ALLÉGATIONS DE VIOLENCE ENVERS LES ENFANTS LORSQUE LES PARENTS SONT SÉPARÉS : DOCUMENT DE TRAVAIL

2001-FCY-4F

4.0 NATURE ET ÉTENDUE DES ALLÉGATIONS DE VIOLENCE ENVERS LES ENFANTS DANS DES CONFLITS PORTANT SUR LE DROIT DE VISITE ET LA GARDE DES ENFANTS

Lors des audiences publiques du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, on s'est fortement préoccupé du problème croissant et important que pose les allégations délibérément fausses.  Certains témoins ont fait valoir que les fausses allégations sont utilisées comme une arme stratégique par un grand nombre de plaideurs en droit de la famille et ont mis en garde sur le fait que cette tactique est devenue une pratique admise et même quelquefois encouragée par les foyers pour femmes battues, les travailleurs chargés de la protection de l'enfance et les avocats.  Ce chapitre étudie de plus près la question des fausses allégations portées dans le cas de violence lorsque les parents sont séparés.  Il comprend un résumé de l'analyse documentaire dans ce domaine, les conclusions pertinentes de l'Étude ontarienne d'incidence (EOI) des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants et aussi la jurisprudence canadienne.  Il y a lieu d'insister, comme on l'a souligné à la section 1, sur l'importance de distinguer entre les fausses allégations délibérées et les autres sortes d'allégations non fondées ou vagues.

Le contenu de ce chapitre se rapporte particulièrement à la question 2 de la section 1, soit quelles sont la nature et l'étendue des allégations portées dans le cas de violence envers les enfants dans le contexte de conflit de droit de visite et de la garde des enfants?

4.1  Revue des travaux de recherche actuels

Au milieu des années de 1970, les travailleurs dans le domaine de la protection de l'enfance et les professionnels de la santé mentale ont établi que la violence exercée envers les enfants, en particulier la violence de nature sexuelle, constituait un problème grave.  Le grand public et les professionnels ont de plus en plus pris conscience du problème à mesure que le gouvernement fédéral commanditait diverses initiatives pour s'attaquer au problème (Hornick & Paetsch, 1995).  Cependant, au milieu des années 1980, les journaux du Canada et des États-Unis ont commencé à publier des reportages affirmant que les mères accusaient faussement les pères de violence envers les enfants lors de conflits sur la garde des enfants (Bonokoski, 1986; Jones, 1986; Dullea, 1987; Zweig, 1987).  Dans leurs travaux faisant autorité, Gardner (1987), Green (1986) ainsi que Benedek et Schetky (1985) ont fait valoir que les fausses allégations de violence lorsque les parents sont séparés sont des problèmes graves et généralisés.  Les quelques travaux de recherche sur l'étendue de fausses allégations dans le cas de violence envers les enfants sont résumés au tableau 1, et ces travaux sont commentés plus loin.

Gardner (1987), psychiatre de l'enfant aux États-Unis, prétend que la grande majorité des enfants qui se disent victimes de violence sexuelle par un des parents après la séparation auraient subi un lavage de cerveau et auraient été programmés par les anciens conjoints rancuniers et irréconciliables, en général, les mères.  Il a créé l'expression « syndrome d'aliénation du père ou de la mère » pour décrire la situation dans laquelle un enfant montre de fortes « affinités » pour l'un des parents et de la désaffection envers l'autre, habituellement dans le contexte du divorce. Toutefois, dans une analyse des travaux de Gardner et du syndrome d'aliénation, Faller (1998: 112) soutient que « Gardner n'avance aucune donnée pour confirmer l'existence du syndrome et de ses caractéristiques proposées.  Dans les faits, les travaux de recherche et les écrits cliniques d'autres professionnels conduisent à la conclusion que certains des principes avancés sont erronés et que d'autres sont soutenus par une minorité seulement ».

Tableau 1 :  Résumé des conclusions sur l'étendue des fausses allégations de violence envers les enfants*

Auteurs Année Pays Échantillon Taux de fausses allégations Définition defausse allégation
Benedek et Schetky 1985 États-Unis 18 cas de garde d'enfant 55 % (10 cas) Délibérément ou non délibérément fausses; comprend sept cas où l'accusateur est reconnu avoir des troubles psychiques.
Green 1986 États-Unis 11 cas de violence sexuelle présumée dans des conflits de droit de visite et de garde d'enfant 36 % (4 cas) Renvoi à des allégations non délibérées ou non corroborées.
Jones et McGraw

 

 

1987 États-Unis 576 cas signalés de violence sexuelle envers les enfants 6 % « signalements fictifs » - cas où les professionnels n'ont pas considéré que la violence s'est produite (y compris les cas de parents avec des troubles psychiques).
Hlady et Gunter

 

 

1990 Canada

(Colombie-Britannique)

370 enfants renvoyés au service de protection de l'enfance; 41 également en cause dans des conflits de garde des enfants Taux non fourni Les auteurs concluent « bien que la question de fausses allégations de violence sexuelle est une préoccupation fréquente dans les cas de droit de visite/de garde, on n'en a pas tenu compte dans nos recherches ».
Thoennes et Tjaden

 

1990 États-Unis Dossiers du tribunal sur plus de 9 000 familles dans des conflits de droit de visite et de garde d'enfant; 169 sur des allégations de violence sexuelle Moins que 1 % du total; 33 % de 169 cas de violence non fondés, 17 % sans documentation Fausses allégations qui n'ont pas particulièrement été considérées - les taux renvoient aux cas où il est présumé qu'il n'y a pas eu de violence.
Anthony et Watkeys

 

1991 Royaume-Uni

 

350 cas signalés de violence sexuelle envers les enfants; 24 sur des conflits de garde des enfants 8,5 % du total Fausses et malveillantes.
Trocmé, McPhee, Tam et Hay 1994 Canada (Ontario) 2 447 enquêtes, dont 9 % portent sur des allégations concernant la garde des enfants 1,3 % des allégations par les mères et 21, 3 % d'allégations par les pères Les enquêteurs de la protection de l'enfance ont conclu que les allégations étaient délibérément fausses.
Faller et DeVoe 1995 États-Unis Échantillon clinique de 215 cas d'allégations de violence sexuelle dans des familles en instance de divorce 20,9 % d'allégations fausses ou peut-être fausses

4,7 %

Fausses interprétations par les adultes auteurs du signalement.

Dans l'évaluation clinique, on a conclu qu'elles étaient délibérément fausses.

Brown, Frederico, Hewitt et Sheehan 1998 Australie 200 allégations de violence envers les enfants dans des conflits de droit de visite et de garde des enfants 9 % Allégations ayant fait l'objet d'une enquête par les services de protection de l'enfance et jugées fausses par opposition à celles ayant fait l'objet d'une enquête mais n'ayant pas pu être corroborées.

*  Veuillez noter que les études figurant dans ce tableau ne sont pas nécessairement des études conçues pour mesurer l'étendue de fausses allégations.  Veuillez également noter que les études définissent différemment l'expression « fausses allégations », ce qui rend les comparaisons difficiles.

Les chercheurs américains Benedek et Schetky (1985) ont déclaré, d'après leur évaluation de 18 cas de garde d'enfant comportant des allégations de violence sexuelle, que les allégations étaient fausses dans 10 cas, soit un taux de fausses allégations de 55 p. 100.  Dans la totalité des 18 cas, les mères avaient porté les accusations, principalement contre les pères (n=16), dans un cas contre le beau-père et dans un autre contre le petit ami.  Les auteurs ont fait valoir que sur l'ensemble des mères faisant de fausses allégations, sept souffraient de troubles psychiques, notamment la paranoïa, l'hystérie et la schizophrénie.  Cette étude a fait l'objet de critiques, parce qu'on a eu recours à un échantillon faible et peut-être biaisé (Faller, 1998; Thoennes & Tjaden, 1990).

Un psychologue américain (Green 1986) prétend qu'il existe plus de fausses allégations de violence sexuelle dans des procès portant sur le droit de visite et la garde des enfants que dans d'autres situations.  Il appuie ses affirmations sur sa propre documentation de fausses allégations concernant 4 des 11 enfants signalés comme étant des victimes d'actes de violences sexuelles commises par celui des parents qui n'a pas eu la garde et dans des situations de conflits sur le droit de visite ou la garde des enfants.  Il formule l'hypothèse que de fausses dénonciations par les enfants se produisent dans les situations suivantes :

  1. l'enfant a fait l'objet d'un lavage de cerveau par l'un des parents rancuniers, habituellement la mère, qui allègue la violence pour que l'autre parent cesse de voir l'enfant;
  2. l'enfant est sous l'influence d'une mère en proie à des fantasmes, qui projette ses propres fantasmes sexuels inconscients en direction de son conjoint;
  3. les allégations de l'enfant se fondent sur ses propres fantasmes sexuels plutôt que sur la réalité;
  4. l'enfant accuse faussement son père par vengeance ou en représailles.

Les affirmations de Green sont contestées par Corwin et coll. (1987) qui soutiennent que Green a utilisé un échantillon biaisé, une base de données incomplète et des conclusions non vérifiées. Ces auteurs prétendent également que dans l'un des quatre cas, les « fausses allégations » étaient un mauvais diagnostic et qu'il s'agissait en réalité de véritables allégations de violence.

Il ne faut pas oublier que Benedek et Schetky ainsi que Green ont étudié des cas hautement contestés en attente de procès.  Des études plus récentes et approfondies (analysées ci-après) prenant en considération toutes les allégations d'actes de violence commis lorsque les parents sont séparés et portées sur tous les cas concernant des séparations de parents arrivent à un taux plus bas de fausses allégations délibérées et non fondées.  Il est probable que les études d'échantillons portant sur des litiges en matière de droit de la famille ont des taux plus élevés d'allégations fausses et non fondées que des études sur tous les cas de séparation de parents qui sont renvoyés aux enquêteurs de la protection de l'enfance : les cas où les travailleurs de la protection de l'enfance enquêtent sur l'allégation et la jugent fondée sont moins susceptibles de faire l'objet d'un procès en matière de droit de la famille.

4.1.1  Étendue du problème

Il n'existe pas suffisamment d'études sur l'étendue de fausses allégations de violence envers les enfants et le peu de renseignements dont nous disposons provient principalement d'autres pays. En outre, il est important de souligner que les études décrites ci-dessous définissent différemment l'expression « fausses allégations », rendant difficiles les comparaisons.  Dans l'étude la plus importante jusqu'à ce jour, Thoennes et Tjaden (1990) ont recueilli des données sur une période de six mois en provenance de huit tribunaux de différentes villes américaines.  Parmi les 9 000 familles ou plus qui se disputent sur le droit de visite et la garde des enfants, seulement 169 cas (1,9 p. 100) comportaient aussi une allégation de violence sexuelle.  Une évaluation plus approfondie de 129 cas (des 169 mentionnés ci-dessus) susceptibles d'évaluation par les services de protection de l'enfance et les travailleurs auprès des tribunaux[46] a abouti à la classification suivante des cas :

Bien que les auteurs n'aient pas fourni une analyse des 33 p. 100 des cas où il n'y a pas de raisons de croire que la violence a eu lieu, ils ont constaté que « nous n'avons établi aucun fait pour soutenir l'hypothèse selon laquelle ces cas étaient caractéristiques de la mère accusant faussement le père pour obtenir ou conserver la garde des enfants » (Thoennes et Tjaden, 1990: 161).  En effet, Pearson (1993: 279) conclut dans son étude que l'affirmation selon laquelle « il y a un plus grand nombre de fausses allégations de violence sexuelle dans les cas de divorce en vue d'obtenir plus facilement la garde des enfants » est un mythe.

Il est digne de remarquer que Thoennes et Tjaden (1990) ont aussi constaté que le taux de corroboration était le même (50 p. 100) pour tous les cas d'allégations de violence sexuelle envers les enfants, liés ou non avec un conflit relatif au droit de visite ou à la garde des enfants. Cette observation est contraire aux résultats de l'étude par Haskett et coll. (1995) qui donnent à entendre qu'il est moins probable qu'une allégation est corroborée si la garde des enfants est contestée.  Haskett et ses collègues ont analysé 175 cas de violence sexuelle présumée dans sept comtés de Floride et de la Caroline du Nord, dont huit p. 100 (n=14) a fait l'objet de conflit relatif à la garde des enfants.  Quoique les auteurs aient établi que soixante-sept p. cent de l'échantillon total des allégations étaient corroborées, seulement quatorze p. cent des cas relatifs à des conflits de garde d'enfant étaient corroborés.  Les auteurs ont reconnu la possibilité de biais dans leur échantillon, toutefois, ils ont réaffirmé que malgré les lignes directrices publiées recommandant la conduite d'une enquête plus approfondie pour des allégations liées à des conflits relatifs à la garde des enfants, les travailleurs des services de protection de l'enfance n'étaient pas plus susceptibles d'interroger les agresseurs présumés dans des situations de conflits de garde des enfants que dans d'autres cas.

Faller et DeVoe (1995) ont étudié un échantillon clinique de 215 cas d'allégations de violence sexuelle dans des familles aussi dans des situations de divorce.  Les cas étudiés sur une période de 15 ans proviennent d'une clinique rattachée à une université du Midwest américain.  La clinique conduit des évaluations multidisciplinaires pour dépister si des actes de violence sexuelle ont été commis et pour faire des recommandations relatives aux interventions.  Les évaluations comprenaient l'examen des dossiers des cas, l'entrevue des victimes présumées, l'entrevue des deux parents et souvent d'autres adultes, l'administration de tests psychologiques au père et à la mère et la conduite, au besoin, d'examens médicaux des enfants.

Faller et DeVoe ont conclu que dans 31 des cas (14,4 p. 100), les allégations étaient non fondées, et dans 14 autres cas (6,5 p. 100), elles pourraient être non fondées.  Toutefois, dans 34 des 45 cas, les allégations résultaient d'interprétations erronées par les adultes et dans un cas, la classification était incertaine.  Seulement 10 du nombre total de 215 allégations (4,7 p. 100) étaient des allégations délibérément fausses et en réalité ces 10 allégations ne concernaient que seulement six pères ou mères puisque quatre des allégations provenaient du même père.

Dans une étude de 576 cas signalés de violence sexuelle envers les enfants (dans toutes les situations) répertoriés dans une année, à Denver, Jones et McGraw (1987) ont constaté que six p. cent des cas était des signalements « fictifs ».  Cinq p. cent de ces signalements étaient faits par un adulte et un p cent par des enfants (n=5 cas).  Les auteurs définissent « fictif » les cas dans lesquels les professionnels n'ont pas jugé que la violence ait eu lieu. Concernant les enfants faisant de fausses allégations, les auteurs déclarent que des cinq, quatre :

…étaient des adolescentes présentant des troubles qui, dans le passé, avaient été sexuellement agressées par un adulte, mais leur présente allégation était fictive… les jeunes filles avaient des troubles de stress post-traumatique comprenant des troubles du sommeil, des symptômes du souvenir et des troubles affectifs (Jones et McGraw 1987: 30).

Quoiqu'il n'existe pas d'analyse comparable sur les signalements faits par les adultes, les auteurs ajoutent que deux adultes étaient des parents souffrant de troubles psychiatriques importants et que les autres cas étaient dans des situations de conflit relatif au droit de visite et à la garde d'enfant.  D'après leur étude, Jones et McGraw (1987: 38) concluent que « les allégations fictives sont rares et que la majorité des soupçons d'acte de violence sexuelle portés à l'attention des professionnels se sont révélés être fondés. »

Dans une étude de 350 cas ayant fait l'objet d'une enquête approfondie et portant sur des signalements de violence sexuelle au Royaume-Uni, on a découvert que 7,7 p. 100 des cas (n=24) concernait aussi des conflits relatifs à la garde d'enfant (Anthony & Watkeys, 1991).  En outre, les enquêteurs ont estimé que 8,5 p. 100 du nombre total des signalements était de faux signalements faits par 6 p. 100 d'adultes et 2,5 p. 100 d'enfants.

Une étude des actes de violence envers les enfants dans des conflits entre parents relatifs au droit de visite et à la garde des enfants en Australie a recueilli des données sur 200 causes provenant du greffe d'un tribunal de Canberra et d'un tribunal de Melbourne (Brown et coll., 1998a).  Les causes étaient en instance dans la période de janvier 1994 à juin 1995 et ont été suivies jusqu'au 1er  juillet 1996 ou avant si elles prenaient fin avant cette date.  Pour étudier la perception selon laquelle les allégations de violence envers les enfants lors d'un procès devant le tribunal de la famille font partie du conflit familial provoqué par le divorce ou la séparation, les chercheurs ont entrepris une étude secondaire de 30 cas.  Ils ont obtenu un taux de fausses allégations de 9 p. 100, identique à celui établi pour toutes les catégories de cas signalés au service public de protection de l'enfance.  Les chercheurs définissent les « fausses allégations » comme des allégations qui ont fait l'objet d'une enquête par les services de protection à l'enfance et qui ont été jugées fausses par opposition aux allégations qui ont fait l'objet d'une enquête mais n'ont pas été corroborées (Brown et coll., 1998b).  Selon les auteurs :

…on a constaté que les allégations de violence envers les enfants faites devant un tribunal de la famille n'étaient pas plus souvent fausses que celles faites dans d'autres situations; donc, on ne peut pas les considérer comme des armes fabriquées spécialement pour la guerre des sexes qui suit souvent la rupture de la vie commune…

La documentation canadienne est rare.  Une étude par Hlady et Gunter (1990) visait à déterminer la fréquence des conflits relatifs au droit de visite et à la garde des enfants parmi les patients du service de protection de l'enfance au British Columbia's Children's Hospital.  Des 370 enfants examinés, 41 (11 p. 100) étaient aussi l'objet de conflits relatifs au droit de visite et à la garde d'enfant.  Sept de ces cas concernaient des allégations de violence physique, dont cinq avait des résultats positifs corroborants (blessures des tissus mous, y compris des contusions, des égratignures et des brûlures anciennes).  Des 110 cas de violence physique présumée où il n'y avait pas la question du droit de visite et de la garde des enfants, seulement 48 (43,6 p. 100) avait des signes physiques visibles.

Dans le groupe des conflits relatifs au droit de visite et à la garde des enfants, 34 cas (sur un total de 41) concernaient des allégations de cas de violence sexuelle.  Dans six de ces cas (17,6 p. 100), il y avait des signes physiques attestant de violence sexuelle.  Cela est comparable aux 219 enfants visités pour des cas de violence sexuelle présumée ne renfermant pas de questions relatives au droit de visite et à la garde des enfants, où on a trouvé dans 15 p. 100 des cas (33 enfants) des preuves tangibles.  En dépit du problème courant de fausses allégations de violence sexuelle dans les cas relatifs au droit de visite et à la garde des enfants, Hlady et Gunter (1990) reconnaissent que cette question n'apparaît pas dans leur recherche.  Ils concluent :

Cette étude souligne l'importance d'effectuer une évaluation extrêmement approfondie lorsqu'une allégation est faite.  Elle fait aussi ressortir la nécessité de recherches valables pour guider tous les professionnels en cause qui traitent du dilemme de vraies ou fausses allégations, avec ou sans la question de la garde des enfants (Hlady et Gunter, 1990: 593).

4.1.2 Qui fait les allégations et qui est accusé?

Thoennes et Tjaden (1990) ont établi que la mère était l'accusatrice dans 67 p. 100 (n=110) des cas, le père était l'accusateur dans 22 p. 100 (n=36) des cas et dans 11 p. 100 (n=19) des cas, une tierce personne telle qu'un des grands-parents était l'accusateur.  Les mères accusaient le père (48 p. 100), le beau-père de l'enfant (6 p. 100) ou une tierce personne (13 p. 100).  Les pères accusaient la mère (6 p. 100), le nouveau partenaire de la mère (10 p. 100) ou une tierce personne (6 p. 100).

Dans leur étude (n=370), Hlady et Gunter (1990) ont déterminé que les cas portés à l'attention des services de protection à l'enfance étaient présentés par : le médecin de famille (31 p. 100), la mère (28 p. 100), le Ministry of Social Services and Housing (23 p. 100), les services de police (10 p. 100) et le père (8 p. 100).  Dans presque la moitié des cas (46 p. 100), le père était l'accusé; dans 51 p. 100 des cas, l'agresseur présumé n'était pas identifié et dans trois p. cent des cas, l'agresseur présumé était une « autre personne ».

4.1.3  Pourquoi des allégations sont portées lorsque les parents sont séparés

Bien que Thoennes et Tjaden (1990) aient déterminé que le taux d'allégations de violence sexuelle était faible dans les familles qui se disputent au sujet du droit de visite et de la garde des enfants (moins de 2 p. cent), ils ont établi que le taux d'actes de violence sexuelle signalés dans les familles qui se disputent sur le droit de visite et la garde des enfants était six fois plus grand que le taux des actes de violence sexuelle signalés dans la population générale.  Les auteurs fournissent plusieurs motifs pour expliquer que la violence sexuelle envers les enfants se produit plus souvent dans les situations de rupture de mariage que dans une famille unie.  En premier lieu, la violence sexuelle envers les enfants peut créer un climat de tension nerveuse qui conduit à la rupture du mariage ou c'est la découverte de la violence qui est en réalité la cause de la rupture du mariage.  En deuxième lieu, la séparation peut susciter des occasions de violence qui n'existent pas dans les familles unies.  Un psychologue cité dans Thoennes et Tjaden (p. 160) fait la remarque suivante :

Il est facile de croire que certains actes de violence puissent être commis dès le divorce prononcé.  Si on réunit pendant une fin de semaine entière des parents qui sont enclins à la violence et qui se sentent seuls et dans le besoin, et si vous les mettez en présence d'un enfant qui se sent aussi seul et effrayé, on a créé les conditions propices à un acte de violence.

En troisième lieu, l'enfant est plus susceptible de divulguer les actes de violence commis par un des parents après la séparation, car il est plus difficile pour l'agresseur de l'empêcher de parler et l'autre conjoint est plus disposé à croire l'enfant (Thoennes & Tjaden, 1990; Fahn, 1991; Fassel, 1988).  En outre, la perspective de laisser un enfant seul avec le père ou la mère susceptible de le maltraiter lors des visites peut pousser l'enfant à parler (Haralambie, 1999).

Plusieurs auteurs avancent des raisons pour lesquelles des allégations non fondées sont portées après que les parents sont séparés.  Selon Green (1991), les comportements suivants peuvent être les causes d'une allégation non fondée :

Penfold (1997: 16) affirme que de nombreuses conditions peuvent conduire à des allégations non fondées de violence sexuelle ou peuvent les influencer, y compris :

… le manque de maturité d'un jeune enfant dans ses relations sociales et sa capacité de communiquer; les lacunes des parents au sujet de la sexualité normale; les fausses impressions, p. ex. des situations limites telles que dormir ou se baigner avec l'enfant; confusion au sujet de l'angoisse de séparation observée chez les jeunes enfants; l'hyperanxiété d'un enfant avec l'un des parents angoissés; la présence d'autres sortes de violence familiale; la violence attribuée à la mauvaise personne; un enfant qui ment, p. ex., pour obtenir un autre placement; la psychopathologie de l'enfant et des parents; l'entraînement par le père ou la mère; l'influence des médias sur les parents concernant la violence sexuelle; l'hostilité et la méfiance des parents à l'égard de l'un et de l'autre; l'enfant exposé à la pornographie; l'enfant présent à des scènes de sexualité animale ou par des adultes; jeux sexuels avec ses amis; techniques d'entrevue insidieuses et coercitives; trop d'entrevues; faible documentation et témoignage « contaminé ».

Comme Penfold fait remarquer, un père ou une mère avec des sentiments d'hostilité ou de méfiance peut à contrecœur commencer à faire une entrevue suggestive avec un jeune enfant au sujet de violence possible fondée peut-être sur des symptômes physiques ambiguës.  Il est possible qu'au cours de l'interrogation, l'enfant doive évaluer si l'attouchement avait une intention « sexuelle », quelque chose qu'un jeune enfant puisse être incapable de faire.  Ce sont des circonstances dans lesquelles une erreur « de bonne foi » peut facilement être faite.

4.2   L'Étude ontarienne d'incidence des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants et l'Étude canadienne d'incidence des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants

L'Étude ontarienne d'incidence des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants (OIS) et l'Étude canadienne de l'incidence des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants (CIS) constituent actuellement les données statistiques canadiennes les plus complètes sur les enquêtes portant sur le mauvais traitement des enfants conduites par les organismes de protection de l'enfance.  L'OIS documente les enquêtes sur les mauvais traitements qui ont été faites en Ontario en 1993 (Trocmé, et coll., 1994), et le CIS documente les renseignements recueillis sur les enquêtes menées dans tout le Canada en 1998 (Trocmé, et coll., 1997).  Le premier ensemble de conclusions du CIS devrait être diffusé au cours de l'année 2001.  La partie suivante du document analyse les conclusions de l'OIS s'appliquant aux situations concernant les séparations des parents et traite des données pertinentes que le CIS transmettra.

4.2.1  Allégations dans l'Étude ontarienne d'incidence (OIS)

L'OIS 1993 a été la première étude canadienne à analyser la fréquence et les caractéristiques des mauvais traitements signalés envers les enfants (y compris des actes présumés de violence physique, sexuelle ou autre).  L'étude est faite à partir d'un formulaire de sondage que les travailleurs chargés de protection de l'enfance ont rempli d'après un échantillon représentatif de 2 447 enfants ayant fait l'objet d'une enquête par 15 Sociétés d'aides à l'enfance (SAE) à travers la province.  Les travailleurs chargés de l'accueil des SAE ont rempli le formulaire de deux pages de la collecte de renseignements suite à leur première enquête.  Ce formulaire comprenait des questions sur la situation du cas, les données démographiques sur la famille et l'enfant, une courte liste de vérification des risques, les sources et les raisons pour le renvoi et le résultat de l'enquête (sortes, gravité et durée du mauvais traitement, agresseurs, placement et recours au tribunal).

Sur un échantillon de l'OIS de 2 447 enfants ayant fait l'objet d'une enquête, il est possible d'évaluer le nombre total de cas en Ontario ouvert par les SAE suite à des allégations de mauvais traitement d'enfants.  En conséquence, nous pouvons évaluer que des 53 000 cas familiaux ouverts par les services des SAE en 1993, 36 799 ont été ouverts suite à des allégations de mauvais traitement d'enfant, concernant 46 683 enfants ayant fait l'objet d'une allégation.  Ceci donne une moyenne de 1,3 enfant pour chaque famille ayant fait l'objet d'une enquête.

Près de la moitié des enquêtes (46 p. 100) concernait des enfants provenant de familles où les parents étaient séparés ou divorcés.  Malheureusement, l'OIS n'a pas recueilli de renseignement pour déterminer si les familles interrogées étaient mêlées dans des conflits sur le droit de visite et la garde des enfants ou s'il existait des liens ou des engagements avec un des parents qui n'avait pas la garde.  Toutefois, il est possible d'utiliser les renseignements au sujet de l'origine des allégations et des agresseurs présumés pour analyser les situations où les parents séparés font des allégations l'un contre l'autre.  Pour les fins de cette analyse, nous faisons allusion à ces cas comme des « allégations autour de la garde des enfants ».

Les évaluations « d'allégation autour de la garde des enfants » proviennent de la combinaison de deux questions de l'OIS : Question 5.  Source(s) de l'allégation ou du renvoi et Question 13. Personne(s) présumée(s) ou responsable(s) pour le mauvais traitement.  Ces deux questions produisent théoriquement quatre catégories de « cas d'allégations autour de la garde des enfants » :

  1. Allégations faites par la mère ayant la garde ou par ses enfants contre le père n'ayant pas la garde.
  2. Allégations faites par le père n'ayant pas la garde ou par ses enfants contre la mère.
  3. Allégations faites par la mère n'ayant pas la garde ou par ses enfants contre le père.
  4. Allégations faites par le père ayant la garde ou par ses enfants contre la mère n'ayant pas la garde.

On n'a identifié aucun cas qui répondait aux critères 3 ou 4 dans l'échantillon de l'OIS.  Cela ne signifie pas que de tels cas n'existent pas, mais ils sont relativement rares (moins de 2 p. 100 des enquêtes) et ne figuraient pas dans l'échantillon de l'OIS.  En conséquence, on peut seulement utiliser les données sur les « allégations autour de la garde des enfants » concernant les pères sans la garde (catégorie 1) et des mères ayant la garde (catégorie 2).

Il est important de remarquer que ces allégations autour de la garde des enfants surestiment la proportion des cas qui concernent réellement les conflits sur le droit de visite et la garde des enfants.  Il n'est pas possible de déterminer combien de ces allégations autour de la garde des enfants de mauvais traitement concernent réellement les situations où il existe un conflit continuel sur le droit de visite et la garde des enfants, par rapport à une situation où les parents sont séparés ou ont divorcé, mais il n'existe pas de conflit sur le droit de visite et la garde des enfants.  Étant donné le peu de données canadiennes, ces évaluations peuvent toutefois fournir une limite extérieure pour aider à délimiter l'étendue du problème.

Le tableau 2 donne une répartition par genres de mauvais traitement et le niveau de corroboration des cas concernant des « allégations autour de la garde des enfants ».  Bien que près de la moitié des enquêtes de mauvais traitement en Ontario concernent des familles dans des situations de séparation ou de divorce, moins de 10 p. 100 des enquêtes concernent des « allégations autour de la garde des enfants ».  La proportion de cas concernant un conflit sur le droit de visite et la garde des enfants représentera une proportion encore plus petite d'enquêtes de mauvais traitement.  Ainsi, dans des situations où les parents sont séparés, il arrive plus souvent que l'allégation de violence soit faite contre le père ou la mère par quelqu'un qui n'est pas un membre de la famille (p. ex., un professeur, un voisin) que par l'un des parents.

Lorsque les parents sont séparés, les pères n'ayant pas la garde sont plus susceptibles d'être l'objet d'une enquête suite à des allégations de violence sexuelle par la mère (13 p. 100 du total des enquêtes sur des cas de violence sexuelle).  Les mères ayant la garde sont plus susceptibles de faire l'objet d'une enquête suite à des allégations de violence physique ou de négligence faites par le père.  Les allégations de négligence sont dignes d'attention, considérant que dans le contexte de conflits sur la garde des enfants, les médias se sont plus occupés d'allégations de violence que de négligence.  Il semble que les pères n'ayant pas la garde sont probablement autant concernés par la négligence que par la violence.

Tableau 2 :  Caractéristiques des enquêtes sur des cas de mauvais traitements infligés à un enfant (négligence et violence) et concernant des allégations relatives à la garde des enfants en Ontario en 1993 (n=2 447)

Allégations par des mères ayant la garde contre des pères qui

ne l'ont pas

(%)

Allégations par des pères n'ayant pas la garde contre des mères

qui l'ont

(%)

Toutes les autres allégations

(%)

Total des enfants ayant fait l'objet d'une enquête (ligne des pourcentages) 6 3 91
Principaux genres de mauvais traitements (ligne des pourcentages) Violence sexuelle 13 87
Violence physique 7 3 90
Négligence 3 5 92
Autre 3 5 92
Corroboration (colonne des pourcentages) Corroborées 23 10 28
Présumées 27 18 32
Non fondées 50 72 40
Allégation délibérément fausse ou malveillante 1,3 21,3 2,2
Enquête de la police 30 10 23
Accusation au pénal 7,6 6,4
Corroboration

La moitié (50 p. 100) des enquêtes sur des « allégations autour de la garde des enfants » contre des pères n'ayant pas la garde et les deux-tiers (72 p. 100) des enquêtes concernant les mères ayant la garde ont été classées comme non fondées par les SAE, par rapport au taux de 40 p. 100 des allégations non fondées pour les autres enquêtes.  En examinant chaque genre de mauvais traitement, on a constaté que le taux des allégations relatives à la garde des enfants concernant des pères n'ayant pas la garde n'est pas vraiment différent du taux global d'enquêtes non fondées dans les cas de violence (48 p. 100 des cas de violence de l'OIS ont été non fondés).

Il ne faut pas confondre les allégations non fondées avec les fausses allégations délibérées.  Le taux des allégations non fondées est comparable aux taux de la plupart des autres administrations de l'Amérique du Nord.  Le grand nombre d'allégations non fondées dans les cas de protection d'enfant traduit le fait que les professionnels et le public ont l'obligation de signaler les mauvais traitements soupçonnés, les mauvais traitements non confirmés, aussi bien que les difficultés de corroborer les cas de violence.

D'une façon significative, les enquêteurs ont considéré seulement 1,3 p. 100 des allégations contre les pères n'ayant pas la garde comme étant délibérément fausses par rapport à 2,2 p. 100 pour les enquêtes d'allégations de négligence et de violence dans des situations où la séparation des parents n'était pas un facteur.  Malgré des préoccupations au sujet d'allégations délibérément fausses dans des situations concernant des conflits sur la garde des enfants, les travailleurs chargés des enquêtes ont rarement considéré les allégations par les mères ou les enfants contre un père n'ayant pas la garde d'avoir été délibérément fausses.  Par contre, plus d'un cinquième (21,3 p. 100) des allégations faites par des pères n'ayant pas la garde contre des mères ayant la garde ont été jugées comme étant délibérément fausses.

Accusations au pénal pour violence

Des enquêtes sur des allégations relatives à la garde des enfants sont aussi susceptibles de donner lieu à des enquêtes de la police que dans d'autres enquêtes.[47]  Les taux d'accusations pour des infractions liées à la violence contre des pères n'ayant pas la garde (7,6 p. 100) étaient analogues au taux global d'accusations(6,4 p. 100), tandis qu'aucune allégation relative à la garde des enfants concernant des mères présumées avoir commis une agression n'a conduit à des accusations.  Toutefois, l'OIS a sous-estimé les taux d'accusations puisqu'elle a suivi seulement les premiers deux ou trois mois de la durée des enquêtes, et les décisions de porter des accusations peuvent prendre plus longtemps.

4.2.2  Enquêtes sur les mauvais traitements dans les cas concernant des conflits sur la garde des enfants dans le cadre de l'Étude canadienne de l'incidence

En utilisant une version élargie du concept de l'OIS, l'Étude canadienne de l'incidence des cas signalés de violence et de négligence à l'égard des enfants (CIS) de 1998 a été financée par la Division de la violence envers les enfants à Santé Canada en vue de recueillir des renseignements concernant les enquêtes sur les mauvais traitements envers les enfants dans tout le Canada.  Outre les sondages successifs financés par les provinces, le CIS a recueilli les données provenant de plus de 100 organismes de protection de l'enfance, obtenant ainsi un échantillon constitué d'environ 10 000 enfants ayant fait l'objet d'une enquête.  Comme dans le cas de l'OIS, les travailleurs de la protection de l'enfance chargés de l'enquête ont rempli à la fin de leur enquête les formulaires de la CIS.  D'autres éléments ont été rajoutés au formulaire de l'OIS, y compris un plus grand nombre de questions sur les facteurs déterminants en matière de santé, les traumatismes chez l'enfant et le fonctionnement des enfants.  On a terminé en 1999 la collecte des données sur les cas signalés entre le 1er octobre 1998 et le 31 décembre 1998 et on prévoit que le rapport final de l'étude paraîtra au cours de l'année 2001.

La CIS permettra de brosser un meilleur tableau des allégations de cas de violence lorsque les parents sont séparés.  À la question 7(b), on demande s'il existe « actuellement un conflit sur la garde des enfants ».  La CIS comprend aussi des questions au sujet de la corroboration, d'allégations délibérément fausses et de la participation de la police.  À l'étape de l'analyse, on pourra déterminer dans quelle proportion les enquêtes sur les cas de violence envers les enfants au Canada touchent à des questions portant sur la garde des enfants et si ces cas conduisent à des résultats différents ou renferment un nombre exceptionnellement élevé de fausses allégations.

4.2.3  Limites des bases de données de l'OIS et de la CIS

L'OIS et la CIS recueillent les renseignements obtenus par les travailleurs chargés de la protection de l'enfance à la conclusion de leur première enquête, habituellement, dans les deux premiers mois qui suivent la réception de la première plainte.  Les renseignements sur les allégations délibérément fausses sont donc limités par les modalités de l'enquête.  Premièrement, il n'a pas de corroboration indépendante du jugement du travailleur chargé de l'enquête selon lequel l'allégation était délibérément fausse.  Cependant, 73 p. 100 des travailleurs qui ont participé à l'OIS détenaient des diplômes universitaires (BSW ou MSW), 79 p. 100 avaient plus de trois années d'expérience en protection de l'enfance, et 36 p. 100 plus de six années d'expérience.  De plus, la plupart des cas de violence sexuelle font l'objet d'une enquête conjointement avec les services de police.

Deuxièmement, dans quelques cas, la validité des renseignements obtenus à la première enquête peut être mise en cause si on obtient de nouveaux renseignements.  Cette situation pourrait être particulièrement grave si, dans le cas d'une poursuite au pénal, de nouveaux éléments de preuve ressortaient plusieurs mois, sinon plusieurs années, après l'enquête sur la protection de l'enfant. De même, les enquêtes portant sur le droit de visite et la garde des enfants peuvent s'étendre sur plus que deux mois.

Troisièmement, l'OIS et la CIS se limitent aux cas ayant fait l'objet d'une enquête par les organismes de protection de l'enfance et ne s'occupent pas des cas ayant seulement fait l'objet d'une enquête par la police.  Tandis que les cas de violence concernant les membres de la famille font habituellement l'objet d'enquête par les organismes de protection de l'enfance, dans plusieurs provinces ou territoires, les cas d'agresseurs présumés n'ayant pas la garde des enfants peuvent seulement faire l'objet d'une enquête de la police.  Il n'est pas possible à ce stade d'évaluer le taux des enquêtes faites uniquement par la police (Trocmé & Brison, 1998).

Finalement, bien que la CIS désigne nommément les familles qui sont en train de se disputer au sujet de la garde des enfants, le formulaire de l'étude ne donne pas de détails sur ce conflit.  En conséquence, il n'est pas possible de déterminer si l'allégation de violence a accéléré la séparation qui serait à l'origine du conflit sur la garde des enfants ou si l'allégation a été portée après la séparation.  Toutefois, la CIS documente le jugement du travailleur chargé de l'enquête au sujet de la malveillance possible concernant un renvoi.  Également, il est possible que certains des travailleurs chargés de l'enquête ne soient pas au courant de l'existence d'un conflit sur la garde des enfants, ce qui peut mener à une sous évaluation possible du taux de conflits sur la garde des enfants lors d'enquêtes sur la violence.

4.3  Étude de la jurisprudence sur le droit de la famille au Canada

Dans le cadre de ce projet, une étude de la jurisprudence canadienne en matière de droit de la famille de 1990 à 1998 a été réalisée pour déterminer comment les tribunaux ont traité les causes portant sur des allégations de violence envers les enfants.[48]  Cette étude traite seulement des affaires concernant le droit de la famille; elle n'a pas porté sur celles concernant la protection de l'enfance et le droit pénal.  Les bases de données de Quicklaw sont tributaires des décisions écrites des juges qu'elles reçoivent et de nombreuses décisions rendues au Canada ne se trouvent donc pas dans les bases de données juridiques.  La plupart des décisions judiciaires sur le droit de la famille ne sont pas motivées par écrit et n'apparaissent pas dans les bases de données juridiques, ce qui veut dire que certains genres de décisions sont sous-représentés dans les bases de données juridiques.  En dépit de cela, les bases de données de Quicklaw constituent la collection la plus complète de jugements écrits qu'on puisse trouver.  Cette étude donne à tout le moins une idée de ce qui se passe dans les nombreuses affaires très litigieuses portées devant les tribunaux de la famille au Canada.

Il se peut que la jurisprudence étudiée ne soit pas représentative de toutes les causes portant sur des allégations de violence lorsque les parents sont séparés.  Par exemple, dans des cas où la preuve tend à établir qu'il y a eu violence, il est peu probable que l'agresseur conteste l'allégation de violence dans la procédure en matière de droit de la famille et il est possible que la décision ne soit jamais publiée.

Durant les neuf ans qui ont fait l'objet de cette étude, on a recensé 196 causes qui portent sur des allégations de violence sexuelle et physique lorsque les parents sont séparés.  Dans 46 de ces causes, le juge a déclaré clairement, compte tenu de la prépondérance des probabilités (la norme civile), qu'un acte de violence avait été commis (23 p. 100).  Dans 89 causes, (45 p. 100), le juge a conclu que l'allégation n'était pas fondée, tandis que dans 61 des cas (31 p. 100), il existait des soupçons d'acte de violence, mais il n'y avait pas de décisions définitives que l'acte de violence avait été commis.  Dans 45 des causes (30 concernant des allégations de violence sexuelle), le juge a estimé que la partie accusatrice a délibérément fait une fausse allégation, c'est-à-dire que le juge était convaincu qu'il y a eu une fabrication délibérée dans 30 p. 100 des décisions judiciaires où la preuve de la violence n'a pas été établie (45/150).  Autrement dit, sur la période des neuf années étudiées, il y avait une moyenne de cinq affaires par an publiées au Canada où le juge était convaincu et a déclaré que la partie accusatrice avait délibérément fait une fausse allégation.

Dans 89 causes où le tribunal a établi que les allégations étaient manifestement non fondées, la partie accusatrice a perdu la garde des enfants dans 18 causes, quoiqu'il y ait des motifs qui ne concernaient pas directement l'allégation de violence.  Dans une cause seulement, la personne qui a fait la fausse allégation a été accusée d'une infraction au pénal - méfait - et a été condamnée en rapport avec la fausse allégation.  Dans trois autres causes, les accusateurs ont été cités pour outrage au tribunal, parce qu'il y avait eu généralement refus du droit de visite.  Dans 46 causes où on a constaté des actes de violence, le juge a refusé le droit de visite dans 21 affaires; il l'a accordé sous surveillance dans 16 affaires et dans seulement trois affaires, l'agresseur présumé a dû répondre à des accusations au pénal.

Les affaires mettaient en cause 262 victimes (74 p. 100 de ces causes étaient des actes présumés de violence sexuelle), dont 32 p. 100 des enfants de moins de cinq ans, 46 p. 100 des enfants de cinq à neuf ans, 13 p. 100 des enfants de dix ans et plus et dans 9 p. 100 de ces causes, l'âge n'est pas mentionné.

D'après l'étude, environ 71 p. 100 des allégations étaient portées par les mères (64 p. 100 ayant la garde des enfants et 6 p. 100 ne l'ayant pas), 17 p. 100 provenaient des pères (6 p. 100 ayant la garde des enfants et 11 p. 100 ne l'ayant pas) et 2 p. 100 des grands-parents ou des parents de la famille d'accueil.  Dans environ 9 p. 100 des causes, l'enfant était celui qui a principalement porté les allégations (et il a souvent témoigné devant le tribunal).  Les pères seraient les plus susceptibles d'être accusés de violence (74 p. 100), ensuite les mères (13 p. 100), le petit ami de la mère ou le beau-père (7 p. 100), les grands-parents (3 p. 100) et les autres membres de la famille, y compris les enfants de mêmes parents (3 p. 100).

4.4  Perceptions des répondants clés

À cause de l'absence d'études canadiennes pertinentes sur la question d'allégations de violence, il a été décidé d'effectuer un sondage auprès d'un faible nombre de répondants clés pour analyser un certain nombre de questions, notamment l'étendue et la nature des fausses allégations.  On avait espéré que les renseignements obtenus des répondants clés auraient permis de confirmer les renseignements recueillis en parcourant les travaux de recherche et la jurisprudence.  Bien que le nombre total de répondants interrogés soit très faible (à cause des contraintes de temps), nous les avons choisis en supposant qu'ils avaient probablement une expérience professionnelle sur les allégations de violence envers les enfants.

Les entrevues auprès de répondants clés ont été faites par téléphone avec les travailleurs chargés de la protection de l'enfance ou prestataires de visites sous surveillance qui ont été choisis (deux agents de police, trois juges, un avocat et un chercheur).  Les auteurs ont obtenu le nom des répondants clés par l'intermédiaire de leurs connaissances.  Vingt-quatre personnes au total ont été appelées, y compris un travailleur chargé de la protection de l'enfance de chaque province et territoire du Canada.  Il n'a pas été possible de joindre neuf personnes ou ces personnes n'ont pas rappelé, et une personne a voulu répondre par écrit, mais n'a pas rempli le questionnaire.  En fin de compte, on a interrogé 14 répondants clés provenant de huit provinces et territoires et d'un État.  Les répondants clés provenaient de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, de l'Ontario, de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Colorado.

Une variété de questions a été posée sur l'étendue du problème aussi bien que sur le processus de l'enquête (voir l'annexe A).  Dans l'ensemble, une grande uniformité s'est dégagée des réponses données par les répondants clés, et cela, quelle que soit leur profession.  Compte tenu des contraintes économiques et temporelles imposées à ce projet, on a effectué un nombre limité d'entrevues et les résultats ne peuvent pas être interprétés comme représentant l'expérience des différentes professions rencontrées.  Toutefois, les entrevues ont permis de mettre en perspective le problème des fausses allégations de violence dans les cas de droit de visite et de garde des enfants et de déterminer les questions.  Vous trouverez ci-après un résumé des réponses données sur l'étendue et la nature du problème, l'adéquation de la législation en vigueur, le processus de l'enquête et les restrictions en ce qui a trait au droit de visite.

4.4.1  Étendue et nature du problème

Presque tous les répondants clés (treize) déclarent qu'ils se sont occupés directement de cas de fausses allégations de violence envers les enfants, quoique la plupart (neuf) affirment que cette situation est plutôt rare.  Chez bon nombre de répondants (huit), les fausses allégations concernaient des cas de violence sexuelle, mais certains ont signalé qu'ils ont eu à traiter des cas de fausses allégations de violence physique (cinq) et aussi de négligence (trois).  Lorsqu'on leur a demandé s'ils avaient eu à traiter des cas qui pourraient être considérés comme des « cas clairs de méfait, d'entrave à la justice ou de parjure », quatre des répondants clés ont répondu non et dix ont répondu oui, mais ces cas sont très rares (p.ex.« moins de un p. cent » ou « peut-être un cas par an »).

Les répondants clés sont divisés sur la question à savoir si le taux de fausses allégations de violence envers les enfants est plus élevé dans les cas liés à des conflits sur le droit de visite et la garde des enfants que dans d'autres situations.  Pour les deux cas de fausses allégations délibérées (cas clairs de méfait, d'entrave à la justice ou de parjure) et de fausses allégations par suite d'erreurs de bonne foi, quatre répondants ont déclaré que le taux n'était pas plus élevé dans les cas liés à des conflits sur le droit de visite et la garde des enfants.  Toutefois, huit ont répondu que c'était plus élevé ou légèrement plus élevé et un répondant a soutenu « qu'il n'y a aucun doute, c'est plus élevé ».  Un répondant qui avait l'impression que le taux de fausses allégations par suite d'une erreur de bonne foi pourrait être légèrement plus élevé lorsque les parents sont séparés que dans d'autres situations a dit que « c'est plus facile de croire à quelque chose de mauvais (mauvaise interprétation) au moment de la séparation que lorsque vous vivez avec cette personne ».  Un autre a déclaré que « le climat dans cette situation est très tendu parce qu'il y a peut-être 1) des problèmes sur le plan du rôle joué par les parents ou 2) une mauvaise communication entre les parents ».

Un tiers des répondants clés (cinq) pensent que le problème de fausses allégations délibérées ou non s'est intensifié depuis les dix dernières années.  Environ un tiers (quatre) ont l'impression que bien que le nombre d'allégations de violence envers les enfants ait augmenté depuis les dix dernières années à cause d'une sensibilisation plus grande du public, le problème des fausses allégations n'a pas augmenté mais il a maintenant retenu l'attention du public.  Un autre tiers (quatre) ne pense pas que le problème de fausses allégations ait augmenté.  Un répondant a déclaré que « ce serait plutôt que le problème a diminué parce que les policiers sont mieux formés dans les techniques d'entrevue ».

À la question de savoir s'ils avaient rencontré des situations où les fausses allégations délibérées de violence envers les enfants étaient répétées dans le même cas (c'est-à-dire au sein de la même famille), plus de la moitié des répondants clés (huit) ont dit oui, mais que cela n'arrivait pas souvent.  Un répondant a fait valoir qu'il est typique de rencontrer le cas d'un enfant de trois à quatre ans dont la mère revient à plusieurs reprises avec de nouvelles histoires à raconter.  Un autre pense qu'il existe « des familles à problèmes mais qu'elles sont peu nombreuses ».  Un autre affirme « cela peut se produire avec des enfants de la même famille… cela produit une réaction en chaîne ».

La plupart des répondants clés (dix) ont déclaré qu'il était courant que la mère ou la personne qui s'occupe principalement des enfants fasse une fausse allégation délibérée de violence envers les enfants contre le père, quoique que sept répondants ont aussi estimé que les pères faisaient aussi de fausses allégations délibérées de violence envers les enfants contre les mères.  Deux répondants ont signalé avoir eu des cas concernant des adolescentes ou des enfants plus âgés qui font de fausses allégations et l'un des deux pense que près d'un tiers des fausses allégations de violence sont faites par des enfants.  Lorsqu'on leur demande si les parents ayant la garde des enfants les ont contraints ou manipulés pour qu'ils portent des accusations contre les parents n'ayant pas la garde, huit répondants clés ont dit non ou que cela est très rare.  Quatre répondants clés pensent que les enfants sont parfois contraints ou manipulés par un des parents.

4.4.2 Adéquation de la législation en vigueur relativement aux faux signalements

On a demandé aux répondants s'ils pensaient que le problème des fausses allégations délibérées de violence envers les enfants nécessitait un recours en justice plus vigoureux que celui qui existe actuellement.  Les répondants ont répondu non en majorité (douze).  Un répondant a dit « vous êtes dans une situation très « émotive » et cherchez à la redresser au moyen d'une sanction pénale - cela ne va pas fonctionner ».  Certains répondants pensent que les dispositions législatives appropriées existent déjà mais qu'elles ne sont pas utilisées.  Un répondant clé a dit que « ce recours existe si nous voulons porter des accusations, mais la police et les agences de protection de l'enfance agissent au mieux des intérêts de l'unité de la famille et utilisent d'autres ressources ».  Un répondant croit que l'entrave à la justice est une accusation de portée plus large et partant d'une plus grande utilité pour les procureurs que si on avait édicté une disposition législative pour créer une infraction précise relative aux fausses allégations liées aux conflits sur le droit de visite et la garde des enfants.  Deux répondants clés pensent que la détermination de la peine pourrait être plus dissuasive dans ces cas.

Lorsqu'on leur a demandé s'ils étaient préoccupés par l'idée que des sanctions judiciaires plus graves contre les personnes faisant de fausses allégations pourraient décourager les signalements fondés de violence, la moitié des répondants clés (sept) ont dit qu'il y avait effectivement un risque et l'autre moitié (sept) ont dit non ou que cela n'aurait aucun effet.  Un répondant clé a déclaré que « vous allez éliminer les gens qui soupçonnent que quelque chose est arrivé mais qui n'ont aucune preuve ».  Un autre a dit que « non, en autant que le libellé de la sanction détermine clairement qu'elle s'applique seulement dans le cas d'allégations faites avec malveillance ».

4.4.3  Processus de l'enquête

Seulement sept des répondants clés qui étaient des travailleurs chargés de la protection de l'enfance ou des policiers ont été interrogés sur le processus de l'enquête portant sur des allégations de violence envers les enfants.  Aucun des répondants clés n'a dit que leurs organismes avaient un protocole particulier pour répondre aux allégations de violence envers les enfants liées aux conflits sur le droit de visite et la garde des enfants.  Un répondant a déclaré que leur protocole général avait une mise en garde de ne pas rejeter une allégation seulement parce qu'elle est faite au milieu d'un conflit sur le droit de visite et la garde des enfants.  La plupart des répondants clés (six) ont déclaré que leurs organismes n'offraient pas de formation particulière sur la dynamique d'allégations de violence envers les enfants dans des situations où les parents se séparent, quoiqu'un organisme se soit penché sur la question.  Un répondant était en train de préparer un cours de formation sur le sujet et un autre répondant connaissait l'existence d'un cours qui avait été récemment abandonné faute de fonds.

On a demandé aux répondants clés combien de temps ils avaient pour commencer une enquête à partir du moment où l'allégation de violence envers les enfants est faite, que les parents soient séparés ou non.  Les sept répondants ont soutenu que cela dépend si l'enfant est plus ou moins en danger.  Les réponses variaient d'une intervention immédiate, à des délais dans les 12 heures, 24 heures, 2 jours, 5 jours, 15 jours ou 21 jours - selon l'évaluation du danger.  À la question de savoir combien de temps une enquête de protection de l'enfance peut prendre, la plupart des répondants clés (cinq) ont répondu de 14 à 21 jours, quoiqu'un répondant ait déclaré que si un cas fait l'objet d'une poursuite judiciaire, l'enquête pourrait se poursuivre sur deux ans.  Des cas concernant des allégations de violence contre le père ou la mère n'ayant pas la garde lorsque les parents sont séparés sont complexes, mais posent relativement peu de danger immédiat pour un enfant et peuvent prendre plus longtemps que la moyenne à compléter.  Tous les répondants clés ont précisé que les déclarations qui sont prises d'une personne signalant un cas de violence ne sont pas habituellement faites sous serment, quoiqu'un répondant clé ait déclaré que plus de déclarations sont maintenant faites sous serment qu'auparavant à cause de la récente jurisprudence.

4.4.4  Restrictions en ce qui a trait au droit de visite

On a posé aux quatorze répondants clés des questions sur les restrictions en ce qui a trait au droit de visite.  À la question de savoir si les droits de visite des parents n'ayant pas la garde des enfants avaient été refusés lors d'enquêtes, les réponses n'ont pas été toutes les mêmes.  La moitié des répondants (sept) ont déclaré que les droits de visite avaient été refusés ou restreints pendant l'enquête, qui en général ne durait que peu de temps.  Trois répondants ont déclaré que les droits de visite pourraient être refusés pendant un certain laps de temps et trois répondants ont dit non ou qu'ils ne savaient pas.

Presque tous les répondants (treize) connaissaient l'existence dans leurs administrations des services de visites sous surveillance.  Les répondants ont déclaré que les travailleurs des agences de protection de l'enfance, les travailleurs contractuels, les travailleurs auprès des tribunaux, les membres de la famille, les auxiliaires familiales et la collectivité fournissent un service de surveillance.  Un répondant clé connaissait l'existence d'un centre d'accueil de visites surveillées financé par le gouvernement ou par les parties.  Cependant, quand on a demandé si les services actuels de visites sous surveillance sont adéquats, seulement deux répondants ont répondu par la positive.  La moitié des répondants ont soutenu qu'il n'y avait pas assez de ressources et que les services financés par l'utilisateur étaient trop chers et ne pouvaient donc profiter à beaucoup de familles.  Un répondant a mentionné le besoin de surveillance après les heures de travail (p.ex., les soirs et les fins de semaine); un autre a proposé de définir les attentes de la part des tribunaux et des surveillants formés et un autre encore a dit qu'il fallait uniformiser les services de visites sous surveillance.  Un répondant clé a affirmé que « la surveillance n'est pas une solution en soi - mais plutôt un remède à court terme, qui permet aux parents de communiquer pendant que quelque chose d'autre se produit ».