Vue d'ensemble des risques et des facteurs de protection pour les enfants touchés par la séparation et le divorce
5. Outils de Mesure Utilisés Pour Évaluer les Incridences du Divorce sure L'Adaptation des Enfants
5.1 Évaluation de la fiabilité et de la validité
Un outil de mesure est considéré comme un outil d'évaluation utile quand sa fiabilité et sa validité sont jugées bonnes. Les évaluations de la fiabilité donnent un aperçu de la qualité de l'outil de mesure. Les éléments distincts composant l'outil de mesure forment-ils un tout cohérent (cohérence interne)? Si l'outil de mesure est utilisé à deux moments différents (avec un court intervalle entre les évaluations), les réponses données sont-elles similaires (fiabilité du test-retest)? Toute évaluation de la fiabilité donnant des résultats supérieurs à 0,80 est considérée comme bonne (Bakeman et Gottman, 1986). Les résultats légèrement inférieurs sont parfois acceptables, tout dépendant de la raison pour laquelle l'outil de mesure est utilisé.
L'évaluation de la validité permet de savoir jusqu'à quel point l'outil utilisé mesure ce qu'il est censé mesurer. Par exemple, l'outil de mesure des conflits conjugaux établit-il une distinction entre les gens heureux en couple et ceux qui éprouvent des problèmes conjugaux importants? Prédit-il la rupture du couple avec le temps? Les résultats d'un nouvel outil de mesure des conflits conjugaux concordent-ils avec ceux d'un outil déjà établi? La corrélation entre les outils de mesure peut varier de -1,0 à 1,0, les valeurs de zéro indiquant qu'il n'existe aucune concordance et les valeurs se rapprochant de 1,0 indiquant une bonne concordance. D'autres indices qui nous aident à évaluer l'efficacité de l'outil de mesure sont parfois présents. Par exemple, grâce à certains des outils de mesure décrits ci-dessous, les chercheurs évaluent la stabilité sur une période d'un an ou plus. On s'attend alors à une concordance des résultats avec le temps, mais pas à une concordance aussi grande qu'à l'intérieur d'une semaine. Dans les parties qui suivent, nous donnons des détails techniques à titre informatif; nous fournissons cependant moins de sommaires techniques. Les outils de mesure que nous avons retenus aux fins de description ont donné des résultats prometteurs au chapitre de la fiabilité et de la validité. Comme on le verra, certains outils de mesure ont été examinés de plus près.
5.2 Outils de mesure de l'adaptation et de la satisfaction conjugales
Le Test d'évaluation de la rapidité d'adaptation conjugale et l'Échelle d'adaptation dyadique sont des outils de mesure de la satisfaction conjugale, par opposition aux outils de mesure des conflits conjugaux. Ces deux outils contiennent des énoncés permettant d'évaluer divers aspects des conflits conjugaux, ainsi que des énoncés permettant d'évaluer des aspects non conflictuels du mariage.
5.2.1 Test d'évaluation de la rapidité d'adaptation conjugale
Le Test d'évaluation de la rapidité d'adaptation conjugale (Short Marital Adjustment Test) ou SMAT, élaboré par Locke et Wallace (1959), est un outil de mesure de l'adaptation conjugale fiable et valide que les parents peuvent remplir rapidement (voir l'annexe A pour en connaître tous les détails). Ses créateurs définissent l'adaptation conjugale comme le degré d'« accommodement » dans la dyade à un moment précis (Locke et Wallace, 1959). Les sujets sont appelés à évaluer certains aspects de leur union, comme le degré de satisfaction de leur relation conjugale et le degré de satisfaction d'avoir choisi de vivre avec leur conjoint; le degré d'entente ou de mésentente sur diverses questions (finances, loisirs, amis et relations sexuelles); la façon dont les conflits sont gérés; et le degré de complicité dans le couple (p. ex. s'ils font des activités agréables ensemble, s'ils se confient l'un à l'autre). Au total, l'outil de mesure regroupe 15 énoncés organisés selon l'échelle de Likert et la méthode du choix multiple.
Dans l'étude originale, Locke et Wallace (1959) ont rapporté un coefficient de fiabilité de 0,90 fondé sur un échantillon de 118 couples. Ce résultat démontre la cohérence interne de l'outil de mesure, c'est-à-dire que ses énoncés sont en rapport l'un avec l'autre. En outre, la fiabilité du test-retest de l'outil de mesure s'établissait à 0,75 sur une période de trois semaines, ce qui démontre une assez bonne constance dans la façon dont les couples évaluent leur mariage. L'outil de mesure faisait aussi une distinction nette entre les couples qui s'étaient bien adaptés et ceux qui s'étaient mal adaptés (séparés, divorcés ou en psychothérapie conjugale). Par exemple, 96 % des couples qui s'étaient bien adaptés avaient obtenu des scores de 100 ou plus au SMAT, mais seulement 17 % des couples qui s'étaient mal adaptés avaient obtenu pareils scores. Un score de 100 a ainsi tenu lieu de score limite. Les personnes ayant obtenu un score inférieur à 100 étaient donc réputées s'être mal adaptées avec leur partenaire, tandis que les personnes ayant obtenu un score supérieur à 100 étaient réputées s'être bien adaptées à leur partenaire.
5.2.2 Échelle d'adaptation dyadique
Élaborée par Spanier (1976), l'Échelle d'adaptation dyadique (Dyadic Adjustment Scale) ou DAS est un outil de mesure de la satisfaction conjugale ou dyadique largement utilisé comprenant
32 énoncés, que les sujets remplissent eux-mêmes (voir l'annexe B pour en connaître tous les détails). Le DAS mesure divers aspects de la satisfaction dyadique, comme le consensus dyadique (le
degré d'entente ou de mésentente dans le couple sur diverses questions), la satisfaction dyadique (« Combien de fois avez-vous parlé de divorcer, de vous séparer ou de mettre fin à votre relation ou
songé à le faire? »
), de la cohésion dyadique (« Vous et votre conjoint, faites-vous des activités ensemble à l'extérieur? »
) et les marques d'affection
(« Embrassez-vous votre conjoint? »
)
Le DAS rapporte à la fois les scores obtenus pour chaque aspect individuel et un score global d'adaptation dyadique. Les coefficients de fiabilité des différents aspects de l'adaptation dyadique vont de 0,73 (sous-échelle des marques d'affection) à 0,94 (sous-échelle de la satisfaction dyadique). Spanier (1976) établit à 0,96 le coefficient de fiabilité du score global d'adaptation dyadique. Dans l'étude originale, l'outil de mesure a été utilisé auprès d'un échantillon formé de 218 personnes mariées et de 94 personnes divorcées. Pour chacun des 32 énoncés, les scores des personnes divorcées différaient sensiblement de ceux des personnes mariées. Ce qui veut dire que l'outil de mesure fait bien la distinction entre les couples satisfaits et les couples insatisfaits. Dans des études ultérieures, le DAS est également parvenu à faire la distinction, de manière fiable, entre conjoints stressés et conjoints non stressés (Eddy, Heyman et Weiss, 1991). Dans une étude récente où l'on a utilisé le DAS, la cohérence interne des rapports de la mère et du père s'établissait à 0,91 (Davis et coll., 1998). La corrélation entre le DAS et le SMAT est également bonne; elle s'établissait à 0,86 dans le cas des personnes mariées et à 0,88 dans le cas des personnes divorcées.
5.3 Outils de mesure des conflits conjugaux
De nombreuses études ont utilisé et continuent d'utiliser les outils de mesure généraux de l'adaptation et de la satisfaction conjugales pour évaluer le lien entre les familles malheureuses et le bien-être de l'enfant, et entre les conflits conjugaux et le bien-être de l'enfant (Davis et coll., 1998). Mais des études récentes ont montré que les outils de mesure spécialisés évaluent mieux les conséquences pour l'enfant que les outils de mesure généraux et globaux. En particulier, plusieurs chercheurs ont constaté que, s'agissant d'un échantillon non clinique, les conflits interparentaux constituent une meilleure variable prédictive des problèmes d'adaptation chez l'enfant que la satisfaction conjugale ou dyadique en général (Buehler et coll., 1998; Davies et Cummings, 1994; Emery et O'Leary, 1982). Bien que les outils de mesure généraux de la satisfaction conjugale comme le SMAT et le DAS comprennent des énoncés permettant d'évaluer le conflit dyadique, il existe des outils fiables et valides qui ne mesurent que le conflit dyadique. Les paragraphes ci-dessous brossent un tableau de deux de ces outils de mesure, soit l'Échelle des tactiques de résolution des conflits (Conflict Tactics Scale) ou CTS et l'échelle de perception des conflits interparentaux par les enfants (Children's Perception of Interparental Conflict Scale) ou PIC.
Le CTS et le PIC ont démontré de très bonnes propriétés psychométriques. On utilise le CTS pour recueillir des renseignements auprès des parents et des enfants; le PIC est perçu comme un outil de mesure fiable et valide des conflits parentaux du point de vue des enfants. Ainsi, les rapports des enfants et des parents concernant les conflits conjugaux sont largement acceptés. Les rapports tant des enfants que des parents ont chacun leurs avantages. Les rapports des parents sont avantageux du fait qu'ils sont moins dérangeants pour les enfants. Puisque les outils de mesure destinés aux enfants ne sont conçus que pour les enfants de 4e année et plus (ils ne sont pas vraiment fiables avant), les outils de mesure pour adultes peuvent également être utilisés pour les jeunes enfants. La valeur du rapport d'un enfant réside dans sa relation plus étroite avec les conséquences qui sont propres à l'enfant lui-même.
5.3.1 Échelle révisée des tactiques de résolution des conflits
On a récemment revu et corrigé le CTS original élaboré par Straus (1979) de façon à augmenter sa validité et sa fiabilité. Il s'agit de l'Échelle révisée des tactiques de résolution des conflits (Revised Conflict Tactics Scale) ou CTS2 (Straus et coll., 1996; voir l'annexe C pour en connaître tous les détails). À l'instar du CTS, le nouvel outil de mesure évalue jusqu'à quel point des partenaires qui se fréquentent, qui cohabitent ensemble ou qui vivent en couple ont eu recours à la violence psychologique et physique pour gérer des conflits au cours d'une période de douze mois.
Le CTS demeure l'échelle d'évaluation des conflits dyadiques la plus couramment utilisée et la plus valide. Bien d'autres outils de mesure des conflits dyadiques existent, mais le CTS fournit l'évaluation la plus concrète des conflits dyadiques poussés par la colère. Straus et coll. (1996) ont rapporté qu'on s'est servi du CTS dans 400 études (regroupant collectivement plus de 70 000 participants). Dans le cadre de ces 400 études, on a procédé à de nombreuses enquêtes visant à évaluer la validité et la fiabilité de cet outil de mesure. On a utilisé le CTS auprès de participants de diverses origines culturelles dans au moins 20 pays, dont l'Espagne, Hong Kong, l'Inde et le Japon. On a aussi utilisé le CTS comme instrument diagnostique de thérapie afin d'évaluer la gravité des conflits et de la violence dans les relations (Straus et coll., 1996).
Le CTS et le CTS2 sont fondés sur la théorie du conflit qui présuppose que toute interaction a sa part de conflit. Les énoncés du CTS et du CTS2 cherchent à connaître les tactiques concrètes et précises qu'adoptent les membres d'une dyade pour résoudre un conflit. Ces tactiques au degré d'engagement variable vont des tactiques passives, comme les discussions calmes, aux tactiques énergiques, comme la violence physique. Ainsi, les deux points forts du CTS2 sont de mettre l'accent sur les moyens concrets de résoudre les conflits et d'évaluer un éventail de tactiques de résolution des conflits. L'outil de mesure évalue aussi ce que le sujet et son partenaire ont fait pour gérer les conflits.
On a reproché au CTS original, qui comprenait 18 énoncés répartis sur trois échelles (raisonnement, violence verbale et violence physique), d'être trop court, donc de ne pas évaluer suffisamment divers types de tactiques de résolution des conflits. Le CTS2 comprend 39 énoncés répartis sur cinq échelles, ce qui a donc permis d'améliorer sa validité et sa fiabilité. L'outil de mesure se penche sur de nombreuses tactiques de règlement des conflits et divers types de violence conjugale.
Voici la liste des cinq échelles du CTS2 :
- Échelle de négociation
- L'échelle de négociation comprend six énoncés qui évaluent les moyens pris pour régler un différend par la discussion.
L'échelle regroupe des tactiques de gestion des conflits cognitives (p. ex. un des partenaires propose un compromis) et émotionnelles (p. ex. un des partenaires demande à l'autre ce qu'il
ressent). Dans le CTS, l'échelle de négociation, dite
« échelle de raisonnement »
, ne comprenait que trois énoncés. - Échelle de violence psychologique
- L'échelle de violence psychologique comprend huit énoncés qui évaluent le recours à des actes de violence verbale et non verbale. Dans le CTS, cette
échelle s'appelait
« échelle de violence verbale »
, mais on a changé son nom parce qu'elle comprend maintenant des énoncés se rapportant à des actes de violence non verbale (p. ex.« sortir de la pièce en furie »
). - Échelle de violence physique
- L'échelle de violence physique comprend douze énoncés qui évaluent le recours à la violence physique pour gérer des conflits dyadiques. Cette
échelle s'appelait
« échelle de violence »
dans le CTS et comprenait neuf énoncés. - Échelle de coercition sexuelle
- Cette échelle ne faisait pas partie du CTS. La nouvelle échelle évalue le recours à la coercition pour contraindre son partenaire à s'engager dans un acte sexuel non désiré. Elle comprend sept énoncés qui explorent divers actes coercitifs, comme l'insistance verbale et la force physique.
- Eacute;chelle des blessures
- Cette échelle aussi ne se retrouve que dans le CTS2. Elle mesure les blessures infligées par le partenaire et comprend six énoncés portant sur l'ampleur de la douleur, les dommages aux tissus et aux os et le besoin de recevoir des soins médicaux.
Contrairement au CTS, le CTS2 fait une distinction entre les actes mineurs et les actes graves, qu'il s'agisse de violence physique, de coercition sexuelle ou de blessures. Pareille distinction s'est imposée parce que les études indiquent que l'étiologie et le traitement des actes de violence mineurs et isolés et des actes de violence graves à répétition diffèrent sensiblement (Straus et coll., 1996). En outre, les énoncés du CTS2 sont classés en ordre hiérarchique, de telle sorte que les premiers énoncés décrivent des manières socialement acceptables de gérer les conflits (p. ex. discuter des problèmes calmement), et que les derniers énoncés décrivent les formes de violence physique les plus graves (utilisation d'un couteau ou d'une arme à feu).
À l'instar du CTS, la validité du CTS2 a été vérifiée auprès d'un échantillon d'étudiants du collégial. On a procédé ainsi parce que les travaux d'évaluation de la validité et de la fiabilité du CTS avaient établi que la structure factorielle des données relatives aux étudiants était très proche de celle des échantillons nationaux et cliniques. Les premières études évaluant les propriétés psychométriques du CTS2 montrent sa très grande fiabilité (coefficients allant de 0,79 à 0,95), tout comme le CTS avant lui. Des données préliminaires suggérant certains types de validité ont déjà été rapportées (Straus et coll., 1996). Tout comme le CTS, le CTS2 peut être rempli par les parents ou les enfants. Les études effectuées à l'aide du CTS font état d'une concordance suffisante entre les rapports des mères et des pères et entre les rapports des enfants et des parents (Johnston, Kline et Tschann, 1989). En outre, à l'instar du CTS, le CTS2 peut être utilisé pour évaluer les conflits au sein des dyades conjugales (Jenkins, 2000) et les conflits postérieurs au divorce (Johnston, Gonzales et Campbell, 1987; Johnston, Kline et Tschann, 1989).
5.3.2 Échelle de perception des conflits interparentaux par les enfants
Élaborée par Grych, Seid et Finchman (1992), l'échelle de perception des conflits interparentaux par les enfants (Children's Perception of Interparental Conflict Scale) ou PIC comprend 48 énoncés de type vrai ou faux qui mesurent la façon dont les enfants perçoivent divers aspects des conflits conjugaux (voir l'annexe D pour en connaître tous les détails). Le PIC comprend les trois échelles suivantes : l'échelle des propriétés des conflits (fréquence, intensité et résolution des conflits), l'échelle de la menace perçue (sentiment d'être menacé et aptitude des enfants à y faire face) et l'échelle du blâme personnel (impression de l'enfant d'être à blâmer pour les conflits parentaux). Les enfants évaluent le comportement de leurs parents à l'aide d'un test à choix multiple dont les réponses donnent de un à trois points (1 = faux, 2 = plutôt vrai, 3 = vrai). Plus le score est élevé, plus les conflits sont graves ou leur évaluation négative.
La cohérence interne du PIC est supérieure à ce qui est recommandé pour les outils de recherche (de 0,78 dans le cas de l'échelle du blâme personnel à 0,90 dans le cas de l'échelle des propriétés des conflits); la corrélation test-retest (qui va de 0,70 dans le cas de l'échelle des propriétés des conflits à 0,76 dans le cas de l'échelle du blâme personnel) indique que le PIC demeure assez constant sur une période de deux semaines (Grych, Seid et Finchman, 1992). La validité de l'outil de mesure a été vérifiée auprès d'enfants de 9 à 12 ans, quand il a été montré que les enfants d'âge scolaire pouvaient rapporter leur perception des conflits parentaux de façon fiable. En fait, la stabilité des mesures sur une période de douze mois s'est révélée suffisante (0,64, 0,51 et 0,47 pour les trois sous-échelles du PIC) et comparable aux autres outils de mesure reconnus qui utilisent des rapports fournis par les enfants (variation de 0,38 à 0,52) (Finchman, Grych et Osborne, 1994). En évaluant la validité du PIC, les chercheurs ont constaté que les rapports des enfants concernant la fréquence, l'intensité et la résolution des conflits corroboraient constamment les rapports des parents, des autres enfants, des enseignants et des pairs concernant l'adaptation. Par contre, les rapports des parents concernant les conflits ne corroboraient que les rapports des parents concernant l'adaptation. Cela indique que le rapport d'un enfant au sujet des conflits familiaux pourrait constituer un outil plus efficace à des fins de sélection que le rapport d'un parent quand le but visé est de cibler les familles dont les enfants sont durement affectés par les conflits. La validité du PIC a été vérifiée auprès d'étudiants du collégial (Bickham et Fiese, 1997) et sa stabilité et sa fiabilité ont été montrées.
5.4 Outils de mesure des conflits postérieurs au divorce
Les deux outils dont il est question dans cette partie se rapportent aux conflits et au fonctionnement de la famille à la suite d'un divorce. Bien que ces outils de mesure aient des propriétés psychométriques prometteuses, ils sont relativement récents, donc moins bien établis que le PIC et le CTS. De plus, le PIC et le CTS ont été utilisés pour évaluer les conflits parentaux après le divorce et se sont avérés extrêmement fiables et valides.
5.4.1 Échelle de mesure des conflits parentaux postérieurs au divorce
L'échelle de mesure des conflits parentaux après le divorce (Post-Divorce Parental Conflict Scale) ou PPCS est un outil de mesure du type et du niveau de conflits parentaux après le divorce tels que perçus par les
enfants. Elle comprend 82 énoncés et les sujets la remplissent eux-mêmes (Morris et West, 2000). L'outil de mesure aborde trois volets : violence verbale, violence indirecte et violence physique.
L'évaluation se fait sur une échelle de Likert à cinq points (1 = ce n'est jamais arrivé, 5 = cela arrive tous les jours) un an après le divorce et concerne les douze mois
précédents. Les énoncés du PPCS commencent par se rapporter à un niveau de conflit et de violence peu élevé et finissent par en venir aux conflits violents et intenses. En outre, les
enfants rapportent séparément les comportements adoptés par le père et la mère (p. ex. : « ma mère discute des questions calmement avec mon père »
; « mon
père a lancé des choses en direction de ma mère »
).
Les études ayant utilisé le PPCS ont démontré la fiabilité des sous-échelles se rapportant au père et à la mère (de 0,80 à 0,90). Par exemple, Morris et West (2000) ont établi que la cohérence interne de toutes les sous-échelles se situait à 0,80 ou plus. Ils ont également constaté une bonne corrélation entre le PPCS et le PIC (Morris et West, 2000).
5.4.2 Inventaire des formes d'adaptation au divorce
La nouvelle version révisée de l'inventaire des formes d'adaptation au divorce (Divorce Adjustment Inventory Revised) ou DAI-R (Portes, Haas et Brown, 1991) est un outil de mesure destiné aux parents qui comprend 42 énoncés et qui évalue l'adaptation de l'enfant et la façon de fonctionner de la famille après la séparation des parents. Le DAI-R évalue cinq facteurs : les conflits et la dysfonction; le divorce dans des conditions favorables et la capacité d'adaptation de l'enfant; le règlement du divorce de façon positive; les réseaux de soutien externes; et la transition après le divorce. Les réponses sont données sur une échelle de Likert qui va de 1 (totalement en désaccord) à 5 (totalement d'accord). Les analyses préliminaires démontrent une bonne cohérence interne, soit de 0,69 dans le cas du score global à 0,83 dans le cas de l'échelle des conflits et de la dysfonction (Portes, Smith et Brown, 2000).
5.5 Outils de mesure du degré de perturbation chez l'enfant
Si l'objectif d'un programme ou d'un service est de reconnaître les enfants susceptibles de moins bien s'en sortir après le divorce de leurs parents, une bonne stratégie à adopter serait de se servir d'un outil de mesure des conflits bien établi, comme le CTS2 et le PIC, conjointement avec un outil de mesure de l'adaptation de l'enfant comme la Liste de comportement pour les enfants de Achenbach (Achenbach Child Behaviour Checklist) ou CBCL (Achenbach et Edelbrock, 1991). La mesure du degré de perturbation chez l'enfant se fait couramment. De nombreux outils de mesure existent, mais la partie du CBCL destinée aux parents est la plus souvent utilisée en recherche et en milieu clinique. Le CBCL a été conçu pour répertorier, de façon normalisée, les problèmes de comportement et les compétences des enfants de 4 à 16 ans tels que rapportés par les parents. Le CBCL est un outil de mesure que les sujets remplissent eux-mêmes et qu'on peut administrer à des parents qui ont la capacité de lecture d'un élève de 5e année. On peut aussi l'administrer oralement le cas échéant.
Le CBCL établit un score final se rapportant aux problèmes de comportement ainsi qu'un certain nombre de profils liés à différents problèmes, notamment au chapitre de l'extériorisation et de l'intériorisation. Le CBCL est largement utilisé en raison de ses propriétés psychométriques solides et ses coefficients de fiabilité sont élevés. La fiabilité du test-retest des scores pour les énoncés est de 0,95, tout comme le degré de fiabilité entre interviewers qui est aussi de 0,95. Quant à la validité des outils de mesure, les rapports indiquent que la corrélation entre le score final du CBCL se rapportant aux problèmes de comportement et le score final d'autres outils de mesure s'établit entre 0,71 et 0,92. Les études montrent aussi que 116 des 118 problèmes de comportement recensés par le CBCL sont intimement liés à l'observation clinique, ce qui renforce encore plus la validité de cet outil de mesure (tout le paragraphe, Achenbach et Edelbrock, 1991).
5.6 Buts des outils de mesure des conflits
5.6.1 Projets de recherche
Les chercheurs qui utilisent des outils de mesure des conflits dans leurs projets de recherche tentent d'établir un schéma des données entre des variables (p. ex. le lien entre les conflits parentaux et les problèmes de comportement social des enfants). Les outils de mesure utilisés dans les projets de recherche ne sont habituellement pas liés à des décisions concernant des enfants ou des familles en particulier.
5.6.2 Affectation aux programmes
Avant de recourir à un outil de mesure des conflits pour répartir des familles dans différents types de programmes, ses propriétés psychométriques doivent être démontrées. L'outil doit aussi avoir fait ses preuves auprès de la population visée. Nous ne pouvons décrire ici toutes les étapes qu'il serait bon de suivre avant d'utiliser pareils instruments de recherche comme moyens d'évaluer les individus. Nous soulevons cependant ci-dessous plusieurs questions qui méritent que l'on s'y attarde.
- L'outil de mesure des conflits que l'on compte utiliser pour assigner des familles à différents types d'intervention doit pouvoir faire la distinction entre les familles vivant un conflit passager et les familles
devenues fortement conflictuelles avec le temps. Bien que la validité prédictive du CTS et du PIC ait fait ses preuves, elle n'a pas été établie pour la mesure des conflits postérieurs au
divorce. La validité du CTS et du PIC n'a pas été démontrée non plus pour les familles en pleine réorganisation à la suite d'un divorce.
- Avant d'assigner des familles à différents types d'intervention, il est nécessaire d'établir des seuils d'inclusion. Cela se fait habituellement en fonction de la distribution. Par
exemple, les familles se retrouvant parmi les 10 % de l'échantillon ayant obtenu les scores les plus élevés pourraient être considérées comme fortement conflictuelles. Le seuil
d'inclusion doit être assez bas pour pouvoir inclure les familles qui tireront avantage de l'intervention et assez élevé pour pouvoir exclure les gens qui ne requièrent pas d'intervention. Aucun
seuil d'inclusion n'a été établi dans la plupart des outils de mesure des conflits.
- Si on procède à une sélection dans le but de pouvoir offrir des services particuliers aux familles qui pourraient le plus en bénéficier, l'utilisation de deux instruments, comme un outil de mesure des conflits parentaux et un outil de mesure de l'adaptation des enfants, devrait être envisagée. Tel que mentionné précédemment, les enfants ne réagissent pas tous mal aux conflits ou au divorce des parents. En sélectionnant des familles considérées comme fortement conflictuelles ou celles dont les enfants éprouvent déjà des problèmes d'adaptation, on pourrait cibler les enfants et les familles dans le besoin.
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