Rapport de recherche sur le droit de la famille au Nunavut

3. RÉSULTATS DE LA RECHERCHE : ASPECTS PRINCIPAUX

Afin de préparer des mesures législatives renforcées ou des options de services pour le Territoire, il faut d’abord recueillir des renseignements de base sur la vie de la famille d’aujourd’hui : à quoi ressemble une famille type au Nunavut? Les aspects concernant la composition et la taille des familles du Nunavut sont tout particulièrement importants. L’étude aborde également la question du mariage et des unions de fait, leur fréquence et l’expérience des personnes parties à ces relations. Elle traite aussi du deuxième mode le plus fréquent de la formation des familles, l’adoption, et en particulier l’adoption selon les coutumes. Enfin, la recherche examine un certain nombre de questions se rapportant à la séparation et au divorce, notamment des questions d’ordre économique et factuel concernant les ménages dans lesquels se trouvent les enfants, tant après une séparation que dans les familles originelles.

L’enquête auprès des ménages est la principale source d’information pour ce chapitre de la recherche. Les problèmes que soulèvent les données et les limites des résultats sont, le cas échéant, consignés dans le texte ou dans les notes. Tous les pourcentages sont exprimés en nombres entiers ce qui, à l’occasion, donne des chiffres qui ne correspondent pas à cent p. cent. Il est arrivé souvent que les participants à l’enquête ne répondent pas à certaines questions. Nos tableaux indiquent alors « données manquantes » pour permettre au lecteur de tirer ses propres conclusions sur la signification de l’absence de réponse. Mis à part les résultats de l’enquête, nous avons intégré à l’étude certaines données puisées dans d’autres recherches ou empruntées à des anecdotes pour illustrer ou expliciter certains des résultats.

3.1  La cellule familiale au Nunavut

La structure de base de la cellule familiale au Nunavut reflète les normes culturelles inuites. La structure familiale est élargie, souple et de composition plus dynamique que dans le reste du Canada. Si l’on compare cette structure à la « norme » canadienne, où prédomine le ménage constitué d’au moins un parent et des enfants naturels, notre enquête révèle que la composition de la famille au Nunavut est beaucoup plus variée, et peut comporter un grand nombre de membres de la famille ayant différents liens avec les enfants et les parents sans lien de sang, les parents et leurs enfants adultes, les frères et les sœurs, tous vivant sous un même toit.

Les données du recensement révèlent que la taille moyenne des ménages au Nunavut est légèrement supérieure à la moyenne canadienne, dans l’ensemble. Notre enquête a révélé que, bien que la plupart des gens vivaient dans des ménages comprenant de trois à cinq personnes, près du tiers des participants à l’enquête vivaient dans des familles de plus de six personnes (Voir le tableau 1). Assez peu de ménages ne comptent qu’une seule personne ou un couple (sans oublier, bien sûr, qu’un ménage de deux personnes ne constitue pas nécessairement un couple). Ces deux types de ménages combinés ne représentent environ que 15 p. cent de tous les ménages du Nunavut.

Ce qui est encore plus surprenant, c’est de constater à quel point la composition des ménages est variée au Nunavut. Ces ménages reflètent la structure de la famille élargie dont il est sans cesse question dans les récits de la tradition orale et dans les études anthropologiques[55]. Les résultats de l’enquête auprès des ménages indiquent qu’un très grand nombre de ménages comptent des personnes autres que les parents et leurs enfants naturels. Un pourcentage important de ménages comptent des grands-parents, des enfants adoptés et des frères ou sœurs adultes des participants à l’enquête. En fait, l’inuktitut fait la différence entre qatangutigiit ou « famille immédiate », soit la mère, le père, le fils, la fille, les grands-parents, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants et ilagiit ou « famille élargie » qui comprend les oncles, les tantes, les cousins et cousines, les neveux et nièces, les grands-parents, les grands-oncles, les grands-tantes et, encore une fois, les petits-enfants[56].

Tableau 1
Répartition des ménages du Nunavut d'après le nombre de leurs membres
Nombre de personnes par ménage Nombre de
ménages
(N)
Pourcentage du
total des ménages
(%)
1 19 6
2 32 10
3 53 17
4 59 19
5 52 16
6 40 13
7 39 12
8 7 2
9 ou plus 16 5
Pas de réponse 25 7
Total 342 100

Le tableau 2 donne un aperçu de la diversité des relations au sein des ménages du Nunavut. Plusieurs éléments en ressortent. D’abord, le phénomène de l’adoption y est très courant, et beaucoup plus que dans l’ensemble du Canada. Au moins 15 p. cent des participants à l’enquête ont indiqué que leur ménage comptait au moins un enfant adopté (Voir ci-dessous pour une discussion plus détaillée des adoptions).

Tableau 2
Répartition des membres des ménages du Nunavut en fonction de leur relation avec les participants à l’enquête
Personne participante* et au moins : Sexe Total
Femmes Hommes
1 épouse ou époux de la personne participante 68
35 %
50
34 %
118
35 %
1 conjoint(e) de fait de la personne participante 51
26 %
36
24 %
87
25 %
1 enfant naturel de la personne participante 140
73 %
77
52 %
217
64 %
1 enfant adopté de la personne participante 30
16 %
22
15 %

15 %
1 enfant de conjoint(e) de la personne participante 6
3 %
14
9 %
20
5 %
1 enfant sous la tutelle de la personne participante 3
2 %
3
2 %
6
2 %
1 parent naturel (père ou mère) de la personne participante 15
8 %
20
13 %
35
10 %
1 parent adoptif (père ou mère) de la personne participante 1
1 %
1
0 %
1 beau-parent (c.-à-d. conjoint du père ou de la mère) de la personne participante 2
1 %
5
3 %
7
2 %
1 sœur naturelle ou frère naturel de la personne participante 21
11 %
23
15 %
44
13 %
1 sœur ou frère par alliance (enfants du conjoint) de la personne participante 6
3 %
6
4 %
12
4 %
1 demi-sœur ou demi-frère de la personne participante
1 sœur adoptive ou frère adoptif de la personne participante 2
1 %
1
1 %
3
1 %
1 petite-fille ou petit-fils de la personne participante 18
9 %
13
9 %
31
9 %
1 grand-parent de la personne participante 1
1 %
2
1 %
3
1 %
1 bru ou gendre de la personne participante 6
3 %
10
7 %
16
5 %
1 belle-mère ou beau-père de la personne participante 1
5 %
1
3 %
1 belle-sœur ou beau-frère de la personne participante 5
3 %
4
3 %
9
3 %
1 nièce ou neveu par alliance de la personne participante 7
4 %
6
4 %
13
4 %
1 oncle ou tante de la personne participante 2
1 %
1
1 %
3
1 %
1 cousin (e)de la personne participante 1
1 %
2
1 %
3
1 %
1 conjoint de même sexe que la personne participante
1 autre parent de la personne participante 1
1 %
1
1 %
1 personne non apparentée à la personne participante 7
4 %
4
3 %
11
3 %
Total des participants à l’enquête 193
100 %
149
100 %
342
100 %

*  Chaque participant(e) à l’enquête présente des caractéristiques uniques. L’un d’eux peut être un garçon de 16 ans à la charge de ses parents, un autre peut être une grand-mère ou un grand-père. Quoi qu’il en soit, ce tableau montre la grande diversité de la composition des ménages au Nunavut.

Deuxièmement, dans un nombre important de ménages, les participants à l’enquête ont signalé vivre avec un parent ou avec une sœur ou un frère. Cette constatation est importante car tous les participants à cette enquête ont plus de quinze ans. Treize p. cent des ménages comptent un père ou une mère, une belle-mère ou un beau-père (conjoint du père ou de la mère) ou un parent adopté ou un beau-parent du/de la participant(e) à l’enquête. Un peu moins du cinquième des participants à l’enquête ont signalé la présence d’une sœur ou d’un frère naturel, ou par alliance. Presque 10 p. cent des participants à l’enquête vivaient avec une petite-fille ou un petit-fils (9 p. cent) et un peu plus de 10 p. cent des ménages comptaient un parent d’un autre type. Enfin, très peu de personnes (seulement 3 p. cent des participants à l’enquête) ont déclaré vivre avec une personne avec laquelle elles n’avaient aucun lien de parenté.

Il est difficile de comparer ces résultats aux moyennes canadiennes car il existe peu d’études sur l’importance de la famille élargie. Il ne semble faire aucun doute que la famille au Nunavut diffère sensiblement, dans sa composition, de la famille typique du sud du Canada. Les chiffres pour le Canada indiquent qu’un peu plus de la moitié des familles entre dans la catégorie « parent/conjoint/enfant »[57]. Par contre, près du tiers des participants à l’enquête au Nunavut ont déclaré vivre avec des membres de leur parenté en plus (ou au lieu) de leur conjoint(e) ou des enfants.

Tableau 3
Répartition des participants à l’enquête en fonction de la composition des ménages
La personne participant à l’enquête vit avec... Sexe Total
Femmes Hommes  
Le/la conjoint(e) seulement 7
4 %
  7
2 %
Le/la conjoint(e) et ses propres enfants seulement (famille nucléaire type) 95
49 %
65
44 %
160
47 %
Le/la conjoint(e), ses propres enfants et d’autres membres de la famille 16
8 %
17
11 %
33
10 %
Le/la conjoint(e) et d’autres membres de la famille seulement   4
3 %
4
1 %
Ses propres enfants seulement (famille monoparentale type) 22
11 %
5
3 %
27
8 %
Ses propres enfants et d’autres membres de la famille 19
10 %
5
3 %
24
7 %
D’autres membres de la famille seulement 16
8 %
26
17 %
42
12 %
Des personnes sans lien de parenté seulement 2
1 %
3
2 %
5
2 %
Aucune autre personne ou aucune réponse 16
8 %
24
16 %
40
12 %
Total des ménages 193
100 %
149
100 %
342
100 %

NB : Chaque pourcentage a été arrondi au nombre entier le plus proche de sorte que le total des pourcentages peut ne pas égaler 100 p. cent.

Ces résultats sont encore plus marqués quand on questionne les personnes sur la structure du ménage dans lequel elles sont nées (Voir le tableau 4). Comme il ressort de ce tableau, la famille élargie était encore plus présente dans les ménages du Nunavut, il y a de cela une génération à peine. Une tendance vers l’apparition d’une famille nucléaire au Nunavut du vivant des participants à l’enquête semble donc se dessiner. En revanche, il existe peu d’indices d’un changement suffisamment radical de la norme prévalant au Nunavut pour y voir une baisse significative de l’importance de la famille élargie.

Tableau 4
Répartition de la composition des ménages des participants à leur naissance
À sa naissance, la personne participant à l’enquête vivait avec... Sexe Total
Femmes Hommes
Les deux parents naturels seulement, aucun membre de la famille élargie 37
19 %
30
20 %
67
20 %
Les deux parents adoptifs seulement, aucun membre de la famille élargie 26
14 %
14
9 %
40
12 %
La mère naturelle seulement, sans le père, aucun membre de la famille élargie 8
4 %
7
5 %
15
4 %
La mère adoptive seulement, sans le père, aucun membre de la famille élargie 1
1 %
1
0 %
Le père naturel seulement, sans la mère, aucun membre de la famille élargie 1
1 %
1
1 %
2
1 %
La mère et la famille élargie, sans le père 3
2 %
3
1 %
Le père et la famille élargie, sans la mère 1
1 %
1
0 %
Les parents naturels/
adoptifs et la famille élargie
91
47 %
85
57 %
176
52 %
Famille mixte : parents naturel/ adoptif/ conjoint(e) du parent naturel, aucun membre de la famille élargie 3
2 %
4
3 %
7
2 %
Famille élargie seulement, sans la mère/le père/les frères et sœurs 16
8 %
6
4 %
22
6 %
Les frères et sœurs seulement, sans les parents/la famille élargie 3
2 %
3
1 %
Autre/pas de réponse 4
2 %
1
1 %
5
2 %
Totaux 193
100 %
149
100 %
342
100 %

Enfin, il est important de signaler que les Inuits reconnaissent un « palier » supplémentaire de relations familiales qui s’inscrit dans le développement de relations « éponymes » ou tuqlluraniq. À leur naissance, les enfants reçoivent toujours le nom d’une autre personne, généralement décédée peu avant. En recevant ce nom, l’enfant fait sienne toute la famille de la « relation éponyme ». Il s’ensuit qu’un petit enfant se faire appeler « époux » par la veuve du défunt éponyme ou « père » par les enfants de celle-ci. Ces relations cimentées par le nom sont à notre époque largement reconnues et respectées[58]. On croit que les noms transportent avec eux les caractéristiques de la personne éponyme. De plus, deux individus qui reçoivent le nom d’un troisième entretiendront une relation particulière. La recherche n’a pas porté sur les relations éponymes ni sur leur incidence en matière de droit de la famille, mais plusieurs personnes ont souligné leur importance par rapport au IQ. Il serait utile d’examiner l’impact de ces relations éponymes et les responsabilités qui en découlent afin de mieux comprendre la dynamique complexe qui lie les membres de la famille élargie et afin de mieux en saisir les répercussions en cas de problèmes relationnels.

3.1.1  Les familles multigénérationnelles, les soins aux enfants et leur l’éducation

Lors des rencontres communautaires et des entrevues, on nous a souvent répété que les membres de la famille élargie avaient d’importantes responsabilités à l’égard des soins et de l’éducation des enfants de leur ménage. Nous avons entendu d’innombrables histoires où les grands-parents étaient les principaux pourvoyeurs des soins apportés aux enfants de leurs enfants. Dans certains cas, les grands-parents vont adopter l’enfant selon les coutumes. Dans d’autres cas, les grands-parents interviendront pour prendre soin des petits-enfants à l’occasion d’une période difficile que traversent leurs enfants. Nous avons aussi entendu des histoires analogues à propos de frères ou de sœurs qui se chargeaient des enfants en période de crise. On nous a bien sûr parlé des membres de la famille qui contribuaient aux soins des enfants de façon générale, en s’occupant d’eux après l’école par exemple ou simplement en offrant aux jeunes de tous âges un lieu accueillant où ils peuvent se retrouver.

L’un des facteurs évidents qui contribue au rôle actif de la famille élargie dans l’éducation des jeunes enfants est le fait que de nombreux Nunavummiuts deviennent parents à un très jeune âge. Les statistiques relatives aux grossesses d’adolescentes tendent à confirmer que les femmes ont des enfants beaucoup plus jeunes au Nunavut que dans le reste du Canada, et que dans les autres territoires. Un article récent paru dans le Nunatsiaq News d’Iqaluit rapportait qu’il y avait au moins 25 grands-mères âgées d’à peine 30 ans dans la ville d’Arviat (dont la population est de 1 676 personnes)[59]. Le jeune âge des nouveaux parents au Nunavut ressort clairement de la recherche. Dix-sept p. cent des participants à l’enquête ont eu leurs enfants à dix-sept ans ou moins et plus de la moitié des participants à l’enquête étaient parents avant l’âge de 21 ans (Voir la figure 1)[60].

Le rôle de la famille élargie, en particulier celui des grands-parents, dans l’éducation des enfants met en relief un certain nombre d’éléments. En ce qui a trait par exemple à la garde et au droit de visite, certaines des personnes présentes à nos réunions ont contesté la présomption selon laquelle seuls les parents pouvaient automatiquement se prévaloir de ce droit sans ordonnance de la cour. Les participants ne connaissaient pas les dispositions législatives qui permettent à toute personne (et pas seulement aux parents de l’enfant) de demander la garde avec autorisation du tribunal[61]. On a également soulevé la question de l’aide sociale pour les grands-parents. Plusieurs membres de la communauté ont fait part de leurs inquiétudes face aux contraintes excessives, financières ou autres, qui pèsent sur les personnes qui élèvent des enfants de membres de leur famille. Dans les cas où les membres de la famille n’avaient pas d’emploi rémunéré, on ne semblait pas très au courant de la possibilité de recevoir une aide sociale pour les enfants qui viennent vivre avec eux.

Figure 1 - Répartition des participants à l’enquête en fonction de l’âge auquel ils sont devenus parents pour la première fois

Figure 1: Répartition des participants à l’enquête en fonction de l’âge auquel ils sont devenus parents pour la première fois

N=248 participants à l’enquête qui étaient parent naturel, adoptif ou conjoint(e) du parent naturel.

[ Description ]

Du strict point de vue du droit de la famille, ces résultats semblent indiquer que l’éclatement de la famille aura des répercussions pour bon nombre de personnes, au-delà des parents et de leurs enfants. Qui plus est, ces résultats sous-entendent l’existence d’une structure de soutien élargie au moment d’une séparation. Le groupe des personnes qui participent de façon importante à l’éducation d’un enfant est considérable et, par conséquent, le groupe qui voudra maintenir la relation avec cet enfant après l’éclatement de la famille l’est aussi. Il sera intéressant d’examiner à l’occasion d’études ultérieures les moyens mis en œuvre par les membres de la famille élargie pour maintenir leur présence dans la vie des enfants après la séparation, le type de soutien qu’ils apportent, et les conséquences du maintien de ces relations pour les deux parents ou d’autres membres de la famille.

L’âge relativement jeune des parents a également d’autres conséquences. En tant que groupe, les parents plus jeunes sont généralement plus pauvres tandis que s’accroît pour eux la probabilité de vivre à un moment donné une situation de monoparentalité. En outre, ils ont des difficultés d’accès à la justice disproportionnées comparativement aux personnes qui attendent la fin de la vingtaine pour avoir des enfants. En termes de stratégies du droit de la famille, il ne fait aucun doute qu’il faudra établir une collaboration étroite avec les services sociaux pour que les parents plus jeunes aient plus facilement accès au soutien disponible et soient mieux renseignés sur les droits que leur confère le droit de la famille. On porte beaucoup d’intérêt au travail qui pourrait se faire avec d’autres intervenants pour inciter les jeunes à patienter quelques années avant de songer à devenir parents.

3.2  L’adoption selon les coutumes autochtones

L’une des différences les plus marquées entre le Nunavut et le reste du Canada est la fréquence de l’adoption selon les coutumes. Dans l’introduction, nous avons souligné le caractère unique du régime de la reconnaissance de l’adoption selon les coutumes que prévoit la Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones, promulguée en 1996. Ce genre d’adoption constitue le point de contact le plus fréquent entre les familles et le système juridique du Nunavut. Depuis 1996, on estime que près de 2 000 cas d’adoption selon les coutumes ont été officialisés par les tribunaux, en grande majorité dans l’Arctique de l’Est[62]. En comparaison, au cours de la même période, on comptait en moyenne cinq adoptions par année de type ministériel (où l’enfant est placé sous la tutelle permanente du gouvernement) et peut-être 35 adoptions de type privé par des personnes autres que des Inuits. Comme nous l’avons mentionné précédemment, 22,5 p. cent des participants à l’enquête ont déclaré avoir élevé des enfants adoptés. Dans plus de la moitié des cas (40 sur 77), les participants à l’enquête ont élevé plus d’un enfant. Vingt-six pour cent (62 sur 237) ont déclaré avoir donné un enfant en adoption; un bon tiers des femmes ayant participé à l’enquête ont affirmé avoir « donné un bébé en adoption » (51 sur 150). Vingt-trois pour cent des participants ont dit avoir eux-mêmes été adoptés. Et parmi ceux-là, 93 p. cent (69) ont affirmé avoir été adoptés en vertu des coutumes autochtones, et seulement 7 p.cent (5) ont signalé un recours aux tribunaux.

Un seul cas d’adoption en vertu de la Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones (S.K.K. v. J.S.[63]) a eu des conséquences juridiques. Dans ce cas particulier, une grand-mère maternelle qui avait adopté sa petite-fille a cherché à obtenir une pension alimentaire pour enfant du père naturel de l’enfant. La juge Schuler de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a statué au paragraphe 30 que :

(traduction) « Les conséquences de l’adoption dépendront du droit coutumier autochtone. Ces conséquences pourraient en fait être les mêmes que celles qui découlent de… la Loi sur l’adoption ou être différentes. Elles pourraient aussi varier en fonction des collectivités ou des régions du Nunavut[64] ».

La juge soutenait plus loin que le tribunal était tenu d’appliquer le droit coutumier autochtone et qu’elle demanderait une expertise en la matière avant de rendre sa décision sur la pension alimentaire pour enfant.

Plusieurs caractéristiques importantes de l’adoption selon les coutumes autochtones la distinguent sensiblement de l’adoption ordonnée par la cour en vertu de la Loi sur l’adoption[65]. Premièrement, l’adoption selon les coutumes est le plus souvent une adoption ouverte où chaque individu concerné, et souvent même la collectivité entière, connaît les différentes relations parentales en cause. La plupart du temps, les parents naturels continueront d’entretenir une relation avec l’enfant et parleront même de l’enfant adopté comme de « leur » fils ou de « leur » fille. Le mot qiturngaqati a été utilisé dans le sens d’« avoir le même enfant » et on l’emploie pour désigner la relation entre enfants naturels et enfants adoptés.

Deuxièmement, dans la plupart des cas (mais certainement pas tous) d’adoption selon les coutumes survient entre personnes d’une même famille; les parents, les frères et sœurs et les cousins adoptent tous des enfants sur une base régulière. Cette réalité transparaît dans nos données, où 70 p. cent de nos participants à l’enquête ayant eux-mêmes été adoptés ont signalé l’avoir été par des personnes de leur famille (Voir le tableau 5 ci-dessous).

Troisièmement, il semble que l’adoption selon les coutumes autochtones ne survienne qu’entre Inuits. Les personnes non inuites ne peuvent adopter selon les coutumes que si elles sont mariées à un(e) Inuit(e). Cela permet à une femme inuite qui épouse un qallunaat de ne pas perdre son droit d’adopter selon les coutumes autochtones.

Tableau 5
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur relation avec leurs parents adoptifs, selon le sexe
Relation entre le parent adoptif et le parent naturel Sexe Totaux
Femmes Hommes
Parents de la mère naturelle 17
34 %
8
29 %
25
32 %
Parents du père naturel 6
12 %
2
7 %
8
10 %
Autre parent de la mère naturelle 6
12 %
4
14 %
10
13 %
Autre parent du père naturel 7
14 %
4
14 %
11
14 %
Non apparenté(e) 5
10 %
7
25 %
112
15 %
Inconnu(e) 9
18 %
3
11 %
12
15 %
Totaux 50
100 %
28
100 %
78
100 %

N=78 participants à l’enquête ont affirmé avoir été adoptés (selon les coutumes autochtones ou sur autorisation de la cour).

Quatrièmement, dans la plupart des cas, les personnes qui « donnent un enfant en adoption » prennent l’initiative de chercher une famille disposée à « adopter » le bébé. Qui plus est, comme de nos jours les gens voyagent beaucoup d’une collectivité à l’autre, il n’est pas rare que la personne qui « adopte » soit un ami ou un parent qui ne vit pas dans la même collectivité.

En général, notre étude indique que les décisions relatives à l’adoption ne s’appuient pas sur un seul critère, par exemple « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Lors des discussions avec les commissaires de la MQ, l’un des aînés et de nombreuses autres personnes ont fait valoir qu’il n’était pas bon pour la vie de l’enfant qu’il fasse l’objet de conflits[66]. Il existe plusieurs rapports indiquant que l’enfant adopté est « davantage aimé » ou particulièrement choyé. Le bien-être de l’enfant est certainement pris en compte, mais les décisions liées à l’adoption se prennent plus vraisemblablement en fonction de considérations liées à la situation de la famille tout entière. L’adoption selon les coutumes autochtones survient dans de nombreux contextes. Dans la situation la plus courante, une jeune femme donne naissance à un enfant et les parents de celle-ci l’adoptent et l’élèvent comme si c’était le leur. Très souvent, ce type d’arrangement survient alors que la mère naturelle vit encore sous le toit de ses parents, et elle s’acquittera d’une part importante des soins prodigués à l’enfant adopté. Dans d’autres cas, on utilisera l’adoption comme une sorte de méthode de planification des familles pour s’assurer, par exemple, qu’il existe suffisamment « d’espace temps » entre deux enfants dont les naissances sont trop rapprochées. L’adoption peut aussi permettre de venir en aide à un parent ou à un ami qui n’a pas d’enfant, ou qui n’a pas d’enfant d’un sexe en particulier. On rapporte aussi des cas de personnes plus âgées pour qui l’adoption est une façon de s’assurer que quelqu’un prendra soin d’elles au moment de leur vieillesse.

Certains rapports font état de cas d’adoption selon les coutumes autochtones qui, à l’instar de certains cas d’adoption judiciaire, ne se déroulent pas comme prévu; soit que les personnes qui « donnent l’enfant » changent d’avis, soit que la famille d’adoption connaît des difficultés imprévues. Le recours judiciaire alors ne vise pas à annuler l’adoption, mais à la remplacer par une autre. L’enfant peut être ré-adopté par ses parents naturels ou encore être adopté par un tiers. Selon nos données, environ 5 p. cent des personnes ont affirmé avoir été adoptées plus d’une fois.

Au plan de la procédure, l’adoption selon les coutumes diffère sensiblement du processus prévu par la Loi sur l’adoption. En premier lieu, l’adoption selon les coutumes autochtones est officialisée entre les deux parties. Un commissaire à l’adoption de la région — qui, invariablement, parle l’inuktitut — consigne l’intention des parties et recueille toute l’information nécessaire pour traiter du dossier de l’adoption, en n’utilisant qu’un seul formulaire. Il existe dans chaque collectivité un commissaire à l’adoption, mais tous n’ont pas de rôle actif et certains manquent de formation, ce qui pose certains problèmes. Quand tous les renseignements ont été rassemblés, le commissaire fait parvenir le dossier à la cour, pour l’enregistrement. La cour a pour rôle de s’assurer que toutes les formalités ont été remplies; elle ne se penche en aucune façon sur le bien-fondé de l’adoption. Une fois satisfaite, la cour enregistre l’adoption. Cela étant fait, le commissaire dépose une demande de modification d’état civil et obtient un certificat de naissance modifié.

À l’opposé, le processus d’adoption tant de type privé que de type ministériel ressemble beaucoup plus à la norme qui prévaut dans le sud. Pour ces adoptions, il faut soumettre une demande à la cour. En raison de la complexité relative du processus, dans la plupart des adoptions de type privé, la personne qui fait la demande d’adoption est représentée par un avocat, que l’adoption soit contestée ou non. Il est essentiel que le consentement du parent naturel (ou, dans le cas des adoptions de type ministériel, le consentement du directeur des Services à l’enfance et à la famille) soit solidement documenté. Sauf dans le cas de l’adoption par un beau-parent, un travailleur social doit procéder à une évaluation du foyer d’accueil. Les décisions finales en matière d’adoption demeurent la prérogative du juge, qui a également le pouvoir d’imposer des conditions à l’adoption; par exemple, le parent naturel peut demander et obtenir un droit de visite permanent. Ironiquement, le juge peut être parfois tenté de reproduire, à travers les ordonnances, les conditions de l’adoption selon les coutumes autochtones.

En somme, l’institutionnalisation de l’adoption selon les coutumes autochtones au Nunavut est unique au Canada[67]. Ce phénomène est également unique dans le contexte du droit de la famille du Nunavut. L’adoption selon les coutumes autochtones semble une institution juridique bien comprise, accessible et couramment utilisée à l’échelle du Territoire. Par ce processus, la prise des décisions appartient à la famille et aux collectivités, et non à des institutions extérieures. Les paramètres décisionnels relatifs à l’adoption semblent assez bien définis et les différentes parties au processus semblent plutôt bien comprendre les responsabilités qui leur incombent. Bien que l’adoption selon les coutumes soit un processus beaucoup plus ouvert que l’adoption judiciaire, on ne semble pas vouloir imposer d’obligations parentales aux parents qui ont « donné l’enfant » de sorte qu’il y a peu de recoupements entre l’adoption selon les coutumes autochtones et le reste du droit de la famille. Le temps dira si d’autres institutions relatives au droit de la famille parviendront à s’adapter pour tenir compte de ce genre de réussites.

Il est important par ailleurs de ne pas idéaliser l’adoption selon les coutumes autochtones. La Commission d’examen des lois fait actuellement des sondages auprès de la communauté pour connaître sa perception des forces et des faiblesses du processus. La commission a décelé de nombreuses inquiétudes face à ces adoptions, et elle tente actuellement de trouver des façons de les « réglementer » afin d’éviter les écueils (Consulter le rapport de la Commission d’examen des lois à venir). La commission consulte aussi la communauté pour évaluer dans quelle mesure elle comprend bien les obligations de toutes les parties. Ses recommandations pourraient refléter l’expérience — positive ou négative — acquise à partir de cet important aspect du droit de la famille dans le Territoire.

3.3  Le mariage et l’union de fait

Les données du recensement montrent que 50,3 p. cent des familles du Nunavut sont composées de couples mariés, tandis que 31 p. cent des familles sont des couples en union de fait. Ces données correspondent grosso modo aux résultats de notre enquête. Nous avons carrément demandé aux participants à l’enquête s’ils vivaient en couple marié ou en union de fait. Il est important de remarquer le taux élevé d’absence de réponse dans les parties du questionnaire portant sur le mariage[68].

Comme semblent l’indiquer les données des tableaux 6 et 7, un grand nombre de Nunavummiuts vivent en union de fait. La fréquence des unions de fait dépasse de baucoup la norme canadienne[69], bien que légèrement inférieure à celle qui prévaut chez les peuples autochtones de l’ensemble du Canada[70]. Par ailleurs, le nombre de mariages y est moins élevé que pour le reste du Canada (malgré cela, le nombre de mariages y est encore plus élevé que pour l’ensemble des peuples autochtones du Canada). Quant au nombre des participants à l’enquête qui ont déclaré avoir vécu en union de fait à un moment ou à un autre de leur vie, les chiffres sont encore plus éloquents : 63 p. cent.

Tableau 6
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur situation matrimoniale au moment de l’entrevue
Situation matrimoniale Sexe Totaux
Femmes Hommes
Marié(e) légalement et non séparé(e) 62
41 %
47
42 %
109
41,3 %
Marié(e) légalement et séparé(e) 7
5 %
7
6 %
14
5 %
Divorcé(e) 5
3 %
7
6 %
12
5 %

Veuf/veuve

11
7 %
5
5 %
16
6 %
Jamais marié(e) 68
44 %
45
41 %
113
43 %
Totaux 153
100 %
111
100 %
264
100 %

N=264 participants à l’enquête ont précisé leur situation matrimoniale (aucune donnée = pas de réponse ou sans objet).

Tableau 7
Répartition des participants à l'enquête selon leur situation matrimoniale actuelle, couples mariés ou en union de fait
Situation actuelle Sexe Total des participants à l'enquête Pourcentage de l'échantillon total
Femmes Hommes
Actuellement marié(e), non séparé(e), divorcé(e) ou veuf/veuve 62
38 %
47
39 %
109
38 %
32 %
Marié(e), séparé(e), divorcé(e) ou veuf/veuve — pas en union de fait 21
13 %
14
12 %
35
12 %
10 %
Union de fait 49
30 %
38
32 %
87
31 %
25 %
Jamais marié(e) et non en union de fait 32
20 %
21
18 %
53
19 %
16 %
Aucune donnée - - - 58
17 %
Totaux 164
100 %
120
100 %
284
100 %
342
100 %
Tableau 8
Répartition des participants à l’enquête ayant déjà vécu en union de fait
En union de fait à un moment donné? Sexe Total des participants à l’enquête Pourcentage de l’échantillon total
Femmes Hommes
Oui 8
50 %
58
59 %
126
54 %
37 %
Non 68
50 %
40
41 %
108
46 %
32 %
Aucune donnée - - - 108
32 %
Totaux 136
100 %
98
100 %
234
100 %
342
100 %

3.3.1  L’âge au début des relations de couple

D’après les résultats de notre enquête, nous avons observé un certain nombre de différences possibles entre les participants mariés et ceux qui vivaient alors en union de fait. Les participants mariés étaient généralement plus âgés (31 ans, en moyenne) que les participants en union de fait (24 ans, en moyenne)[71]. De plus, si l’on compare l’âge moyen des participants au moment de leur mariage (âge moyen : 24 ans) à l’âge moyen des participants au début de leur union de fait (âge moyen : 21 ans), il semble que les gens retardent le moment de se marier[72]. Cette tendance est d’autant plus significative que les participants à l’enquête ne retardent pas le moment d’avoir des enfants.

Bien que l’on doive considérer les statistiques avec prudence, elles montrent aussi, qu’en général, les mariages durent plus longtemps que les unions de fait. Parmi les participants à notre enquête, la durée moyenne du mariage était d’un peu plus de dix-sept ans tandis que l’union de fait durait à peine plus de sept ans (Voir la figure 2).

Figure 2 - Répartition des relations de couple actuelles en genre et en durée

Figure 2: Répartition des relations de couple actuelles en genre et en durée

[ Description ]

3.3.2  Relations de couple antérieures

Il semble que pour cette partie du questionnaire, comme pour plusieurs autres, les participants à l’enquête aient hésité à répondre. Bon nombre des personnes qui auraient dû répondre à cette question ne l’ont pas fait[73]. Par conséquent, il est difficile d’avoir une idée précise du nombre de personnes ayant eu des relations de couple avant le mariage ou l’union de fait actuelle (au moment de l’enquête). Il serait intéressant de savoir pourquoi cette information semblait de nature si délicate que les personnes ont préféré ne pas en parler.

Les réponses étaient légèrement plus précises quand les questions portaient sur la situation familiale et les relations de couple antérieures du conjoint actuel du/de la participant(e), plutôt que sur les propres antécédents du/de la participant(e). À une écrasante majorité, tant chez les personnes mariées qu’en union de fait, les participants ont répondu que leur partenaire était célibataire avant la relation actuelle.

Comme l’indiquent les tableaux 10 et 11, un plus grand pourcentage de personnes actuellement en union de fait que de personnes mariées ont déclaré que leur conjoint avait vécu une relation de couple importante avant la relation actuelle; cependant, les chiffres sont très bas. Moins de 10 p. cent des participants à l’enquête vivant en union de fait ont affirmé que leur partenaire précédent(e) avait été marié(e), était veuf/veuve, divorcé(e) ou séparé(e). Moins de 5 p. cent des personnes mariées ont affirmé que leur conjoint(e) avait déjà été marié(e), mais les résultats sont douteux car 15 p. cent des participants n’ont pas répondu à la question. Quinze p. cent des personnes vivant en union de fait ont dit savoir que leur partenaire avait déjà vécu une autre union de fait, mais seulement environ 2 p. cent des personnes mariées ont répondu savoir que leur partenaire avait déjà vécu en union de fait.

Tableau 9
Répartition des participants à l’enquête en fonction d’une union de fait antérieure du conjoint/ de la conjointe et en fonction de la nature actuelle de la relation du couple
Actuellement marié(e), séparé(e) ou divorcé(e)
Femmes Hommes Total des
participants à l’enquête
% de l’échantillon total
Union de fait antérieure 2
3 %
1
2 %
3
3 %
2 %
Aucune union de fait antérieure 59
88 %
44
88 %
103
88 %
76 %
Ne sait pas 6
9 %
5
10 %
11
9 %
8 %
Aucune donnée 18
13,3 %
Totaux 67
100 %
50
100 %
117
100 %
135
100 %

Vivant actuellement en union de fait
Femm. Hom. Total des
participants à l’enquête
% de
l’échant. total
Union de fait antérieure 9
18 %
4
11 %
13
15 %
15 %
Aucune union de fait antérieure 39
80 %
34
90 %
73
83,9 %
83,9 %
Ne sait pas 1
2 %
0 1
1 %
1 %
Aucune donnée 0
Totaux 49
100 %
38
100 %
87
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

Tableau 10
Répartition des relations de couple en fonction de la situation matrimoniale du conjoint/de la conjointe au début de la relation
Actuellement marié(e), séparé(e) ou divorcé(e)
Femmes Hommes Total des participants à l’enquête Total de l’échant.
Veuf/veuve 0 0 0 0
Séparé(e) 0 0 0 0
Divorcé(e) 2
3 %
2
4 %
4
4 %
4
3 %
Célibataire 62
95 %
48
96 %
110
96 %
110
82 %
Ne sait pas 1
2 %
0 1
1 %
1
1 %
Aucune donnée - - - 20
15 %
Totaux 65
100 %
50
100 %
115
100 %
135
100 %

  Vivant actuellement en union de fait
Femmes Hommes Total des participants à l’enquête Total de l’échant.
Veuf/veuve 0 1 1 1
Séparé(e) 3
6 %
2
5 %
5
6 %
5
Divorcé(e) 2
4 %
0 2
2 %
2
Célibataire 44
90 %
35
92 %
79
91 %
79
Ne sait pas 0 0 0 0
Aucune donnée - - - 0
Totaux 49
100 %
38
100 %
87
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

3.3.3    Les enfants d’une relation de couple antérieure

Il est révélateur d’examiner le contraste entre ces résultats et le nombre beaucoup plus élevé de participants à l’enquête qui déclarent que leur conjoint(e) a eu des enfants de relations antérieures. De plus, les taux supérieurs de réponse indiquent que les participants se sentaient plus à l’aise pour aborder le sujet.

Les données du tableau 11 semblent indiquer que les Nunavummiuts qui vivent en union de fait ont généralement plus d’enfants d’une relation antérieure que ceux qui vivent une relation de personnes mariées. Un nombre sensiblement plus élevé d’hommes que de femmes ont affirmé que leur partenaire avait introduit dans la relation des enfants issus d’une relation antérieure (environ deux fois plus)[74]. Quand ces données se conjuguent à celles portant sur des relations de couple antérieures, il semble que, dans un nombre important de cas, les parents ont des enfants en dehors de toute relation de couple. Nous aborderons à nouveau ce sujet dans le chapitre sur les enfants.

Tableau 11
Répartition des participants à l’enquête en fonction des conjoints ayant eu des enfants d'une relation de couple antérieure
Actuellement marié(e), séparé(e)
ou divorcé(e)
Femmes Hommes Total des participants à l’enquête/strong> Total de l’échant.
Enfants d’une relation antérieure 3
5 %
9
18 %
12
11 %
9 %
Aucun enfant d’une relation antérieure 55
90 %
39
81 %
94
86 %
74 %
Ne sait pas 3
5 %
1
2 %
4
4 %
3 %
Aucune donnée - - - 25
19 %
Totaux 61
100 %
49
100 %
110
100 %
135
100 %

Vivant actuellement en union de fait
Femmes Hommes Total des participants à l’enquête Total de l’échant.
Enfants d’une relation antérieure 9
20 %
13
38 %
20
28 %
23 %
Aucun enfant d’une relation antérieure 34
74 %
20
59 %
54
68 %
62 %
Ne sait pas 3
7 %
1
3 %
4
5 %
5 %
Aucune donnée - - - 7
8 %
Totaux 46
100 %
34
100 %
80
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

Comme il a été indiqué précédemment, de récentes réformes législatives au Nunavut (à l’instar de lois adoptées presque partout au Canada) reconnaissent l’importance des unions de fait en accordant aux conjoints des droits pratiquement égaux aux droits des personnes mariées en ce concerne la pension alimentaire pour conjoint, le partage des biens matrimoniaux et un éventail d’avantages sociaux[75]. Cette reconnaissance vise à faire en sorte que les personnes qui vivent en union de fait ne soient pas privées des moyens juridiques leur permettant, au moment d’une séparation, de partager équitablement les avantages accumulés pendant la relation. Cependant, comme nous le verrons plus loin, ce cadre juridique semble avoir, dans les faits, une portée bien limitée.

3.3.4    Les attentes liées au mariage

On peut se demander si l’égalité juridique qui prévaut entre les personnes mariées et celles qui vivent en union de fait modifie la perception qu’ont les gens du mariage comme une option souhaitable ou du moins comme une option probable.

Le groupe le plus important a dit penser se marier un jour; mais ces personnes comptaient pour moins de la moitié des personnes non mariées. À peine un peu plus du quart des autres ne s’attendaient pas à se marier un jour et un nombre important de participants ignoraient ce que leur réservait l’avenir. (Voir le tableau 12). On peut interpréter ces résultats de bien des façons.

Tableau 12
Attentes liées au mariage des participants à l'enquête non mariés ou vivant en union de fait
Le mariage est-il une option pour vous? Femmes Hommes Total
Oui 35
39 %
36
54 %
71
46 %

Non

26
29 %
17
25 %
43
28 %

Peut-être

8
9 %
3
5 %
11
7 %

Ne sait pas

20
23 %
11
16 %
31
20 %
Total 89
100 %
67
100 %
156
100 %

N=156 participants à l’enquête célibataires ou vivant en union de fait. Aucune de ces personnes n’a jamais été mariée.