Étude sur la violence envers les femmes en milieu rural ontarien (ORWAS) rapport final

ANNEXE D

COMMENTAIRES ET RÉFLEXIONS DES CHERCHEURES

Rédigés par un chercheur de la collectivité avant le dernier atelier ORWAS.

Nous espérons que nous avons présenté fidèlement les voix des participantes à cette recherche. Nous les remercions de nous avoir fait confiance en nous confiant leurs histoires et nous les félicitons de leur courage. Leur force est une inspiration pour nous tous. Nous voulons aussi remercier les nombreux membres, dirigeants et fournisseurs de services de la collectivité qui ont pris le temps de nous faire part de leurs réflexions profondes sur la question telle qu’ils la vivent dans leur collectivité.

Nous sommes dépassées par la mesure dans laquelle la peur domine la vie des victimes de la violence. Comme nous nous y attendions, elles nous ont dit à quel point elles étaient terrifiées à l’idée de quitter leur agresseur et à quel point elles étaient encore plus terrifiées de rester. Cependant, nous n’étions pas préparées au fait que bon nombre d’entre elles vivent encore dans la peur  chaque jour, même quatre ou cinq ans après être parties. Elles ont leur propre maison, leur propre travail et leur propre vie et pourtant, leur fantôme les hante toujours. Certaines doivent vivre dans la même petite ville, certaines ont encore des contacts en raison des dispositions relatives à la garde des enfants et certaines se font encore suivre. La peur ne disparaîtra-t-elle jamais?

La peur des femmes nous a toutes prises par surprise. Même si la plupart d’entre nous avaient déjà travaillé avec le problème de la violence faite aux femmes, nous avons toutes été étonnées de la façon dont leurs histoires nous ont touchées. Nous avons vécu une partie des effets du traumatisme secondaire que les intervenantes dans ce domaine connaissent bien, comme la tristesse, les troubles du sommeil, la peur et la colère, pour n’en nommer que quelques-uns. Les femmes qui nous ont raconté leurs histoires ont-elles souffert de revivre le traumatisme pour le bien de ce projet? D’autres études sont nécessaires afin d’examiner l’incidence de la participation à une telle étude, que la participante soit chercheure ou «sujet».

En même temps, le processus de collaboration a été très gratifiant pour les chercheures. Tout au long de la consultation, de la définition du problème, de la rédaction et de la réécriture du rapport, de l’analyse et des discussions, le processus a toujours respecté notre propre expérience et celles des femmes dont nous entendions les récits. Les chercheures principales de Justice Canada ont confirmé et apprécié également la contribution de chaque personne. À leur tour, les chercheures au niveau local ont fait tout en leur pouvoir pour faire participer les victimes à chaque étape du projet. Leur réaction au présent rapport nous dira à quel point nous avons réussi à refléter leur vécu.

Il nous apparaît clairement qu’on éprouve de la sympathie dans la collectivité pour les femmes victimes de violence. Sans exception, les membres de la collectivité ont exprimé leurs préoccupations, mais aussi leur frustration vis-à-vis du manque de sensibilisation et d’intervention dans ce domaine dans les collectivités rurales. Une fois encore, nous avons entendu parler de la nécessité de mieux éduquer le public sur la nature complexe et multidimensionnelle de la violence conjugale. Une fois encore, nous avons entendu parler de l’inefficacité du système de justice pénale face à ce problème. Une fois encore, nous avons entendu parler du fardeau qu’un financement limité impose aux services de santé et aux services sociaux. Il est déprimant de prendre conscience du fait que la violence faite aux femmes est un enjeu public depuis maintenant plusieurs décennies et pourtant, il semble qu’on ait fait si peu de progrès. Nous espérons que cette étude débouchera sur des mesures dans les collectivités et au niveau de l’établissement des programmes.