Conflits relatifs au droit de visite après une séparation : les différentes interventions
DOCUMENT DE RÉFÉRENCE
(2001-FCY-6)
DISCUSSION
La présente étude avait pour but d'examiner si des démarches ciblées et davantage orientées vers la recherche de solutions, sont aussi efficaces, sinon plus, que l'évaluation traditionnelle en matière de garde et de visite, qui cherche à recueillir des éléments permettant de prouver « qui est le meilleur parent »
. Elle comportait des critères d'admission et d'exclusion particuliers. Elle avait un caractère exploratoire, car il n'existe actuellement dans la littérature aucune étude différenciant les types d'intervention auprès des familles, à savoir, d'une part, les évaluations ciblées et, d'autre part, les évaluations traditionnelles en matière de garde et de visite, et leurs résultats. Des problèmes méthodologiques ont été soulevés dans la littérature relativement aux déclarations des mères seulement. Dans la
présente étude, on a recueilli des renseignements auprès de plusieurs informateurs sur des sujets multiples au moyen de questionnaires.
Les parents ont signalé une augmentation du nombre de jours de visite accordés à celui qui n'avait pas la garde (habituellement le père), malgré leurs craintes que celui-ci ne comprenne pas les besoins socio-affectifs de l'enfant. Bien que l'on n'ait constaté aucune différence statistiquement significative entre les deux types d'intervention, les parents ont déclaré que l'évaluation ciblée les avait davantage aidés à replacer leur conflit dans une perspective plus orientée vers la résolution de leurs problèmes. Cela pourrait expliquer le niveau élevé de concordance entre eux (84 p. 100) au titre de leur satisfaction globale à l'égard du service.
Au 2e volet, les pères ont signalé qu'ils communiquaient davantage avec leur ex-conjointe dans le cas de l'évaluation traditionnelle que dans celui de l'évaluation ciblée. Cela pourrait être attribuable au temps requis par chaque intervention et étayer les déclarations des deux parents selon lesquelles le contenu de leur communication avait changé. Les deux parents ont déclaré au 2e volet, dans le cas de chaque intervention, qu'ils discutaient moins des questions susceptibles de susciter un conflit entre eux et n'en abordaient aucune touchant :
- a) les décisions quotidiennes au sujet de leur enfant;
- b) les grandes décisions concernant l'enfant;
- c) la façon dont celui-ci s'adaptait au divorce, et
- d) les questions d'ordre financier.
Beaucoup de parents participants avaient été en procès pendant trois ans lorsqu'ils ont été mis en rapport avec l'avocat des enfants. Cela indique que leurs divergences au sujet de leur enfant duraient déjà depuis un certain temps. L'un des aspects importants de chaque intervention consiste donc à aider les parents extrêmement divisés à apprendre à échanger de l'information concernant leur enfant et à adopter des schémas de communication moins conflictuels. En outre, les techniques de résolution de problèmes apprises se révéleront importantes et bénéfiques pour leur enfant à l'avenir.
Il est intéressant de noter la corrélation modérée entre les cotes attribuées par les mères et par les pères au comportement global de leur enfant au 2e volet, étant donné que la recherche a révélé des différences entre les cotes attribuées par le parent ayant la garde et par l'autre sur la CBCL. Plus de 80 p. 100 des mères avaient la garde de l'enfant, mais les pères étaient généralement conscients de son comportement. Cela donne à penser que les deux parents étaient peut-être déjà plus centrés sur leur enfant, malgré leurs divergences d'opinions. La concordance entre les cotes attribuées par les parents est significative à trois égards. Premièrement, les pères sont d'importantes sources d'information dans le processus. Beaucoup de chercheurs n'ont souvent pas de conclusions à formuler au sujet des pères à cause du faible taux de réponse de la part de ceux-ci (Lee, 1997). Deuxièmement, cette concordance peut expliquer pourquoi la proportion des enfants se situant dans la fourchette cliniquement significative des problèmes psychologiques et comportementaux signalés par les parents sur la CBCL était inférieure à celle se dégageant d'autres études (Johnston et coll., 1987; Radovanovic et coll., 1994). Troisièmement, cela pourrait aussi expliquer l'augmentation du nombre mensuel de jours de visite du père, conformément à la recommandation des travailleurs sociaux.
En revanche, d'autres études n'ont fait ressortir qu'un rapport minime entre les déclarations faites par les pères et par les mères sur la CBCL, car, y est-il dit, comme les enfants ont peu de contacts avec le parent qui n'en a pas la garde (habituellement le père, toutes les deux fins de semaine), celui-ci ne les connaît pas vraiment assez bien pour donner des renseignements exacts sur leur développement socio-psychologique (Radovanovic, 1993; Radovanovic et coll., 1994). Ces chercheurs signalent en outre que les enfants se comportent différemment dans les deux foyers, ce qui contribuerait à expliquer les différences entre les déclarations des parents. L'examen des différences dues au sexe et à l'âge des enfants devra faire l'objet de travaux futurs.
Austin et Jaffe (1990) ont été parmi les premiers à soulever la question de la différenciation et de la compréhension du processus d'évaluation en matière de garde lui-même, et du rôle joué par les évaluateurs dans le règlement. Cela va à l'encontre de la littérature sur la médiation et la psychothérapie, qui abonde en études sur les liens entre le clinicien et les résultats. Dans la présente étude, on a cherché à combler certaines de ces lacunes de la littérature sur la garde des enfants en fournissant une liste de contrôle de la fidélité des interventions aux travailleurs sociaux et aux parents, ainsi qu'un manuel exposant chaque étape de celles-ci. En conséquence, il faut moins de temps pour venir en aide à certaines familles, et des variables possibles des processus employés dans l'intervention traditionnelle produisent des résultats positifs. Il faudra examiner à l'avenir des façons de perfectionner le manuel et la liste de contrôle de la fidélité.
La présente étude ne fait ressortir aucune corrélation significative entre l'intervention des travailleurs sociaux, le nombre d'heures qu'ils ont passées avec les familles, leurs années d'expérience et leur âge, et les taux de règlement, mais il faut se rappeler qu'elle était de nature exploratoire. Les parents ont exprimé la même satisfaction à l'égard des deux types d'intervention, et la majorité des cas a été réglée avec l'aide de l'avocat des enfants. Fait non étonnant, la satisfaction à l'égard des deux types d'intervention a semblé avoir un lien avec la situation de garde et l'orientation des recommandations. Cette conclusion est confirmée par la littérature (Birnbaum et Radovanovic, 1999; Radovanovic et coll., 1994).
Si les résultats semblent indiquer que les critères d'admission et d'exclusion sont valides pour cette population, nous ne savons pas si l'intervention est efficace dans le cas des parents qui font face à des problèmes plus complexes, par exemple violence familiale, un enfant marginal, etc.
Toutefois, les résultats donnent à penser que l'on pourrait procéder à d'autres études sur l'intervention ciblée à l'aide de ces critères d'admission et d'exclusion.
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