Toutes les voix comptent : les répercussions des problèmes juridiques graves chez les jeunes de 16 à 30 ans de la communauté noire
Contexte
COVID-19
Toutes les étapes de la présente recherche se sont déroulées dans le contexte des restrictions liées à la COVID applicables aux rassemblements sociaux et professionnels. À l’instar des chercheuses, les répondants au sondage et les participants aux groupes de discussion ont tous pris part à la recherche de façon virtuelle. Certains des participants, qui étaient des travailleurs essentiels, devaient se déplacer pour se rendre à leur travail, mais la plupart étaient à la maison.
La nature changeante de l’information scientifique qui était diffusée et la fluctuation des mesures qui étaient appliquées en conséquence ont suscité un sentiment général d’incertitude – et, dans certains cas, de l’anxiété – qui a été perceptible tout au long de la présente étude. Pour faire face à la COVID, les gouvernements ont également annoncé de nouveaux programmes, de nouvelles initiatives et divers changements à l’infrastructure sociale. Les messages véhiculés par le gouvernement et les médias étaient fortement axés sur la pandémie, en particulier pendant la phase de recrutement et de sondage de l’étude.
Il est vrai que tirer des conclusions précises quant à l’incidence que cette période d’incertitude a pu avoir sur les résultats de l’étude tiendrait de la supposition. Néanmoins, il importe de tenir compte des événements qui sont survenus et du climat qui régnait pendant l'étude, car ceux-ci ont eu une influence tant sur les participants que sur les chercheuses.
Manifestations contre l’injustice raciale
La présente recherche portait spécifiquement sur les expériences des personnes qui s’identifient comme étant noires. L’identité noire et les répercussions différentielles des problèmes juridiques constituent l’élément central de la présente recherche. George Floyd est décédé après avoir été arrêté par la police à Minneapolis, au Minnesota. Cet événement charnière s’est produit après le lancement du projet, mais avant la tenue de la première discussion de groupe. Les manifestations, qui ont commencé à Minneapolis le 26 mai 2020, ont focalisé l’attention sur le mouvement BlackLivesMatter (BLM) et ont donné lieu, dans le monde entier, à des appels à l'action pour contrer le racisme systémique envers les Noirs, mettre fin à la brutalité policière et revoir le financement des services de police. Au Canada, des manifestations en soutien au mouvement BLM ont eu lieu dans la plupart des grandes villes et ont attiré des foules importantes, malgré les restrictions liées à la pandémie applicables aux rassemblements sociaux. Les manifestations ont attiré l’attention sur les meurtres de Noirs et d’Autochtones commis par des policiers au Canada ainsi que sur les problèmes de racisme systémique au sein du système de justice pénale canadien. Bon nombre de politiciens œuvrant aux niveaux municipal, provincial ou national ont fait des déclarations publiques sur le racisme systémique et, dans certains cas, ont pris des mesures visant à obliger la police à rendre des comptes.
Les discussions de groupe ont eu lieu entre le 30 juin et le 19 août 2020. À l’instar des chercheuses, les participants avaient une conscience aiguë des questions liées au racisme systémique à l’intérieur du système de justice et dans la société en général. Les participants ont formulé des observations à la fois sur le racisme lui-même et sur les récentes propositions présentées pour le combattre.
Race, âge et sexe
En Ontario, 627 715 personnes (4,7 % de la population de la province) s’identifient comme étant noires. À Toronto, la communauté noire représente 8,9 % (239 850 personnes) de la population de la ville, alors qu’à Ottawa, cette proportion est de 6,6 % (60 205 personnes). Les grandes collectivités urbaines de l’Ontario abritent des populations noires deux plus importantes en proportion que la communauté noire à l’échelle du Canada (3,5 %).2
Les membres de la communauté noire, et en particulier les jeunes qui s’identifient comme étant noirs, sont aux prises avec le racisme envers les Noirs dans le cadre de leur participation à la société civile, notamment lorsqu’il s'agit de contracter un bail ou une hypothèque, de conclure un contrat de travail ou de prendre d’autres arrangements liés à la vie de tous les jours. Le taux de chômage des Noirs en Ontario est de 13 %, comparativement à 7,5 % dans le cas des personnes non racisées.3 Les jeunes noirs affichent un taux de chômage de 28 %, alors que la moyenne nationale chez les jeunes est de 14,3 %.4
L’intersection de la race et de l’âge amplifie l’impact de ce racisme, ce qui prive encore davantage ces jeunes de la stabilité économique et sociale dont ils ont besoin pour s’établir sans dépendre de leur famille.5 Le sexe ajoute une dimension intersectionnelle supplémentaire au racisme. En effet, les répercussions du racisme ne sont pas les mêmes chez les jeunes femmes noires que chez les jeunes hommes noirs. Les attentes sociales des jeunes sont sexospécifiques. À l’intersection de la race et du sexe, les jeunes hommes noirs se heurtent à des stéréotypes en ce qui concerne leurs aspirations, leur propension à la criminalité et leur potentiel scolaire ou professionnel. Ils affirment qu’on leur prête souvent une gamme plus restreinte de réactions affectives ou d’intérêts et qu’ils font souvent l’objet de préjugés négatifs à l’école, au travail et dans les lieux publics.6 Les jeunes femmes noires sont ciblées par des attentes différentes, tant en ce qui concerne leur sexualité que leur rôle au sein de la famille et leur responsabilité envers les autres. Mais, peu importe le sexe, les présomptions quant aux capacités des jeunes femmes et des jeunes hommes noirs, et aux choix qui s’offrent à eux, entraînent généralement une réduction de leurs possibilités.7 Les marqueurs visibles de l’identité raciale et de l’appartenance religieuse et culturelle peuvent accentuer l’expérience de discrimination vécue par les jeunes.
Les expériences vécues par ces jeunes sont plus prononcées dans les zones urbaines où certains quartiers sont dépeints de façon négative par les médias et où les tendances observées en matière de démographie et de criminalité contribuent à stigmatiser davantage les résidents.8 Chacune de ces formes de discrimination et de stéréotypes confère un caractère unique à leur expérience en matière de problèmes juridiques.
Notes de bas de page
2 Profil de l’ENM, Toronto, C, Ontario, 2016.
3 Enquête nationale auprès des ménages, produit no 99-012-X2011038 au catalogue de Statistique Canada, 2011, Statistique Canada.
4 Sheila Block, Grace-Edward Galabuzi et Alexandra Weiss. The Colour Coded Labour Market By The Numbers: A National Household Survey Analysis. The Wellesley Institute, 2014.
5 L’honorable Roy McMurtry et le Dr Alvin Curling. Examen des causes de la violence chez les jeunes, Vol. 1 : Résultats, analyse et conclusions, Gouvernement de l’Ontario. http://www.children.gov.on.ca/htdocs/French/documents/youthandthelaw/rootsofyouthviolence-vol1.pdf
6 “As a Black student, he was told to dream small. He had hoped that things would change for his son,” Toronto Star, 6 septembre 2019. https://www.thestar.com/news/atkinsonseries/2019/09/06/as-a-black-student-he-was-told-to-dream-small-but-he-hoped-things-would-change-for-his-son.html
7 « Racialized Canadians continue to face barriers to decent work », Behind the Numbers. 29 novembre 2017. https://behindthenumbers.ca/2017/11/29/racialized-canadians-barriers-to-work/
8 Ville de Toronto. « Toronto Action Plan to Confront Anti-Black Racism ». https://www.toronto.ca/legdocs/mmis/2017/ex/bgrd/backgroundfile-109127.pdf Gouvernement de l’Ontario. « Une meilleure façon d'avancer : Plan stratégique triennal de l'Ontario contre le racisme ». https://www.ontario.ca/page/better-way-forward-ontarios-3-year-anti-racism-strategic-plan
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