Bibliographie annotée de droit comparé et de droit international concernant le mariage forcé

7.0 Questions connexes

7.1 Mariage d'enfants

Le mariage d'enfants, qui est quelquefois appelé mariage précoce, est habituellement considéré comme un mariage forcé du fait que les mineurs sont réputés incapables de donner leur consentement à cause d'un manque de compréhension. Toutefois, malgré tout, dans bon nombre de cas de mariages d'enfants, on ne leur demande pas leur accord. Bien que le mariage d'enfants ait attiré l'attention à cause des risques connexes pour la santé (comme la grossesse précoce, l'une des principales causes de décès dans le monde pour les filles âgées de 15 à 19 ans), il est en grande partie passé sous silence en tant que question de droits de la personne, bien qu'il soit interdit par bon nombre de conventions internationales. Bon nombre de lois nationales et de pactes internationaux qui traitent du mariage d'enfants échouent à cause des lois qui protègent les mariages coutumiers ou les mariages religieux traditionnels, du nombre insuffisant de mariages enregistrés et des cas exceptionnels où la victime est mariée à l'agresseur sexuel. Toutefois, le fait de n'adopter un âge minimal pour le mariage, comme il est exigé par la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (voir recommandation générale no 21 ci-dessus, à la page 12), conduit peut-être à ne pas voir toute la complexité du mariage et de l'enfance; une méthode plus contextuelle serait sans doute préférable. Les facteurs contributifs clés du mariage d'enfants sont la pauvreté et la volonté de contrôler la sexualité féminine.

1. BLACK, Maggie. « WANTED: the right to refuse », New Internationalist (août 2001), p. 20.

Mme Black critique le fait que le mariage forcé n'est pas reconnu comme un élément important des droits de la personne alors qu'il s'apparente à l'esclavage et a pour effet de légaliser le viol et la grossesse forcée. La plupart des arguments exprimés contre la grossesse précoce sont liés à des questions de santé et à la croissance démographique, non pas à l'esclavage et au mariage forcé.

2. BUNTING, Annie. « Stages of Development: Marriage of Girls and Teens as an International Human Rights Issue » (2005), 14(1) Social & Legal Studies 17.

Mme Bunting allègue que la stratégie de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes visant à fixer un âge uniforme pour le mariage et qu'une analyse stricte des droits ne tiennent pas compte de la complexité du mariage et de l'âge. Il faut tenir compte des différentes façons de concevoir l'enfance selon les cultures lorsqu'on analyse le mariage précoce; une stratégie fondée sur un âge uniforme de 18 ans ne tient pas compte de la diversité des enfances. Il faut que l'approche soit fondée sur les conditions historiques, culturelles, sociales et économiques, qui ont une incidence sur la fréquence et les conséquences du mariage précoce.

3. CANADA, SÉNAT, COMITÉ PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE. Qui dirige, ici? Mise en œuvre efficace des obligations internationales du Canada relatives aux droits des enfants (Ottawa: le Comité, 2005).

Ce rapport traite d'une étude des obligations internationales du Canada relativement aux droits et libertés des enfants et pose la question de savoir si le droit canadien respecte les obligations découlant de la Convention relative aux droits de l'enfant. L'étude conclut que le Canada est devancé par d'autres pays à ce chapitre et qu'il faut donc un nouveau processus. L'étude révèle entre autres que le Canada n'a pas de normes nationales uniformes dans un certain nombre de domaines clés, ce qui influe directement sur les droits des enfants. De plus, le mandat des institutions vouées à la protection des droits des enfants varie considérablement d'une province à l'autre.

4. Conseil de l'Europe, Commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes. Mariage forcés et mariages d'enfants, Documents, Doc. 10590 (2005), p. II(B).

Ce document donne des renseignements généraux sur le mariage d'enfants et l'étendue du problème dans le monde et propose des changements. On y fait remarquer que les États doivent agir pour faire respecter les droits de l'homme dans leur pays; la loi nationale devrait donc traduire cette obligation, et l'âge minimum légal du mariage pour les hommes et pour les femmes devrait être 18 ans. Les mariages forcés ne devraient pas être reconnus, et des mesures de prévention et de protection des victimes devraient être mises en place.

5. UNICEF. « Le mariage précoce » Digest Innocenti n. 7 1 (Fonds des Nations Unies pour l'enfance, Centre de recherche Innocenti, Italie, mars 2001).

Ce condensé se penche sur le mariage précoce — le mariage d'enfants et d'adolescents de moins de 18 ans — dans une perspective de droits humains, un point de vue qui n'a pas souvent été abordée par le passé. Il examine l'étendue du mariage précoce, son contexte, ses causes, et ses conséquences sur la société. Les facteurs contributifs clés du mariage d'enfants sont la pauvreté et la volonté de « protéger » les filles. Le rapport favorise la création de programmes d'information et d'éducation, tant pour les adolescents que pour les parents, davantage de secours d'urgence pour les victimes, des mesures gouvernementales pour garantir que les droits coutumier et civil respectent les normes internationales en matière de droits humains et une recherche accrue sur ce problème sous l'angle des droits.

6. WARNER, Elizabeth. « Behind the Wedding Veil: Child Marriage as a form of trafficking in girls » 12 Am. U. J. Gender Soc. Pol'y & L, p. 233 (2004).

Mme Warner traite de l'échec des lois nationales et des pactes internationaux en ce qui concerne le mariage d'enfants du fait des cas d'exception où la victime est mariée à l'agresseur et des lois qui protègent les pratiques coutumières ou religieuses traditionnelles. De plus, les conventions ne comportent pas de mécanismes d'exécution et ne reconnaissent pas la vulnérabilité des enfants dont le consentement a été obtenu sous la contrainte. Le mariage d'enfants est habituellement favorisé, soit pour des motifs financiers car les futures mariées plus jeunes sont vendues à un prix plus élevé, soit du fait du désir parental de contrôler la sexualité féminine. À la fin de l'article, on énonce des recommandations sur les mesures juridiques et extrajudiciaires pour lutter contre le mariage d'enfants.

7. « Case study: Forced Early Marriage », document disponible en ligne sur le site de BBC World Service. (Anglais seulement)

Ce site Web décrit brièvement le problème du mariage précoce comme étant une violation des droits de la personne en s'appuyant beaucoup sur le rapport de l'UNICEF. Il traite de l'incidence du mariage précoce et de ses causes, et il résume certaines mesures de prévention qui ont été adoptées. L'UNICEF a élaboré l'Initiative Sara de communication avec les adolescentes dans dix pays d'Afrique orientale et d'Afrique australe afin d'éduquer les filles et leur famille. En Éthiopie, la Family Guidance Association exploite 18 cliniques et plus de 500 centres communautaires qui font la promotion des pratiques sexuelles plus sécuritaires et qui offrent des conseils en ce qui concerne les relations.

7.2 Double nationalité

La double nationalité devient un élément important quand il s'agit de décider de la réponse que le pays donnera à un citoyen qui a été forcé de se marier, surtout lorsque le mariage comprend une dimension étrangère. Le degré de pouvoir qu'un pays peut exercer pour aider un citoyen ayant la double nationalité et dans les affaires de son autre pays de nationalité fait toujours l'objet d'un débat. Bien que la Convention sur la nationalité ait établi qu'« un État ne peut exercer sa protection diplomatique au profit d'un de ses nationaux à l'encontre d'un État dont celui-ci est aussi le national », bon nombre de personnes allèguent maintenant que la règle de la nationalité dominante et réelle devrait l'emporter (Symington, 2001; Hossain et Turner, 2001). La principale raison de l'intervention du Royaume-Uni dans les cas de mariage forcé tient à la violation des normes internationales en matière de droits de la personne, qui créent une obligation d'agir. Le rapport du groupe de travail du Home Office a critiqué le fait que les personnes ayant la double nationalité ne sont pas assurées de recevoir de l'aide mais, comme le fait remarquer Mme Hossain (2005), la double nationalité doit maintenant être considérée comme non pertinente au Royaume-Uni, et le gouvernement a décidé de traiter toutes les personnes se trouvant dans la même situation, et faisant face au mariage forcé, de la même façon, de prendre toutes les mesures appropriées et de faire des démarches en leur nom.

1. SYMINGTON, Alison. « Dual Citizenship and Forced Marriages », Dalhousie J. Legal Stud. no 10 (2001), p. 1.

Mme Symington donne des renseignements généraux, tant sur la double nationalité que sur le mariage forcé, en particulier du point de vue des Britanniques d'origine asiatique. L'interaction des lois nationales empêche de protéger les personnes ayant la double nationalité qui sont enlevées et forcées de se marier. L'auteure se dit en faveur de l'abandon de la Convention sur la nationalité au profit de la règle de la nationalité dominante.

2. INTERIGHTS, AIN O SALISH KENDRA (ASK) & SHIRKAT GAH. « Home Office Working Group — Information Gathering Exercise on Forced Marriages » (Mémoire présenté au groupe de travail du Home Office, mars 2000).

Ce document comprend une section sur les personnes ayant la double nationalité et leur position en vertu du droit international et du droit anglais; il formule des critiques du fait que l'aide ne peut être assurée.

3. HOSSAIN, Sara. Women's Rights to Choice in Marriage: From Recognition to Realisation…and denial?(Exposé fait au cours de la conférence intitulée Catalyst 2005: « Global Perspectives on Successful Implementation of Human Rights of Women Conference », University of Essex, 6 mai 2005) [non publié].

Mme Hossain fait état de bon nombre de cas où des femmes ont été forcées de se marier, y compris ceux où elles ont pu être rapatriées avec succès au Royaume-Uni. Elle a résumé les mesures que le Royaume-Uni a mises en place depuis 2000, notamment un changement en ce qui concerne les personnes ayant une double nationalité : le gouvernement a affirmé que la double nationalité n'était pas pertinente, que toutes les personnes se trouvant dans la même situation et menacées de mariage forcé seraient traitées de la même façon et que des mesures appropriées seraient prises. Bon nombre de difficultés existent encore parce que les tribunaux d'autres pays refusent d'aborder la question.

4. HOSSAIN, Sara et Suzanne TURNER, « Abduction for Forced Marriage — Rights and Remedies in Bangladesh and Pakistan » (2001), 1-64 I.F.L., p. 15.

Cet article est axé sur l'enlèvement en Grande-Bretagne à destination du Bangladesh et du Pakistan de personnes ayant une double nationalité. Une protection est offerte aux personnes ayant la double nationalité, mais il n'existe aucune obligation contraignante d'agir sauf en cas de violation des normes internationales en matière de droits de la personne. Les auteures se disent en faveur de l'abandon de la Convention sur la nationalité en faveur de la règle de la nationalité dominante.

7.3 Traite des femmes

Le mariage forcé est étroitement lié à la traite des femmes et, dans certains cas, ils peuvent se recouper, par exemple si les femmes font l'objet d'un trafic pour être vendues comme épouses. Les gouvernements ont des obligations juridiques internationales de prendre des mesures pour empêcher le trafic et les abus y afférents, mais ces obligations sont souvent laissées de côté en cas de mariage à cause de la nature censément privée de ces affaires. Des études de cas montrent qu'en Irak, le viol des jeunes filles récalcitrantes est encouragé parce que, pour être légal, le mariage doit être consommé, et un trafic en vue de « mariages de masse » a lieu fréquemment au Japon. En Chine, les mariages forcés sont légaux, et quelque 30 à 90 % des mariages peuvent être forcés.

1. HUMAN RIGHTS WATCH. « Trafficking of women and girls into forced prostitution and coerced marriage » (1995). Document disponible en ligne sur le site Web de Human Rights Watch. (Anglais seulement)

Des milliers de femmes chaque année sont vendues ou attirées dans des mariages forcés ou dans la prostitution et peuvent rarement échapper à cette situation. Souvent, les fonctionnaires gouvernementaux et les officiers de police profitent de ce commerce, de sorte qu'il est impossible de corriger la situation. Tant la prostitution forcée que le mariage forcé sont souvent considérés comme des crimes perpétrés par des particuliers dont les États ne sont pas responsables en vertu des droits internationaux de la personne. De fait, les gouvernements ont des obligations juridiques internationales précises et doivent prendre des mesures pour éliminer la traite des personnes et les abus qui s'y rapportent.

2. WIJERS, Marjan et Lin LAP-CHEW. Trafficking in Women. Forced Labour and Slavery-Live Practices in Marriage, Domestic Labour and Prostitution, Utrecht, Foundation Against Trafficking in Women (STV), 1997, aux pages 64 et 65, et ainsi que 194 et 195.

Ce livre révèle les conclusions d'une enquête internationale sur la traite des femmes essentiellement axée sur la prostitution. La courte section sur le mariage forcé est centrée sur les relations de mariage servile, qui sont le fruit de la situation inférieure de la femme dans la société en ce qui concerne les droits de propriété et les droits juridiques. L'ouvrage examine le cas de personnes en Irak où le viol des jeunes mariées récalcitrantes est encouragé parce que, pour être légal, le mariage doit être consommé et au Japon, pays qui connaît bon nombre de mariages de masse. En Chine, les mariages forcés sont légaux, et 30 à 90% des mariages peuvent être des mariages forcés, selon la coutume locale.