Rapport de la phase I de l'étude de faisabilité des programmes de déclaration des nouveaux employés pour le Canada: Programmes de déclaration des nouveaux employés aux États-Unis
- Exécution des pensions alimentaires pour enfants aux États-Unis
- L'élaboration des programmes de déclaration des nouveaux employés
- Mesure de l'efficacité du programme
- Échange des renseignements sur les nouveaux employés
- Questions relatives à l'anonymat et à la protection de la vie privée
- Rôle du gouvernement fédéral des États-Unis
- Déclaration des employeurs dans d'autres pays du Commonwealth
VII. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Les programmes de déclaration des nouveaux employés ou des employeurs ont débuté à la fin des années 1980 aux États-Unis afin d'accélérer le dépistage de débiteurs dans les dossiers des organismes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants. En 1996, la loi américaine intitulée Personal Responsibility and Work Opportunity Reconciliation Act (PRWORA) a créé le National Directory of New Hires et obligé tous les États à mettre sur pied leur propre répertoire, qui transmet régulièrement des renseignements au National Directory. La loi a aussi créé le Federal Case Registry pour enregistrer toutes les ordonnances de pensions alimentaires pour enfants.
On a affirmé que le programme avait augmenté le recouvrement des pensions alimentaires pour enfants " de façon spectaculaire " et permis aux États d'économiser des millions de dollars. En raison de l'intérêt que ces allégations ont suscité au Canada, l'Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants du ministère de la Justice du Canada a étudié le fondement et l'élaboration de ce programme, de même que les questions soulevées par le concept de la déclaration des employeurs.
Nous avons étudié les documents produits par les États et le gouvernement américains, examiné des rapports internes fournis par des responsables des États et téléphoné à des personnes clés s'occupant de divers types de programmes dans les États. Peu d'évaluations semblent disponibles. Malgré la somme de documents que nous avons trouvés, il a été difficile de comparer la situation entre les divers États, en fait d'efficacité et de coûts des programmes, en raison de la nature et du niveau de détails variables de la documentation disponible.
Par ailleurs, nous avons communiqué avec les fonctionnaires du Royaume-Uni, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande pour obtenir des renseignements sur l'utilisation de la déclaration des employeurs dans ces pays.
Exécution des pensions alimentaires pour enfants aux États-Unis
En vertu de la loi américaine, les programmes de pensions alimentaires pour enfants déterminent la paternité, établissent les ordonnances de pensions alimentaires pour enfants et veillent au paiement des montants accordés. Même si les États administrent le régime des pensions alimentaires pour enfants, le gouvernement américain jouit de pouvoirs considérables par le biais de dispositions législatives et d'incitatifs financiers.
Dans les dossiers des pensions alimentaires pour enfants, on trouve des créanciers qui ont obtenu une ordonnance de pension alimentaire de leur plein gré et ceux qui ont été forcés de la demander. Les assistés sociaux ou les bénéficiaires de coupons alimentaires et de Medicaid sont au nombre de ceux-là. Dans la plupart des cas, les programmes d'État sont financés à même les sommes recouvrées au nom des clients forcés d'obtenir une ordonnance; ces montants sont remis au gouvernement de l'État et au gouvernement américain. Les créanciers qui ont obtenu une ordonnance de leur plein gré reçoivent toutes les sommes perçues en leur nom. De nombreux répondants ont prédit une diminution du nombre de cas d'assistés sociaux au sein des programmes de pensions alimentaires pour enfants, étant donné que la PRWORA a restreint l'admissibilité aux prestations d'aide sociale. Cela pourrait avoir pour effet de réduire les recettes du gouvernement.
Les programmes de déclaration des nouveaux employés constituent un élément d'une approche intégrée de l'exécution des pensions alimentaires pour enfants prévue dans la PRWORA. Cette loi mise sur trois fronts:
- accroître la capacité des États de dépister des personnes et leurs éléments d'actif (ce qui comprendrait le programme de déclaration des nouveaux employés);
- traiter les dossiers en masse au moyen de la technologie de l'information;
- exécuter les ordonnances de façon énergique au moyen de mécanismes administratifs comme la retenue automatique sur le revenu.
Le troisième élément vise l'élimination de l'exécution axée sur les plaintes et son remplacement par des procédures accélérées pour les dossiers courants. En application de cette loi, les organismes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants jouissent de pouvoirs suffisants pour traiter la plupart des dossiers sans intervention judiciaire. Au moyen de mécanismes administratifs, ils peuvent prendre de nombreuses mesures, notamment ordonner la retenue sur le revenu, saisir des paiements forfaitaires, saisir des éléments d'actif dans des institutions financières et majorer le paiement mensuel pour couvrir des sommes en souffrance.
L'élaboration des programmes de déclaration des nouveaux employés
Avant la création de ces programmes, les États avaient accès aux déclarations de salaires trimestrielles, ce qui voulait dire que l'information pouvait remonter jusqu'à six mois. Quand on appariait enfin les dossiers de pensions alimentaires pour enfants avec les déclarations de salaires, de nombreux parents non gardiens avaient quitté leur emploi.
Les programmes de déclaration des nouveaux employés obligent tous les employeurs, ou certains employeurs, à transmettre à un organisme d'État central le nom de tous leurs nouveaux employés ou des employés réembauchés, souvent à l'organisme d'exécution des pensions alimentaires lui-même. Grâce aux données informatisées, il est maintenant possible d'apparier des dossiers et des déclarations de nouveaux employés au moyen du numéro de sécurité sociale (SSN) et du nom de l'employé. Il est ainsi possible d'établir plus rapidement des ordonnances de retenue sur le salaire.
Le premier programme américain a vu le jour dans l'État de Washington. Il était obligatoire pour des secteurs d'activités ciblés, comme la construction, dans lesquels on croyait trouver une main-d'œuvre surtout masculine, un taux de roulement élevé du personnel et des licenciements fréquents. D'autres États ont adopté la même démarche ciblée, mais presque la moitié des programmes lancés avant 1995 étaient obligatoires pour tous les employeurs. Quelques États ont mis sur pied des programmes volontaires, en partie parce que les responsables voulaient tester les systèmes en prévision de l'entrée en vigueur du programme fédéral.
Les employeurs fournissaient des renseignements différents d'un État à l'autre. Quelques États s'en tenaient à l'essentiel et demandaient aux employeurs de transmettre des renseignements rudimentaires contenus dans une formule d'impôt que les entreprises devaient déjà remplir à l'embauche de tout nouvel employé. Cette formule, la W-4, renferme le nom, l'adresse et le SSN de l'employé de même que le nom, l'adresse et le numéro d'identification fédéral de l'employeur.
D'autres États ont créé leurs propres formules et ajouté des données, comme la date de naissance de l'employé, la date d'embauche et des renseignements sur la couverture médicale. Cette pratique a été très peu populaire auprès d'employeurs présents dans plusieurs États qui auraient grandement préféré des déclarations standardisées. De plus, certains renseignements supplémentaires, en particulier l'information sur la couverture médicale, sont conservés ailleurs que dans le service de la paie, ce qui alourdit la déclaration pour les employeurs.
Quelques États n'obligent pas les employeurs à présenter une déclaration s'ils n'ont embauché ou réembauché personne pendant la période visée. Cependant, cela signifie que lorsqu'un employeur ne produit pas de déclaration, on ne peut savoir si cela est dû à une omission de sa part ou à l'absence d'embauche.
Presque tous les États offrent aux employeurs plusieurs possibilités pour transmettre des données sur les nouveaux employés :télécopieur,téléphone,courrier,disquette,bande magnétique et (plus récemment)l'Internet. Cette souplesse favorise probablement la coopération des employeurs.
Presque que la moitié des États oblige l'employeur à transmettre les renseignements sur les nouveaux employés dans le mois suivant l'embauche, mais le délai varie de 5 à 35 jours. Habituellement, les employeurs préfèrent le délai plus long et l'État où le délai était de 5 jours a fait face à l'opposition des employeurs.
D'après les documents recensés et les personnes interviewées, nous avons cerné les éléments essentiels au succès d'un programme : la participation des employeurs à l'élaboration du programme et la promotion soutenue du programme auprès des employeurs. Quelques États accordaient beaucoup moins d'attention aux relations publiques et aux activités d'éducation que d'autres, ne faisant pas beaucoup plus qu'expédier aux employeurs de l'information sur la loi par la poste. Selon certains, les programmes de déclaration des nouveaux employés dans ces États avaient moins de succès, mais cette hypothèse n'a pu être confirmée.
Un seul État a pu fournir les coûts qu'engendrent les programmes de déclaration des nouveaux employés pour les employeurs. Le coût annuel médian variait entre 60 $ pour les entreprises comptant 50 employés ou moins et 240 $ pour les employeurs comptant 250 employés ou plus (en dollars US constants de 1993). En moyenne, les coûts de lancement étaient inférieurs à 100 $. On ne connaît pas le taux de réponse à cette enquête. Une entreprise de traitement de la paie exigeait 2 $ par déclaration d'un nouvel employé ou d'un employé réembauché.
Dans plusieurs États, on rapporte que les plaintes les plus fréquentes à propos du programme proviennent des petites entreprises. On a peu contrôlé la conformité des employeurs, bien qu'on s'attende qu'il soit facile de rapprocher les banques de données sur les nouveaux employés et les rapports trimestriels des salaires. Selon les personnes que nous avons interviewées, les premiers programmes des États n'ont pas mis à l'amende les employeurs qui ne se conformaient pas au programme, à la fois pour des raisons de relations publiques et parce que le montant des amendes ne justifiait pas l'investissement dans une telle mesure d'exécution. Dans quelques États, la législation ne prévoyait aucune pénalité.
En bref, les premiers programmes de déclaration des nouveaux employés ont été mis en œuvre pour améliorer le recouvrement des pensions alimentaires pour enfants en accélérant la communication des données sur l'emploi des parents non gardiens. On utilisait les rapports trimestriels sur les salaires pour repérer les débiteurs de pensions alimentaires pour enfants, mais certains d'entre eux changeaient trop rapidement d'emploi et mettaient en échec les mécanismes d'exécution des pensions alimentaires. En obligeant tous les employeurs, ou des employeurs ciblés, à déclarer leurs nouveaux employés moins d'un mois après l'embauche, les organismes pouvaient établir un plus grand nombre d'ordonnances de retenue sur le salaire. Les programmes ont semblé faire face à moins d'obstacles dans les conditions suivantes:
- quand les employeurs ont aidé à élaborer le programme et les communications avec l'employeur étaient une priorité;
- quand le programme comportait peu de données, quand celles-ci provenaient toutes d'une même source et quand les employeurs présents dans plusieurs États pouvaient utiliser un ensemble standard de données;
- quand les employeurs pouvaient transmettre l'information sur divers supports;
- quand les employeurs étaient tenus de produire une déclaration, même quand ils n'avaient embauché ou réembauché personne pendant la période de déclaration;
- quand les employeurs pouvaient présenter une déclaration mensuelle.
Mesure de l'efficacité du programme
Il est presque impossible de déterminer le taux d'efficacité des divers types de programmes. Dans les documents portant sur les programmes, l'efficacité est mesurée suivant:
- le pourcentage de rapprochements avec les dossiers de pensions alimentaires pour enfants par rapport au nombre d'employés déclarés en vertu du programme;
- l'augmentation des pensions alimentaires pour enfants recouvrées attribuable au programme.
On indique souvent les taux d'appariement dans les documents sur les programmes de déclaration des nouveaux employés. Les chiffres pouvaient sembler impressionnants parce qu'ils étaient souvent calculés en fonction du nombre total de dossiers des organismes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants et non uniquement du nombre de débiteurs obligataires défaillants ou qu'on ne pouvait repérer. Le seul État qui a fait des rapprochements fondés sur les débiteurs défaillants a rapporté un taux de rapprochement de 0,5 %. On peut comparer ce chiffre aux taux applicables aux dossiers d'exécution (aucune définition fournie) variant de 2,5 à 5,9 % et aux taux de rapprochement globaux allant jusqu'à 11 %.
Le rapprochement du nom n'est que la première étape pour recouvrer des pensions alimentaires. Les études sur ce sujet ont montré que les organismes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants n'ont reçu des paiements additionnels que dans une minorité de dossiers appariés. Cela s'explique de nombreuses façons, y compris par le fait que des employés avaient déjà changé d'emploi ou que les organismes connaissaient déjà les employeurs avant qu'on ait fait le rapprochement.
Nous soupçonnons des auteurs de gonfler l'augmentation des recouvrements attribuables aux programmes de déclaration des nouveaux employés. Des sources différentes fournissaient parfois des estimations radicalement différentes de cette augmentation. Il est difficile d'attribuer directement une augmentation des sommes recouvrées aux données sur les nouveaux employés plutôt qu'aux rapports trimestriels sur les salaires, par exemple, parce que les sources ne donnaient aucun détail sur les calculs.
Parmi les premiers États qui ont mis en œuvre des programmes de déclaration des nouveaux employés, cinq ont aussi fourni des rapports coûts-avantages, variant de 1 $ : 3,20 $ en Alaska en 1994 à 1$ : 22 $ dans l'État de Washington en 1992. Ces écarts importants nous donnent à penser que les coûts ou les recouvrements, ou les deux, n'ont pas été calculés de la même façon. Les données disponibles ne nous permettent pas de tirer des conclusions définitives sur la rentabilité de la déclaration des employeurs.
Comme on peut s'y attendre compte tenu des écarts relatifs au rapport coûts-avantages, les frais d'exploitation annuels des programmes de déclaration des nouveaux employés variaient considérablement, de 104 000 $ pour le programme volontaire de l'Arizona à un peu plus de 500 000 $ pour le programme obligatoire du Minnesota. Le coût par nouvel employé variait de 0,27 $ à 1,45 $ dans les six États qui ont fourni des données sur le budget et les nouveaux employés.
Nous devrions nous garder d'extrapoler les taux de rapprochement, les chiffres sur les recouvrements et les rapports coûts-avantages au contexte canadien sans nous poser de questions.
- Les dossiers de pensions alimentaires pour enfants des deux pays peuvent différer de façon substantielle, par exemple au chapitre de la mobilité professionnelle des débiteurs. Il ne fait aucun doute que le mandat des programmes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants des États américains est beaucoup plus large que celui des programmes similaires au Canada, étant donné que les programmes américains statuent aussi sur les recherches de paternité et établissent des ordonnances.
- La communication rapide des rapprochements fructueux aboutissant à une retenue automatique sur le salaire est un élément clé du succès du programme de déclaration des nouveaux employés.
- Découvrir le lieu de travail du débiteur n'est que la première étape du recouvrement des sommes dues.
Échange des renseignements sur les nouveaux employés
Dans la présente étude, nous avons accordé une attention spéciale à l'échange des renseignements sur les nouveaux employés avec d'autres programmes sociaux, comme l'aide sociale, l'indemnisation des accidents du travail et l'assurance-chômage. La communication d'information aide à réduire les fraudes touchant les prestations. Comme les programmes de pensions alimentaires pour enfants, la plupart de ces programmes sociaux ont accès aux données trimestrielles sur les salaires afin de détecter les paiements excédentaires, mais les délais pour obtenir des données à jour compliquent la tâche d'éviter et de recouvrer les paiements excédentaires. La PRWORA prévoit la communication de l'information, mais même avant l'entrée en vigueur de la loi américaine, quelques États partageaient régulièrement ce genre de renseignements. Les facteurs suivants ont contribué à la communication d'information:
- Les renseignements sont plus faciles à communiquer à d'autres programmes sociaux si ces derniers font partie du même ministère et s'ils partagent les mêmes systèmes informatiques.
- Dans quelques États, des dispositions législatives imposaient des restrictions à la banque de données sur les nouveaux employés de telle façon que les données ne pouvaient servir qu'à l'exécution des pensions alimentaires pour enfants. Ailleurs, la législation de l'État dans ce domaine a donné le coup d'envoi à la communication de données.
Questions relatives à l'anonymat et à la protection de la vie privée
Les auteurs de documents sur la déclaration des nouveaux employés abordent rarement ce sujet. Toutefois, dans quelques États, on a suggéré de détruire les dossiers afin de préserver l'anonymat ou de protéger la vie privée. La législation américaine de 1996 ne prévoit pas la durée de conservation de l'information.
De nombreuses dispositions de la PRWORA concernant la communication de données sont assujetties aux lois de l'Internal Revenue Service sur la confidentialité, qui limitent l'utilisation de données fédérales à des fins particulières. Cette limitation est censée suivre l'information lorsqu'elle transite dans le système. En conséquence, les systèmes informatisés des États doivent pouvoir " marquer " l'information selon sa source et les usages autorisés.
Rôle du gouvernement fédéral des États-Unis
Le gouvernement américain s'est intéressé davantage aux programmes de déclaration des nouveaux employés en 1993 et en 1994, étant donné que 30 % des dossiers de pensions alimentaires pour enfants aux États-Unis visent des parents non gardiens qui ne travaillent pas dans l'État où leurs enfants habitent. La déclaration obligatoire pour tous les employeurs dans tous les États faisait partie du train de réformes de l'aide sociale présenté par l'Administration. Le National Directory a débuté ses activités au mois d'octobre 1997 et tous les États devaient commencer à lui transmettre leurs données au mois d'octobre 1998. On ne dispose encore d'aucune donnée sur l'efficacité du National Directory.
Déclaration des employeurs dans d'autres pays du Commonwealth
L'endroit où l'organisme d'exécution des pensions alimentaires pour enfants est situé dans la bureaucratie gouvernementale semble déterminant dans la déclaration des employeurs. Au Royaume-Uni, où l'exécution des pensions alimentaires fait partie du ministère des Services sociaux, il n'y a aucun programme de ce genre et on ne prévoit pas en établir. En Australie et en Nouvelle-Zélande, les organismes d'exécution des pensions alimentaires pour enfants font partie du service de l'impôt. La déclaration des nouveaux employés est faite à des fins d'impôt. L'organisme des pensions alimentaires pour enfants a facilement accès aux données, ce qui lui permet de déterminer le statut d'emploi et l'employeur des débiteurs de pensions alimentaires pour enfants.
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