nécessaires pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes était plus élevé pour chaque trimestre de l’année où la pandémie a commencé comparativement aux mêmes trimestres de l’année précédente (voir la figure 6). Par exemple, au premier trimestre de 2020-2021 (du 1er avril au 30 juin 2020), lorsque la pandémie a été déclarée, le nombre médian de jours requis pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes était de 195 jours, soit 23 jours de plus que le nombre médian de jours requis pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes au cours de la même période en 2019. Aux deuxième et troisième trimestres de 2020-2021 (du 1er juillet au 30 septembre 2020 et du 1er octobre au 31 décembre 2020), les délais médians étaient respectivement de 85 et 71 jours supérieurs à ceux pour les mêmes trimestres de l’année précédente. Au cours de l’année suivante, 2021-2022, le nombre médian de jours pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes aux deuxième et troisième trimestres était légèrement inférieur aux mêmes trimestres de l’année précédente; cependant, ces chiffres ne se rapprochaient toujours pas des niveaux prépandémiques. À la fin de 2021-2022, les données du quatrième trimestre montrent que le nombre médian de jours pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes a augmenté de 21 jours par rapport au quatrième trimestre de l’année précédente en 2020-2021. Il s’agit d’une augmentation de 31 % par rapport au quatrième trimestre précédant la pandémie en 2019-2020.
Figure 6 : Nombre médian de jours pour nécessaires pour régler une cause devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes nécessitant plus de sept jours

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le nombre médian de jours par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (nombre médian de jours par trimestre) – Le bleu est pour l’année 2019–2020, le mauve est pour l’année 2020–2021, le noir est pour l’année 2021–2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 172, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 195, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 231.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 157, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 242, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 238.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 166, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 237, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 223.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 1er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 182, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 218, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 239.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
On a constaté une tendance semblable dans les causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse au cours de la même période (voir la figure 7). Par exemple, au premier trimestre de 2020-2021 (du 1er avril au 30 juin 2020), le nombre médian de jours nécessaire au règlement d’une cause dont le traitement prend plus de sept jours était de 33 jours supérieurs au même trimestre de 2019-2020. Toutefois, au cours des trois trimestres suivants de 2020-2021, l’écart dans la durée médiane des cas a augmenté de plus de 80 jours (entre 84 et 108 jours) pour chaque trimestre comparativement aux mêmes trimestres de l’année précédant la déclaration de la pandémie de COVID-19.
Dans l’ensemble, à la fin de la première année de la pandémie (au quatrième trimestre de 2020-2021), le nombre médian de jours requis pour régler une cause était plus élevé pour les tribunaux de la jeunesse (268 jours) que pour les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes (218 jours), même si ces derniers ont une charge beaucoup plus élevée (c.-à-d. près de 18 fois plus de causes que les tribunaux de la jeunesse au quatrième trimestre de 2020-2021, figures 4 et 5). Au cours de l’année suivante, 2021-2022, le nombre médian de jours pour régler une cause devant les tribunaux de la jeunesse a diminué aux deuxième, troisième et quatrième trimestres, mais il n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant la pandémie (Ibid.).
Figure 7 : Nombre médian de jours pour nécessaires pour régler une cause devant les tribunaux de la jeunesse nécessitant plus de sept jours

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le nombre médian de jours par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (nombre médian de jours par trimestre) – Le bleu est pour l’année 2019–2020, le mauve est pour l’année 2020–2021, le noir est pour l’année 2021–2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 171, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 204, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 253.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 164, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 260, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 253.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 169, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 277, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 239.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 1er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 184, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 268, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 225.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
La proportion d’affaires devant les tribunaux qui dépassaient la limite établie par le principe de Jordan une fois réglées a augmenté
Le défaut de subir un procès dans un délai raisonnable peut constituer une violation des droits constitutionnels d’un accusé en vertu de l’alinéa 11b) de la Charte et pourrait entraîner un sursis à l’instance, conformément à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Jordan (R. v. Jordan 2016 SCC 27). Le pourcentage des causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes qui ont dépassé la limite établie par l’arrêt JordanNote de bas de page31 a augmenté d’une année sur l’autre pour chaque trimestre de chaque année depuis le début de la pandémie (voir la figure 8). Les augmentations les plus fortes ont été enregistrées un an après la déclaration de la pandémie. Par exemple, au premier trimestre de 2021-2022 (du 1er avril au 30 juin 2021), 9 % des causes réglées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes avaient dépassé la limite établie par l’arrêt Jordan, ce qui correspondait à plus du double de la proportion pour la même période de l’année précédente (4 %, Ibid.). Les données du quatrième trimestre de 2021-2022 montrent que le pourcentage de causes dépassant la limite établie par l’arrêt Jordan continue d’augmenter et atteint 11 %, par rapport à 9 % au quatrième trimestre de l’année précédente (Ibid.).
Figure 8 : Pourcentage des causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes qui dépassent la limite établie par l'arrêt Jordan

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le pourcentage des causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes qui dépassent la limite établie par l’arrêt Jordan par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (causes réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes par trimestre) – Le bleu est pour l’année 2019 2020, le mauve est pour l’année 2020 2021, le noir est pour l’année 2021 2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3,5 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 3,8 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 9,0 %.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3,3 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 6,4 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 9,7 %.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3,5 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 7,0 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 10,5 %.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 1er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 3,9 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 8,6 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 10,9 %.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
- Il convient de mentionner que le calcul de la durée de traitement des causes, comme indiqué dans l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle, commence à partir de la première comparution devant le tribunal, tandis que la limite établie par l’arrêt Jordan commence au moment du dépôt d’une accusation. Cette différence dans le calcul de la durée de traitement des causes peut entraîner une sous-déclaration des affaires qui dépassent la limite établie par l’arrêt Jordan.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
De même, la proportion de causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse qui dépassent la limite établie par le principe de Jordan a augmenté depuis le début de la pandémie. En 2021-2022, un an après le début de la pandémie, la proportion de causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse qui dépassaient la limite établie par le principe de Jordan allait de 11 % à 12 % au cours des trois premiers trimestres (voir la figure 9). Ce chiffre était environ quatre fois plus élevé pour le premier trimestre et six fois plus élevé pour les deuxième et troisième trimestres par rapport aux mêmes trimestres en 2019-2020 (Ibid.). Toutefois, au quatrième trimestre de 2021-2022, la proportion de causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse qui dépassent la limite établie par le principe de Jordan est environ trois fois plus élevée par rapport au quatrième trimestre de 2019-2020.
Figure 9 : Pourcentage des causes réglées par les tribunaux de la jeunesse qui dépassent la limite établie par l'arrêt Jordan

Version textuelle
Ce diagramme à barres verticales comporte quatre catégories, dont chacune représente le pourcentage des causes réglées par les tribunaux de la jeunesse qui dépassent la limite établie par l’arrêt Jordan par trimestre. Il y a trois barres pour chaque catégorie (causes réglées par les tribunaux de la jeunesse par trimestre) – Le bleu est pour l’année 2019 2020, le mauve est pour l’année 2020 2021, le noir est pour l’année 2021 2022.
La première catégorie correspond au premier trimestre : du 1er avril au 30 juin. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 2,8 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 3,8 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 10,7 %.
La deuxième catégorie correspond au deuxième trimestre : du 1er juillet au 30 septembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 2,2 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 4,2 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 12,2 %.
La troisième catégorie correspond au troisième trimestre : du 1er octobre au 31 décembre. La première barre est bleue (2019–2020) et indique 2,4 %, la deuxième barre est mauve (2020–2021) et indique 5,9 %, la troisième barre est noire (2021–2022) et indique 12,2 %.
La quatrième catégorie correspond au quatrième trimestre : du 11er janvier au 31 mars. La première barre est bleue (2019 2020) et indique 3,1 %, la deuxième barre est mauve (2020 2021) et indique 9,1 %, la troisième barre est noire (2021 2022) et indique 10,5 %.
Remarques :
- Les données ne comprennent pas Terre-Neuve-et-Labrador, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, le Québec et le Manitoba, puisque ces administrations n’ont pas présenté des données de façon constante à l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle pour tous les trimestres au cours des trois années.
- Ces données sont préliminaires et doivent être interprétées avec prudence. Les données sont comparées d’une année à l’autre et non d’un trimestre à l’autre. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez vous reporter à l’Encadre 4 : Remarque sur les limites relatives aux données trimestrielles des tribunaux.
- Il convient de mentionner que le calcul de la durée de traitement des causes, comme indiqué dans l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle, commence à partir de la première comparution devant le tribunal, tandis que la limite établie par l’arrêt Jordan commence au moment du dépôt d’une accusation. Cette différence dans le calcul de la durée de traitement des causes peut entraîner une sous-déclaration des affaires qui dépassent la limite établie par l’arrêt Jordan.
Source : Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC), Statistique Canada, Demande spéciale, s.d.-e
Dans les causes réglées par des tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, les données les plus récentes disponibles pour le quatrième trimestre de 2021-2022 (du 1er janvier au 31 mars 2022) montrent que les infractions au Code criminel (15 %), les crimes contre la personne (14 %) et les crimes contre les biens (10 %) affichaient le pourcentage le plus élevé de causes qui dépassaient la limite établie par l’arrêt Jordan (Statistique Canada s.d.-d.).Note de bas de page32 En ce qui concerne les causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse au cours de la même période, les infractions contre la personne (13 %), les autres infractions au Code criminelNote de bas de page33 (10 %) et les infractions au Code criminel liées au trafic (10 %) étaient les infractions qui affichaient la plus forte proportion de causes dépassant la limite établie par le principe de Jordan (Ibid.).
La fermeture temporaire ou partielle des tribunaux d’un bout à l’autre du Canada a entraîné des retards importants dans les procès, en plus de soulever des préoccupations en ce qui concerne le droit à un procès en vertu de l’alinéa 11b) de la Charte dans un délai raisonnable (Paciocco 2021). Il ne fait aucun doute que la pandémie de COVID-19 est une situation unique; c’est toutefois le juge de première instance qui détermine si un retard est attribuable à une « circonstance exceptionnelle » en appliquant le cadre établi dans l’arrêt Jordan.Note de bas de page34 Un an après la pandémie, de nombreux juges partout au Canada ont déterminé qu’une pandémie mondiale constitue une « circonstance exceptionnelle ». Cela dit, au moment de la rédaction du présent rapport, un certain nombre de demandes fondées sur le principe de Jordan sont présentées aux tribunaux, et la jurisprudence dans ce domaine pourrait continuer d’évoluer (Bridges et Latimer 2021).
Il faudra mener des recherches supplémentaires dans un avenir postpandémique afin de bien comprendre les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur le système judiciaire canadien, y compris un examen des contestations judiciaires portées devant les tribunaux en réponse aux directives de santé publique données pendant la pandémie.
L’administration des infractions contre l’administration de la justice demeure stable
L’administration des infractions contre l’administration de la justice (ICAJ) est un autre indicateur de l’efficacité des tribunaux mis en évidence dans le cadre de l’état du système de justice pénale. Les ICAJ sont des infractions commises contre l’intégrité du système de justice pénale et comprennent, par exemple, le non-respect des conditions énoncées dans une ordonnance (comme les conditions de libération sous caution) et le défaut de comparaître (devant un tribunal), entre autres violations.Note de bas de page35 Ces violations sont souvent perçues comme une porte tournante au sein du système de justice, car elles sont commises lorsqu’une personne enfreint une condition avant procès ou une peine imposée pour une infraction antérieure. Ils sont donc renvoyés dans le système ou y restent, et ce, même si certains ont pu être innocentés de l’infraction initiale pour laquelle ils ont violé une condition avant procès (Burczycka et Munch 2015). Le pourcentage de causes réglées par des tribunaux de juridiction criminelle pour les adultes et pour les jeunes pour lesquelles l’infraction la plus grave était une ICAJ est resté relativement stable et inchangé par la pandémie. Par exemple, au quatrième trimestre de 2021-2022, les proportions pour les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et pour les jeunes étaient respectivement de 20 % et de 8 %, ce qui était presque identique aux taux pour le quatrième trimestre de l’année précédant la pandémie (21 % et 9 %, respectivement, en 2019-2020) (Statistique Canada s.d.-d).Note de bas de page36
Projet de loi fédérale visant à améliorer le SJP et à gérer les répercussions de la COVID-19
Le 24 février 2021 (43e législature), l’honorable David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada, a présenté l’ancien projet de loi C-23, Projet de loi C-23, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois (réponse à la COVID-19 et autres mesures) (Ministère de la Justice Canada 2021b). Le projet de loi n’a pas été plus loin que la première lecture dans la Chambre des communes. Le 8 février 2022 (44e législature), le gouvernement a présenté de nouveau dans le projet de loi S-4, qui apporte des modifications considérablement similaires au Code criminel et à la Loi sur l’identification des criminels, ainsi que des modifications connexes à d’autres lois fédérales. Ces modifications visaient à aider les tribunaux de juridiction criminelle à surmonter les obstacles causés ou exacerbés par la pandémie de COVID-19, à moderniser le système de justice pénale et à faciliter l’accès à la justice (Gouvernement du Canada 2022a).
Accès au SJP et autres mécanismes de règlement
Le nombre de demandes d’aide judiciaire pénale approuvées a diminué, mais les demandes approuvées par rapport à toutes les demandes d’aide judiciaire sont restées stables
Le cadre de l’état du système de justice pénale a comme résultat fondamental de garantir que le SJP est équitable et accessible.Footnote37 Ce résultat peut être mesuré par le recours à l’aide et aux programmes juridiques. La prestation d’une aide juridique pénale favorise l’accès à la justice pour les personnes défavorisées sur le plan économique, contribue à assurer l’équité, la pertinence et l’accessibilité du système de justice pénale canadien et aide à renforcer la confiance du public dans le système de justice pénale. En 2020-2021, 238 156 demandes d’aide judiciaire pénale ont été reçues pour les adultes et les jeunes (Ministère de la Justice Canada 2022a), ce qui correspond à une baisse de 20 % par rapport à l’année précédente (299 330 en 2019-2020) [Ibid.]. Le nombre de demandes d’aide judiciaire pénale a diminué de façon constante au fil des ans, mais cette baisse est la plus forte des dernières années. La baisse du nombre de demandes d’aide judiciaire pénale reçues peut être attribuée en partie à la COVID-19, car la pandémie a entraîné la fermeture des tribunaux, a eu une incidence sur le niveau de dotation, a réduit la disponibilité des services d’aide juridique et a créé un arriéré dans le traitement des dossiers, réduisant ainsi le nombre de dossiers traités. En 2020-2021, le nombre de demandes approuvées pour une représentation légale complèteFootnote38 a également baissé, mais leur proportion par rapport à l’ensemble des demandes reçues est demeurée relativement stable, passant de 85 % (253 786) en 2019-2020 à 84 % (199 767) en 2020-2021 (Ibid.). Une proportion semblable des demandes approuvées (parmi l’ensemble des demandes) a été observée chez les Autochtones (83 %) [Ibid].Footnote39
Le recours aux programmes et aux processus de déjudiciarisation et de justice réparatriceFootnote40 a diminué
Au Canada, la criminalité peut être gérée par divers mécanismes de résolution, y compris des options communautaires et culturelles ou le système de justice pénale officiel, au besoin. L’un des résultats mis en évidence dans le cadre de l’état du système de justice pénale est la promotion et le soutien de la déjudiciarisation, de la justice réparatrice et des programmes communautaires de justice autochtone. Ce résultat est notamment mesuré par le recours à la déjudiciarisation, ainsi aux programmes et processus de justice réparatrice.
En 2020, 5 769 incidents criminels ont été classés par un renvoi à un programme de déjudiciarisation par la police, ce qui correspond à une baisse de 36 % par rapport à l’année précédente (9 009 en 2019) (Statistique Canada s.d.-f.). Cette baisse est en partie attribuable à la diminution de 9 % du nombre total d’incidents signalés par la police au cours de la même période (Ibid.). La proportion de tous les incidents classés par la police a légèrement diminué, passant de 35 % en 2019 à 34 % en 2020, tandis que la proportion de tous les incidents non classés est passée de 63 % en 2019 à 65 % en 2020 (Ibid.).Footnote41
Les restrictions liées à la pandémie qui ont entraîné des fermetures et des retards dans l’ensemble du SJP canadien ont également eu une incidence directe sur les services de justice réparatrice (JR), un mécanisme de résolution communautaire. La police et les procureurs se sont concentrés à maintenir les opérations de base, tandis que de nombreux tribunaux se sont concentrés seulement sur l’audition des affaires urgentes. Chacun de ces facteurs a influé sur les renvois à la JR, ce qui a mené certains programmes communautaires de JR à suspendre temporairement leurs activités. Environ 92 % des répondants à un sondage mené auprès des ministères de 11 administrations fédérales-provinciales-territoriales qui appuient les programmes de JR ont indiqué que le nombre de causes renvoyées avait baissé entre mars et juillet 2020, principalement en raison de fermetures et de retards dans le système judiciaire. La baisse du nombre de renvois a également eu une incidence sur le nombre de cas acceptés (Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la justice réparatrice À paraître). Dans la mesure du possible, les organisations JR du pays ont recouru à la technologie pour établir des liens avec les victimes et les délinquants; les processus virtuels n’étaient toutefois accessibles qu’aux personnes ayant accès à l’Internet haute vitesse (p. ex., à la maison, dans une bibliothèque ou au bureau du ministère de la Justice local) (Asadullah et Tomorowski 2021).
Programme d’assistance parajudiciaire aux autochtones
Le Cadre de l’état du système de justice pénale examine le nombre de clients servis par le Programme d’assistance parajudiciaire aux autochtones (PAPA) Footnote42 comme indicateur d’un SJP équitable et accessible. Aucune donnée sur le rendement du PAPA après le début de la pandémie n’est disponible à l’heure actuelle. Dans un rapport récent, toutefois, on s’est penché sur les activités du PAPA tout au long de la pandémie et on a conclu qu’il continuait de fonctionner, les conseillers parajudiciaires aux Autochtones (CPA) agissant en tant que lien direct entre les tribunaux et leurs clients autochtones. La transition vers le travail à distance a permis aux CPA de travailler plus étroitement avec les professionnels de la justice (c.–à–d. le personnel des tribunaux, les agents de probation, les avocats de l’aide juridique, les avocats de service, les avocats de la Couronne et les avocats du secteur privé) grâce à l’utilisation de la technologie. Ils avaient toutefois plus de mal à entrer en contact avec des clients qui n’avaient souvent pas accès aux téléphones ou aux appareils (Reciprocal Consulting 2021).
Une enquête menée en 2021 auprès des CPA a révélé que le rôle des CPA avait évolué pendant la pandémie. Les répondants ont généralement indiqué qu’ils offraient un soutien plus global aux clients (c.–à–d. les demandes pour la Prestation canadienne d’urgence, les paniers de nourriture et la distribution d’équipement de protection individuelle) et qu’ils jouaient un rôle de défense plus important dans les salles d’audience. Un tiers (n=56) des répondants ont indiqué qu’ils aidaient également des clients qui ne relevaient pas de leur rôle de CPA (c.-à-d., aider un nouvel immigrant au Canada ou d’autres clients non autochtones) [Ibid.]. Les répondants ont également indiqué que la pandémie avait eu une incidence sur les renvois de leurs clients à d’autres services en raison de l’augmentation des listes d’attente et de la diminution des options de renvois (Ibid.).
Opérations correctionnelles pendant la pandémie
Les personnes qui se trouvent dans les établissements correctionnels sont particulièrement vulnérables à la COVID-19, car la conception de l’établissement peut rendre la mise en œuvre de mesures de prévention et de contrôle des infections plus complexe. Il faut donc adopter une approche stratégique pour résoudre des problèmes comme l’espace limité et l’infrastructure rigide. Compte tenu du risque auquel les personnes qui vivent dans des établissements correctionnels s’exposent sans la mise en place de mesures de protection adéquate, des mesures ont été prises au début de la pandémie afin de réduire la taille de la population carcérale, tout en assurant un équilibre avec la sécurité publique. Parmi ces mesures figurent la mise en liberté provisoire ou la libération anticipée des personnes en détention, jugées peu susceptibles de récidiver, la prolongation du délai des appels de libération conditionnelle et de l’accès au privilège d’un congé médical, de même que d’autres solutions de rechange à la détention des personnes en attente de leur procès, de la détermination de leur peine ou d’une enquête sur le cautionnement (Statistique Canada 2021). En outre, le personnel correctionnel et les détenus ont reçu une éducation sur les mesures de prévention et de contrôle des infections et sur l’équipement de protection individuelle, des pratiques d’hygiène et de nettoyage accrues ont été mises en œuvre dans les établissements, des transferts interrégionaux et internationaux ainsi que des visites en personne ont été temporairement suspendus, et l’utilisation de la technologie a été encouragée pour les visites familiales et certaines comparutions devant les tribunaux (Ibid.).
La COVID-19 dans les établissements correctionnels fédéraux
La pandémie de COVID-19 a posé des défis particuliers aux établissements correctionnels. À l’instar des autres lieux de vie communautaires (p. ex., les résidences pour personnes âgées et les refuges), les établissements correctionnels présentent un risque plus élevé de transmission de la COVID-19. Cela s’explique par la proximité des détenus et du personnel, les espaces confinés, l’absence de distance physique, les détenus nouvellement admis, les déplacements du personnel et des détenus, ainsi que l’environnement sanitaire médiocre. L’approche adoptée par le SCC pour atténuer ces difficultés comprenait la mise en œuvre d’une série de mesures de prévention et de contrôle semblables à celles mentionnées au paragraphe précédent (Gouvernment du Canada 2020b).
Éclosions et décès dans les établissements du SCC
Au 18 août 2022, plus de deux ans après le début de la pandémie, le SCC a signalé 6 237 cas positifs à la COVID-19 chez les détenus dans les établissements correctionnels fédéraux (Gouvernment du Canada 2022b). À cette date, la plupart des détenus sous responsabilité fédérale qui avaient déjà obtenu un résultat positif au test de dépistage étaient rétablis (99 %), tandis qu’environ 1 % des cas (56 cas) étaient toujours actifs et que moins de 1 % (6 cas) avaient entraîné la mort du détenu (Ibid.).
Déploiement des vaccins
Le SCC est tenu par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC), de fournir des soins de santé essentiels aux détenus sous responsabilité fédérale. Tout au long de la pandémie, le SCC a travaillé en étroite collaboration avec l’Agence de la santé publique du Canada afin de mettre en œuvre de multiples mesures préventives pour éviter la propagation du virus et assurer la santé et la sécurité des détenus et du personnel. À savoir, des vaccins ont été administrés conformément aux lignes directrices du Comité consultatif national de l’immunisation. Le déploiement des vaccins s’est amorcé en janvier 2021. Au 14 août 2022, le SCC avait administré au total 33 196 doses, ce qui signifie que 81 % des détenus étaient adéquatement vaccinés (Gouvernment du Canada 2022c).Footnote43
Plaintes des délinquants
Au cours des huit premiers mois de la pandémie, le Bureau de l’enquêteur correctionnel a reçu près de 500 plaintes relatives à la COVID-19 de détenus dans des établissements correctionnels fédéraux (Bureau de l'enquêteur correctionnel 2021a). Les plaintes reçues pendant la pandémie portaient sur l’accès limité aux services (p. ex., les services de santé, les programmes éducatifs, l’accès à la bibliothèque et au gymnase, ainsi que les visites), l’accès limité aux fournitures sanitaires et à l’équipement de protection individuelle, le non-respect des mesures de protection par le personnel et le temps excessif passé dans les cellules (Ibid.). Dans plusieurs cas, les plaintes étaient issues de la mise en œuvre de mesures de contrôle restrictives visant à prévenir la COVID-19 et à en limiter la propagation, ce qui avait pour conséquence de limiter l’accès à des services institutionnels clés. Les expériences de la pandémie de COVID-19 « ont été exceptionnellement difficiles et astreignantes pour les personnes vivant derrière les barreaux » (Bureau de l'enquêteur correctionnel 2021b).
Tendances dans la population carcérale
Baisse globale des populations carcérales
Au cours des premiers mois qui ont suivi le début de la pandémie de COVID-19, le nombre d’adultes et de jeunes dans les établissements de détention a connu une baisse sans précédent (voir les figures 10 et 11). Par exemple, les changements mensuels dans la population carcérale adulte ne dépassent généralement pas 1 % (Statistique Canada 2021). En avril 2020, le premier mois après la déclaration de la pandémie, le nombre quotidien moyen d’adultes sous garde fédérale et provinciale-territorialeFootnote44 a chuté de près de 5 000 (voir la figure 10). D’avril à juin 2020, le nombre quotidien moyen a continué de diminuer, mais pas nécessairement autant qu’en avril. En juillet, ce nombre a commencé à augmenter lentement, mais il n’est pas revenu aux niveaux prépandémiques. À la fin de 2020-2021, un an après le début de la pandémie, le nombre annuel moyen d’adultes sous garde provinciale, territoriale et fédérale avait diminué de 16 % depuis l’année précédente (Statistique Canada 2022).
De même, le nombre quotidien moyen de jeunes sous garde provinciale-territorialeFootnote45 avait baissé de plus de 100 entre mars et avril 2020 (voir la figure 11). Le nombre quotidien moyen de jeunes détenus a commencé à augmenter d’août à octobre 2020; à la fin de la première année de la pandémie, toutefois, il avait diminué de 27 % par rapport à mars 2020 (Ibid.).
Cette baisse de la population carcérale adulte et de la population carcérale des jeunes pendant la pandémie a entraîné une diminution des taux d’incarcération des adultes et des jeunes en 2020-2021. En ce qui concerne les personnes âgées de 18 ans et plus, le taux d’incarcération dans les services correctionnels provinciaux-territoriaux est passé de 79 à 62 pour 100 000 adultes entre 2019-2020 et 2020-2021 (Statistique Canada s.d.-g.). Dans les établissements correctionnels fédéraux, le taux d’incarcération est passé de 46 à 42 pour 100 000 adultes au cours de la même période (Statistique Canada s.d.-h.). Dans le cas des jeunes âgés de 12 à 17 ans, le taux d’incarcération est passé de 4 à 3 pour 10 000 jeunes par rapport à 2019-2020 (Statistique Canada s.d.-i.).
Figure 10 : Nombre quotidien moyen d'adultes sous garde fédérale et provinciale-territoriale

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte seize catégories, dont chacune représente un mois situé entre mars 2020 et juin 2021. Il y a une ligne bleue pour chaque catégorie (mois) indiquant le nombre quotidien d’adultes sous garde fédérale et provinciale territoriale.
La première catégorie correspond à mars 2020 et la ligne bleue indique 36 954.
La deuxième catégorie correspond à avril 2020 et la ligne bleue indique 32 109.
La troisième catégorie correspond à mai 2020 et la ligne bleue indique 30 925.
La quatrième catégorie correspond à juin 2020 et la ligne bleue indique 30 773.
La cinquième catégorie correspond à juillet 2020 et la ligne bleue indique 30 847.
La sixième catégorie correspond à août 2020 et la ligne bleue indique 31 245.
La septième catégorie correspond à septembre 2020 et la ligne bleue indique 31 684.
La huitième catégorie correspond à octobre 2020 et la ligne bleue indique 32 259.
La neuvième catégorie correspond à novembre 2020 et la ligne bleue indique 32 525.
La dixième catégorie correspond à décembre 2020 et la ligne bleue indique 31 981.
La onzième catégorie correspond à janvier 2021 et la ligne bleue indique 32 052.
La douzième catégorie correspond à février 2021 et la ligne bleue indique 32 303.
La treizième catégorie correspond à mars 2021 et la ligne bleue indique 32 536.
La quatorzième catégorie correspond à avril 2021 et la ligne bleue indique 32 577.
La quinzième catégorie correspond à mai 2021 et la ligne bleue indique 32 337.
La seizième catégorie correspond à juin 2021 et la ligne bleue indique 32 428.
Nombre quotidien moyen de jeunes sous garde provinciale territoriale
Source : Rapport sur les indicateurs clés des services correctionnels pour adultes. « Statistiques sur les services correctionnels pour les adultes et les jeunes, 2020-2021 », Statistique Canada, 2022.
Figure 11 : Nombre quotidien moyen de jeunes sous garde provinciale-territoriale

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte treize catégories, dont chacune représente un mois situé entre mars 2020 et mars 2021. Il y a une ligne bleue pour chaque catégorie (mois) indiquant le nombre quotidien de jeunes sous garde provinciale–territoriale.
La première catégorie correspond à mars 2020 et la ligne bleue indique 599.
La deuxième catégorie correspond à avril 2020 et la ligne bleue indique 491.
La troisième catégorie correspond à mai 2020 et la ligne bleue indique 490.
La quatrième catégorie correspond à juin 2020 et la ligne bleue indique 500.
La cinquième catégorie correspond à juillet 2020 et la ligne bleue indique 498.
La sixième catégorie correspond à août 2020 et la ligne bleue indique 493.
La septième catégorie correspond à septembre 2020 et la ligne bleue indique 515.
La huitième catégorie correspond à octobre 2020 et la ligne bleue indique 530.
La neuvième catégorie correspond à novembre 2020 et la ligne bleue indique 501.
La dixième catégorie correspond à décembre 2020 et la ligne bleue indique 479.
La onzième catégorie correspond à janvier 2021 et la ligne bleue indique 466.
La douzième catégorie correspond à février 2021 et la ligne bleue indique 449.
La treizième catégorie correspond à mars 2021 et la ligne bleue indique 451.
Source : Rapport sur les indicateurs clés des services correctionnels pour les jeunes. « Statistiques sur les services correctionnels pour les adultes et les jeunes, 2020-2021 », Statistique Canada, 2022.
Le nombre d’adultes et de jeunes placés en détention provisoire ou avant le procès a baissé, tandis que les adultes placés en détention provisoire représentaient une proportion de plus en plus grande de tous les adultes placés en détention (détention provisoire et condamnation)
Les tendances à la baisse au sein de la population carcérale adulte des provinces et des territoires au début de la pandémie étaient en grande partie attribuables à des changements dans la population carcérale (c.–à–d. les personnes en détention en attente de subir un procès ou à la suite d’une condamnation) (Statistique Canada 2021). La détention provisoire (adultes) et la détention avant le procès (jeunes)Footnote46 jouent un rôle important dans la protection de la société et dans l’administration de la justice, mais l’augmentation du nombre et de la proportion de personnes placées en détention provisoire ou avant procès peut indiquer des problèmes systémiques plus profonds. Cela comprend les questions liées aux droits juridiques (p. ex. la présomption d’innocence), aux droits de la personne (p. ex. mauvaises conditions, surpeuplement, manque de programmes correctionnels), à l’accès à la justice, à une culture de l’inefficacité et de retards, et aux répercussions disproportionnées du système de justice pénale sur les personnes vulnérables et marginalisées.
Depuis le début de la pandémie, le nombre de personnes placées en détention provisoire ou en détention avant procès a baissé. En 2020-2021, on comptait 12 767 adultes en détention provisoire, ce qui correspond à une baisse de 18 % par rapport à 2019 (15 505) (Statistique Canada s.d.-g.). Malgré cette baisse, la proportion d’adultes en détention provisoire parmi tous les adultes en détention (détention provisoire et condamnation) a légèrement augmenté, passant de 66 % en 2019-2020 à 69 % en 2020-2021 (Ibid.).
Le nombre de jeunes détenus en détention avant le procès a baissé de 28 %, passant de 383 en 2019 à 274 en 2020-2021 (Statistique Canada s.d.-i.). La proportion de jeunes en détention provisoire parmi tous les jeunes en détention (détention avant le procès et condamnation) est restée quelque peu stable, à 58 % en 2019-2020 et 57 % en 2020-2021 (Ibid.).
Les admissions d’adultes et de jeunes autochtones aux services correctionnels ont diminué, mais les admissions de personnes autochtones ont représenté une proportion de plus en plus grande des admissions globales
La surreprésentation des Autochtones dans les services correctionnels demeure un problème urgent en matière de droits de la personne au Canada. C’est pourquoi un indicateur clé du Cadre de l’état du système de justice pénale mesure la représentation des Autochtones dans les admissions aux établissements correctionnels. Même s’ils ne représentent qu’environ 5 % de la population canadienne adulte, les adultes autochtones ont continué de représenter une proportion beaucoup plus importante d’admissions d’adultes aux établissements de détention provinciaux et territoriaux (31 %), et fédéraux (33 %) en 2020-2021 (Statistique Canada 2022). Au cours de la même année, les jeunes autochtones représentaient la moitié (50 %) de toutes les admissions de jeunes en détention en 2020-2021, tandis qu’ils représentaient environ 8 % de la population de jeunes (Ibid.).
Le nombre d’admissions d’Autochtones aux services correctionnels pour adultes (en détention et services communautaires) a baissé au cours de la première année de la pandémie. Cette baisse a surtout été observée dans les services correctionnels provinciaux et territoriaux (-31 %, de 104 550 en 2019-2020 à 72 002 en 2020-2021), et dans une moindre mesure dans les services correctionnels fédéraux (-9 %, de 4 315 en 2019-2020 à 3 916 en 2020-2021) (Statistique Canada s.d.-j., Statistique Canada s.d.-m., Statistique Canada s.d.-k.). La baisse a été plus marquée pour les admissions en détention que pour les admissions aux services communautaires. Le nombre d’admissions d’adultes autochtones en détention a baissé de 34 % pour les établissements correctionnels provinciaux et territoriaux et de 16 % pour les établissements correctionnels fédéraux (Statistique Canada s.d.-j., Statistique Canada s.d.-m.).
Malgré ces baisses, entre 2019-2020 et 2020-2021, la proportion d’admissions d’adultes autochtones aux programmes des services correctionnels (de toutes les admissions en détention et aux services communautaires) a augmenté d’un point de pourcentage pour les établissements correctionnels provinciaux-territoriaux (de 29 % à 30 %, respectivement) et de deux points de pourcentage pour les établissements correctionnels fédéraux (de 30 % à 32 %, respectivement) (Statistique Canada s.d.-j., Statistique Canada s.d.-k., Statistique Canada s.d.-n., Statistique Canada s.d.-o.). L’écart entre les délinquants autochtones et non autochtones était plus prononcé chez les femmes que chez les hommes. En 2020-2021, les femmes autochtones représentaient 42 % des admissions de femmes en détention dans les établissements provinciaux-territoriaux et 40 % dans les établissements fédéraux, tandis que les hommes autochtones représentaient 30 % des admissions d’hommes en détention dans les établissements provinciaux et territoriaux et 32 % dans les établissements fédéraux (Ibid.).
Les admissions des jeunes autochtones aux programmes des services correctionnels (détention et services communautaires) ont également baissé en 2020-2021 par rapport à l’année précédente (-41 %, de 7 270 à 4 302) (Statistique Canada s.d.-n.). Ces baisses n’ont toutefois pas été aussi prononcées que celles constatées dans les admissions de jeunes non autochtones, puisque la proportion des admissions de jeunes autochtones (de toutes les admissions) a augmenté de 2 points de pourcentage (passant de 41 % à 43 % en 2020-2021) (Ibid.). Comme c’est le cas chez les adultes, cette baisse a été plus marquée pour les admissions en détention que pour les admissions aux services communautaires; les admissions de jeunes autochtones en détention ont baissé de 44 % de 2019-2020 à 2020-2021 (Ibid.). La surreprésentation est plus prononcée chez les jeunes Autochtones de sexe féminin, qui représentaient 62 % des admissions de jeunes de sexe féminin en détention, tandis que les jeunes Autochtones de sexe masculin représentent 48 % des admissions de jeunes de sexe masculin en détention (Statistique Canada 2022).
Les délinquants autochtones représentaient une proportion de plus en plus grande de la population totale de délinquants sous responsabilité fédérale
À la suite de la pandémie, en 2020-2021, la population de délinquants sous responsabilité fédérale, y compris en établissement et dans la collectivité, a diminué de près de 1 600 personnes par rapport à l’année précédente (Service correctionnel Canada s.d.). Suivant une tendance similaire, le nombre de délinquants autochtones sous responsabilité fédérale a baissé de 4 %, passant de 6 030 en 2019-2020 à 5 809 en 2020-2021 (Ibid.). Cette baisse n’était toutefois pas aussi prononcée que celle observée chez les délinquants non autochtones; la proportion de délinquants autochtones (en détention et dans la collectivité) a augmenté d’un point de pourcentage (passant de 26 % en 2019-2020 à 27 % en 2020-2021) (Ibid.). Cette augmentation de proportion était plus prononcée chez la population carcérale. En 2019-2020, les délinquants autochtones représentaient 30 % (4 138) de tous les détenus sous responsabilité fédérale; cette proportion est passée à 32 % (3 914) en 2020-2021 (Ibid.). Entre 2019-2020 et 2020-2021 (Ibid.), les hommes autochtones (+1 %) et les délinquantes (+2 %) ont vu leur proportion parmi tous les délinquants sous responsabilité fédérale incarcérés augmenter en pourcentage.
La proportion de délinquants autochtones dangereux demeure stable et inchangée depuis la pandémie
Un délinquant dangereux (DD) est une personne à qui l’on impose une peine d’une durée déterminée ou non en fonction d’un crime particulièrement violent ou d’un schéma de crimes violents graves, lorsqu’on juge que le comportement du délinquant a peu de chance d’être inhibé par les normes ordinaires de restriction du comportement. (Service correctionnel Canada s.d.). En 2020-2021, la proportion d’Autochtones parmi les délinquants désignés comme DD est demeurée inchangée par rapport à l’année précédente, à 36 % (Ibid.).
La proportion de délinquants noirs et de délinquants racisés sous responsabilité fédérale demeure stable
Depuis le début de la pandémie, le nombre de délinquants racisésNote de bas de page47 sous surveillance fédérale a diminué d’environ 9 %, passant de 3 864 en 2019-2020 à 3 530 en 2020-2021 (Service correctionnel Canada s.d.). Des baisses ont été constatées dans tous les groupes racisés : les délinquants Latinx ont enregistré la plus forte baisse proportionnelle du nombre de délinquants, soit 14 % (de 258 à 222), tandis que les délinquants noirs sous surveillance fédérale ont enregistré la plus faible baisse proportionnelle, soit 7 % (de 2 026 à 1 876) [Ibid.]. La population de délinquants blancs a baissé de 9 % (passant de 12 508 à 11 381) au cours de cette période (Ibid.).
Malgré la baisse, en 2020-2021, la proportion de délinquants racisés parmi tous les délinquants sous surveillance fédérale (en détention et dans la collectivité) est demeurée pratiquement inchangée, à 16 % de tous les délinquants sous surveillance fédérale, comparativement à un peu moins de 17 % en 2019-2020 (voir la figure 12). De même, la proportion de délinquants blancs sous surveillance fédérale est demeurée relativement stable, à 53 % en 2020-2021, comparativement à 54 % l’année précédente (Ibid.). Des tendances comparables ont été observées pour les populations en détention et les populations dans la collectivité.
En 2020-2021, les délinquants noirsNote de bas de page48 représentaient le plus grand groupe de délinquants racisés, soit 9 %Note de bas de page49 de tous les délinquants sous surveillance fédérale, tandis qu’ils ne représentaient que 3 % de la population canadienne adulte totale (voir la figure 12). Même si la proportion de délinquants noirs est demeurée la même en 2020-2021 par rapport à l’année précédente, le nombre de délinquants noirs sous surveillance fédérale a augmenté régulièrement au cours des dernières années, tandis que le nombre de délinquants blancs a baissé (Ibid.). Par exemple, le nombre de délinquants noirs a augmenté de 2 % entre 2016-2017 et 2020-2021, tandis que le nombre de délinquants blancs a baissé de 16 % au cours de la même période (Ibid.).
Les délinquants asiatiquesNote de bas de page50 et LatinxNote de bas de page51 représentaient respectivement 6 % et 1 % de tous les délinquants sous surveillance fédérale (voir la figure 12).Note de bas de page52 Ces proportions étaient inférieures ou égales à la représentation de ces groupes dans la population adulte canadienne (14 % et 1 %, respectivement) (voir la figure 12).
Figure 12 : Proportion de la population canadienne adulte et de la population de délinquants sous responsabilité fédérale (en détention et dans la collectivité), par groupe racisé, Canada, 2019-2020 et 2020-2021

Version textuelle
Ce diagramme à barres verticales comporte cinq catégories, dont chacune représente un groupe racisé. Il y a trois barres pour chaque catégorie (groupe racisé) – Le bleu représente la population canadienne, le mauve représente la population de délinquants (2019‑2020), le noir représente la population de délinquants (2020‑2021).
La première catégorie concerne les groupes racisés. La première barre est bleue (population canadienne) et indique 20,9 %, la deuxième barre est mauve (population de délinquants – 2019‑2020) et indique 16,7 %, la troisième barre est noire (population de délinquants – 2020‑2021) et indique 16,4 %.
La deuxième catégorie concerne les groupes noirs. La première barre est bleue (population canadienne) et indique 2,9 %, la deuxième barre est mauve (population de délinquants – 2019‑2020) et indique 8,7 %, la troisième barre est noire (population de délinquants – 2020‑2021) et indique 8,7 %.
La troisième catégorie concerne les groupes asiatiques. La première barre est bleue (population canadienne) et indique 14,4 %, la deuxième barre est mauve (population de délinquants – 2019‑2020) et indique 5,9 %, la troisième barre est noire (population de délinquants – 2020‑2021) et indique 5,7 %.
La quatrième catégorie concerne les groupes Latinx. La première barre est bleue (population canadienne) et indique 1,3 %, la deuxième barre est mauve (population de délinquants – 2019‑2020) et indique 1,1 %, la troisième barre est noire (population de délinquants – 2020‑2021) et indique 1,0 %.
La cinquième catégorie concerne les groupes blancs. La première barre est bleue (population canadienne) et indique 74,9 %, la deuxième barre est mauve (population de délinquants – 2019‑2020) et indique 54,1 %, la troisième barre est noire (population de délinquants – 2020‑2021) et indique 52,9 %.
Source : Profil du recensement, 2016. Statistique Canada. Demande spéciale. Totalisation personnalisée préparée par le ministère de la Justice Canada. 2017.
Remarque : Les données du Recensement de la population, 2 016 (Statistique Canada) ont servi à présenter la proportion de la population canadienne âgée de 18 ans et plus. Les données du Recensement sur les groupes racisés proviennent de la variable et des catégories des minorités visibles. Veuillez noter que les chiffres du Recensement sont arrondis au hasard, de sorte que les proportions ne sont pas fondées sur les chiffres exacts.
Les plus fortes baisses du nombre de délinquants racisés de 2019-2020 à 2020-2021 ont été enregistrées chez les personnes en détention (13 %) plutôt que chez celles dans la collectivité (2 %) (Service correctionnel Canada s.d.). En 2020-2021, la majorité (62 %) des délinquants noirs sous surveillance fédérale étaient en détention plutôt que dans la collectivité (38 %), tandis que la proportion des délinquants blancs était répartie de façon plus égale entre la détention (52 %) et la surveillance dans la collectivité (48 %), comme c’était le cas pour les délinquants asiatiques (51 % en détention et 49 % dans la collectivité) et, dans une mesure relativement moindre, pour les délinquants Latinx (58 % en détention et 42 % dans la collectivité) [Ibid.].
Les femmes racisées représentaient 10 % des délinquantes en détention dans un établissement fédéral (Ibid.). Une baisse de 18 % (de 77 à 63) chez les délinquantes raciséesNote de bas de page53 et de 15 % (de 313 à 267) chez les délinquantes blanches a été enregistrée de 2019-2020 à 2020-2021, tandis que le nombre de délinquants racisés et blancs a baissé de 13 % (Ibid.).
Services de réadaptation et de préparation à la mise en liberté dans la collectivité
Le SJP a le résultat essentiel de veiller à ce que les personnes qui font partie du système correctionnel reçoivent les services et le soutien dont elles ont besoin pour réussir leur réadaptation et leur réinsertion dans la société. À l’échelle fédérale, le SCC offre un éventail de services et de soutiens, y compris le traitement des problèmes de santé mentale, les programmes éducatifs, les programmes correctionnels ainsi que des possibilités pour les collectivités autochtones de participer à la réinsertion sociale des délinquants autochtones qui retournent dans leur collectivité par l’intermédiaire des mises en liberté prévues à l’article 84 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC). Le SCC et la CLCC aident également les victimes d’actes criminels en leur permettant de s’inscrire pour recevoir des renseignements sur un individu qui leur a causé du tort. Enfin, en tant que tribunal administratif indépendant, la CLCC rend des décisions de mise en liberté sous condition pour les délinquants incarcérés. Ces indicateurs clés du cadre de l’état du système de justice pénale sont examinés ci-dessous.
La proportion de délinquants sous responsabilité fédérale chez qui on avait cerné un besoin en matière de santé mentale reste stable
Les problèmes de santé mentale sont fréquents chez les personnes incarcérées en temps normal, et le sont encore plus pendant une pandémie mondiale (John Howard Society of Ontario 2021). Selon la LSCMLC, le SCC doit veiller à ce que chaque détenu reçoive les soins de santé essentiels et qu’il ait accès, dans la mesure du possible, à des soins de santé non-essentiels, conformément aux normes professionnelles. En 2020-2021, 85 % des délinquants sous responsabilité fédérale chez qui on avait cerné un besoin en matière de santé mentaleNote de bas de page54 ont reçu des traitements en santé mentale; cette proportion demeure inchangée par rapport à l’année précédente (Service correctionnel Canada s.d.).Note de bas de page55
La capacité en matière de programmes dans les établissements fédéraux a été considérablement réduite pendant la pandémie
Les programmes d’éducation offerts dans les établissements correctionnels visent à améliorer l’alphabétisation et le développement personnel d’une personne afin d’accroître ses chances de réinsertion dans la société. Avant la pandémie de COVID-19, une classe était composée de 12 à 15 détenus; toutefois, avec la mise en place des restrictions liées à la COVID-19, les classes dans les établissements partout au pays fonctionnaient à une capacité de 30 % à 50 % (Bureau de l'enquêteur correctionnel 2021a). En 2020-2021, 42 % délinquants ayant un besoin défini en éducation ont amélioré leur niveau de scolarité avant leur date d’admissibilité à la libération conditionnelle totale (Service correctionnel Canada s.d.). Il s’agit d’une baisse importante par rapport à l’année précédente, où 58 % des personnes ayant un besoin défini avaient mis à niveau leur éducation (Ibid.).
On a constaté une baisse semblable du pourcentage de délinquants ayant un besoin défini qui ont suivi un Programme correctionnel reconnu à l’échelle nationale (PCREN) pendant la première année de la pandémie. Les programmes correctionnels contribuent à la sécurité publique grâce à des activités d’évaluation et à des interventions de programme pour les personnes sous responsabilité fédérale qui sont conçues pour favoriser la réadaptation de ces derniers et pour faciliter leur réinsertion dans la collectivité en tant que citoyens respectueux des lois. Ces programmes sont conçus pour cibler des risques et des besoins précis qui sont liés aux comportements criminels, notamment les amis et les fréquentations, les antécédents de comportement criminel, les pensées nuisibles, les antécédents de violence familiale, les antécédents professionnels et la toxicomanie. À l’instar des programmes éducatifs, les programmes correctionnels fonctionnaient aussi à capacité réduite pendant la pandémie (Bureau de l'enquêteur correctionnel 2021a).
En 2020-2021, 36 % des délinquants sous responsabilité fédérale ayant un besoin défini ont terminé un PCREN avant leur date d’admissibilité à la libération conditionnelle totale (Service correctionnel Canada s.d.). Il s’agit d’une baisse considérable par rapport à 2019-2020, où 50 % des personnes ayant un besoin défini ont suivi un PCREN (Ibid.). Les retards dans l’accès aux programmes peuvent donner lieu à une augmentation du nombre de personnes détenues sous responsabilité fédérale qui n’ont pas terminé leurs programmes correctionnels avant d’être admissibles à la libération conditionnelle. La CLCC a indiqué qu’elle collaborait étroitement avec le SCC afin d’évaluer les répercussions et les options pour combler l’écart dans l’exécution des programmes correctionnels (Commission des libérations conditionnelles du Canada 2021).
Le recours au processus de mise en liberté en vertu de l’article 84 de la LSCMLC pour les délinquants autochtones demeure stable
Étant donné les besoins particuliers des délinquants autochtones et l’importance d’offrir des services adaptés à leur culture, l’article 84 de la LSCMLC donne aux collectivités autochtones la possibilité de devenir des partenaires actifs dans le processus de réinsertion des délinquants autochtones dans la société. En 2020-2021, 36 % des délinquants autochtones qui se sont dits intéressés à obtenir un plan de mise en liberté en vertu de l’article 84 en avaient un avant la première mise en liberté, comparativement à 37 % l’année précédente (Service correctionnel Canada s.d.). Des différences ont été constatées au chapitre du sexe : la moitié (51 %) des délinquantes qui souhaitaient obtenir un plan en vertu de l’article 84 en avaient un avant la première mise en liberté, comparativement au tiers (34 %) des délinquants qui souhaitaient obtenir un plan en vertu de l’article 84 (Ibid.).
La proportion de délinquants sous responsabilité fédérale qui ont obtenu un emploi dans la collectivité avant la fin de leur peine a diminué
L’obtention d’un emploi dès la libération dans la collectivité aide les personnes incarcérées à se réinsérer dans la société. En 2020-2021, 72 % des délinquants sous responsabilité fédérale ayant un besoin défini en matière d’emploi ont obtenu un emploi dans la collectivité avant la date d’expiration de leur peine, ce qui correspond à une baisse par rapport à l’année précédente (76 %) (Service correctionnel Canada s.d.). Cette baisse était particulièrement évidente chez les délinquants autochtones, passant de 64 % en 2019-2020 à 56 % en 2020-2021 (Ibid.). Les mesures de santé publique mises en place pour freiner la propagation de la COVID-19 ont peut-être sapé les possibilités d’emploi, car de nombreuses entreprises ont été contraintes de fermer leurs portes et beaucoup d’autres menaient leurs activités avec un personnel réduit.
Le nombre de personnes inscrites en tant que victimes afin de recevoir de l’information sur un individu qui leur a causé du tort demeure stable
Les victimes d’actes criminels peuvent s’inscrire auprès de la Commission des libérations conditionnelles du Canada ou du Service correctionnel du Canada afin de recevoir des renseignements sur l’individu qui leur a causé du tort. Plus précisément, les victimes reçoivent de l’information sur le statut du délinquant, la date de sa libération, son plan correctionnel et les progrès qu’il a réalisés. En 2020-2021, 8 661 victimes se sont inscrites pour recevoir des renseignements sur un individu qui leur a causé du tort, soit environ 1 % de moins que l’année précédente (8 783 en 2019-2020) (Commission des libérations conditionnelles du Canada s.d.). En plus de l’incidence possible de la pandémie, la variation du nombre de victimes inscrites d’une année à l’autre dépend de nombreuses variables, y compris le nombre global de victimes, la sensibilisation et l’intérêt de la victime à l’égard de l’inscription, et le nombre global de délinquants en détention. Cela dit, l’inscription des victimes a généralement augmenté au fil des ans : en 2020-2021, on comptait 12 % de victimes de plus inscrites en 2020-2021 qu’en 2016-2017 (Ibid.).
Tendances des décisions concernant la mise en liberté dans la collectivité
Augmentation du nombre d’examens de cas de libération conditionnelle pour les personnes relevant de la responsabilité correctionnelle fédérale, y compris la libération conditionnelle accordée à titre exceptionnel
La libération conditionnelle est le processus par lequel les personnes sont libérées de prison afin de purger une partie de leur peine dans la collectivité dans des conditions strictes pour faciliter leur retour dans la société générale. Il y a deux types de libération conditionnelle : la semi–liberté et la libération conditionnelle totale. La semi-liberté permet à une personne d’être libérée dans la collectivité tout en étant obligée de retourner tous les soirs dans un établissement résidentiel communautaire ou une maison de transition, à moins d’une autorisation contraire de la CLCC.Note de bas de page56 La libération conditionnelle totale permet à une personne de purger une partie de sa peine sous surveillance dans la collectivité pourvu qu’elle respecte certaines conditions. Normalement, elle lui est accordée après qu’elle a terminé avec succès une période de semi-liberté. Les délinquants en liberté conditionnelle totale habitent généralement dans une résidence privée.
En 2020-2021, le nombre d’examens de libération conditionnelle effectués par la CLCC a augmenté par rapport à l’année précédente (2019-2020), pour la libération conditionnelle totale (+11 %) et pour la semi–liberté (+4 %) (Public Safety Canada 2022, Commission des libérations conditionnelles du Canada n.d.) Il s’agit d’une moyenne globale de 187 avis par semaine en 2020-2021, contre 175 en 2019-2020 (Ibid.). La majorité des examens ont été effectués par vidéoconférence ou par téléconférence, si la vidéoconférence n’était pas disponible, ainsi que par des examens sur papier (Commission des libérations conditionnelles du Canada 2021).
En raison de la pandémie, la CLCC a également constaté un intérêt plus marqué pour la libération conditionnelle accordée à titre exceptionnelNote de bas de page57 que pour toute autre une année donnée. Toutefois, pour la plupart des 62 demandes reçues de mars 2020 à mars 2021 la CLCC a déterminé que le demandeur ne satisfaisait pas aux critères prévus par la loi pour accorder une libération conditionnelle à titre exceptionnel (Ibid.). Un cinquième (21 %) de toutes les demandes ont été acceptées (Ibid.). En mai 2022, 18 cas de libération conditionnelle accordée à titre exceptionnel avaient été accordés (et quatre sont en attente) (Gouvernement du Canada 2022d).
Baisse de la proportion globale de personnes sous responsabilité correctionnelle fédérale qui ont obtenu la libération conditionnelle
Le nombre total et la proportion d’examens de libération conditionnelle accordés ont baissé en 2020-2021. La semi-liberté a été accordée pour environ 71 % (3 787) des cas examinés, tandis que 33 % (1 458) ont reçu une libération conditionnelle totale (Commission des libérations conditionnelles du Canada s.d.). Il s’agit d’une baisse considérablement par rapport à l’année précédente pour la semi-libertéNote de bas de page58 (80 %; 4 073) et la libération conditionnelle totaleNote de bas de page59 (41 %; 1 627) (Ibid.). Cette baisse peut être en partie attribuable à un plus grand nombre de délinquants qui ont demandé la libération conditionnelle au début de la pandémie, peu importe leur profil de risque plus élevé, ainsi qu’à un plus grand nombre de demandes de libération conditionnelle reçues par des délinquants qui ne répondaient pas aux critères pour ce genre de libération.
Figure 13 : Pourcentage de personnes qui ont obtenu la semi-liberté et la libération conditionnelle totale

Version textuelle
Le diagramme à barres verticales comporte cinq catégories, dont chacune représente une année entre 2016–2017 et 2020–2021. Il y a deux lignes pour chaque catégorie (année) – La ligne bleue représente la libération conditionnelle totale et la ligne noire représente la semi–liberté.
La première catégorie correspond à 2016–2017, la ligne bleue indique 37 % et la ligne noire indique 78 %.
La deuxième catégorie correspond à 2017–2018, la ligne bleue indique 40 % et la ligne noire indique 79 %.
La troisième catégorie correspond à 2018–2019, la ligne bleue indique 39 % et la ligne noire indique 80 %.
La quatrième catégorie correspond à 2019–2020, la ligne bleue indique 41 % et la ligne noire indique 80 %.
La cinquième catégorie correspond à 2020–2021, la ligne bleue indique 33 % et la ligne noire indique 71 %.
Source : Commission des libérations conditionnelles du Canada. Demande spéciale. Totalisation personnalisée préparée par le ministère de la Justice Canada.
Des baisses ont été observées chez les Autochtones (de 76 % à 67 % pour la semi-liberté et de 29 % à 23 % pour la libération conditionnelle totale) et les délinquants non autochtones (de 81 % à 73 % pour la semi-liberté et de 44 % à 35 % pour la libération conditionnelle totale), même si les délinquants non autochtones continuent d’obtenir la semi-liberté et la libération conditionnelle totale dans des proportions plus élevées (Commission des libérations conditionnelles du Canada s.d.). Afin de s’assurer que les examens de mise en liberté sous condition répondent aux besoins des populations autochtones, la CLCC offre des audiences tenues avec l’aide d’un Aîné (AAA). Les AAA consistent en des audiences adaptées à la culture des peuples autochtones, qui comportent des cérémonies et des prières. En raison de la pandémie de COVID-19, les AAA ont été suspendues dans les premiers mois de la pandémie; le nombre d’AAA tenues est passé de 31 en mars 2020, dont 23 ont été tenues avant le confinement, à aucune entre avril et août 2020, avant d’augmenter de nouveau dans le deuxième semestre de l’année où les mesures de sécurité autorisaient leur tenue (Commission des libérations conditionnelles du Canada 2021).
Augmentation du nombre de décisions d’accorder la semi-liberté à un autre lieu au début de la pandémie de COVID-19
Même si le nombre total de demandes de libération conditionnelle a baissé en 2020-2021, on a constaté une augmentation du nombre de décisions d’accorder la semi-liberté dans un autre lieu (p. ex., au domicile d’un délinquant) au début de la pandémie de COVID-19, qui ont atteint un sommet en mars 2020 et ont depuis continué de baisser pour se situer légèrement au-dessus de leurs niveaux d’avant la COVID-19 (Commission des libérations conditionnelles du Canada 2021). Depuis mars 2020, en moyenne, la CLCC a rendu environ huit décisions d’accorder la semi-liberté à un autre lieu par semaine (comparativement à cinq par semaine au cours de l’année précédente) (Gouvernement du Canada 2022d). La CLCC a décidé d’accorder la semi-liberté à un autre lieu à certains délinquants qui étaient déjà dans la collectivité sous surveillance, de sorte que ceux-ci n’ont plus besoin de résider dans une maison de transition et ont pu habiter en toute sécurité chez eux. La CLCC a rendu en moyenne deux décisions de ce genre par semaine (comparativement à une par semaine par rapport à l’année précédente) (Ibid.).
Depuis le début de la pandémie, les défenseurs des droits des prisonniers demandent la libération anticipée de certains délinquants afin de limiter la propagation de la COVID-19 dans les établissements. L’enquêteur correctionnel, Ivan Zinger, a fait écho à ce sentiment dans sa recommandation de collaborer avec le SCC à l’élaboration d’une stratégie de libération anticipée pour les détenus âgés et souffrant de problèmes médicaux qui ne présentent aucun risque indu pour la société (Bureau de l'enquêteur correctionnel 2021a). Stan Stapleton, président du Syndicat des employé(e)s de la Sécurité et de la JusticeFootnote60, fait remarquer l’accélération de la libération des délinquants suscite de graves préoccupations, notamment l’absence d’un plan réaliste pour l’endroit où les délinquants vivront et la façon dont ils subviendront à leurs besoins (APTN National News 2020). Les personnes libérées dans la collectivité sont confrontées depuis longtemps à des difficultés liées à l’absence de logement, d’emploi et de continuité des soins (Griffiths, Dandurand et Murdoch, 2017). Ces problèmes ont été exacerbés pendant la pandémie, ce qui montre qu’il est nécessaire d’examiner attentivement ces risques et les efforts d’atténuation possibles dans toute décision d’accélérer la mise en liberté des délinquants.
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