Contexte

En 2007, après près de 25 ans de délibérations et de leadership autochtone, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (La Déclaration). La Déclaration est un document international exhaustif sur les droits des peuples autochtones du monde entier. Elle établit les normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones, notamment les droits relatifs à la gouvernance, à la santé, à la communauté, à la culture, à la langue, aux terres, aux territoires, aux ressources et à l’éducation.

En 2014, l’ensemble des 193 États membres de l’Organisation des Nations Unies (ONU) ont renouvelé leur engagement envers la Déclaration durant la Conférence mondiale sur les peuples autochtones. Dans le document final émanant de celle-ci, les États s’engagent à « prendre, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, des mesures appropriées au niveau national, y compris des mesures législatives, politiques et administratives, pour atteindre les objectifs définis dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et pour y sensibiliser tous les secteurs de la société, notamment les parlementaires, les magistrats et les membres de la fonction publique ».

La façon dont un pays choisit de mettre en œuvre la Déclaration et les droits qui y sont énoncés dépend de la situation unique de chaque pays. Le gouvernement du Canada a décidé de faire progresser la mise en œuvre de la Déclaration au niveau fédéral par voie législative. Le 3 décembre 2020, le ministre de la Justice et procureur général du Canada, avec l’appui du ministre des Relations Couronne-Autochtones, a déposé le projet de loi C-15, Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, au terme d’une série de séances de mobilisation virtuelles avec les dirigeants des Premières Nations, des Inuit et des Métis, les signataires de traités modernes, les organisations autochtones régionales, les organisations de femmes autochtones et les jeunes autochtones.

La Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (la LDNUDPA ou la Loi) est entrée en vigueur le 21 juin 2021. Élaborée en partenariat avec les peuples autochtones, la Loi prévoit un cadre pour le travail générationnel et transformationnel nécessaire pour mettre en œuvre les droits de la Déclaration à l’échelle fédérale.

Bien que le ministre de la Justice soit le principal responsable de la mise en œuvre de la Loi (en vertu d’un décret), les ministres des Relations Couronne-Autochtones et des Ressources naturelles contribuent également à cette tâche. De plus, la Loi contient des directives expresses à l’intention du gouvernement du Canada dans son ensemble et des autres ministres fédéraux ayant un rôle à jouer dans sa mise en œuvre. La mise en œuvre de la Loi est une priorité pour le gouvernement fédéral comme en témoignent les lettres de mandat publiées en 2021. Ainsi, la mise en œuvre de la Loi et la promotion des droits des Autochtones sont une responsabilité de l’ensemble du gouvernement en partenariat avec les peuples autochtones.

La Loi prévoit que le gouvernement du Canada doit remplir trois obligations interreliées, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones :

  1. Article 5 : Prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois du Canada soient compatibles avec la Déclaration. Cela comprend des mesures visant à garantir que les lois existantes et futures soient conformes aux droits et aux principes prévus dans la Déclaration et appuient la réalisation de son objet

Bien que l’article 5 vise plus particulièrement la législation et la réglementation fédérales, le préambule de la Loi met également en relief que le gouvernement du Canada s’est engagé à adopter des politiques efficaces et à prendre des mesures législatives et administratives qui le sont tout autant, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, pour remplir les objectifs de la Déclaration, lesquels peuvent aller bien au-delà des exigences particulières de l’article 5.

Contrairement à l’article 6, l’article 5 ne met pas en place un échéancier pour sa mise en œuvre. Celle-ci s’est faite dès la sanction royale et est en cours, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones.

  1. Article 6 : Élaborer un plan d’action d’ici juin 2023 pour atteindre les objectifs de la Déclaration. Le plan d’action doit, sans s’y limiter, comprendre des mesures visant à :
  1. Article 7 : Préparer des rapports annuels sur les progrès réalisés.

Ces rapports annuels assurent la transparence et la responsabilisation du travail de mise en œuvre de la Loi au fur et à mesure de son avancement.

En septembre 2021, le Secrétariat de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies (le Secrétariat) a été constitué au sein du portefeuille des droits et relations autochtones de Justice Canada pour diriger l’élaboration du plan d’action fédéral et des rapports annuels sur la LDNUDPA en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones et en coordination avec tous les ministères fédéraux concernés.

Le Secrétariat est composé d’agents de programmes et des politiques, d’analystes et de chercheurs, ainsi que du personnel de soutien administratif qui ont effectué des recherches de base et planifié, organisé, facilité et fait le suivi de nombreuses séances avec les peuples autochtones partout au pays.

Les recherches préliminaires ont consisté à examiner divers documents accessibles au public produits par les partenaires autochtones au cours des dernières années afin de mieux comprendre leurs positions et leurs priorités. Cette recherche a complété les séances de mobilisation, qui ont permis au Secrétariat de valider et d’approfondir sa connaissance des priorités autochtones et des mesures proposées à prendre en compte dans le plan d’action.

Processus de consultation et de collaboration de la LDNUDPA

En décembre 2021, le ministère de la Justice Canada a lancé un processus de consultation et de collaboration vaste en deux phases, inclusif et fondé sur les distinctions avec les peuples autochtones afin de faire progresser la mise en œuvre de la Loi. La première phase consistait à déterminer les priorités et les possibles mesures d’une ébauche de plan d’action, tandis que la deuxième phase consistera à valider les mesures proposées et à déterminer les lacunes et les mesures supplémentaires. Ce processus regroupe les partenaires suivants :

De décembre 2021 à décembre 2022, le ministère de la Justice Canada a organisé plus de 200 réunions bilatérales virtuelles de partage d’information et de mobilisation. En novembre 2022, le ministère de la Justice a organisé 20 séances d’information multilatérales virtuelles régionales afin de faire le point sur la mise en œuvre de la Loi et de s’assurer que les partenaires autochtones disposent des informations nécessaires pour formuler et communiquer les priorités à intégrer éventuellement dans l’ébauche du plan d’action. Outre les réunions et discussions bilatérales, les séances multilatérales ont rassemblé plus de 100 participants, issus de plus de 60 collectivités détentrices de droit, nations et communautés autochtones, représentant des dizaines de milliers d’Autochtones au Canada.

De plus, le Ralliement national des Métis (RNM) et l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) ont convenu de convoquer une table des priorités communes avec le ministère de la Justice Canada afin d’aborder les priorités autochtones transversales et de faciliter la coordination de la mise en œuvre de la Loi. L’Assemblée des Premières Nations (APN) a le statut d’observateur à ces réunions.

Bien que la plupart des séances se soient déroulées virtuellement en raison des problèmes liés à la COVID, certaines rencontres en personne ont également eu lieu, comme les assemblées générales annuelles des partenaires, et d’autres organisées par le Secrétariat, notamment une série de réunions au Manitoba avec le sous-ministre adjoint du portefeuille des droits et des relations autochtones et divers partenaires autochtones. Cette démarche a permis au ministère de la Justice Canada d’entrer en contact avec certains groupes avec lesquels il n’avait pas encore eu l’occasion de collaborer et de discuter.

Les travaux de consultation et de collaboration menés jusqu’à présent ont été fondés sur le respect et le soutien des droits interdépendants et intimement liés des peuples autochtones à l’autodétermination et à la participation à la prise de décision dans les domaines qui touchent à leurs droits. Les travaux conjoints visant à faire progresser la mise en œuvre de la Loi continueront à être entrepris d’une manière qui fait de l’élaboration conjointe des priorités avec les peuples autochtones un principe fondamental, tout en reconnaissant que nous continuons à établir une compréhension commune de la nature d’une élaboration conjointe significative dans le cadre de processus plus vastes de consultation et de collaboration dans divers contextes.

Consultations menées par les Autochtones

Pour encourager la participation des Autochtones au processus, un appel de propositions a été lancé pour financer les consultations menées par les Autochtones avec leurs citoyens, leurs membres et leurs communautés afin d’identifier les priorités et les mesures potentielles qui seront incluses dans le plan d’action. L’appel de propositions a été lancé le 10 décembre 2021 et s’est terminé le 15 avril 2022.

La décision de lancer un appel de propositions ouvert reflétait la nécessité de mobiliser de manière générale et inclusive les détenteurs de droits autochtones et les organisations qui les représentent dans tout le pays, et répondait aux commentaires des partenaires autochtones qui souhaitaient un processus plus approfondi et plus vaste que celui qui avait été entrepris pour l’élaboration du projet de loi C-15.

Pour soutenir les consultations menées par les Autochtones, le ministère de la Justice Canada a créé une trousse de mobilisation et d’autres documents de soutien comprenant des renseignements généraux sur la Loi, la Déclaration et d’autres ressources afin d’aider à orienter les discussions et les commentaires relatifs aux articles 5, 6 et 7 de la Loi.

Lorsque l’appel de propositions a été lancé, le ministère de la Justice Canada n’avait pas encore les pouvoirs administratifs pour gérer le financement. C’est pourquoi Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada (RCAANC) et Services aux Autochtones Canada (SAC) ont collaboré avec le ministère de la Justice pour veiller à ce qu’un large éventail de propositions soit financé et que les fonds soient versés aux demandeurs retenus. Deux cent dix (210) nations, organisations, gouvernements et groupes autochtones de partout au pays ont soumis des propositions totalisant près de 100 millions de dollars. Au total, 149 partenaires autochtones à travers le Canada ont été financés (annexe A), plus de 26,33 millions de dollars ayant été accordés dans le cadre de ce programme de contribution1. Bien que l’échéancier de l’appel de propositions ait été prolongé, et malgré les efforts acharnés déployés par le Secrétariat en vue de garantir un grand rayonnement, nous reconnaissons que certaines nations et communautés autochtones n’ont pas été en mesure de présenter une demande faute de moyens.

Le ministère de la Justice Canada regrette que des retards dans le financement soient survenus pour de nombreux partenaires en raison de divers facteurs, notamment de sa décision de prolonger l’échéance de l’appel de propositions. RCAANC et SAC ont apporté leur aide en veillant à ce que les accords de contribution soient signés le plus rapidement possible dans le nouveau délai imparti. Le ministère de la Justice Canada reconnaît que les retards dans le financement ont perturbé l’échéancier pour les consultations menées par les Autochtones ainsi que leur capacité à participer pleinement au processus de consultation et de collaboration de la LDNUDPA, en particulier chez les partenaires qui ne pouvaient pas gérer leur trésorerie.

Cela dit, grâce à ce soutien, de nombreuses consultations menées par des Autochtones, sous diverses formes, ont eu lieu dans tout le pays, ce qui a permis au ministère de la Justice Canada d’entendre les commentaires des divers partenaires sur les priorités et les mesures potentielles à intégrer au plan d’action.

Outil en ligne

En mars 2022, le ministère de la Justice Canada a mis un outil en ligne à la disposition des personnes, des communautés et des organisations qui se déclarent autochtones afin de leur permettre de communiquer plus facilement leurs points de vue et leurs perspectives sur les priorités à intégrer dans le plan d’action. L’outil en ligne était accessible jusqu’au 31 décembre 2022 sur le site Web Canada.ca/Declaration.

Les personnes interrogées ont été invitées à répondre à une série de questions relatives aux articles 5, 6 et 7 de la Loi, telles que « Selon vous ou votre organisation, est-ce que certaines lois fédérales devraient être examinées en priorité afin de confirmer leur compatibilité avec la Déclaration? Si oui, laquelle ou lesquelles? » et « Quelles suggestions avez-vous à formuler concernant le contrôle du plan d’action ainsi que son examen et sa modification au fil des ans? » Les personnes pouvaient choisir de répondre à toutes les questions, ou seulement à quelques-unes.

Au moment de la rédaction du présent document, une trentaine de personnes et de groupes qui se déclarent autochtones avaient transmis leurs commentaires par ce moyen. En mettant cet outil à leur disposition, le ministère de la Justice Canada souhaitait que tous les Autochtones puissent contribuer à l’élaboration du plan d’action, y compris ceux qui ne sont affiliés à aucune organisation ou qui estiment ne pas être représentés par un groupe.

Après la publication de l’ébauche du plan d’action, l’outil en ligne sera mis à jour pour faciliter un accès plus étendu et la participation des Autochtones à la deuxième phase et pour permettre aux personnes et aux groupes autochtones de formuler des commentaires sur l’ébauche du plan d’action.


Notes de fin de page

1 Les propositions ont été évaluées par un comité d’examen composé de représentants de la Justice et de RCAANC. Les soumissions ont été évaluées en fonction de leur représentation des détenteurs de droits en vertu de l’article 35, ainsi que de la capacité de gouvernance, de l’étendue de la population et de la portée géographique de la mobilisation de ces derniers. Le profil culturel et linguistique de l’organisation et la représentation des besoins et des priorités des groupes diversifiés ont également été un facteur clé. Le comité a également examiné la façon dont les propositions reflétaient les contributions et les idées particulières fournies par les organismes et les institutions de gouvernance autochtones de différents niveaux et de différentes tailles, et la façon dont la proposition contribuerait à établir des mesures concrètes qui seront intégrées dans le plan d’action. Sur la foi de ces critères, 58 propositions ont été rejetées, à savoir cinq provenant de la catégorie Métis, 35 des Premières Nations, une du milieu urbain et une de la Diversité, trois de la catégorie des autres autochtones et 13 de la catégorie Autre. Cette dernière catégorie englobe les organisations allochtones, les personnes et les firmes privées agissant comme consultante qui ont présenté des propositions pour leur propre compte. Aucune proposition de la catégorie inuit n’a été rejetée. Voir l’annexe D pour des renseignements supplémentaires sur le financement.