Le rapport final sur l’examen du système de justice pénale du Canada
Ce que nous avons entendu : les problèmes
En raison de sa nature même, le processus de consultation a permis de recueillir un large éventail de points de vue. En dépit de la nature générale de l’examen, il a été parfaitement possible de dégager un consensus sur certaines questions clés. En plus de souligner la nécessité pour le système de justice pénale de promouvoir la sécurité publique et de tenir les délinquants responsables de leurs actes, les participants ont signalé un certain nombre de problèmes systémiques :
- Le système est archaïque et n’a pas suivi le rythme d’évolution de la société. Certains de ses principes et de ses valeurs sont désuets, comme le fait de trop compter sur les sanctions et l’incarcération et de ne pas miser suffisamment sur la réadaptation et les sanctions communautaires.
- La justice réparatrice et les autres solutions de rechange ne sont pas suffisamment exploitées comme mesures efficaces pour tenir les individus responsables de leurs actes.
- Le système cible de façon disproportionnée les personnes appartenant à des groupes démographiques particuliers, principalement les Canadiens de race noire et les Autochtones, et il est particulièrement mal adapté aux réalités des groupes vulnérables et marginalisés, dont les personnes souffrant de maladie mentale ou de toxicomanie.
- Le système est souvent utilisé pour s’attaquer à des problèmes qui, fondamentalement, sont d’ordre social, dont la pauvreté et l’itinérance. Dans bien des cas, les personnes vulnérables entrent dans le système en grande partie à cause de leur situation et du manque d’options qui s’offrent à elles. Ces personnes finissent souvent par revenir dans le système.
- Les gens font face à des problèmes qui touchent souvent d’autres systèmes sociaux, qui n’ont aucun lien avec le système de justice pénale. L’information n’est pas échangée ni intégrée de façon adéquate entre les différents systèmes.
- Les lois actuelles, en particulier en ce qui concerne les peines minimales obligatoires, limitent inutilement le pouvoir judiciaire discrétionnaire.
- Le système entraîne souvent de longs délais avant que l’affaire ne soit instruite, ce qui a des répercussions négatives sur l’accusé et sur la victime du crime, qui sont tous deux forcés d’attendre que justice soit faite. Le temps de traitement des dossiers au sein des tribunaux pour adultes continue d’augmenter, même si le nombre total de dossiers diminue.
- Le système est trop surchargé par des infractions contre l’administration de la justice relativement mineures, comme le défaut de comparaître. Le nombre d’infractions du genre a nettement augmenté au cours des dernières années, et celles-ci contribuent aux retards importants observés dans le système judiciaire.
- On manque cruellement de données et de renseignements sur ce qui se passe dans le système de justice pénale, notamment sur les personnes qui s’y trouvent et pourquoi, de même que sur les approches qui s’avèrent efficaces.
Des obstacles à la justice subsistent encore pour les victimes et les survivants d’actes criminels, qui se sentent souvent isolés, frustrés et sans voix. Les obstacles les plus importants qu’ils rencontrent sont les suivants :
- Le signalement insuffisant – Les victimes (surtout les victimes d’agression sexuelle) choisissent souvent de ne pas signaler les crimes commis à la police par peur d’en subir les conséquences ou par crainte que leur cas ne soit pas pris au sérieux. Elles n’ont pas confiance dans l’intégrité du système de justice pénale.
- Les délais avant la tenue des procès – Souvent, les affaires ne sont instruites qu’après un long délai. Lorsque l’affaire est finalement entendue, ce délai a déjà eu d’importantes répercussions pour la victime. En raison du temps nécessaire avant que certaines affaires soient portées devant les tribunaux, on compte actuellement dans les prisons provinciales plus de personnes en attente de leur procès ou de leur sentence que de délinquants purgeant réellement une peine.
- Le traitement réservé à l’intérieur du système – Bien que certains progrès aient été réalisés, les victimes continuent de signaler qu’elles ne sont pas toujours traitées avec compassion et respect, à l’intérieur du système de justice pénale. Elles se sentent souvent exclues du système, qui les laisse parfois encore plus traumatisées.
- Le manque de services de soutien abordables, offerts en temps opportun – Les victimes sont particulièrement préoccupées par le manque de services de soutien qui leur sont offerts, pendant le processus de justice pénale et une fois leur dossier traité.
En résumé, l’examen a montré qu’il est largement reconnu que notre système de justice pénale doit faire l’objet d’une réforme globale et qu’il doit, notamment, être plus souple afin de lutter contre la criminalité et de répondre aux besoins des personnes touchées d’une manière nouvelle et différente.
Plus précisément, les participants aux consultations étaient nombreux à penser que le système de justice pénale ne devrait plus être utilisé pour résoudre les problèmes sociaux. Les enjeux qui poussent certaines personnes à commettre des crimes seraient mieux traités grâce à une approche multisectorielle, axée sur la collaboration. La transformation la plus importante consistera, en fin de compte, à offrir des services de soutien appropriés aux personnes qui n’ont pas leur place, au départ, dans le système de justice pénale. La plupart des personnes qui se retrouvent à l’intérieur du système, tel que nous le connaissons aujourd’hui, ont besoin d’autres services sociaux.
Parallèlement, nous avons très clairement entendu que la sécurité publique doit conserver une place primordiale dans le système et que les délinquants doivent être tenus responsables de leurs actes.
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