Soutenir les victimes d’actes criminels à participer à la justice réparatrice

Par Nadine Badets

Cet article examine la manière dont les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux du Canada s’efforcent d’accroître et d’améliorer la participation des victimes d’actes criminels aux processus de justice réparatrice (JR).

Qu’est-ce que la justice réparatrice?

La JR traite les torts causés par le crime aux personnes, aux relations et aux collectivités. Pour ce faire, elle réunit la victime, l’auteur de l’acte criminel et la collectivité pour discuter des causes, des circonstances et des répercussions du crime, ainsi que pour répondre à leurs besoins. Il n’existe aucun processus standard de la JR; elle est flexible et offre de multiples possibilités de participation. Les processus de JR visent les objectifs suivants :

  • permettre à toutes les personnes touchées par le crime de tourner la page;
  • permettre au délinquant de s’amender de son crime;
  • permettre au délinquant de se réinsérer dans la collectivité. Ils tentent également d’empêcher les récidives ultérieures (ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Justice et de la Sécurité publique, 2018).

Les victimes et les survivants d’actes criminels déclarent souvent se sentir exclus et isolés par le processus judiciaire pénal (Justice Canada, 2019). Grâce aux processus de JR, les victimes et les survivants d’actes criminels, ainsi que leurs familles et leurs collectivités, peuvent travailler à leur guérison. Les victimes et les survivants qui ont participé à des processus de JR déclarent souvent sentir que la JR leur redonne un pouvoir en leur donnant l’occasion de participer à la prise de décision (Abramson, Giesbrecht et Palfreyman, 2019). Bien que les victimes et les survivants ne soient pas toujours satisfaits des processus de JR, cette dernière peut leur apporter un soutien leur permettant de tourner la page et de guérir (Bargen, Lyons et Hartman, 2019; Evans, McDonald et Gill, 2018).

Il y a une utilisation limitée de la JR dans le système de justice pénale (SJP) canadien pour lutter contre la criminalité. Par exemple, en 2018-2019, 28 603 causes d’adultes et de jeunes ont été acceptées dans des processus de JR (Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la justice réparatrice, 2021). En revanche, en 2018-2019, les tribunaux pour adultes de juridiction criminelle et les tribunaux de la jeunesse ont traité et réglé 340 104 causes (Statistique Canada, s.d.a; Statistique Canada, s.d.b)Note de bas de page47.

En 2018, les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux (FPT) responsables de la justice et de la sécurité publique se sont fixé pour objectif d’augmenter d’au moins 5 pour cent le recours aux processus de JR dans l’ensemble du Canada d’ici 2022-2023 (Groupe de travail FPT sur la justice réparatrice, 2020; Groupe de travail FPT sur la justice réparatrice, 2021). Pour ce faire, nous devons mieux comprendre comment les victimes et les survivants d’actes criminels accèdent à la JR, afin de définir les lacunes dans les services et les obstacles systémiques et procéduraux qui entravent l’accès à la JR.

Cet article explique la manière dont les gouvernements FPT s’efforcent d’accroître et d’améliorer l’accès des victimes et des survivants d’actes criminels aux processus de JR.

Le sondage

Entre janvier et février 2022, Justice Canada a distribué un sondage intitulé Faciliter la participation des victimes d’actes criminels aux processus de justice réparatrice (« le sondage »). Justice Canada a envoyé le sondage aux représentants des gouvernements FPT qui travaillent avec les victimes d’actes criminels et qui soutiennent, financent ou mettent en œuvre des programmes de JR. Il s’agit notamment de membres du Groupe de travail FPT sur les victimes d’actes criminels. L’objectif principal de ce sondage était de recueillir des informations sur les activités, les politiques, la recherche et les partenariats qui ont permis d’accroître et d’améliorer la participation des victimes aux programmes de JR dans l’ensemble du Canada.

Le questionnaire du sondage était divisé en huit thèmes :

  • renforcer la sensibilisation auprès des victimes d’actes criminels;
  • renforcer la sensibilisation auprès des professionnels du SJP;
  • messages clés;
  • engagement;
  • partenariats;
  • recherche;
  • politiques, règlements, procédures et protocoles;
  • outils, documents et ressources.

Les questions de chaque thème demandaient aux répondants d’indiquer les activités menées par leur administration pour mieux faire connaître les processus de JR, les difficultés rencontrées et les leçons apprises, ainsi que les suggestions ou les projets pour améliorer la participation des victimesNote de bas de page48 à la JR. Des représentants de quatre ministères fédéraux, de huit gouvernements provinciaux et des trois gouvernements territoriaux ont répondu au sondage, soit un total de 19 répondantsNote de bas de page49.

La section suivante résume les résultats du sondage en fonction des thèmes abordés. Elle fait également état de plusieurs difficultés auxquelles les administrations sont confrontées pour améliorer l’accès des victimes à la JR. La dernière section présente des pratiques prometteuses et des idées à prendre en considération pour l’avenir.

Activités principales

Cette section résume l’analyse des réponses au sondage en sept sous-sections basées sur ses thèmesNote de bas de page50. Chaque sous-section décrit les activités et les outils principaux utilisés par les gouvernements FPT pour aider les victimes d’actes criminels à participer aux processus de JR.

1. Renforcer la sensibilisation auprès des victimes d’actes criminels

Près de 70 pour cent des répondants ont indiqué que leur administration menait actuellement des activités visant à sensibiliser les victimes aux programmes et services de JR. L’une des principales conclusions du sondage est que la plupart des programmes de JR au Canada ne communiquent pas directement avec les victimes; les services d’aide aux victimes établissent généralement le premier contact. Les services d’aide aux victimes jouent un rôle essentiel dans la communication sur la JR, car ils sont souvent le principal point de contact des victimes avec le SJP. Dans les territoires, les coordonnateurs des témoins de la Couronne apportent un soutien aux victimes devant les tribunaux et fournissent des informations sur les processus de JR.

Les programmes de JR et les fournisseurs de services aux victimes entretiennent des relations de travail étroites dans de nombreuses administrations, car les services aux victimes peuvent transmettre des informations importantes aux victimes et les soutenir tout au long du processus de renvoi à la JR et du processus de JR lui-même. En outre, les partenaires du SJP, tels que les procureurs de la Couronne et la police, qui ont pour mandat d’orienter les victimes vers les programmes de JR, sont également souvent en contact avec les victimes pour les informer de l’existence des processus de JR.

Les répondants ont indiqué que la plupart des administrations s’efforcent d’établir des relations avec les organisations qui servent les victimes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du SJP, ainsi qu’avec les professionnels du SJP, afin d’améliorer l’accès des victimes à la JR. Un répondant a indiqué que son administration encourageait l’utilisation de la JR en demandant au personnel du programme de JR de travailler avec le personnel des services d’aide aux victimes pour déterminer les causes potentielles pour la JR. De nombreuses personnes interrogées ont indiqué qu’elles avaient souvent recours à des présentations, à des formations et à des comités pour élaborer des politiques et des lignes directrices en matière de la JR. Ce travail permet de s’assurer que les professionnels du SJP savent quand orienter les victimes vers la JR et quand communiquer avec elles au sujet des processus de JR.

Les sites Web des gouvernements et les comptes de médias sociaux fournissent fréquemment de l’information et des renseignements publics sur la JR. Le personnel du programme de JR travaille avec les organismes dans les collectivités, les dirigeants dans les collectivités et les gouvernements autochtones pour sensibiliser les membres des collectivités et les victimes d’actes criminels aux programmes de JR. Le personnel du programme de JR travaille également avec les collectivités, les gouvernements autochtones et les organisations non gouvernementales pour élaborer des programmes de JR adaptés à la culture.

2. Renforcer la sensibilisation auprès des professionnels du SJP

Toutes les personnes interrogées ont indiqué qu’elles travaillaient avec d’autres professionnels du SJP dans leur administration pour mieux faire connaître les processus de JR. La plupart d’entre elles ont nommé trois partenaires clés du SJP pour les programmes de JR : les procureurs de la Couronne, la police et les services d’aide aux victimes. La police et les procureurs de la Couronne jouent un rôle important dans l’amélioration de l’accès des victimes à la JR, car ils peuvent orienter les victimes vers la JR dans certaines administrations. Les autres professionnels du SJP mentionnés par les personnes interrogées sont le personnel des services correctionnels et le corps judiciaire.

Les répondants au sondage ont souligné l’importance d’établir des relations entre les programmes de JR et les professionnels du SJP, qui sont essentielles pour augmenter l’aiguillage vers les processus de JR. De nombreux programmes de JR offrent une formation sur la JR aux professionnels du SJP et transmettent de l’information sur les processus de JR par l’entremise de comités, de groupes de travail et de réunions. La formation peut prendre différentes formes, de l’apprentissage en classe aux manuels de formation internes. L’administration d’un répondant a publié des directives de poursuite en ligne pour les procureurs de la Couronne et le public, et pour informer les victimes que la JR est à leur disposition.

La formation est également importante. Elle garantit que la police, les procureurs de la Couronne, le corps judiciaire et les services d’aide aux victimes reçoivent des informations actualisées et précises sur les principes de la JR, ainsi que sur l’accessibilité aux services de JR locaux et sur le fonctionnement des processus de JR.

Dans certaines administrations, les professionnels du SJP, comme la police dans les régions septentrionales et éloignées, ont un taux de rotation élevé. En l’absence d’une formation cohérente et régulière, la connaissance des programmes de JR se perd. Cette absence de formation a des effets négatifs sur le nombre d’aiguillages vers les processus de JR.

Dans certaines administrations, la décision d’aiguiller une personne vers un processus de JR est du ressort des procureurs de la Couronne et des agents de police. Ces professionnels seront plus enclins à aiguiller les personnes vers la JR s’ils ont l’expérience des programmes de JR. L’aiguillage vers les processus de JR dépend également de la culture d’une organisation. Un répondant a fait remarquer que de nombreux procureurs de la Couronne craignent d’être blâmés si un délinquant qui a été orienté vers la JR récidive. Le répondant a indiqué qu’il est important de veiller à ce que les partenaires du SJP qui sont en mesure de réorienter des causes vers la JR comprennent les programmes de JR de leur administration (tels que les principes, les avantages, les limites et les services), ce qui renforcera leur confiance dans l’utilisation de la JR et répondra à des préoccupations telles que la récidive.

Une autre administration a noté que certains partenaires du SJP s’opposent à l’utilisation de la JR pour des délits particuliers, comme les services d’aide aux victimes qui déconseillent l’utilisation des processus de JR pour les délits sexuels.

De nombreux répondants soulignent que l’échange d’informations et la formation entre les programmes de JR, les partenaires du SJP, les services d’aide aux victimes, les organismes dans les collectivités et les groupes autochtones sont d’autres activités importantes pour sensibiliser les professionnels du SJP.

3. Messages clés

La majorité (63 pour cent) des répondants au sondage ont donné quelques exemples des messages clés que leur administration transmet aux victimes d’actes criminels au sujet des programmes et des processus de JR. Les messages clés de la plupart des administrations indiquent que les processus de JR sont volontaires et flexibles, en ce sens que les victimes ont de nombreuses possibilités différentes pour participer, car il n’y a pas de processus de JR standard. Par exemple, les victimes peuvent envoyer un substitut pour assister au processus de JR en leur nom, ou elles peuvent soumettre des commentaires écrits ou verbaux aux facilitateurs de la JR.

De nombreux programmes de JR se concentrent sur l’éducation du public et des victimes en matière de JR. Il s’agit notamment des principes de réparation sur lesquels repose la JR, par exemple :

  • habilitation;
  • guérison;
  • respect;
  • empathie;
  • non-jugement;
  • autodétermination.

D’autres exemples de messages clés mettent l’accent sur l’utilisation d’une approche tenant compte des traumatismes dans les processus de JR. Cette approche prend en compte les effets physiques, sociaux et émotionnels du traumatisme sur la victime. Un autre exemple de message clé est que la JR offre aux victimes d’actes criminels la possibilité de s’exprimer dans le processus judiciaire et d’en apprendre davantage sur l’acte criminel et sur le délinquant.

4. Engagement et partenariats

Près de 90 pour cent des répondants au sondage ont déclaré qu’ils dialoguaient et travaillaient avec des partenaires pour aider les victimes à avoir un meilleur accès aux processus de JRNote de bas de page51. Les principales activités d’engagement mentionnées étaient l’organisation de comités et de groupes de travail sur la JR au sein du SJP de leur administration. Les programmes de JR consacrent également beaucoup de temps à l’élaboration de formations pour les professionnels du SJP et de présentations pour la sensibilisation des collectivités.

La formation sur la JR est dispensée aux professionnels du SJP principalement pour leur fournir les connaissances et les ressources dont ils ont besoin pour aiguiller les victimes vers la JR, ce qui favorise l’accès à la justice pour les victimes et promeut les droits des victimes.

Comme nous l’avons déjà mentionné, les services d’aide aux victimes, la police, les services des poursuites et les services correctionnels comptent parmi les principaux partenaires du SJP avec lesquels le personnel du programme de JR travaille souvent. Les relations importantes en dehors du SJP pour les programmes de JR comprennent les dirigeants des collectivités, comme les gouvernements autochtones et les dirigeants des collectivités immigrantes, les programmes de prévention de la criminalité et les organisations à but non lucratif qui servent les victimes de divers types de crimes.

5. Recherche

Les questions sur la recherche ont obtenu le taux de réponse le plus faible du sondage : seuls 42 pour cent des répondants ont déclaré que leur administration travaillait sur des recherches liées aux victimes d’actes criminels et à la participation aux processus de JR. Les ministères fédéraux ont mené la plupart des recherches présentées par les répondants au sondage. Un répondant a indiqué que, bien que son administration recueille de nombreuses données quantitatives, sa capacité d’analyse et de publication des données est limitée.

En 2017-2018, des données ont été recueillies auprès des gouvernements FPT qui financent, soutiennent ou mettent en œuvre des processus de JR afin de créer des données de référence sur les processus de JR que ces gouvernements soutiennent (Groupe de travail FPT sur la justice réparatrice, 2020). Les résultats ont montré qu’en 2018-2019, 30 658 causes ont été renvoyées vers des processus de JR, parmi lesquelles 93 pour cent (28 603 causes) ont été acceptées (Groupe de travail FPT sur la justice réparatrice, 2021). Ces rapports présentent également des données sur le nombre de délinquants et de victimes qui ont participé à des processus de JR et recommandent quelques moyens d’augmenter le nombre de victimes participant à des processus de JR.

D’autres recherches se sont concentrées sur les expériences et les perceptions des victimes qui ont participé à des processus de JR, afin de mieux comprendre leurs points de vue et leurs besoins lorsqu’elles s’engagent dans la JR (Bargen, Lyons et Hartman, 2019; Ha, 2019).

Parmi les autres exemples d’études, citons une étude réalisée en 2021 sur l’utilisation de la JR dans les causes de violence sexiste (Ending Violence Association of BC et Just Outcomes, 2021). Une étude de 2018 sur les expériences des victimes dans les processus de JR a examiné les programmes de justice communautaire soutenus par le Programme de justice autochtone (Evans, McDonald et Gill, 2018).

6. Politiques, règlements, procédures et protocoles

Environ trois quarts (74 pour cent) des répondants ont déclaré que leur administration disposait de politiques, de règlements, de procédures ou de protocoles pour soutenir la participation des victimes à la JR. Les réponses à ce thème sont très variées : elles font référence à des ressources nationales telles que la Charte canadienne des droits des victimesNote de bas de page52 et le Guide du Service des poursuites pénales du CanadaNote de bas de page53, ainsi qu’aux ressources internes des administrations.

Un répondant a indiqué que son administration avait élaboré un ensemble de lignes directrices en matière de JR afin de déterminer qui y était admissible. Ces lignes directrices définissent les types de délits et de délinquants qui sont considérés comme admissibles aux processus de JR, par exemple les délits considérés comme « mineursNote de bas de page54 » et les délinquants primaires. Les lignes directrices mettent également l’accent sur l’utilisation de la JR et la déjudiciarisation plus généralement pour les jeunes accusés de délits. Un autre répondant a indiqué que son administration envisageait de modifier les critères d’admissibilité aux processus de JR afin d’y inclure un plus large éventail d’infractions. Un autre répondant a indiqué que son administration dispose de politiques particulières pour l’utilisation de mesures de remplacement et de sanctions extrajudiciaires, qui comprennent des dispositions relatives à la participation des victimes aux processus de JR.

7. Outils, documents et ressources

Près de 60 pour cent des répondants au sondage ont donné un exemple d’outil, de document ou de ressource qu’ils utilisent pour promouvoir et faciliter l’accès des victimes aux processus de JR dans leur administration. Les personnes interrogées ont mentionné plusieurs ressources internes au sein du SJP de leur administration, ainsi que des ressources externes pour les victimes et le public. Les ressources internes ont souvent été décrites comme du matériel de formation, tel que des manuels sur la manière d’orienter les victimes vers les programmes de JR ou des manuels destinés à guider les animateurs de JR dans le dialogue avec les victimes aux différents stades du processus de JR.

Les ressources externes citées par les répondants au sondage sont généralement des sites Web publics et des comptes de médias sociaux, car certaines administrations ont des pages Web et des brochures sur la JR. Ils disposent également de documents destinés directement aux victimes d’actes criminels. Un répondant a indiqué que son administration dispose d’un formulaire en ligne que les victimes peuvent utiliser pour demander des informations sur la JR.

Défis et leçons apprises

Pour de nombreuses administrations au Canada, l’utilisation de la JR dépend encore de la participation de l’accusé ou du délinquant. Souvent, ce n’est qu’une fois que l’accusé ou le délinquant a accepté d’être responsable du tort causé par le crime et qu’il a accepté de participer à un processus de JR que la victime est informée de la possibilité de participer à un processus de JR. Certaines administrations ont élaboré des critères pour déterminer si les délinquants (tels que les délinquants primaires) et les types d’infractions (tels que les délits « mineurs ») sont admissibles à la JR. Dans quelques administrations, les victimes peuvent demander un processus de JR.

Il peut être difficile de fournir aux victimes des informations sur les processus de JR. Les mesures prises pour lutter contre la pandémie de COVID-19 ont créé des obstacles importants à la sensibilisation du public et des collectivités. En raison de l’éloignement physique et des restrictions liées au confinement, le personnel du programme de JR, les services d’aide aux victimes et les collectivités locales ont eu du mal à se rencontrer, ainsi qu’à rencontrer les victimes et les membres des collectivités. Le passage aux réunions virtuelles a été particulièrement difficile pour les collectivités et les personnes ayant un accès limité à Internet. Les personnes interrogées ont également noté que certaines collectivités sont confrontées à un certain nombre de situations d’urgence, notamment des catastrophes naturelles, telles que des inondations et des incendies, et d’autres types de crises, telles que la crise des opioïdes. Ces facteurs font qu’il est plus difficile d’atteindre ces collectivités.

Il peut également être difficile de fournir des informations sur les processus de JR aux professionnels du SJP. Par exemple, les règlements sur la protection de la vie privée limitent la capacité de la police à transmettre des informations aux services d’aide aux victimes. Si le personnel des services d’aide aux victimes ne dispose que de très peu d’informations, voire d’aucune, sur l’acte criminel, il sera plus enclin à être prudent et à ne pas recommander le recours à la JR.

Un répondant a noté que les professionnels qui ont des stéréotypes négatifs profondément ancrés à l’égard de certains groupes, tels que les peuples autochtones, peuvent être moins enclins à orienter les clients vers les processus de JR. Cette stigmatisation intériorisée est préjudiciable parce qu’elle limite l’accès de certaines victimes et de certains accusés ou délinquants à la JR et limite leur accès à la justice. L’administration de ce répondant a conçu une formation obligatoire en collaboration avec les collectivités autochtones locales afin de lutter contre ces stéréotypes et de s’assurer que la formation est culturellement exacte et respectueuse. Ce cours a permis aux professionnels du SJP de se familiariser avec les peuples autochtones et l’histoire du Canada, et aux participants de mieux comprendre les programmes autochtones de JR. Le cours a été considéré comme une réussite et, à la fin du cours, même les participants qui avaient initialement résisté à la formation obligatoire ont fait état d’un changement dans leurs perspectives.

Parmi les autres défis relevés dans les réponses au sondage figurent le manque de ressources, le taux élevé de rotation du personnel et l’épuisement professionnel du personnel des programmes de JR et des partenaires du SJP. Ces questions ont un impact sur le nombre d’aiguillages vers la JR, car la perte de connaissances entraîne souvent une diminution du nombre d’aiguillages. L’une des principales leçons apprises est que lorsque les partenaires du SJP bénéficient d’une formation régulière sur les programmes de JR, ils peuvent s’assurer que les connaissances ne sont pas perdues lorsque le personnel part. Cette leçon s’applique particulièrement aux les régions où la rotation du personnel est élevée, comme les services de police dans les régions septentrionales, rurales et éloignées.

Projets et conclusions

Les répondants au sondage ont relevé plusieurs idées et pratiques prometteuses. Un répondant a suggéré que les administrations devraient avoir un « champion de la JR ». Ce serait un rôle important pour la promotion des processus de JR et fait en sorte que la JR soit plus visible au sein d’une administration. Un autre répondant a indiqué que son administration travaillait sur un plan d’action pour la JR afin de développer une vision et un avenir pour la JR, y compris la participation des victimes à cette dernière. Une autre administration a réalisé un exercice d’organigramme de l’écosystème afin de mieux comprendre les rôles de tous les acteurs de la JR, en particulier ceux qui sont en contact avec les victimes, et de déterminer les obstacles qui empêchent les victimes d’être aiguillées vers les processus de JR.

Les réponses au sondage ont permis de recueillir de nombreuses informations sur la manière dont les gouvernements FPT s’efforcent d’accroître et d’améliorer la participation des victimes d’actes criminels aux processus de JR dans l’ensemble du Canada. Toutefois, plusieurs domaines doivent encore être explorés plus en détail. Il faut notamment un examen approfondi des politiques qui soutiennent la participation des victimes aux processus de JR et des pratiques exemplaires pour soutenir les victimes pendant et après les processus de JR. Une répétition de ce sondage pourrait permettre de mettre à jour les données du présent rapport; parallèlement, l’administration périodique du sondage pourrait permettre de déterminer les tendances et les changements au fil du temps, ainsi que les lacunes.

Références

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Evans, Jane, Susan McDonald et Richard Gill. « La justice réparatrice : le vécu des victimes et des survivants », Recueil de recherches sur les victimes d’actes criminels, 2018, no 11, p. 27-33, accessible à l’adresse suivante : https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/victim/rr11-rd11/p5.html

Ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la justice et de la sécurité publique. Principes et lignes directrices relatifs à la pratique de la justice réparatrice en matière pénale, Secrétariat des conférences intergouvernementales canadiennes, 2018, Principes et lignes directrices relatifs à la pratique de la justice réparatrice en matière pénale (2018) – CICS/SCIC (scics.ca)

Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la justice réparatrice. Accroître le recours à la justice réparatrice en matière pénale au Canada : Rapport préliminaire,Ottawa, Sécurité publique Canada, 2020, Accroître le recours à la justice réparatrice en matière pénale au Canada : Rapport préliminaire (securitepublique.gc.ca)

Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la justice réparatrice. Accroître le recours à la justice réparatrice en matière pénale au Canada : constatations de l’analyse des gouvernements de 2018-2019, Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la justice réparatrice, 2021.

Ha, Lisa. Le vécu des victimes d’actes criminels dans le processus de la justice réparatrice : un projet d’écoute, Recueil de recherches sur les victimes d’actes criminels, 2020, no 13, p. 39-42, accessible à l’adresse suivante : Le vécu des victimes d’actes criminels dans le processus de la justice réparatrice :un projet d’écoute

Justice Canada. Le rapport final sur l’examen du système de justice pénale du Canada, Ottawa, ministère de la Justice, 2019, accessible à l’adresse suivante : https://www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/tsjp-tcjs/rf-fr/index.html

Statistique Canada. s.d.a., Tableau 35-10-0027-01 Tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, nombre de causes et d’accusations selon le type de décision, DOI : https://doi.org/10.25318/3510002701-fra

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