
Tableau de bord sur l’état du système de justice pénale
Comprendre les expériences des jeunes noirs avec le système de justice pénaleNote de base de page138
Les communautés noires contribuent à la société canadienne depuis des générations. Toutefois, l’expérience des Noirs au Canada est enracinée dans une histoire de racisme systémique envers les Noirs, par exemple le colonialisme, l’esclavage, la ségrégation, et les pratiques d’immigration restrictive. Cette histoire a préparé le terrain pour les expériences des générations suivantes de Canadiens noirs et de nouveaux arrivants noirs. À ce jour, les Noirs continuent d’être victimes de racisme et de traitements injustes au Canada, y compris dans le système de justice pénaleNote de bas de page139. Pour en savoir plus sur l’histoire des Noirs au Canada, cliquez sur le lien de Patrimoine canadien suivant : Chronologie des événements marquants de l’histoire des Canadiens noirs.
Au Canada, la population noire est diversifiée en ce qui concerne les origines ethniques, les langues, les religions, les identités de genre, les orientations sexuelles et les pays d’origineNote de bas de page140. Ces caractéristiques se recoupent et se chevauchent, créant des expériences vécues différentes. Il est important de garder cela à l’esprit lorsqu’on examine les renseignements présentés ci-dessous. Pour en savoir plus sur les diverses caractéristiques sociodémographiques de la population noire au Canada, veuillez cliquer sur les liens de Statistique Canada suivants : Diversité de la population noire au Canada : un aperçu (2019) et La population noire au Canada : éducation, travail et résilience (2020).
Les sections qui suivent donnent un aperçu du contexte dans lequel les jeunes noirs ont des démêlés avec le système de justice pénale, ainsi que de leurs expériences au sein du système. Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter le rapport d’Owusu-Bempah et Jeffers intitulé Les jeunes provenant des communautés noires et le système de justice pénale : rapport sommaire sur un processus de mobilisation au Canada (2022), un rapport commandé par le ministre de la Justice du Canada ou bibliographie.
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Les répercussions du racisme et de la discrimination envers les Noirs sur les démêlés avec le système de justice pénale
Un nombre croissant de recherches ont fait la lumière sur la présence historique et continue du racisme et de la discrimination envers les Noirs dans divers systèmes sociaux, tels que le système de protection de l’enfance et le système éducatif, qui peuvent contribuer aux démêlés qu’ont les jeunes noirs avec le système de justice pénaleNote de bas de page141.
Protection de l’enfance
Une grande partie de la recherche et de la documentation existantes sur les pratiques parentales est fondée sur des pratiques eurocentriques. Cela entraîne des stéréotypes des pratiques parentales d’autres cultures non-européennes selon lesquels elles sont inférieures, autoritaires ou nuisibles. Par conséquent, les professionnels et les éducateurs peuvent mal reconnaître certaines pratiques parentales comme nécessitant une intervention des organismes de protection de l’enfance. La police peut aussi se fier trop aux organismes de protection de l’enfance pour gérer les conflits au sein des familles noires. La recherche a permis de conclure que les jeunes faisant partie du système de protection de l’enfance sont plus susceptibles d’avoir des démêlés avec le système de justice pénale que ceux qui ne sont pas assujettis aux services de protection de l’enfanceNote de bas de page142. En raison de la surreprésentation des enfants et des jeunes noirs dans les affaires de protection de l’enfanceNote de bas de page143, ces jeunes sont touchés de manière disproportionnée par la relation entre le système de protection de l’enfance et le système de justice pénaleNote de bas de page144. En outre, une étude effectuée en Ontario a permis de conclure que les jeunes noirs qui ont des démêlés avec le système de protection de l’enfance sont « surcriminalisés », et font l’objet d’accusations criminelles plus nombreuses et plus sévères que les jeunes blancsNote de bas de page145. Pour en savoir plus sur la relation entre le contact avec le système de protection de l’enfance et les démêlés avec le système de justice pénale, veuillez consulter la page Comprendre les expériences des jeunes ayant des démêlés avec la justice avec d’autres systèmes sociaux.
Éducation
La relation entre les mauvais résultats scolaires et les démêlés avec la justice pénale est bien établieNote de bas de page146. Les recherches indiquent que les étudiants noirs au Canada sont confrontés à de multiples défis au sein des systèmes scolaires, qui ne sont pas équipés pour répondre à leurs besoins éducatifs, émotionnels et de développement. Par exemple, on a signalé à maintes reprises que les étudiants noirs sont intégrés incorrectement dans des programmes non-universitaires, sont soumis à des pratiques disciplinaires injustes et abandonnent leurs études (ou en sont exclus)Note de bas de page147. Ce phénomène, aussi appelé « pipeline de l’école à la prison », est où la sous-performance académique suscitée par les institutions, l’absence de l’école et l’incapacité d’obtenir un diplôme augmentent la probabilité que les jeunes noirs aient des démêlés avec le système de justice pénaleNote de bas de page148. Ces difficultés éducatives, ainsi que les formes de discrimination structurelle et institutionnelle que vivent les jeunes noirs, peuvent entraîner des inégalités supplémentaires plus tard dans la vie, par exemple dans le secteur de l’emploiNote de bas de page149. La recherche a permis de conclure que les taux de chômage sont plus élevés chez les Noirs par rapport au reste de la population; pour les Noirs qui sont employés, la discrimination systémique donne souvent lieu à des postes de niveau inférieur, à des possibilités limitées de perfectionnement professionnel et à des disparités salarialesNote de bas de page150. Pour en savoir plus sur la surveillance policière excessive des jeunes noirs dans les écoles, veuillez consulter la section sur La surveillance policière excessive et la sous-surveillance policière des jeunes noirs dans les écoles et dans les quartiers marginalisés sur le plan économique.
Pauvreté
La présence de racisme et de discrimination systémiques envers les Noirs au Canada a entraîné une baisse des taux d’emploi et du revenu des familles noiresNote de bas de page151. La pauvreté est souvent concentrée géographiquement, ce qui signifie que les jeunes noirs et leurs familles sont surreprésentés dans les quartiers défavorisés. Ces quartiers sont souvent mal desservis par divers services, comme le transport en commun, les bibliothèques, les écoles et les hôpitaux, qui contribuent à créer des collectivités fortes et à protéger les résidents contre le crime, l’appartenance à un gang et la violenceNote de bas de page152. En l’absence de ces ressources sociales importantes et face à la pauvreté croissante, les jeunes noirs peuvent recourir à la criminalité, comme la fraude, le vol et le trafic de drogue, comme moyen d’emploi.
En outre, les quartiers défavorisés et mal desservis présentent souvent des taux de criminalité et de victimisation plus élevés. Cela peut entraîner des styles de services de police plus concentrés et axés sur l’application de la loi dans ces secteurs, ce qui à son tour entraîne une criminalisation plus poussée des jeunes noirsNote de bas de page153. Pour en savoir plus sur la surveillance policière excessive des jeunes noirs dans les quartiers marginalisés sur le plan économique, veuillez consulter la section suivante : La surveillance policière excessive et la sous-surveillance policière des jeunes noirs dans les écoles et dans les quartiers marginalisés sur le plan économique.
D’autres obstacles à la sécurité financière – et à l’établissement réussi – sont présents chez les nouveaux arrivants et les réfugiés noirs, tels que les obstacles linguistiques, le sentiment anti-immigration et anti-réfugiés et la xénophobie. La recherche a permis de conclure que certains immigrants noirs sont surqualifiés pour les emplois qu’ils sont en mesure d’obtenir et peuvent accepter un « emploi de survie » pour joindre les deux boutsNote de bas de page154. Les garçons noirs peuvent être poussés à se livrer à des comportements criminels, comme la participation aux gangs, pour gagner de l’argent et pour subvenir aux besoins de leur famille. D’autres, surtout les jeunes ayant des parents ou des tuteurs qui doivent avoir plusieurs emplois et passer beaucoup de temps à l’extérieur du foyer, peuvent utiliser l’appartenance à un gang comme moyen de répondre à des besoins non satisfaits comme l’amour, l’acceptation et l’appartenance à une famille. La recherche a permis de conclure que l’appartenance à un gang contribue aux démêlés avec le système de justice pénaleNote de bas de page155.
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La surveillance policière excessive et la sous-surveillance policière des jeunes noirs dans les écoles et dans les quartiers marginalisés sur le plan économique
Les formes de surveillance policière excessives et de sous-surveillance policière façonnent généralement les premiers contacts des jeunes noirs avec la police. La première expérience avec la surveillance policière excessive – décrite comme une intervention excessive de la part des organismes d’application de la loi – a souvent lieu dans les établissements scolaires dans le cadre de pratiques discriminatoires et sévères, comme les politiques de tolérance zéro qui traitent les étudiants noirs de manière différente par rapport aux étudiants non-noirs. La recherche a permis de conclure que ces pratiques contribuent à la suspension, à l’expulsion ou à l’exclusion d’une plus grande proportion de jeunes noirs des établissements scolairesNote de bas de page156. De plus, de nombreux rapports soulignent la dépendance excessive de la police dans le traitement des jeunes noirs ayant des problèmes comportementaux ou de santé mentaleNote de bas de page157. Ces problèmes découlent souvent de l’expérience de la pauvreté, des problèmes conjugaux dans le foyer et du racisme systémique envers les Noirs dans la salle de classe et dans la société en général. En ce qui concerne les nouveaux arrivants, il peut y avoir des difficultés à s’adapter à la société canadienne, l’exclusion liée au fait que leur langue maternelle est une langue autre que l’anglais ou le français, au fait d’avoir un accent, au stress lié à la migration ou au traumatisme de l’expérience vécue d’une guerre ou à d’autres menaces à la sécurité nationale dans leur pays d’origine. En plus de l’expérience de la surveillance policière excessive, les jeunes noirs n’ont souvent pas l’aide nécessaire des organismes d’application de la loi lorsqu’ils répondent à la victimisation ou à la victimisation potentielle, un phénomène connu sous le nom de sous-surveillance policièreNote de bas de page158. Par exemple, certains nouveaux arrivants racontent avoir été victimes d’intimidation de la part de leurs pairs et de leurs enseignants et signalent ne pas avoir été crus ou pris au sérieux par l’administration de l’école.
De nombreux jeunes noirs doivent également gérer une forte présence policière dans leurs quartiers. Cela se traduit souvent par des pratiques discriminatoires telles que les activités d’arrêt et de fouille – aussi appelées profilage racial – et l’exercice différent du pouvoir discrétionnaire policier, qui contribuent tous à accroître le risque de victimisation et de criminalisation des jeunes noirsNote de bas de page159. La surveillance policière excessive et la sous-surveillance policière des jeunes noirs peuvent avoir des répercussions négatives sur leurs sentiments d’appartenance à la communauté et sur leur confiance dans la capacité des services de police à assurer la sécurité des collectivités. Toutes ces pratiques jouent un rôle principal à façonner les premiers démêlés des jeunes noirs avec le système de justice pénale.
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Le traitement injuste continu des jeunes noirs qui naviguent le système de justice pénale
Une fois dans le système de justice pénale, les jeunes noirs signalent souvent avoir été victimes de racisme et de discrimination envers les Noirs tout au long des diverses étapes du système, y compris les services de police, le système judiciaire et le système correctionnel. Dans le système judiciaire, les jeunes noirs se voient souvent imposer des peines plus longues, des conditions de probation plus nombreuses, moins de mesures extrajudiciaires, moins de renvois vers des programmes de santé mentale et d’autres services sociaux, et se voient plus souvent refuser la liberté sous caution, par rapport aux jeunes blancs. En outre, la surreprésentation des Blancs qui agissent comme jurés, ainsi que des professionnels des tribunaux comme les juges, les procureurs de la Couronne et les avocats, diminue considérablement la probabilité que les histoires collectives et individuelles des jeunes noirs soient prises en compte lors de la prise de décision. Dans le système correctionnel, les jeunes noirs décrivent souvent leurs expériences comme déshumanisantes, violentes et négligentes. De nombreux cas signalés soulignent également que les jeunes noirs sont souvent soumis à une surveillance accrue, à des sanctions et à un étiquetage plus rigoureuxNote de bas de page160. De telles expériences négatives et discriminatoires peuvent entraîner des sentiments d’exclusion, de colère, d’animosité et d’inaptitude à un traitement juste, ce qui peut servir de justification à la poursuite de la criminalité lorsqu’ils sont libérés.
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Un changement de culture sociale, structurelle et culturelle est nécessaire
Tel que cela a été décrit ci-dessus, les expériences et les répercussions intergénérationnelles du traitement raciste et discriminatoire à l’égard des jeunes noirs font souvent en sorte que les jeunes noirs sont des victimes et augmentent le nombre de démêlés qu’ils ont avec le système de justice pénale. Le racisme et la discrimination systémiques envers les Noirs produisent et perpétuent des résultats différents pour les jeunes noirs par rapport à la plupart des autres jeunes canadiens, y compris leur surreprésentation dans le système de justice pénale canadien pour les jeunes. Cette réalité a donné lieu à des appels à une sensibilisation accrue et à la prestation de services et de programmes adaptés à la culture et appropriés, à une représentation diversifiée accrue au sein de l’effectif du système de justice pénale, à une sensibilisation accrue à la culture et à la formation sur les compétences culturelles, et à un changement global de la culture sociale, structurelle et institutionnelleNote de bas de page161.
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