Analyse des options concernant la modification de la réglementation légale de la garde et du droit de visite des enfant
2001-FCY-2E
INCIDENCE DE LA RÉFORME SUR LES ORDONNANCES ET LES ENTENTES EXISTANTES (suite)
VIOLENCE, CONFLITS GRAVES ET EXERCICE INADÉQUAT DES RESPONSABILITÉS PARENTALES
Chacune des options proposées pourrait favoriser de façon significative l'objectif de la protection des enfants contre les préjudices si l'on inscrit dans le cadre législatif les dispositions qui s'imposent.
Le régime de la garde et du droit de visite pourrait être amélioré par l'ajout d'une mention de la violence, des conflits graves et de l'exercice inadéquat des responsabilités parentales. Un régime de responsabilité parentale pourrait prendre ces facteurs en considération lors de l'attribution de la responsabilité parentale dans les ordonnances et les ententes parentales. Un régime de partage des responsabilités parentales pourrait également prendre ces facteurs en considération afin de restreindre la présomption en faveur du partage des responsabilités parentales. En particulier, la violence, les conflits graves et l'exercice inadéquat des responsabilités parentales pourraient être signalés comme des facteurs susceptibles de limiter la présomption en faveur du partage du pouvoir de prise de décisions.
La mesure dans laquelle ces modèles permettraient de protéger les enfants contre ces préjudices dépendrait moins du modèle retenu et davantage de la mesure dans laquelle le cadre législatif précise la façon de tenir compte de ces facteurs. Les trois options pourraient préciser la façon de tenir compte de ces facteurs dans l'attribution de la responsabilité parentale dans les ordonnances et les ententes parentales.
S'il est important que ces facteurs soient incorporés dans les trois options de réforme, il est particulièrement crucial d'indiquer dans l'option trois que ces facteurs limitent une présomption en faveur du partage des responsabilités parentales. Le partage des responsabilités parentales n'est pas dans l'intérêt supérieur des enfants qui ont connu la violence, les conflits graves ou l'exercice inadéquat des responsabilités parentales, et le cadre législatif doit veiller à ce que les enfants de ces familles ne se retrouvent pas par mégarde dans une situation de partage des responsabilités parentales.
LES ENTENTES PARENTALES
Les trois modèles pourraient incorporer des ententes parentales dans les régimes législatifs, en particulier les ententes parentales facultatives, dans lesquelles les parents sont incités à s'entendre sur l'exercice des responsabilités parentales après le divorce. Comme nous l'avons indiqué précédemment, les trois options pourraient adopter des approches très similaires sur les questions du contenu, des critères d'examen, des restrictions et de la modification de ces ententes facultatives. Tel qu'on l'a déjà indiqué, l'inclusion d'ententes parentales sur une base facultative comporte très peu d'aspects négatifs, sauf dans le cas où ces ententes ne sont pas respectées.
Cependant, les trois options ne sont pas sur un pied d'égalité en ce qui concerne les ententes parentales obligatoires. Un régime obligatoire dans lequel tous les parents en instance de séparation ou de divorce sont tenus de produire des ententes parentales serait plus compatible avec un régime neutre de responsabilité parentale. L'entente parentale part du principe qu'il s'agit d'un moyen souple pour permettre aux parents d'adapter leurs ententes parentales en fonction des besoins particuliers de leurs enfants. On ne suppose pas à l'avance une façon dont la responsabilité parentale doit être attribuée mais on permet aux parents (et, s'ils ne s'entendent pas, aux tribunaux) de prendre cette décision en fonction de l'évaluation qu'ils font de l'intérêt supérieur de leurs enfants.
Par contre, un régime obligatoire serait le moins compatible avec le régime actuel fondé sur la garde et le droit de visite. Un régime obligatoire d'ententes parentales vise à encourager les parents, au moment de répartir entre eux leur responsabilité parentale, à prévoir les situations qui vont au-delà des catégories restrictives de la garde et du droit de visite. Dans les dossiers contestés, rien n'inciterait les parents à faire des efforts en ce sens si, à l'issue du processus, le tribunal devait prendre la décision en fonction de la garde et du droit de visite. Un régime facultatif cependant pourrait encourager les parents, même en cas de litige, à répartir entre eux la responsabilité parentale d'une façon plus inventive que les notions de garde et de droit de visite ne semblent le permettre.
Un régime de partage des responsabilités parentales pourrait englober un régime obligatoire, même si la chose n'est pas tout à fait compatible avec l'idée d'encourager les parents à négocier leurs propres ententes parentales adaptées aux besoins uniques de leurs enfants. Un régime de partage des responsabilités parentales part de l'hypothèse qu'une partie au moins de la responsabilité parentale, la plupart du temps la prise de décisions, devrait être partagée. Une entente obligatoire dans un régime de partage de la responsabilité parentale devrait par conséquent partir d'une hypothèse que ce pouvoir principal de prise de décisions est généralement partagé entre les parents, et devrait ensuite permettre aux parents de négocier tous les autres détails de leurs ententes parentales.
LES SERVICES CONNEXES AU DIVORCE
Chacun des modèles peut préconiser l'objectif de promouvoir le règlement à l'amiable des litiges en incorporant un renvoi aux services connexes au divorce. Dans les trois modèles, des restrictions au niveau des administrations et du financement peuvent faire obstacle à la prestation obligatoire de services connexes au divorce mais les trois modèles devraient prévoir des dispositions qui encouragent le recours à ces services. Chaque modèle pourrait prévoir un service d'éducation parentale offert sur une base facultative ou sur l'ordre du tribunal. Chaque modèle pourrait également mentionner la possibilité d'obtenir des services de médiation, et pourrait permettre au tribunal de nommer un médiateur lorsque les parties y consentent.
Une approche fondée sur les ententes parentales obligatoires pourrait être conçue spécialement en vue d'encourager les parents en instance de séparation et de divorce à utiliser la médiation, le counselling ou quelque autre mécanisme primaire de règlement des conflits en vue de faciliter la négociation de leurs ententes parentales. Mais même dans une approche fondée sur les ententes parentales obligatoires, le recours à des processus primaires de règlement des conflits devrait rester facultatif ou être imposé par un tribunal.
En ce qui concerne ces services connexes au divorce, il n'y a toutefois pas de différences importantes entre les trois options.
LES ATTENTES RAISONNABLES DE MODIFICATIONS LÉGISLATIVES
Il serait illusoire de chercher à évaluer les différences entre ce que chaque option de réforme est susceptible d'accomplir. Comme nous l'avons indiqué précédemment, aucune des options proposées ne permet d'atteindre tous les objectifs souhaités. Cette dernière section tente d'évaluer dans quelle mesure chaque modèle pourrait favoriser l'atteinte des objectifs et des principes directeurs de la réforme. Elle présente en conclusion certaines observations au sujet des limites générales des mesures de réforme législative envisagées.
La garde et le droit de visite
Un régime qui continue de se fonder sur la garde et le droit de visite favorisera certains des objectifs de la réforme mais pas tous.
Le régime de la garde et du droit de visite pourrait être modifié pour mieux promouvoir le recours au règlement à l'amiable des conflits. Les services d'aide en matière de divorce pourraient être incorporés dans la Loi sur le divorce. En plus d'une déclaration générale encourageant les parents à envisager le règlement à l'amiable des litiges, un programme d'éducation des parents pourrait être prévu à la discrétion du tribunal là où il est offert. La médiation et les autres mécanismes primaires de règlement des conflits pourraient être incorporés sur une base facultative. La Loi sur le divorce pourrait aussi prévoir des ententes parentales sur une base facultative, ce qui encouragerait les parents à conclure des ententes parentales. Ces mesures favoriseraient l'atteinte des objectifs de la réforme qui consistent à encourager les parents à régler dans la mesure du possible leurs conflits à l'amiable. À certains égards, ces mesures reflètent tout simplement la pratique courante, mais le fait de les inclure dans la Loi sur le divorce pourrait promouvoir les objectifs éducatifs et incitatifs de la réforme, à savoir établir des normes et des principes généraux pour guider les parents en instance de séparation et de divorce à travers le processus de règlement des litiges.
Le régime de la garde et du droit de visite pourrait être modifié pour favoriser les objectifs de la protection des enfants contre les préjudices, en particulier la violence, les conflits et l'exploitation. La Loi sur le divorce pourrait être modifiée par l'ajout d'une mention spécifique de la violence, des conflits graves et de l'exercice inadéquat des responsabilités parentales au moment d'envisager l'intérêt supérieur de l'enfant et de prononcer des ordonnances de garde et de droit de visite et de conclure des ententes parentales.
Dans le régime de garde et de droit de visite, l'intérêt supérieur de l'enfant reste primordial. Le régime pourrait être amélioré si l'on précisait en quoi consiste l'intérêt supérieur de l'enfant. Si le fait de mieux orienter les parents, les professionnels et les tribunaux au sujet des facteurs spécifiques à prendre en compte peut être bénéfique au plan éducatif, cette réforme ne permettra pas de rendre plus prévisible l'issue des conflits entre les parents, et il est peu probable qu'elle réduise de façon importante le niveau des conflits.
De même, une liste des responsabilités parentales pourrait être ajoutée à ce régime, ce qui pourrait avoir une certaine valeur éducative et incitative en encourageant les parents à porter leur attention sur les besoins spécifiques de leurs enfants. Toutefois, comme nous l'avons indiqué, une telle liste des responsabilités parentales cadre bien mal avec un régime qui repose ultimement sur la garde et le droit de visite. La mesure dans laquelle ce régime de garde et de droit de visite permet de reconnaître que les responsabilités parentales subsistent après la séparation et le divorce et que le père et la mère devraient continuer à participer à la vie de leurs enfants reste entachée d'obscurité. Même si le principe peut être énoncé dans l'intérêt supérieur de l'enfant, la notion dominante dans la garde et le droit de visite semble restreindre la possibilité que ce régime favorise ces objectifs.
La responsabilité parentale
Un régime de responsabilité parentale pourrait favoriser plusieurs des objectifs de la réforme. D'abord et avant tout, il s'agit d'un régime qui s'écarte des notions contestées de la garde et du droit de visite. Il s'agit d'un régime susceptible de contribuer à atténuer l'émotivité dans les litiges entre les parents en évitant les étiquettes indicatrices d'un statut parental de première ou de seconde classe. Il s'agit d'un régime qui favoriserait l'objectif consistant à affirmer le statut de parent tant pour le père que pour la mère.
Il s'agit en outre d'un régime qui insiste sur la notion de responsabilité des parents plutôt que sur la notion de droit des parents et qui fait ressortir que cette responsabilité subsiste après la séparation et le divorce. Non seulement ce régime affirme que les parents doivent continuer à participer à la vie de leurs enfants, mais il insiste aussi sur les dimensions particulières des responsabilités des parents. Il s'agit d'une démarche axée sur l'enfant, qui tente d'attirer l'attention sur les besoins des enfants.
Comme dans le cas du régime de la garde et du droit de visite, un régime de responsabilité parentale pourrait englober et favoriser le recours aux services d'aide au divorce et les ententes parentales. Ainsi, la réforme pourrait favoriser les objectifs consistant à promouvoir le règlement à l'amiable des litiges et à encourager les parents à régler leurs litiges avec le moins d'antagonisme possible et sans recourir aux tribunaux.
En outre, un régime de responsabilité parentale pourrait favoriser l'objectif consistant à protéger les enfants contre la violence, les conflits et les mauvais traitements. Le régime pourrait préciser avec soin la pertinence de ces facteurs au moment d'attribuer dans les ordonnances et les ententes parentales la responsabilité parentale.
Un régime de responsabilité parentale pourrait aussi favoriser l'objectif consistant à reconnaître qu'il n'y a pas de modèle unique de l'exercice des responsabilités parentales après la séparation qui conviendrait idéalement à tous les enfants. Un modèle neutre de responsabilité parentale ne suppose pas à l'avance la manière d'attribuer la responsabilité parentale mais permet plutôt d'attribuer cette responsabilité, dans les ordonnances et les ententes parentales, en fonction de l'intérêt supérieur de l'enfant. Il s'agit d'un modèle qui fait place à la souplesse et à la diversité. Il s'agit aussi d'un modèle dans lequel l'intérêt supérieur de l'enfant reste primordial : dans tous les cas, l'attribution de la responsabilité parentale doit être fonction de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Le partage des responsabilités parentales
Un régime de partage des responsabilités parentales pourrait favoriser certains des objectifs de la réforme. Il s'agit d'un régime qui s'écarte de la terminologie contestée de la garde et du droit de visite et qui affirme le maintien du statut de parent tant pour le père que pour la mère. C'est un régime qui peut favoriser l'objectif consistant à reconnaître que l'enfant bénéficie du maintien et du développement de relations significatives tant avec son père qu'avec sa mère. Selon le principe même de ce modèle, non seulement l'exercice de la responsabilité parentale continue après la séparation et le divorce mais il doit aussi être partagé.
Un régime de partage des responsabilités parentales peut également englober et encourager le recours aux services d'aide connexes au divorce et aux ententes parentales. Envisagé de cette façon, c'est un modèle qui favorise les objectifs consistant à promouvoir le règlement à l'amiable des litiges et à encourager les parents à régler leurs litiges avec le moins d'antagonisme possible et sans recourir aux tribunaux.
Un régime de partage des responsabilités parentales peut favoriser l'objectif consistant à protéger les enfants contre les préjudices s'il précise avec soin les circonstances justifiant que l'on s'écarte du principe du partage. Si la loi ne le précise pas, les enfants qui ont connu la violence, les conflits graves et l'exercice inadéquat des responsabilités parentales pourraient être assujettis à des ententes de partage des responsabilités parentales susceptibles d'être extrêmement dommageables pour eux.
Il ne semble pas cependant qu'un régime de partage des responsabilités parentales puisse favoriser l'objectif consistant à reconnaître qu'il n'y a pas de modèle unique d'exercice des responsabilités parentales après la séparation qui sera idéal pour tous les enfants. Ce régime suppose plutôt qu'un mode particulier d'exercice des responsabilités parentales dans lequel la prise de décisions est partagée est généralement dans l'intérêt supérieur de l'enfant.
En fait, on ne pourrait affirmer qu'il s'agit d'un modèle dans lequel l'intérêt supérieur de l'enfant est toujours primordial. Il s'agit plutôt d'un modèle qui suppose qu'une attribution particulière de la responsabilité parentale est généralement dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et il exige que toute dérogation à cette attribution soit justifiée. Certes, il s'agit d'un modèle qui continue de respecter la notion de l'intérêt supérieur de l'enfant, mais qui ne traite pas au cas par cas des intérêts particuliers à chaque enfant. Il suppose plutôt que le partage de la prise de décisions est généralement dans l'intérêt supérieur de l'enfant. On comprend donc de façon légèrement, et peut être subtilement, différente le sens qu'il faut donner à la primauté du critère de l'intérêt supérieur de l'enfant. En même temps, il importe de signaler que pour l'attribution des autres aspects de la responsabilité parentale, spécifiquement la cohabitation, il s'agit d'un modèle qui continue de reposer sur une détermination de l'intérêt supérieur de l'enfant dans chaque cas.
Les limites de la réforme
La réforme a pour objectifs généraux de réduire les conflits entre les parents, d'encourager la coopération des parents et de promouvoir des relations significatives entre les enfants et leurs parents tout en protégeant les enfants contre les préjudices. Les objectifs visent à améliorer le processus de règlement des conflits en encourageant les parents à conclure des ententes dans l'harmonie. Les objectifs visent aussi à améliorer l'exercice des responsabilités parentales après la séparation et le divorce, à encourager la participation continue et la coopération des deux parents.
D'autres administrations ont visé des objectifs similaires, et leur expérience à l'occasion d'une multitude de réformes en matière de garde et de droit de visite laisse croire qu'il est loin d'être facile de réaliser des changements en profondeur.
La réforme du droit peut faire miroiter de grandes promesses pour ce qui est d'améliorer le processus de règlement des conflits. Un régime légal peut être plus ou moins antagoniste, et il semble très valable de tenter de modifier la Loi sur le divorce pour promouvoir un processus judiciaire plus conciliant pour le règlement des litiges entre les parents. Comme nous l'avons indiqué précédemment, les trois options de réforme peuvent prévoir un renvoi aux services d'aide connexes au divorce qui encourage le recours au règlement primaire des litiges. On ne saurait affirmer qu'un tel renvoi se traduira par une transformation en profondeur de la méthode actuelle de règlement des litiges entre les parents; cette méthode compte déjà beaucoup sur l'éducation, la médiation et le counselling pour aider les parents à conclure des ententes parentales sans recourir à une action en justice. Ce sont peut-être les multiples réformes de la procédure et les nouveaux services en matière de divorce instaurés par les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral au cours des dernières années qui offrent le plus de possibilités de poursuivre sur la voie d'une meilleure collaboration pour le règlement des litiges. Toutefois, il reste toujours valable de modifier la Loi sur le divorce pour mieux refléter et, par conséquent, approuver symboliquement cette façon de faire.
Pour ce qui est de la terminologie des litiges entre les parents, il se peut qu'en écartant la terminologie de la garde et du droit de visite, on facilite aussi la promotion d'un régime juridique moins antagoniste. L'expression « partage des responsabilités parentales »
est elle aussi controversée et conflictuelle. La présomption qui s'attache au partage de la prise de décisions vise à atténuer les conflits et à promouvoir la participation continue des deux parents à la vie de leurs enfants. Cependant, elle peut aussi amener par inadvertance une situation dans laquelle les parents se sentent obligés de recourir au tribunal pour renverser cette présomption. La terminologie du partage des responsabilités parentales, qui est la plus neutre, peut s'avérer la moins antagoniste dans les trois options. Il est peu probable que le recours à une terminologie nouvelle élimine à lui seul
les conflits. Cependant, cette terminologie nouvelle peut constituer un petit élément d'un ensemble plus général de mesures nouvelles visant à promouvoir une méthode moins antagoniste de règlement des litiges entre les parents.
De plus, il primordial de reconnaître qu'aucun élément de réforme du droit ne peut éliminer tous les conflits entre les parents en instance de divorce et de séparation. Le fait d'encourager le règlement des conflits par des moyens non antagonistes ne devrait pas empêcher les litiges entre les parents dans les familles qui vivent des situations très conflictuelles. De plus, tout régime parental aura toujours à satisfaire les besoins des parents en instance de séparation et de divorce qui ne peuvent régler leurs litiges par des moyens non antagonistes. Tous les régimes parentaux auront encore à compter sur l'intervention des tribunaux pour les litiges qui ne peuvent se régler autrement.
Si la réforme législative laisse entrevoir des possibilités d'améliorer le processus de règlement des litiges, elle semble moins prometteuse lorsqu'il s'agit de modifier l'attribution de la responsabilité parentale après le divorce. Selon les recherches récentes, il ne semble pas que la réforme législative ait une incidence importante sur la façon d'attribuer la responsabilité parentale après le divorce, qui continue à refléter dans une large mesure les modèles qui existaient avant le divorce. Comme nous l'avons indiqué précédemment, il faut vraiment se demander dans quelle mesure une réforme législative peut favoriser les rapports de collaboration entre les parents. Un régime législatif peut encourager les parents à envisager le partage de la responsabilité parentale, il peut être conçu de façon à supprimer les obstacles au partage de la responsabilité parentale, mais il n'est pas en mesure de l'imposer ou d'en exiger l'application(396). Un régime législatif peut aussi encourager les deux parents à maintenir des rapports entre eux, mais il ne peut les obliger à entretenir de bonnes relations s'ils ne le souhaitent pas.
La réforme législative peut affirmer que les responsabilités parentales des mères et des pères subsistent après le divorce. Les trois solutions proposées pourraient mentionner les responsabilités parentales et inclure une déclaration de principe affirmant le statut de parent tant pour le père que pour la mère après le divorce. Toutefois, comme nous l'avons indiqué précédemment, un régime fondé sur la garde et le droit de visite aurait plus de difficulté à y parvenir. Un régime de partage des responsabilités parentales pourrait reposer sur cette notion même, mais peut compromettre d'autres intérêts tout aussi importants. Un régime neutre de responsabilité parentale est mieux en mesure de confirmer le maintien du statut de parent tant pour le père que pour la mère sans pour autant sacrifier des objectifs comme la souplesse et la protection des enfants, et en faisant en sorte que le critère de l'intérêt supérieur de l'enfant reste la pierre angulaire de toutes les décisions concernant les enfants. Toutefois, tant le régime de la responsabilité parentale que le régime du partage des responsabilités parentales pourraient affirmer symboliquement l'importance pour les parents de continuer à participer à la vie de leurs enfants. La réforme législative pourrait offrir, du moins dans une certaine mesure, l'affirmation de leurs droits que les parents détenant un droit de visite souhaitent tellement.
Une telle affirmation pourrait être coûteuse. Dans certaines des administrations qui ont adopté un régime de partage des responsabilités parentales, les parents qui exerçaient auparavant un droit de visite ont exprimé clairement leurs frustrations parce qu'ils s'attendaient à retirer plus de la réforme que ce qu'elle pouvait offrir, ou même que ce qu'elle devait offrir. Une réforme législative peut non seulement ne pas éliminer les conflits, elle peut toujours aussi apporter le risque d'engendrer encore plus de conflits. Les attentes non réalistes à l'égard des réformes législatives ne peuvent qu'alimenter le mécontentement au lieu de l'atténuer.
Enfin, l'atteinte des objectifs éducatifs et incitatifs de la réforme, qui consistent à changer les attitudes au sujet de la responsabilité parentale à compter de la séparation et du divorce, dépendra de toute une gamme de facteurs sociaux qu'il est difficile de prédire et encore plus de mesurer. Comme nous l'avons indiqué précédemment, la mesure dans laquelle une réforme peut apporter les résultats souhaités dépendra autant, sinon plus, des attitudes des professionnels en matière de divorce, les avocats, les juges, les médiateurs, les conseillers et les éducateurs qui interviennent dans le processus de séparation. L'attitude des parents envers leurs enfants au moment de la séparation et du divorce dépendra en partie de ce que leur disent ces professionnels. Si ces derniers leur font valoir les avantages du règlement non antagoniste des litiges et du maintien de la participation des parents à la vie de leurs enfants (comme plusieurs le font déjà), les parents peuvent réagir en conséquence.
Cependant, la façon dont les parents envisagent la loi et leurs relations avec leurs enfants dépend d'une multitude d'autres facteurs, qui vont de leurs propres croyances au sujet de leur rôle de parent jusqu'à la façon dont les médias leur présentent le divorce. Une autre question beaucoup plus importante et malheureusement sans réponse subsiste : dans quelle mesure peut-on affirmer que la réforme législative se traduit par un changement dans les attitudes? Est-ce qu'elle reflète simplement des changements déjà intervenus? Un bon nombre des mesures de réforme examinées ci-dessus reposent sur des changements déjà survenus, les changements dans la façon dont les professionnels du divorce exercent leur métier (comme le recours à des méthodes non antagonistes), et les changements dans la façon dont les parents s'attendent à exercer leur rôle de parent après la séparation et le divorce (comme le maintien de leur participation à la vie des enfants). D'autres mesures de réforme visent à réaliser d'autres changements (comme l'exercice des responsabilités parentales axé sur la coopération). C'est sur cet aspect que la réforme législative risque le plus de faire des promesses qu'elle ne peut tenir et de susciter des attentes qui resteront sans réponse à cause de la constante réalité des pratiques parentales et du divorce.
396 Maccoby et Mnookin, note 77 supra.
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