Analyse des options concernant la modification de la réglementation légale de la garde et du droit de visite des enfant

2001-FCY-2E

OBJECTIFS ET DÉFIS DE LA RÉFORME (suite)

AUTRES ADMINISTRATIONS (suite)

La Family Law Reform Act de l'Australie (suite)

Évaluation

Un rapport préliminaire sur la Family Law Reform Act a tenté d'évaluer certains des effets immédiats et à long terme de la loi sur une période de trois ans.

Litiges

Les statistiques des tribunaux de la famille laissent croire qu'il y a eu une augmentation des demandes d'ordonnances de résidence, d'ordonnances de contact et d'ordonnances spéciales depuis l'entrée en vigueur de la loi. Ces chiffres montrent aussi une progression constante des demandes faisant suite au non-respect présumé de l'ordonnance visant l'enfant (voir le tableau 1).

Tableau 1 Ordonnances parentales en Australie
Année
Nombres d'ordonnances de contact demandées (125)
Nombre d'ordonnances de résidence et d'ordonnances spéciales demandées (126)
Nombre d'ordonnances faisant suite au non-respect de l'ordonnance visant l'enfant (127)
1994-1995
14 144
13 315
s/o
1995-1996
13 814
12 595
786
1996-1997
21 897
33 304
1 434
1997 - 1998
23 958
38 411
1 659

Les avocats interrogés dans le cadre de cette étude étaient également persuadés qu'il y avait eu une intensification des litiges entre parents à la suite d'ordonnances parentales.

[Traduction]

La majeure partie de ces litiges avaient été introduits par des pères chez qui l'enfant n'habitait pas. Certains ont affirmé que ce phénomène s'expliquait par les espoirs déçus et l'amertume croissante des pères qui avaient cru obtenir plus de droits en vertu de ces réformes ou qui estimaient que les mères ne partageaient pas adéquatement les responsabilités décisionnelles. D'autres ont déclaré que les différends étaient attribuables aux pères qui s'attendaient à ce que les mères s'occupent de presque tout mais qui saisissaient la moindre occasion pour critiquer les soins qu'elles donnaient aux enfants ou le manque de consultation dans les décisions quotidiennes(128).

Les avocats interviewés par les auteurs de l'étude australienne ont également fait savoir que certaines des demandes faisaient suite à des manquements mineurs ou « techniques » aux ordonnances, demandes qu'on n'aurait jamais vues avant les réformes(129).

Contacts

Le régime australien établit le principe général que l'enfant a le droit d'avoir des contacts réguliers avec ses deux parents, principe qui s'appliquerait seulement dans le cas où il n'est pas contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant(130). Ce droit de contact est un des aspects les plus controversés de la Family Law Reform Act de 1995. Bien que certains aient pu faire valoir qu'il s'agissait d'une évolution positive visant à faire en sorte que le parent avec qui l'enfant n'habite pas puisse s'impliquer dans la vie de son enfant, d'autres se disent inquiets des risques d'abus.

[Traduction]

Tout d'abord, on a craint que les réformes fournissent au parent non gardien qui souhaitait harceler son ancien conjoint la possibilité de demander des ordonnances relatives aux détails des soins que l'autre donne aux enfants. Deuxièmement, conjugué aux prescriptions légales de partage et d'entente entre les parents, le droit de l'enfant en matière de contacts était vu comme un autre moyen d'exercer des pressions sur la mère qui s'inquiète avec raison du bien-être de son enfant dans une entente qui compromet sa propre sécurité et l'intérêt supérieur de l'enfant(131).

Contrairement aux tribunaux du Royaume-Uni, toutefois, le Tribunal de la famille de l'Australie a statué que le droit de l'enfant en matière de contacts était restreint par son intérêt supérieur(132). Les dispositions du paragraphe 60B(2) ont été interprétées par le tribunal de manière non pas à créer une présomption en faveur des contacts mais plutôt à établir un contexte pour l'examen de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Le rapport préliminaire a permis de constater que le pourcentage d'ordonnances refusant les contacts durant les audiences provisoires avait considérablement baissé depuis l'entrée en vigueur de la réforme. En revanche, le taux de refus dans les ordonnances provisoires n'avait pas changé notablement.

[Traduction]

Même si la majorité des demandes provisoires de contact soulèvent l'existence d'un risque de dommages pour l'enfant, habituellement en raison de la violence conjugale, il est rare dorénavant que les contacts soient refusés durant l'audience sur les mesures provisoires. Dans certaines régions, les ordonnances postérieures à la réforme permettant à l'enfant de vivre une semaine avec chaque parent jusqu'à l'ordonnance finale sont assez fréquentes et ont été rendues malgré des accusations de violence conjugale. Les tribunaux ont justifié ces ordonnances en expliquant qu'il serait injuste de créer un statu quo en faveur d'un parent avant que les accusations n'aient été entendues au stade final(133).

Selon le rapport, il est clair que cette modification dans les ordonnances provisoires est au moins en partie imputable aux principes mis de l'avant par la réforme, particulièrement le droit aux contacts énoncé à l'alinéa 60B(2)b) et l'idée d'une « égalité » entre les parents, qui serait conforme à l'esprit des réformes(134). Bien que l'incidence de ce droit aux contacts n'ait pas été aussi marquée qu'au Royaume-Uni, il semble exister au moins certaines raisons de s'interroger sur la façon dont le principe est mis en application en cas de violence familiale, surtout à l'étape provisoire.

Ententes parentales

Le rapport préliminaire montre que les ententes parentales ne sont pas utilisées. De fait, l'étude fait même état d'une baisse des ententes privées depuis l'entrée en vigueur des réformes.

[Traduction]

C'est au chapitre des ententes parentales que les modifications législatives semblent avoir eu, au plus, des conséquences minimales sur la pratique des avocats. Seulement trois des avocats interviewés avaient aidé les parties à rédiger une entente parentale, et seulement une de ces ententes avait été ensuite enregistrée au greffe. De même, une vaste majorité des avocats qui ont répondu aux questionnaires (91 %) ont signalé qu'ils utilisaient moins souvent les ententes parentales que les ententes familiales antérieures à la réforme. Cette constatation est étayée par les statistiques du Tribunal de la famille, où le nombre d'ententes parentales est de loin inférieur aux ententes familiales enregistrées avant la réforme(135).

Les avocats ont souvent mentionné la lourdeur des formalités d'enregistrement et de modification du régime australien pour justifier le non-recours à ces ententes.

Les modifications apportées à la Family Law Act en vue d'inclure les ententes parentales semblent donc ne pas avoir permis d'atteindre les objectifs généraux, soit d'encourager les ententes privées et de réduire les conflits.

Dispositions sur la violence

Ces dispositions, qui visent à établir le rapport entre les ordonnances rendues par le Tribunal de la famille et les ordonnances sur la violence familiale prononcées par les tribunaux sommaires en vertu des lois d'État, ont été critiquées en raison de leur complexité injustifiée. Le rapport préliminaire a constaté que les tribunaux se servaient rarement des dispositions de la division 11 de la loi. Les juges et les avocats ont déclaré que cette division était trop complexe et trop lourde. Le rapport cite un examen récent du fonctionnement de la division 11, qui a conclu que l'article 68R était rarement utilisé(136). Un examen des jugements non publiés a permis de conclure également que, si l'existence des ordonnances sur la violence familiale est généralisée dans les procédures sur les contacts, la division 11 est rarement invoquée par le tribunal lorsque vient le moment de déterminer les arrangements appropriés au chapitre des contacts, et aucun des jugements n'a mentionné l'article 68K(137).

La Domestic Relations Act du Maine

Ordonnances sur les droits et les responsabilités des parents

Dans la Domestic Relations Act, le législateur du Maine remplace les ordonnances sur la garde et le droit de visite par des ordonnances sur les droits et les responsabilités des parents. La loi dispose qu'une ordonnance judiciaire accordant des droits et des responsabilités aux parents doit attribuer des droits et responsabilités répartis, partagés ou exclusifs.

Les premiers sont définis comme suit :

[Traduction]

Responsabilités à l'égard de divers aspects du bien-être de l'enfant qui sont réparties entre les parents, celui à qui une responsabilité particulière est confiée ayant le droit de contrôler cet aspect. Les responsabilités peuvent être divisées de façon exclusive ou proportionnelle. Les aspects du bien-être de l'enfant pour lesquels la responsabilité peut être répartie comprennent la résidence physique principale de l'enfant, les contacts avec les parents, la pension alimentaire, l'éducation, les soins médicaux et dentaires, l'enseignement religieux, les limites et dépenses de déplacements ainsi que tout autre aspect des droits et responsabilités des parents. Le parent qui assume une responsabilité pour un aspect particulier du bien-être de l'enfant peut être tenu d'informer l'autre parent de l'évolution importante de cet aspect(138).

Les droits parentaux partagés sont définis comme suit :

[Traduction]

(5) La totalité ou la quasi-totalité des aspects du bien-être de l'enfant demeurent la responsabilité et le droit conjoints des deux parents, de sorte que le père comme la mère conservent des responsabilités et des droits égaux, qu'ils se consultent tous deux et prennent des décisions concertées à l'égard du bien-être de l'enfant. Il peut s'agir notamment de l'éducation, de l'enseignement religieux, des soins médicaux, dentaires et mentaux, des déplacements, du gardiennage et de la résidence. Les parents partageant leurs droits et responsabilités doivent se garder mutuellement informés de tout changement important ayant une incidence sur le bien-être de l'enfant et se consulter au préalable dans la mesure du possible pour toute décision touchant ce bien-être(139).

Le partage des droits et responsabilités peut inclure l'attribution de la résidence principale de l'enfant à un seul parent et les droits relatifs aux contacts avec l'autre, ou encore partager les soins résidentiels primaires entre les deux parents(140).

Les droits parentaux exclusifs sont définis comme suit :

[Traduction]

(6) Un parent possède tous les droits et responsabilités à l'égard de tous les aspects du bien-être de l'enfant, à l'exception possible du droit et de la responsabilité à l'égard de la pension alimentaire.

La loi n'établit aucune présomption ou préférence en faveur d'une de ces trois ordonnances. Le paragraphe 1653(D)(1) stipule que le tribunal devrait fonder sa décision sur l'intérêt supérieur de l'enfant(141). Il précise toutefois ce qui suit : [Traduction] « lorsque les parents se sont entendus sur le partage de leurs droits et responsabilités ou qu'ils s'entendent à l'audience, le tribunal doit prononcer une ordonnance en conséquence, à moins que des éléments de preuve importants montrent qu'il ne devrait pas rendre cette ordonnance. »(142) L'article dispose en outre que le tribunal doit motiver sa décision de ne pas ordonner le partage des droits et responsabilités dont avaient convenu les parents. Le régime du Maine crée donc une présomption favorable à l'application des ententes parentales survenues entre le père et la mère.

Violence

La Domestic Relations Act du Maine contient plusieurs dispositions visant expressément la violence familiale, notamment l'énoncé général suivant de la conclusion et de l'intention du législateur concernant les relations entre les membres de la famille lorsqu'il s'agit de déterminer l'intérêt supérieur de l'enfant :

[Traduction]

La législature estime que la violence familiale constitue un crime grave contre l'individu et la société, qu'elle engendre un environnement familial malsain et dangereux, donnant lieu à des mauvais traitements de plus en plus prononcés, dont des actes de violence qui se soldent souvent par un homicide au sein de la famille, et qu'elle crée un environnement peu propice au développement normal de l'enfant(143).

La pertinence de la violence familiale est visée très précisément au paragraphe 1653(6) :

[Traduction]

Un tribunal peut accorder la résidence primaire d'un enfant mineur ou des contacts avec un enfant mineur à un parent qui a commis des actes de violence familiale uniquement si le tribunal estime que les contacts sont dans l'intérêt supérieur de l'enfant et que des mesures adéquates sont prises pour assurer la sécurité de l'enfant et celle du parent qui est victime de violence. [L'italique est de nous.]

La loi traite aussi abondamment des conditions qui entourent les contacts parents-enfants dans le contexte de la violence familiale, établissant et autorisant un éventail de mesures de protection bien précises(144). Le tribunal peut ainsi imposer une série de restrictions et de conditions en ce qui a trait aux contacts, y compris la supervision obligatoire, la nécessité de les tenir dans un cadre protégé et l'interdiction des séjours de nuit. Il peut aussi ordonner des mesures de protection supplémentaires, notamment que l'adresse de l'enfant et de la victime de la violence reste confidentielle.

Aucun document d'évaluation de l'incidence de la loi du Maine n'était disponible.

La Parenting Act de 1987 de l'État de Washington

Aperçu général

Dans l'État de Washington, la Parenting Act de 1987 a remplacé la garde et le droit de visite par un régime fondé sur les ententes parentales. La loi constitue un code exhaustif réglementant les pratiques parentales après la séparation et le divorce. Elle prescrit le contenu des ententes parentales, les critères dont devraient se servir les tribunaux pour évaluer et approuver ces ententes ou répartir les fonctions parentales en cas d'absence d'entente entre les parents, ou les deux. Elle contient également des dispositions détaillées sur les limites entourant la répartition des fonctions parentales dans le cadre des ententes. La loi débute par l'énoncé de principe suivant :

[Traduction]

Les parents ont la responsabilité de prendre les décisions et d'exercer les fonctions parentales nécessaires pour prendre soin de leurs enfants mineurs et leur permettre de s'épanouir. Dans toute procédure prévue dans le présent chapitre et mettant en cause les parents, le tribunal accordera préséance à l'intérêt supérieur de l'enfant lorsqu'il doit déterminer et répartir les responsabilités parentales. L'État reconnaît l'importance fondamentale des liens parent-enfant pour le bien-être de l'enfant, et la relation entre celui-ci et chacun de ses parents devrait être favorisée à moins d'être contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant. Il est dans l'intérêt de l'enfant que soit conclu l'arrangement parental répondant le mieux à la croissance, à la santé et à la stabilité émotionnelles ainsi qu'aux besoins physiques de l'enfant. En outre, l'intérêt supérieur de l'enfant est respecté lorsque l'interaction entre un parent et un enfant est modifiée seulement dans la mesure rendue nécessaire par la nouvelle relation des parents ou en vue de protéger l'enfant contre un préjudice physique, mental ou émotionnel.

Ententes parentales

L'entente parentale constitue le point central de la loi de l'État de Washington. Le législateur exige que tous les parents en instance de séparation déposent une entente parentale qui répartit les fonctions parentales(145).

La loi définit les fonctions parentales comme étant les aspects de la relation parent-enfant où le parent prend les décisions et exerce les fonctions nécessaires pour prendre soin de l'enfant et l'aider à s'épanouir. Les fonctions parentales incluent ce qui suit :

  • (a) Préserver une relation affectueuse, stable et cohérente avec l'enfant;
  • (b) Répondre aux besoins quotidiens de l'enfant, comme la nourriture, les vêtements, les soins physiques et l'hygiène personnelle, l'encadrement, les soins de santé et le gardiennage, la participation à des activités appropriées compte tenu du développement de l'enfant et de la situation socio-économique de sa famille;
  • (c) Veiller à l'éducation de l'enfant, c'est-à-dire lui fournir les services d'appui essentiels;
  • (d) Aider l'enfant à établir et à préserver des relations interpersonnelles appropriées;
  • (e) Exercer un jugement approprié relativement au bien-être de l'enfant, conformément à son niveau de développement ainsi qu'à la situation socio-économique de la famille;
  • (f) Subvenir aux besoins financiers de l'enfant(146).

Toutes les ententes parentales doivent comporter un calendrier de séjour, une répartition du pouvoir décisionnel et un mécanisme de résolution des conflits entre les parents(147).

La loi prévoit que l'entente parentale doit attribuer le pouvoir décisionnel à une des parties ou aux deux en ce qui concerne l'éducation de l'enfant, les soins de santé et l'enseignement religieux. Les parties peuvent y intégrer un accord sur les soins à donner à l'enfant et sur son épanouissement dans certains domaines. Peu importe l'attribution du pouvoir décisionnel, l'un ou l'autre parent peut prendre les décisions en cas d'urgence touchant la santé ou la sécurité de l'enfant. La loi dispose également que chaque parent peut prendre des décisions sur les soins quotidiens donnés à l'enfant lorsqu'il habite chez lui; dans le cas où aucun consensus ne se dégage, les parties doivent en toute bonne foi tenter de résoudre la question au moyen du processus de résolution des conflits(148).

Sur le plan de la résidence, l'entente parentale doit prévoir un calendrier de séjour qui désigne le foyer de chaque parent où l'enfant doit habiter certains jours précis de l'année, y compris les jours fériés, les anniversaires des membres de la famille, les vacances et toute autre occasion spéciale(149).

Critères pour la répartition des fonctions parentales

La Parenting Act de l'État Washington présente une caractéristique qui lui est propre : elle fixe des critères pour l'évaluation de la répartition des différents aspects de la responsabilité parentale dans l'entente parentale. Bien que l'intérêt supérieur de l'enfant demeure le principe directeur général, la loi recense des facteurs spécifiques qui doivent être pris en compte dans l'attribution du pouvoir décisionnel et la détermination de l'endroit où habitera l'enfant.

Résolution des conflits.

En prescrivant un processus de résolution des conflits, le législateur enjoint au tribunal de considérer tous les facteurs pertinents, dont les différences entre les parents qui restreindraient considérablement leur participation efficace au processus désigné; les souhaits des parents ou leurs ententes; s'ils se sont entendus, le fait que l'entente est le résultat d'une décision éclairée et volontaire; les différences dans la situation financière des parents qui peuvent nuire à leur capacité de participer pleinement au processus de résolution des conflits(150).

Pouvoir décisionnel.

Il incombe au tribunal d'approuver l'entente sur l'attribution du pouvoir décisionnel s'il estime qu'elle est le résultat d'une décision éclairée et volontaire. Le tribunal confiera à une seule personne ce pouvoir décisionnel si les parents rejettent une prise de décisions conjointe ou si l'un des deux s'y oppose pour des motifs valables.

Dans la répartition du pouvoir décisionnel entre les parents, la loi enjoint alors au tribunal de considérer la participation antérieure de chacun dans la prise de décisions, le fait que les parents ont montré leur capacité et leur désir de coopérer pour prendre les décisions, et la distance géographique, dans la mesure où elle peut affecter leur capacité à prendre des décisions conjointes au moment opportun(151).

Calendrier de séjour.

Sur ce plan, la loi enjoint au tribunal d'ordonner des arrangements résidentiels qui encouragent le maintien, par chaque parent, d'une relation affectueuse et stable avec l'enfant, compatible avec son développement et la situation socio-économique de la famille. Le tribunal doit aussi prendre en considération ce qui suit :

  • (i) La vigueur relative, la nature et la stabilité de la relation de l'enfant avec chaque parent, y compris la responsabilité plus grande assumée par un parent dans l'exercice de ses fonctions relatives aux besoins quotidiens de l'enfant;
  • (ii) Les ententes entre les parties, pourvu qu'elles soient le fruit d'une décision éclairée et volontaire;
  • (iii) Le comportement antérieur du parent et son potentiel dans l'exercice futur de ses fonctions parentales;
  • (iv) Les besoins émotionnels et le niveau de développement de l'enfant;
  • La relation de l'enfant avec ses frères et soeurs ainsi qu'avec d'autres adultes importants dans sa vie, sa présence dans son milieu physique, son école ou d'autres activités importantes;
  • (v) Les souhaits des parents et ceux de l'enfant suffisamment mûr pour exprimer une préférence raisonnée et autonome quant à son calendrier de séjour;
  • (vi) L'horaire de travail de chaque parent, compte tenu des accommodements compatibles avec ces horaires.

Le facteur (i) doit avoir préséance(152).

Tout en énumérant une longue liste de facteurs qui doivent être pris en considération lorsqu'il faut déterminer où l'enfant habitera, le régime de Washington accorde la plus grande importance à la relation de l'enfant avec le parent avec lequel il est destiné à habiter, y compris la question de savoir lequel des deux parents est le principal responsable des soins à donner à l'enfant(153).

Restrictions frappant les ententes parentales

La Parenting Act de 1987 de l'État de Washington établit quelques restrictions frappant les ententes parentales provisoires et permanentes : toutes les dispositions mentionnées plus haut sur la désignation d'un processus de règlement des différends, la répartition du pouvoir décisionnel et le calendrier de séjour de l'enfant font l'objet de ces restrictions. Ces dernières visent à garantir la protection des enfants et des parents vulnérables face aux préjudices que peuvent causer la violence, les mauvais traitements émotifs, les conflits graves et l'exercice inadéquat des responsabilités parentales.

La loi dispose que l'entente parentale ne peut exiger la prise de décisions conjointe ni la désignation d'un mécanisme de résolution des conflits autre qu'un tribunal et que le temps de séjour de l'enfant chez un parent peut être limité si ce parent a eu un des comportements suivants :

  • (a) abandon délibéré qui se poursuit pendant une longue période ou le refus appréciable d'exercer ses fonctions parentales;
  • (b) mauvais traitements de nature physique, sexuelle ou émotionnelle envers l'enfant;
  • (c) gestes de violence conjugale au sens légal, ou voies de fait causant des lésions corporelles graves ou engendrant la crainte de telles lésions(154).

Le temps de séjour chez un parent est également limité si celui-ci a été reconnu coupable, à l'âge adulte, d'une infraction sexuelle à une des lois de l'État en la matière(155). Le législateur a décidé que le séjour de l'enfant chez son père ou sa mère sera limité également si le parent habite avec une personne qui a eu un des comportements énoncés(156).

Toute limite imposée par le tribunal au temps de séjour de l'enfant chez un parent sera calculée raisonnablement, de manière à protéger l'enfant contre des dommages ou des mauvais traitements physiques, sexuels ou émotionnels qui pourraient découler de ses contacts avec le parent qui demande à ce qu'il séjourne chez lui. Si le tribunal constate que la limite n'assurera pas une protection adéquate, il peut empêcher tout contact avec le parent(157). Dans le cas où le tribunal est convaincu que les contacts avec le parent ne causeront aucun dommage physique, sexuel ou émotionnel à l'enfant et que la probabilité que les mauvais traitements se répètent est tellement faible qu'il ne serait pas dans l'intérêt supérieur de l'enfant d'imposer des limites, le tribunal n'est pas tenu de le faire(158).

La loi prévoit par ailleurs que le tribunal peut limiter toute disposition contenue dans l'entente parentale, advenant un des facteurs suivants :

Le régime législatif de l'État de Washington s'intéresse non seulement à la violence comme facteur limitatif, mais il est aussi un des seuls à mentionner les facteurs qui nuiraient à la coopération dans une famille à haute incidence de conflits. C'est aussi un des rares régimes à traiter expressément des problèmes associés à l'exercice inadéquat des responsabilités parentales, comme la négligence, la non-exécution appréciable des fonctions parentales et la toxicomanie. La désignation d'un mécanisme de règlement des conflits autre que le tribunal, la prise de décisions mutuelle et même le calendrier de séjour de l'enfant sont expressément limités par l'existence d'un abandon délibéré ou le refus de s'acquitter de ses responsabilités parentales, de même que des mauvais traitements physiques, sexuels ou émotionnels. La loi laisse également au tribunal un pouvoir discrétionnaire considérable pour restreindre par ailleurs le processus de résolution des différends, le partage des décisions et le calendrier de séjour de l'enfant s'il constate l'existence d'un des comportements ou préjudices visés.

Évaluation du texte législatif

Une vaste évaluation de la loi de l'État de Washington est en cours en ce moment, et les résultats n'en sont pas encore disponibles. Plusieurs petites études portent à croire jusqu'à maintenant que la loi s'est traduite par certaines changements dans l'attribution du pouvoir décisionnel, sans modifier toutefois notablement les calendriers de séjour des enfants.

Au moyen de 300 dossiers, Jane Ellis a étudié les retombées de la Parenting Act durant ses premières années d'existence(160). Elle a constaté une hausse marquée du nombre d'ordonnances ou d'ententes parentales qui prévoyaient la prise de décision conjointe(161). Les arrangements de séjour chez les deux parents avaient progressé de 3 à 20 %, tandis que la garde accordée à la mère avait baissé de 79 à 70 % et aux pères, de 18 à 10 %. Cependant, Ellis a découvert que les parents n'avaient recours qu'à un éventail limité d'horaires de séjour différents pour la semaine. Ainsi, dans 41 % des dossiers, l'enfant séjournait toutes les deux fins de semaine chez le parent avec qui il n'habitait pas et, dans 26 % des cas, s'ajoutait une journée de visite la semaine ou toutes les deux semaines. Les modalités de contact n'étaient pas notablement différentes de celles qui sont habituellement négociées dans les régimes de garde et de droit de visite.

Le docteur John Dunne, psychiatre et membre du comité de rédaction de la Parenting Act, a effectué une étude plus récente, mais de plus petite envergure. Elle portait sur 50 couples ayant divorcé durant la première année où les ententes parentales étaient devenues obligatoires dans l'État de Washington et sur 50 familles qui avaient vécu un divorce l'année précédente. Cette étude n'a mis en lumière aucun effet positif de la loi sur la qualité de la relation entre l'enfant et ses parents après le divorce(162). Dunne fait remarquer que certaines des exigences légales spécifiques ont pu empêcher d'atteindre les objectifs, par exemple le fait que les parents doivent négocier tant une entente parentale provisoire qu'une entente permanente.

Diane Lye procède actuellement à une évaluation des conséquences de la Parenting Act; elle a comparu devant le Comité mixte spécial. Dans ses observations, elle a distingué l'incidence de la loi sur les parents ayant de bons moyens financiers, le temps et l'argent nécessaires pour rencontrer des experts et mettre au point des ententes qui répondent réellement à leurs besoins, d'une part, et sur les parents à faible revenu que la loi désavantage, d'autre part(163).

Propositions de l'American Law Institute

L'American Law Institute (ALI) vient de publier un projet de propositions relatives aux règles régissant les enfants en cas de dissolution de la famille(164). Dans ses propositions, l'organisme recommande l'adoption d'un régime parental très semblable à celui qu'a instauré la Parenting Act de l'État de Washington, axé fondamentalement sur les ententes parentales : l'ALI recommande que tous les parents en instance de divorce ou de séparation qui demandent une ordonnance parentale soient tenus de présenter une entente parentale. Les ententes conjointes doivent aussi être approuvées par le tribunal; si le père et la mère ne peuvent pas s'entendre, ce dernier formulera l'entente à laquelle ils seront assujettis(165).

Une entente parentale doit énoncer les arrangements de garde, préciser la durée du séjour de l'enfant avec chaque parent et les détails du pouvoir décisionnel, en spécifiant quel parent doit prendre les décisions importantes relatives à l'éducation de l'enfant, aux soins de santé et à d'autres sujets d'importance. L'entente doit également désigner un mécanisme de résolution des différends.

Si les parents sont dans l'impossibilité de parvenir à une entente, l'ALI propose des critères que le tribunal devrait prendre en considération dans l'élaboration de l'entente. La répartition de la responsabilité en matière de garde doit être déterminée en fonction de la « règle d'approximation », c'est-à-dire que le tribunal effectuera cette répartition pour faire en sorte que la proportion du temps passé par l'enfant avec chacun reflète à peu près le temps que consacraient le père et la mère aux soins donnés à l'enfant avant la séparation(166). L'attribution du pouvoir décisionnel, par contre, doit être faite en fonction de l'intérêt supérieur de l'enfant, compte tenu spécifiquement des éléments suivants : a) la répartition de la responsabilité de garde; b) le degré de participation de chaque parent aux décisions antérieures touchant l'enfant; c) les souhaits des parents; d) la capacité et le niveau de coopération dont les parents ont fait preuve dans la prise de décisions concernant l'enfant; d) les ententes antérieures des parties; f) l'existence de facteurs limitatifs(167).

Comme la loi de l'État de Washington, les propositions de l'ALI s'assortissent d'une série de facteurs qui limiteraient l'attribution de la responsabilité parentale. Il s'agit notamment des mauvais traitements, de la négligence et de l'abandon de l'enfant, de la violence conjugale, de la toxicomanie et de l'ingérence persistante dans l'exercice des droits de visite(168). Si un parent a commis l'un ou l'autre de ces actes, le tribunal devra imposer des limites qui seront raisonnablement calculées pour protéger l'enfant ou l'autre parent contre tout risque de préjudice. Ces limites comprennent la restriction de la responsabilité parentale, le séjour supervisé, l'échange protégé, le refus d'accorder la responsabilité parentale pour des séjours de nuit et la réussite d'un programme pour parents violents ou toxicomanes. L'ALI recommande également que le tribunal, si le parent a commis un de ces actes, ne puisse pas attribuer la responsabilité de séjour ou le pouvoir décisionnel à ce parent sans avoir conclu par écrit expressément que l'enfant et l'autre parent peuvent être adéquatement protégés.