Étude sur la violence envers les femmes en milieu rural ontarien (ORWAS) rapport final

4. RÉSULTATS : LA VIOLENCE ENVERS LES FEMMES EN MILIEU RURAL ONTARIEN (suite)

4. RÉSULTATS : LA VIOLENCE ENVERS LES FEMMES EN MILIEU RURAL ONTARIEN (suite)

4.7 Les services sociaux

La portée et la disponibilité des services

Certaines des femmes interviewées ne connaissaient pas l'existence des services offerts dans leur région. D'autres ont dit avoir vu des brochures dans le bureau de leur médecin et dans les garderies ou les centres de ressources parentales. Ce qui semble dissuader le plus les femmes d'utiliser ces services, c'est l'absence de transport. Même si les refuges offrent effectivement des services de transport, les femmes qui doivent accéder à d'autres services sont désavantagées, de l’avis des fournisseurs de services.

L’aide sociale

Beaucoup de femmes ont dû recourir à l'aide sociale lorsqu'elles ont quitté leur agresseur. Même si, de façon générale, elles ont dit qu'il avait été facile d’obtenir l'aide sociale, elles étaient toutes déconcertées d'avoir à le faire. Beaucoup de femmes ont parlé du stigmate rattaché au fait «d'être sur l'aide sociale» et de la honte qu'elles ressentaient. Une femme a raconté comment un propriétaire avait hésité à lui louer son appartement lorsqu'elle a parlé de bien-être social. Plusieurs femmes ont dit que l'allocation «de démarrage» était extrêmement utile pour retomber sur leurs pieds après avoir quitté leur conjoint. Malgré leur hésitation à demander l'aide sociale, beaucoup de femmes ont dit que les gens les ont beaucoup aidées et leur ont un tant soit peu facilité la tâche de demander de l'argent.

La Société d'aide à l'enfance

Après avoir quitté leur conjoint violent, beaucoup de femmes n’envisageaient même pas d'appeler la Société d'aide à l'enfance (SAF) parce qu'elles craignaient que leur enfant leur soit enlevé. En fait, certaines ont dit que c'est ce qui leur est arrivé. D'autres avaient vécu des expériences plus positives avec la SAF, où on a appuyé leur décision de partir. Les commentaires étaient partagés au sujet de la capacité de la SAF de protéger les enfants contre les pères violents. Les fournisseurs de services ont discuté du changement de politique proposé qui encouragera les mères à quitter des situations de violence parce qu’on assimile maintenant le fait d'être témoin de violence à une forme de violence faite aux enfants. Même si la SAF a plus de pouvoirs pour obliger une femme à quitter son conjoint, d'autres organismes ne respectent pas cette philosophie car cela ne renforce pas le pouvoir de la femme de prendre des décisions pour elle-même.

«Et j'ai parlé à la Société d'aide à l'enfance de l'alcool et des drogues qu'ils peuvent consommer chez leur père, et rien n'a été fait.» (victime d'Espanola)

Les services communautaires

À l'exception des refuges, on a très peu fait mention des services communautaires. Dans une collectivité, il y a une halte-accueil pour les femmes accompagnées de leurs enfants. Dans une autre collectivité, les victimes ont parlé de séances de counselling en groupe données à l'hôpital de l'endroit.

«Les services de counselling étaient merveilleux. Pour ce qui est des autres domaines des services sociaux, je dirais qu'ils ont été absolument inutiles – il n'y a absolument rien là pour une mère seule.» (victime de Cochrane)

Le rôle des refuges

On a parlé du refuge comme de l'endroit dans les collectivités où toutes les femmes étaient certaines d'obtenir du soutien et de la compréhension. Les refuges offraient des services de renvoi et d'aide pour accéder aux services juridiques, à l'aide sociale et au logement. Ils ont offert du counselling et donné de l'information sur la violence, de même que sur les groupes de défense et sur le soutien au cours du procès. Même si toutes les collectivités n'offrent pas un refuge, beaucoup de femmes se sont retrouvées dans celui d'une autre collectivité. Une collectivité offrait les services d'une travailleuse d'approche rattachée au refuge. Ces programmes permettent aux refuges de continuer d'offrir un système de soutien important pour les femmes qui ont quitté leur conjoint violent. Le refuge offrait du soutien aux femmes, soutien que souvent elles ne recevaient nulle part ailleurs.

«Le rôle qu'ils ont joué, c'est qu'ils ont validé ce que j'avais déjà commencé à croire dans ma propre tête, qu’il ne s’agissait pas seulement d’un mariage boiteux, mais plutôt d’une véritable relation de violence.» (victime d'Espanola)

L’information sur les refuges

Nombre des victimes ont dit ne pas être au courant de l'existence d'un refuge ou ont eu de la difficulté à trouver l'endroit où il se trouvait lorsqu'elles ont cherché activement de l'information. Plusieurs femmes ont indiqué que si elles avaient connu l'existence du refuge, elles auraient quitté leur conjoint plus tôt. Certaines femmes ont découvert l’existence d’un refuge par l’entremise d’un centre de ressources parentales ou de la télé communautaire, alors que d'autres ont consulté les Pages jaunes. Certains membres de petites collectivités n'étaient pas au courant non plus de l'existence d'un refuge dans leur région.

«Je ne sais même pas s'il y a en ville un refuge où on peut aller. Je n'en ai aucune idée.» (membre de la collectivité d'Espanola)

L’expérience dans les refuges

Les victimes ont souvent dit que sans l'aide des refuges locaux, elles ne savaient pas comment elles auraient quitté leur conjoint. Les femmes percevaient les refuges comme un endroit sûr où faire part de ses émotions, où on vous écoute et on vous entend. Les membres du groupe de réflexion dans une collectivité particulière ont également dit croire que le refuge était bien vu chez eux, comme en témoignent les dons de nourriture et de vêtements qu’on y reçoit et le temps que les gens y consacrent bénévolement.

L’accès aux refuges

Les résidentes de petites collectivités et les fournisseurs de services se sont dit inquiets d'avoir de la difficulté à amener certaines femmes dans un refuge parce qu’elles habitent une autre collectivité. Outre l'hésitation des femmes à quitter leur collectivité et à s’éloigner de l'école de leurs enfants, mentionnons le fait que peu d'entre elles ont une voiture ou d'autres moyens de transport. Selon de nombreuses femmes, plusieurs fournisseurs de services et des membres de petites collectivités, les services d'approche constituent un service nécessaire pour les femmes qui n'oseraient pas ou ne pourraient pas se rendre dans un refuge. Dans l’une des petites collectivités, on a fait remarquer que malheureusement, le refuge avait dû mettre un terme à son programme d'approche en raison de compressions budgétaires.

L’intervention en cas d’urgence et de crise

Les fournisseurs de services ont discuté du fait que les refuges offrent des numéros sans frais de même que le transport en provenance et en direction du refuge, mais que beaucoup de femmes ne connaissent pas ces services. Même si la police offre une intervention en cas de crise, on a constaté, dans une collectivité particulière, que le service de pompiers bénévoles répond plus rapidement. Comme on l'a dit auparavant, la réaction de la police n'est pas toujours efficace.

Le manque de choix

La plupart des femmes ont dit qu'elles avaient l'impression qu’il y avait vraiment peu de choix quant aux services offerts aux femmes victimes de violence dans une petite ville ou une région rurale.

«Il n'y a pas d'endroit où se cacher à Espanola.» (victime d'Espanola)

L’accès aux services: les conséquences sur le plan de la sécurité

Seul le refuge était reconnu comme un endroit sûr pour les femmes victimes de violence dans une petite collectivité. Même là, certaines femmes estimaient ne pas être complètement en sécurité parce que dans un tel endroit, la plupart des gens savent où se trouve le refuge. Si le refuge est trop loin de leur foyer, ou si elles n'ont pas de moyen de transport à leur disposition, la plupart des femmes ne s’y rendront pas.

4.8 Les services médicaux, de santé physique et mentale

4.8.1 La portée et la disponibilité des services

Dans la plupart des collectivités, on a dit avoir accès à une clinique médicale et à un hôpital. Les services de santé mentale étaient moins facilement accessibles. Dans la plupart aussi, on a dit disposer de certains services de counselling, mais les collectivités du Nord sont particulièrement désavantagées en ce sens qu'elles n'ont droit qu'aux services d'un psychiatre itinérant. Plusieurs femmes ont parlé des listes d'attente pour obtenir des services de santé mentale. Une victime, qui était déménagée du Sud de l'Ontario pour s'installer dans le Nord, a fait remarquer l'énorme différence dans la disponibilité des services médicaux entre le Sud et le Nord.

«L'un des plus gros problèmes que je vois, c'est d'avoir facilement accès aux services de psychologie. Il y a une très longue liste d’attente pour participer au programme [en place maintenant] qui offre les services d'une personne qui vient chez nous une fois par semaine... Nous avons vraiment besoin de services ici-même dans la collectivité.» (dirigeant communautaire de Stormont, Dundas et Glengarry)

4.8.2 Le personnel médical et celui des soins de santé mentale

Plusieurs femmes n'avaient pas une opinion très favorable de la réaction du personnel médical et des responsables de la santé mentale. On a parlé de leur manque de sensibilité, de leur manque de compréhension du problème et de leur peu de connaissance des ressources. Une victime a dit comment son médecin lui avait prescrit des médicaments «pour les nerfs» qui ont créé chez elle une accoutumance. Une ou deux femmes ont dit avoir eu des expériences positives avec le personnel offrant des soins de santé.

4.8.3 Les centres médicaux et de santé

Les femmes ont dit à ce sujet que même si les services pouvaient être offerts dans les petites villes, elles sont parfois hésitantes à les utiliser en raison des bris potentiels de confidentialité dont il a été question précédemment dans le présent rapport. Une femme a dit que la conseillère à qui elle avait été renvoyée faisait partie d'une organisation pour laquelle elle travaillait et que celle à qui son mari avait été renvoyé détenait l'hypothèque sur leur maison. L'anonymat pose souvent problème dans les régions rurales: les personnes qui travaillent dans les services médicaux ou sociaux sont souvent bien connues de la femme victime de violence et de sa famille.

4.8.4 Les services de santé mentale

Nombre de femmes ont eu recours à des services de santé mentale, mais le niveau de satisfaction dont elles ont fait part à l'égard de ces services variait. Un des problèmes soulevés par plusieurs des fournisseurs de services était celui du mandat. Ces dernières années, le mandat des organismes communautaires de santé mentale a changé et les clients qui n'ont pas de troubles de santé mentale n'ont pas droit aux services. D'autres fournisseurs de services ont fait part de leurs frustrations à l'égard du manque de services dans la collectivité, ce qui fait allonger les listes d'attente.

Certaines victimes ont exprimé leur insatisfaction à l'égard des services de santé mentale.

D'autres ont eu des expériences positives:

4.8.5 L’intervention d'urgence et de crise

L'intervention d'urgence relève le plus souvent de l'hôpital, même si à Vermilion Bay, le médecin local à la clinique répondait aux appels de crise. Dans cette collectivité, la plupart des femmes, de nombreux fournisseurs de services, des résidents de la collectivité et des dirigeants ont parlé du médecin de l’endroit en termes positifs. Plusieurs fournisseurs de services ont soulevé le fait qu’une déclaration inexacte portant sur une situation de violence constituait un problème. Cela peut se produire lorsqu'une femme se plaint de souffrir de dépression et d'anxiété mais qu'elle ne divulgue pas la situation de violence qu'elle vit. Cela peut aussi se produire lorsque l'hôpital ne consigne pas adéquatement la cause des blessures.

«... On les garde à l’hôpital jusqu’au lendemain et on n’ose même pas dire de quoi il s’agit vraiment. On attribue n’importe quelle cause aux blessures et on installe la victime seule dans une chambre.» (fournisseur de services de Grey-Bruce)

4.9 Facteurs aidants et habilitants pour les femmes victimes de violence

D'après les renseignements recueillis auprès des diverses participantes à l'Étude sur la violence faite aux femmes dans les régions rurales de l'Ontario (ORWAS), voici une liste de plusieurs des besoins qu’ont les femmes victimes de violence dans les régions rurales.