Stratégie relative à la justice applicable aux autochtones, Évaluation sommative

2. Description de la stratégie relative à la justice applicable aux autochtones


2. Description de la stratégie relative à la justice applicable aux autochtones

La présente section du rapport décrit la SJA. Elle expose le contexte stratégique dans lequel œuvre la Stratégie et décrit la logique du programme, sa structure de gestion et les ressources financières qui y sont allouées.

2.1. Contexte

La SJA est l'un des éléments de la réaction du gouvernement fédéral au fait bien documenté qu'un nombre disproportionné d'Autochtones ont des démêlés avec la justice. Récemment, ce problème a été exposé par le Bureau de l'enquêteur correctionnel, qui a signalé que le taux d'incarcération des Autochtones est environ 10 fois plus élevé que le taux d'incarcération des non-Autochtones :

Les Autochtones représentent une grande partie de la population carcérale : ils comptent 18 % de la population carcérale sous responsabilité fédérale; par contre, ils ne forment que 3 % de la population canadienne générale. […] La meilleure estimation du taux d'incarcération global des Autochtones au Canada s'élève à 1 024 pour 100 000 adultes. En utilisant la même méthode, le taux d'incarcération chez les non-Autochtones s'élève à 117 pour 100 000 adultes[3].

Au cours des années précédentes, de nombreuses études ont documenté la relation problématique entre les Autochtones et le système de justice traditionnel. La Commission royale sur les Peuples autochtones a tiré une conclusion particulièrement troublante sur cette question :

Le système canadien de justice pénale n'a pas su répondre aux besoins des peuples autochtones du Canada -- Premières nations, Inuit et Métis habitant en réserve ou hors réserve, en milieu urbain ou en milieu rural --, peu importe le territoire où ils vivent ou le gouvernement dont ils relèvent. Ce lamentable échec découle surtout de ce qu'Autochtones et non-Autochtones affichent des conceptions extrêmement différentes à l'égard de questions fondamentales comme la nature de la justice et la façon de l'administrer[4].

La Cour suprême du Canada a également souligné les lourdes conséquences qu'a le fait de maintenir les délinquants autochtones dans un système qui ne parvient pas à les desservir et à les réadapter :

Il ne faut pas s'en surprendre, mais le recours excessif à l'emprisonnement dans le cas des autochtones n'est que la pointe de l'iceberg en ce qui concerne la marginalisation des autochtones au sein du système de justice pénale au Canada. Les autochtones sont surreprésentés dans virtuellement tous les aspects du système. Notre Cour a souligné récemment […] que les préjugés contre les autochtones sont largement répandus au Canada, et qu'« [i]l y a une preuve que ce racisme largement répandu s'est traduit par une discrimination systémique dans le système de justice pénale».

[…] Ces constatations exigent qu'on reconnaisse l'ampleur et la gravité du problème, et qu'on s'y attaque. Les chiffres sont criants et reflètent ce qu'on peut à bon droit qualifier de crise dans le système canadien de justice pénale[5].

Parmi les autres faits récents, mentionnons les modifications que le Parlement a apportées au Code criminel en ce qui concerne la déjudiciarisation et la détermination de la peine :

En somme, le financement accordé pour les programmes de justice communautaire ainsi que les changements apportés au Code criminel reflètent le désir d'avoir recours, lorsque cela est possible et raisonnable, à la déjudiciarisation pour éviter que les délinquants soient pris en charge par le système de justice traditionnel et d'envisager différentes sanctions autres que l'incarcération lorsque les délinquants – et particulièrement les délinquants autochtones – sont effectivement pris en charge par le système de justice traditionnel.

C'est dans ce contexte que le ministère de la Justice a financé des programmes de justice communautaire depuis les 16 dernières années, y compris pendant les cinq dernières années où il a financé la SJA actuelle, qui fait l'objet de la présente évaluation.

2.2. Logique du programme

La SJA appuie une gamme d'activités qui sont censées contribuer à la réalisation des objectifs précis du programme. La présente section décrit la logique de la SJA et est fondée sur le modèle que l'on retrouve à la Figure 1, à la page 8.

2.2.1.   Buts et objectifs du programme

La SJA vise à atteindre des objectifs qui ont trait à la fois à l'administration de la justice au sein des collectivités autochtones et à l'administration du système de justice traditionnel. Plus précisément, la SJA vise à atteindre trois objectifs :

2.2.2.   Activités et résultats du programme

La SJA comprend six composantes qui peuvent être regroupées en deux catégories, à savoir les activités communautaires, qui sont appuyées au moyen d'accords de contribution et les mesures de soutien, qui sont exécutées à l'interne par le ministère de la Justice.

Activités communautaires
Mesures de soutien

2.2.3.   Incidence attendue

On s'attend à ce que les activités énumérées dans la sous-section précédente contribuent à l'atteinte des résultats initiaux suivants :

On s'attend à ce que les activités de la SJA contribuent à l'atteinte de trois résultats intermédiaires :

Finalement, on s'attend à ce que les activités de la SJA contribuent à l'atteinte de trois résultats à long terme :

Figure 1, Modèle logique – Stratégie relative à la justice applicable aux Autochtones

2.3. Structure organisationnelle

Au cours des quatre premières années pendant lesquelles des fonds ont été alloués à la SJA (2002-2003 à 2005-2006), la Direction de la justice applicable aux Autochtones a géré toutes les composantes de la SJA. En juin 2006, le ministère de la Justice a réaligné la structure de gestion comme il suit :

Figure 2 - Structure de gestion de la SJA

2.4. Ressources

Lorsque le gouvernement fédéral a lancé la SJA en 1996, il a affecté 4,5 millions de dollars par année au programme, montant qui est passé à 8,6 millions de dollars par année à la fin de la première période pour laquelle des fonds ont été affectés (2000-2001). Bien qu'initialement il ait affecté 11,5 millions de dollars à la SJA pour la période actuelle, le gouvernement fédéral a appliqué les réaffectations et les rajustements budgétaires au programme de sorte que l'affectation actuelle varie entre 9,4 et 10,3 millions de dollars par années (voir les détails au tableau 1).

Tableau 1 : montants affectés à la SJA

Le ministère de la Justice et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien affectent tous deux des fonds pour SJA. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien verse 2 millions de dollars par année tandis que le ministère de la Justice verse le reste du montant.

Le ministère de la Justice affecte la plus grande partie des fonds destinés à la SJA au financement des programmes de justice communautaire. En 2005-2006, près de 70 pour cent du financement total accordé pour la SJA a servi à appuyer de tels programmes, les gouvernements provinciaux et territoriaux les supportant également au moyen d'un financement direct ou de contributions en nature.